David Wark Griffith (1875-1948)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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Supfiction
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Re: David Wark Griffith (1875-1948)

Message par Supfiction »

Alexandre Angel a écrit :
Supfiction a écrit :
Evaluer les innovations et l'importance d'un film dans l'histoire du cinéma est une chose. Juger de sa qualité intrinsèque en est peut-être une autre.
C'est, en l'occurrence, la même chose.
Et même si l'on est pas obligé de suivre, le film est largement considéré par les historiens comme du grand cinéma.
Visiblement, Geoffrey n'est pas forcement du même avis et ce n'est pas seulement le fond qui a été jugé mais aussi la forme, ceci expliquant le zéro pointé.
Geoffrey Firmin a écrit : J'ai vu des travelling arrières chaotiques, des plans larges de scènes de bataille certes avec beaucoup de figurant mais au final assez confus . Ce n'est pas suffisant pour compenser l'idéologie du film et son révisionnisme.
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Alexandre Angel
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Re: David Wark Griffith (1875-1948)

Message par Alexandre Angel »

De toute manière, aucune forme, aussi sommitale qu'on puisse l'imaginer, ne pourrait atténuer la crétinerie odieuse et abyssale du fond.
Mais ce que dit Geoffrey sur la forme me paraît, à charge de revoir le film, discutable.
Comme "le Temps de l'innonce" et "A tombeau ouvert", "Killers of the Flower Moon" , très identifiable martinien, est un film divisiblement indélébile et insoluble, une roulade avant au niveau du sol, une romance dramatique éternuante et hilarante.

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Re: David Wark Griffith (1875-1948)

Message par Rashomon »

Supfiction a écrit : Visiblement, Geoffrey n'est pas forcement du même avis et ce n'est pas seulement le fond qui a été jugé mais aussi la forme, ceci expliquant le zéro pointé.
Geoffrey Firmin a écrit : J'ai vu des travelling arrières chaotiques, des plans larges de scènes de bataille certes avec beaucoup de figurant mais au final assez confus . Ce n'est pas suffisant pour compenser l'idéologie du film et son révisionnisme.
Certes, mais comme je le disais plus haut, il s'agit d'un film tourné en 1915 avec les moyens techniques de 1915 et le savoir-faire de 1915. La question est: Griffith a-t-il fait du mieux qu'il a pu dans ce contexte et a-t-il réussi mieux, aussi ou moins bien que ses contemporains? Régénération de Walsh tourné la même année est probablement supérieur d'un point de vue cinématographique - et moral - mais il est sorti après le Griffith... qui fut le mentor de Walsh. Forfaiture de Cecil B. DeMille est lui aussi postérieur.
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Supfiction
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Re: David Wark Griffith (1875-1948)

Message par Supfiction »

Rashomon a écrit :
Supfiction a écrit : Visiblement, Geoffrey n'est pas forcement du même avis et ce n'est pas seulement le fond qui a été jugé mais aussi la forme, ceci expliquant le zéro pointé.
Certes, mais comme je le disais plus haut, il s'agit d'un film tourné en 1915 avec les moyens techniques de 1915 et le savoir-faire de 1915. La question est: Griffith a-t-il fait du mieux qu'il a pu dans ce contexte et a-t-il réussi mieux, aussi ou moins bien que ses contemporains? Régénération de Walsh tourné la même année est probablement supérieur d'un point de vue cinématographique - et moral - mais il est sorti après le Griffith... qui fut le mentor de Walsh. Forfaiture de Cecil B. DeMille est lui aussi postérieur.
Est ce que c’est ainsi que note l’équipe Classik ?
Je ne pense pas que ce soit le cas de tout le monde en tous cas.

Pour ma part, lors de sa découverte il y a quelques années j’avais été sidéré de la nullité de ce film considérant son aura.
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Re: David Wark Griffith (1875-1948)

Message par Jeremy Fox »

Supfiction a écrit :
Est ce que c’est ainsi que note l’équipe Classik ?
Je ne pense pas que ce soit le cas de tout le monde en tous cas.

Tout à fait ; il n'y a aucune règles concernant la notation ; chacun procède comme il le souhaite.
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Re: David Wark Griffith (1875-1948)

Message par Geoffrey Firmin »

hansolo a écrit : En revanche, est ce en raison de son racisme qu'il n'a pas de donné de rôles importants à des noirs ?
C'est expliqué dans les bonus de l'édition du BFI ( et accessoirement dans le test du BR), dans certains états la loi interdisait à des actrices blanches de jouer au côté d'acteurs afro-américain mâles adultes ( au théâtre comme au cinéma), si cela n'est pas du racisme alors je ne sais pas ce qu'est le racisme. Comme Griffith ne voulait certainement pas que son film soit interdit dans les états du sud...
Et son film ne parle que de ça, l'àprès guerre de sécession a donné le droit de vote aux noires, le congrès est peuplé de nègres et ils veulent voter des lois iniques comme autoriser le mariage mixte. C'est écrit blanc sur noir dans les intertitres du film, c'est montré comme ça dans le film. Les sièges du congrès sont occupés par des afro américain mangeant du poulet avec les pieds sur la table en faisant des grimaces. En montrant ça Griffith remet en cause le droit de vote, le droit au mariage mixte,le droit à l'égalité. Rien que ça et il fait intervenir le KKK au son de la Valkyrie pour remettre de l'ordre dans tout ça. Comment veux tu que je ne trouve pas ça détestable? Comment faire autrement que de mettre zéro à tel film? Ca aurait pu être tourné avec un steadycam que ça ne changerait rien aux problèmes. Je trouve même pas ça beau visuellement, j'ai beau chercher un plan composé comme celui là qui se trouverait dans les scènes de bataille de naissance d'une nation, j'en trouve pas, le plan est tiré de The Coward tourné en 1915 par Thomas Ince:

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Re: David Wark Griffith (1875-1948)

Message par hansolo »

Geoffrey Firmin a écrit :
hansolo a écrit : En revanche, est ce en raison de son racisme qu'il n'a pas de donné de rôles importants à des noirs ?
C'est expliqué dans les bonus de l'édition du BFI ( et accessoirement dans le test du BR), dans certains états la loi interdisait à des actrices blanches de jouer au côté d'acteurs afro-américain mâles adultes ( au théâtre comme au cinéma), si cela n'est pas du racisme alors je ne sais pas ce qu'est le racisme. Comme Griffith ne voulait certainement pas que son film soit interdit dans les états du sud...]
Dont acte.
Du coup les 'vrais' noirs du film ne sont jamais aux côtés d'actrices blanches dans le film?
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Re: David Wark Griffith (1875-1948)

Message par Geoffrey Firmin »

Watkinssien a écrit :
Du coup, une note sanctionnée d'une bulle est clairement à visée morale, mais je la trouve du coup non crédible
Non ça n'est pas qu'un jugement moral, une posture...avant de voir naissance d'une nation, j'ai vu Le lys brisé, à travers l'orage et les deux orphelines. Jusque là j'avais plutot une bonne opinion du cinéma de Griffith. Mais alors quand j'ai découvert Naissance d'une nation, je suis tombé des nus... Je m'attendais pas à une telle purge. Je ne trouve rien à sauver la dedans, trois heures de mensonges, de falsification, même les motivations de l'assassin de Lincoln sont révisionnistes. Objectivement je ne peux pas contre balancer celà par le fait que Bitzer aurait inventé le traveling arrière, rien n'indique que personne ne l'avait fait auparavant. Qui peut prétendre avoir vu tous les films muets de cette époque, alors qu'une grande partie de la production a disparu.
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Re: David Wark Griffith (1875-1948)

Message par Geoffrey Firmin »

hansolo a écrit : Du coup les 'vrais' noirs du film ne sont jamais aux côtés d'actrices blanches dans le film?
J'ai pas envie de me retaper tout le film :mrgreen: pour vérifier mais ça semble être le cas en effet

Il y a juste ce plan ou il y a bien quelques blanches à l'arrière plan:
Image

Sinon celui ci est intéressant et symptomatique, quelques acteurs noirs, beaucoup de grimés et surtout des femmes noires jouées par des hommes blancs grimés, je pense qu'ils manquaient de figuration noire féminine mais pas question de grimer des femmes blanches pour ce plan:
FabPlayer_[20180129-144833-196].jpg
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Re: David Wark Griffith (1875-1948)

Message par Alexandre Angel »

En tout cas, la copie a l'air belle :mrgreen: (j'en suis resté à l'édition MK2).
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Re: David Wark Griffith (1875-1948)

Message par hansolo »

Geoffrey Firmin a écrit :. Objectivement je ne peux pas contre balancer celà par le fait que Bitzer aurait inventé le traveling arrière, rien n'indique que personne ne l'avait fait auparavant. Qui peut prétendre avoir vu tous les films muets de cette époque, alors qu'une grande partie de la production a disparu.
J'imagine qu'à l'époque de la sortie du film et dans les années qui suivirent, on a pu trancher sur ce point.
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Re: David Wark Griffith (1875-1948)

Message par Geoffrey Firmin »

Alexandre Angel a écrit :En tout cas, la copie a l'air belle :mrgreen: (j'en suis resté à l'édition MK2).
Comme je le précise dans le test, c'est le paradoxe de ce film, plus la lisibilité des scènes est bonne plus cela joue en sa défaveur à mon sens...(la deuxième est issue du Kino).
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Re: David Wark Griffith (1875-1948)

Message par hansolo »

Geoffrey Firmin a écrit :
Alexandre Angel a écrit :En tout cas, la copie a l'air belle :mrgreen: (j'en suis resté à l'édition MK2).
Comme je le précise dans le test, c'est le paradoxe de ce film, plus la lisibilité des scènes est bonne plus cela joue en sa défaveur à mon sens...(la deuxième est issue du Kino).
Je comprends ce que tu veux dire.
Je l'ai découvert il y a quelques années dans une copie pitoyable (Bach film ?) et j'avais tendance à être assez indulgent (les images étaient parfois si mauvaises que je ne sais pas si on pouvait distinguer les noirs & les blancs grimés ...)
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Re: David Wark Griffith (1875-1948)

Message par Watkinssien »

Geoffrey Firmin a écrit : Objectivement je ne peux pas contre balancer celà par le fait que Bitzer aurait inventé le traveling arrière, rien n'indique que personne ne l'avait fait auparavant. Qui peut prétendre avoir vu tous les films muets de cette époque, alors qu'une grande partie de la production a disparu.

Oui, mais dès sa sortie le film a été salué par les théoriciens du cinéma de l'époque et ceux qui ont suivis après. Quasiment tous les cinéastes contemporains du film (en activité ou en devenir) ont salué les innovations techniques qui ont contribué à la base constructive la plus typique du langage cinématographique. Des personnes comme Dreyer, Chaplin, Gance, Stroheim, Walsh, Ford, DeMille, Eisenstein, etc...

Après, de manière absolue, je ne peux que comprendre le dégoût que provoque ce film. C'est un monument d'ignominie et en même temps une oeuvre fondatrice pour faire avancer l'art du cinéma. Certaines de ses techniques sont concrètes et présentes et pas toujours bien exécutées. Quand Gance se déchaînait sur ses expérimentations dans Napoléon, on est beaucoup plus épaté et époustouflé par la qualité et l'aboutissement technique, mais il y a 12 ans d'écart.

Intolérance est bien plus convaincant techniquement.
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Re: David Wark Griffith (1875-1948)

Message par Rashomon »

Watkinssien a écrit :
Oui, mais dès sa sortie le film a été salué par les théoriciens du cinéma de l'époque et ceux qui ont suivis après. Quasiment tous les cinéastes contemporains du film (en activité ou en devenir) ont salué les innovations techniques qui ont contribué à la base constructive la plus typique du langage cinématographique. Des personnes comme Dreyer, Chaplin, Gance, Stroheim, Walsh, Ford, DeMille, Eisenstein, etc...

Après, de manière absolue, je ne peux que comprendre le dégoût que provoque ce film. C'est un monument d'ignominie et en même temps une oeuvre fondatrice pour faire avancer l'art du cinéma. Certaines de ses techniques sont concrètes et présentes et pas toujours bien exécutées. Quand Gance se déchaînait sur ses expérimentations dans Napoléon, on est beaucoup plus épaté et époustouflé par la qualité et l'aboutissement technique, mais il y a 12 ans d'écart.
Voilà, c'est ce que j'essaie de dire depuis tout à l'heure: c'est un film de 1915 dont les qualités artistiques doivent être jugés selon les critères de 1915. Je me répète, mais comparez aux Vampires de Feuillade pour voir où on en était techniquement en France à la même époque: découpage basique, échelle de plans réduite au seul plan large et à un gros plan de ci de là, caméra presque toujours immobile... Et pourtant je préfère largement Feuillade à Griffith. Après, sur le plan purement idéologique, le Griffith est effectivement immonde et surtout comme l'a bien dit Alexandre, profondément crétin.
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