Mary Pickford (1892-1979)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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francesco
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Mary Pickford (1892-1979)

Message par francesco »

Chez Bach Video (ou Bac Film ? je ne sais plus : celui qui n’est pas bien, en tous cas et j’ai appris en plus qu’il ne fallait pas les acheter puisque c’était des copies de films restaurés par d’autres) sont sortis cette année 12 films avec Mary Pickford.
Je ne me lance pas dans une bio parce que je ne me connais pas assez en cinéma muet et que la vie de l’actrice mériterait quelque chose d’assez développé, mais …. Quelle actrice !!!!!
J’en suis à mon sixième :
Suds (1920)
Le signal de l’amour (1921)
Tess au pays des tempêtes (1922)
Sparrows (1926)
La petite marchande (1927)
Coquette (1929)

A part Coquette (son premier parlant que j’ai acheté en VHS) tous les autres sont de la collection dont je parlais plus haut.
Dans ma tête Pickford était surtout un phénomène de société, une pré-Shirley Temple, des anglaises et des rôles de petites filles à 30 ans passés. Bref je n’en attendais pas grand-chose.
Chez la plupart des forumeurs et blogueurs américain Coquette est considéré comme la plus mauvaise interprétation qui ait reçu un oscar. Or j’ai trouvé le film intéressant (Ce n’est pas du tout une comédie : au contraire il s’agit d’un sombre drame autour des flirts d’une southbelle.) Pickford y met une charge émotionnelle presque hystérique, très forte, sans retenu qu’on retrouve dans certaines interprétations du début du parlant chez Bessie Love ou Helen Hayes. Les dernières scènes sont totalement théâtrales pour nos critères actuelles mais constamment justes et du coup poignantes. Ayant été favorablement impressionné j’ai commencé à acheter les muets et suis impressionné :
Je mets à part Sparrow qui est, avec ou sans elle, un film génial, terrifiant, cauchemardesque, sur un groupe d’orphelins maltraités par un Ténardier (j'avais écrit Tavernier au début :mrgreen: ) qui a des airs de Nosferatu.
Les autres sont un moyen de se rendre compte de sa versatilité : Sparrows est le seul film dans lequel elle joue le rôle d’une (grande) enfant, pour le reste ce sont des rôles d’adultes, très différents les uns des autres, même si ils appartiennent tous à la même catégorie sociale.
Dans Suds elle est méconnaissable (j’ai attendu jusqu’à la moitié du film de la voir arrivé alors qu’on ne voyait qu’elle depuis le début !) : elle joue une espèce de demeurée qui est à la fois extrêmement ridicule et profondément touchante. Je veux dire qu’au cours de la même scène, voir du même moment elle peut être les deux à la fois (annonçant certaine performance …. De Shelley Winters !) Le film, à part une fin complètement plaqué, est très attachant et le personnage de Lavender le cheval (si, si) est particulièrement sympathique et bien traité.
Le Signal de l’amour est un grand mélo magnifiquement photographié avec des scènes terribles, un phare au milieu de la nuit, des côtes rocheuses battues par la tempête et une Pickford bouleversante, aussi grande, en tous cas techniquement, dans ce registre de femme fragile au bord de la folie, que Lilian Gish (cette dernière ayant en plus dans ces meilleures rôles une espèce de grâce qui en fait une des quatre ou cinq plus grandes actrices du cinéma, à mes yeux).
Tess est un remake d’un film qu’elle avait déjà tourné et c’était son personnage préféré. Un peu comme pour Sparrows le film est une telle réussite que le talent de Pickford n’est qu’un « plus » pour un film déjà très beau. C’est fou comme la beauté des cadrages et la force de la mise en scène transcende une intrigue mélodramatique au possible : il y a une scène terrible mais très saint-sulpicienne qui devient bouleversante à l’écran.
La petite vendeuse (son dernier film muet et sa plus belle interprétation pour beaucoup) est au contraire prétexte à un magnifique numéro d’actrice, tour à tour très drôle et très émouvante, une composante qu’elle a beaucoup exploitée dans sa carrière et qui en fait le pendant féminin (et je crois aussi talentueux du point de vue de l’interprétation) qu’un Chaplin. A noter en particulier la grande scène où elle prétend être une femme de mauvaise vie pour ne pas épouser l’homme qu’elle aime et ne pas abandonner ses parents : elle a des larmes plein les yeux, une gestuelle caricatural de vamp et, à la fin, le gros plan sur son visage effondré, le sourire figé, le rouge à lèvre qui déborde est très beau. Pour la petite histoire son partenaire deviendra son dernier mari après son divorce avec Fairbanks.
Ce serait vraiment intéressant de savoir d’où me venaient mes préjugés : est-ce qu’ils sont généraux ?
Quelqu’un a vu quelques uns de ses films ?
En tous cas une actrice et des films à redécouvrir d’urgence, même si vous ne jurez que par Janet Gaynor ou Gloria Swanson !
Dernière modification par francesco le 25 juin 08, 10:32, modifié 1 fois.
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Re: Mary Pickford

Message par Music Man »

J'ai aperçu aussi cette collection de DVD à des pris très attractifs. pourtant une certaine réticence (la peur de tomber sur des films complètement fossilisés?) m'a retenu.
Après avoir lu tes avis positifs, cela me donne davantage envie, surtout les moineaux.
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Re: Mary Pickford

Message par Music Man »

LES MOINEAUX (Sparrows) de William Beaudine -1926
Avec Mary Pickford, Gustav Von Seyfferitz

Un grand merci à Francesco :D :wink: pour m’avoir prêté ce DVD et fait découvrir ce film magnifique, conte cruel et sombre absolument fascinant.
Comme le signale Patrick Brion dans les bonus, on ne peut s’empêcher de songer à la Nuit du chasseur le chef d’œuvre de Charles Laughton en suivant les péripéties de ces enfants kidnappés et exploités honteusement par des Ténardier cruels. La réalisation est très efficace (on raconte que William Beaudine voulait réduire les trucages au minimum et a obligé les enfants à tourner des scènes avec les alligators en leur faisant prendre des risques insensés :shock: ) , les gamins merveilleux de naturel et l’interprétation de Mary Pickford absolument splendide et souvent fort émouvante (et pas du tout nunuche comme on pourrait le croire). Dans ce mélodrame prenant et haletant, le scénariste a su insuffler quelques touches de comédie fort bienvenues (délicieux passage où les enfants affamés, scrutent respectivement leur gosier afin de montrer à quel point leur ventre est vide).
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Si comme moi, vous adorez la Nuit du chasseur, un film à voir absolument.
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Ann Harding
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Re: Mary Pickford

Message par Ann Harding »

Je viens de regarder toute une série de film avec Mary Pickford et je dois dire qu'elle se révèle une comédienne de premier plan. :shock: Si on lit les notices dans les dictionnaires français, on a une idée bien faible de l'actrice et du personnage. 'America's Sweetheart' n'avait rien d'une petite fille des romans de la comtesse de Ségur. Voici quelques uns des films de j'ai vu et que je vous recommande. (Attention: je n'ai pas vu de films des Editions BACH)

Heart o'the Hills (La Fille des Monts, 1919) de Sidney Franklin
Mavis Hawn (M. Pickford) est une vraie sauvageonne dans les montagnes du Kentucky. Elle court pieds nus dans la forêt avec un fusil et n'a peur de rien. Des étrangers venus des plaines souhaitent exproprier les paysans pauvres pour exploiter le charbon qui est présent en quantité dans le sol...
Ce film est une vraie révélation: les extérieurs réalisés en Californie sont absolument superbes. Mary trace un portrait remarquable en fille sauvage et farouche, battue par sa mère et qui souhaite venger son père assassiné. Son rôle est celui d'une adolescente et elle donne à Mavis une véritable dimension psychologique. On peut voir dans le film un très jeune John Gilbert qui a déjà toutes les mimiques que l'on retrouvera dans ses films avec Garbo. Les intertitres jouent joliment sur le patois des paysans du Kentucky. Il n'y a que la musique de Maria Newman qui cloche: la fille d'Alfred Newman offre une partition grinçante passablement agaçante....(Belle copie teintée-Sur l'Edition Milestone-Image Entertainment, Zone 1 US)

Amarilly of Clothes-Line Alley (A Chacun sa vie, 1918) de Marshall Neilan
Amarilly (M. Pickford) vit dans une impasse populaire avec sa mère et ses nombreux frères et soeurs. Son petit ami Terry est garçon de café. Mais, elle rencontre Gordon, issu d'une grande famille...
Mary a fait 8 films avec Mashall Neilan, la plupart sur des scénarios de Frances Marion, une des meilleures scénaristes du muet. Celui-ci fait partie des meilleur, s'attachant à la vie en société de cette famille d'Irlandais pauvres mais plein d'humour et d'enthousiasme. La confrontation avec la haute société se révèle attachante et charmante. Mary est parfaitement à l'aise en Amarilly qui utilise une langage vert que n'aurait pas renié Arletty! :lol: (Edition Milestone-Image Entertainment, Z1 US)

M'Liss (1918) de Marshall Neilan
Melissa Smith (M. Pickford) terrorise litéralement la petite ville minière où elle habite avec son vieux père alcoolique (et sa poule préférée!). Elle décide d'aller à l'école lorsque le nouveau maître d'école (Thomas Meighan -qui apparaît dans de nombreuses comédies de DeMille) arrive...
Le film a pas mal de points communs avec Heart o'the Hills, Mary est à nouveau une savageonne qui va se sociabilier pour plaire à son maître d'école. On y retrouve aussi le meurtre du père qui va soudain la projeter dans le mode adulte. A nouveau des extérieurs superbes pour ce petit western, avec en prime un Tully Marshall impayable en juge alcoolique et corrompu. :lol: La balance entre humour et tragédie est toujours parfaitement maintenue. A voir! (Milestone-Image Entertainment Z1 US)

Il faut aussi mentionner le travail remarquable du chef opérateur préféré de Mary: Charles Rosher. Que ce soit pour les extérieurs ou les gros plans son travail magnifique éclate à l'écran.
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Re: Mary Pickford

Message par Music Man »

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SUDS de Jack DILLON -1920Avec Mary PICKFORD

Dans un quartier pauvre de Londres, une petite blanchisseuse un peu sotte s’invente une histoire d’amour avec un client de la laverie qui a oublié sa chemise ;

Charmante petite comédie qui rappelle beaucoup les films de Chaplin. Même réalisme social : l’action se déroule dans une infâme laverie située dans un quartier mal famé de Londres où travaillent pour un salaire de misère de pauvres filles.
(Pour la petite histoire, ce genre de laveries archaïques avec chaudrons bouillants et ambiance digne d’un roman d’Eugene Sue existait encore en France à la fin des années 50.)
Et même onirisme et magie : pour s’évader de ce milieu glauque, elle s’invente une romance avec un noble qui se fiche tout à fait d’elle. Son attachement pour le cheval qu’elle sauve de l’abattoir est également symptomatique d’une fille qui veut s’affranchir des cruelles réalités de son milieu.
Méconnaissable, Mary Pickford fait songer à la Audrey Hepburn de My fair lady. Petite bonne femme, Charlot féminin, elle est adorable et juste.
Merci encore à Francesco pour cette découverte.
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Ann Harding
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Re: Mary Pickford

Message par Ann Harding »

Je continue à découvrir les films de Mary Pickford toujours avec le même plaisir. Il faudrait aussi passer un peu de temps à examiner ses courts-métrages des années Griffith. Je n'en ai vu que quelques uns: The Lonely Villa (1909) ou The Narrow Road (1912). (Allen John les a déjà mentionné dans le topic sur Griffith.) Il y aussi ceux de Thomas Harper Ince comme The Dream (1911) où elle devient une créature délurée, fumant et buvant lors d'un rêve (ou cauchemar?) de son époux.

Juqu'à présent, j'ai vu The Little American (1917, DeMille); Rebecca of Sunnybrook Farm (1917, Neilan); The Little Princess (1917, Neilan); Stella Maris (1918, Neilan); Amarilly of Clothes-Line Alley (1918, Neilan); M'liss (1918, Neilan); Daddy-Long-Legs (1919, Neilan); Heart o'the Hills (1919, Franklin); Pollyanna (1920, Powell); The Love Light (1921, Marion); Tess of the Storm Country (1922, Robertson); Little Annie Rooney (1925, Beaudine); Sparrows (1926, Beaudine); My Best Girl (1927, Taylor) et Secrets (1933, Borzage).

On retrouve deux personnages dominants dans tous ses rôles: la petite fille de 10-12 ans orpheline maltraitée ou l'adolescente qui vit dans un quartier (ou une campagne) pauvre où elle doit survivre grâce à son ingéniosité et son intelligence. Ces deux personnages sont d'ailleurs très proches de sa propre enfance: dès cinq ans, elle est mise sur les planches par sa mère veuve et à 12 ans, elle est le gagne-pain de la famille.
J'ai tendance à préférer les rôles d'adolescente/adulte à ceux de petite fille qu'elle joue néanmoins avec talent et sans aucune mièvrerie. Il est intéressant de lire le témoignage de sa scénariste et amie, Frances Marion à propos de Pollyanna. Elles trouvaient toutes les deux le personnage de cette petite fille modèle (the glad girl!) totalement nauséeux. Elles se rendirent incognito à une présentation du film. Quelle ne fut leur surprise de voir que le public appréciait le film et même riait à leurs touches de comédie! Mary retira ses lunettes noires pour recevoir les compliments du public! :lol:
Elle souvent bagarreuse et n'hésite pas à s'attaquer à plus grand qu'elle. Il faut la voir frapper le vicieux Jean Hersholt (qui prépare son personnage de Greed!) dans Tess of the Storm Country. :shock:
Cela dit, parmi tous les films vus, je recommande particulièrement les films de Marshall Neilan: Stella Maris (1918, Neilan) où elle est hallucinante dans un double rôle; Amarilly of Clothes-Line Alley (1918, Neilan) et M'liss (1918, Neilan) ainsi que le superbe Heart o'the Hills de Franklin. The Love Light (1921) mise en scène par Frances Marion lui offre un rôle proche de ceux de Lillian Gish: elle sombre dans la folie à la mort de son enfant.

Ses films plus tardifs sont réalisés par des 'réalisateurs de commande' comme William Beaudine ou Sam Taylor. Mais, néanmoins, ils montrent toujours un rythme et une qualité comique remarquable. Mary devait certainement être derrière la production de A à Z. j'aimerais bien voir ses deux films avec Maurice Tourneur, Poor Little Rich Girl et The Pride of the Clan. Mais, il y a déjà de très nombreux DVDs de ses films qu'il faut découvrir d'urgence. :wink:

Secrets montre qu'elle aurait pu continuer à faire des films parlants. Elle y est superbe en jeune fille délurée qui s'enfuit avec son futur mari (Leslie Howard) pour l'ouest. La seconde partie du film est fascinante avec une séquence de western/film noir qui donne froid dans le dos. Elle sert dans ses bras son enfant mort encadrée par une porte de leur maison en flammes. Puis, la dernière partie qui rappelle Make Way For Tomorrow de McCarey.
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Re: Mary Pickford

Message par allen john »

Ann Harding a écrit : Secrets montre qu'elle aurait pu continuer à faire des films parlants. Elle y est superbe en jeune fille délurée qui s'enfuit avec son futur mari (Leslie Howard) pour l'ouest. La seconde partie du film est fascinante avec une séquence de western/film noir qui donne froid dans le dos. Elle sert dans ses bras son enfant mort encadrée par une porte de leur maison en flammes. Puis, la dernière partie qui rappelle Make Way For Tomorrow de McCarey.
Quelle copie de Secrets? Est-ce celle sortie en DVD aux USA?
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Re: Mary Pickford

Message par Ann Harding »

Non je n'ai pas le DVD de Secrets. Mais, il a été diffusé récemment sur TCM US. :wink:
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Re: Mary Pickford

Message par allen john »

Ann Harding a écrit :Non je n'ai pas le DVD de Secrets. Mais, il a été diffusé récemment sur TCM US. :wink:
Ah, d'accord, d'accord. tant pis! Merci. :wink:
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Re: Mary Pickford (1892-1979)

Message par Ann Harding »

The Taming of the Shrew (La mégère apprivoisée, 1929) de Sam Taylor avec M. Pickford et D. Fairbanks

Cette adaptation de Shakespeare est le premier film parlant de Doug et le second de Mary ainsi que leur seule apparition ensemble à l'écran. Bien qu'ils aient été actionnaires et producteurs au sein du même studio (United Artists), ils n'eurent que cette occasion de jouer ensemble. Je ne m'attendais pas à grand'chose, mais, finalement, j'ai été impressionnée par les longs travellings, le montage intelligent ainsi que la performances des deux acteurs. Ils évitent habilement le travers de nombreux acteurs de l'époque: le débit théâtral. Doug utilise son image de swashbuckler pour donner à Petruccio un panache bien sympathique alors que Kate (M. Pickford) est une belle furie face à lui. On a beaucoup glosé sur cette mention du générique: 'de Wm Shakespeare avec quelques dialogues supplémentaires de Sam Taylor'. En fait, aucune copie ne porte plus cette mention. Le film a fait l'objet d'un remontage dans les années 60: 7 min ont été coupée, on a ajouté de la musique et des effets sonores. Mary Pickford avait gardé sous clé tous ses films et avait refusé systématiquement de les montrer pendant de nombreuses années. Elle avait peur que l'on se moque d'elle. Puis en 1965, la cinémathèque française a organisé une rétrospective qui fut un grand succès. Cela permit enfin à certains de ses films d'être visibles. Sam Taylor qui a réalisé le dernier muet de Mary (My Best Girl) offre des travellings d'une fluidité que j'aurais cru impossible vu les contraintes techniques de l'époque (la caméra était enfermée dans une énorme boîte insonorisée). A découvrir.
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Re: Mary Pickford (1892-1979)

Message par Ann Harding »

A Romance of the Redwoods (1917) de C.B. DeMille avec MP, Elliott Dexter et Tully Marshall.
Image E. Dexter & M. Pickford

Jenny Lawrence (MP) part pour l'ouest pour y retrouver son oncle. Mais celui-ci a été tué par les Indiens. Un hors-la-loi 'Black' Brown a usurpé son identité. Jenny se retrouve dans une ville champignon, en pleine ruée vers l'or, à la merci de ce hors-la-loi. Mais ses sentiments à son égard vont évoluer rapidement...
Dans cet univers de western avec ses 'outlaws', ses lyncheurs, ses saloons mal famés, Mary est tout à fait à son aise. Elle, la jeune fille de l'est bien élevée, va s'adapter rapidement aux moeurs sauvages de la ruée vers l'or. L'évolution des deux personnages principaux est incroyablement bien menée. Nous sommes en 1917! Le hors-la-loi tente de se réformer -avec difficulté- et Jenny tente de le protéger d'une bande de lyncheurs. Elle arrive à le sauver grâce à sa tenacité et son ingéniosité: elle enlève les vêtements d'une poupée (que lui a offert Brown) et prétend être enceinte. Les lyncheurs tombent dans le panneau. Mary a tourné deux films avec DeMille en 1917 qui se révèlent parmi ses meilleurs. A découvrir lors de la rétro DeMille. :wink: Je vais aller le voir de ce pas car je n'ai pu voir qu'une très mauvaise copie de ce très joli film.
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Re: Mary Pickford (1892-1979)

Message par Ann Harding »

Juste un message rapide pour signaler que A Romance of the Redwoods de CB DeMille avec Mary Pickford passe à la cinémathèque vendredi prochain 24 mars à 19h30. A ne pas manquer! :wink:
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Re: Mary Pickford (1892-1979)

Message par Ann Harding »

The Little American (La petite américaine, 1917) avec Mary Pickford, Jack Holt et Raymond Hatton
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Angela (M. Pickford), une jeune américaine célèbre son anniversaire le 4 juillet (!) 1914 en compagnie de ses deux prétendants, un français et un allemand. Mais, l'entrée en guerre de ces deux pays les sépare. Elle traverse l'Atlantique, à l'appel de sa tante française, sur le Veritania qui est coulé par un sous-marin allemand....

Ce film dont la réalisation commença peu de temps avant l'entré en guerre des Etats-Unis se veut un plaidoyer pour l'intervention dans le conflit. Néanmoins, pour une oeuvre de propagande, le film offre une narration intéressante. Mary Pickford est le symbole de l'Amérique neutre qui décide de s'impliquer en découvrant les atrocités perpétrées par les 'prussiens'. Le torpillage du Veritania -qui bien sûr rappelle le Lusitania- n'est que le début de sa prise de conscience. Lorsque dans le noir, elle est aggressée par un officier allemand, elle découvre avec stupeur qu'il s'agit de Jack Holt, l'homme qu'elle aimait. Le film utilise par moment des images particulièrement frappantes comme celle de ce Christ qui reste les bras en l'air ayant perdu sa croix au milieu des décombres d'une église eventrée. Mary Pickford donne à Angela son énergie et son opiniâtreté. Elle domine les scènes où elle est humiliée par un officier allemand qui l'oblige à retirer ses bottes couvertes de boue. le film est un excellent document sur la vision américaine de la première guerre mondiale. La copie présentée, issue de UCLA Film & TV Archive, était très belle: teintée et avec un beau contraste contrairement aux hideuses copies en circulation en DVD...
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Re: Mary Pickford (1892-1979)

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Rosita (Rosita, Chanteuse des rues, 1923) d'Ernst Lubitsch avec Mary Pickford, Irene Rich, Holbrook Blinn et George Walsh

Rosita (M. Pickford) chante dans les rues de Séville en se moquant du roi (H. Blinn). Elle est arrêtée pour propos séditieux. Un jeune officier, Don Diego (G. Walsh) qui avait tentée de la défendre est lui aussi arrêté...

Mary Pickford avait embauché Ernst Lubitsch en 1922. A l'origine, ils devaient tourner Faust, puis Dorothy Vernon. Mais, ils ne purent se mettre d'accord, donc ils se tournèrent vers Rosita, une version de Don César de Bazan. Les relations entre Lubitsch, fraîchement arrivé d'Allemagne, et sa productrice-interprète furent très tendues. Chacun voulait conserver sa liberté d'action face à l'autre qui voulait contrôler le film. Mary Pickford avait toujours eu un contrôle presque total de ses films au sein de son studio. D'ailleurs, pour cette production, elle ne ménage pas ses frais. Le Danois Svend Gade est engagé pour réaliser les décors gigantesques de Rosita en collaboration avec William Cameron Menzies. La dimension des plateaux vu sur grand écran laisse rêveur: ils rivalisent avec le château médiéval de Robin Hood (1922, A. Dwan) tourné peut de temps avant par son époux, Douglas Fairbanks. La petite Mary Pickford paraît minuscule devant les portails géants et les salles à haut plafond des palais. De ce point de vue, le film est une brillante réussite: la petite ville espagnole recréée en studio semble être réelle. De même, l'opérateur de Pickford, le génial Charles Rosher (qui gagna le 1er Oscar de la cinématographie en 1927 pour Sunrise) fait des merveilles. On sent là à quel point la cinématographie en Amérique avait de l'avance, à l'époque, sur celle des allemands. D'ailleurs, visuellement, le film est plus un film de Rosher que de Lubitsch. Son utilisation des silhouettes en ombre se détachant sur un immense décor en grande profondeur de champ est incroyable. Hélas, la seule copie de ce film qui a survécu est un vilain contretype russe où il faut deviner les beautés de Rosher. L'intrigue n'offre pas beaucoup de surprises. C'est surtout Mary Pickford qui tire son épingle du jeu en fille des rues sauvage et futée. Mais, elle avait eu des rôles bien plus intéressants (et plus complexes) dans Tess of the Storm Country (1922) par exemple. George Walsh (le frère de Raoul Walsh) est bien fade en jeune officier. Heureusement, il y a Irene Rich (qui sera plus tard Mrs Erlynne dans Lady Windermere's Fan) pour apporter un élément de subtilité en reine trompée qui fait tout pour faire échouer les amours de son roi. L'aspect comique du film avec les parents adoptifs -assez grotesques- de Rosita fait penser aux farces bavaroises du Lubitsch allemand comme Kohlhiesels Töchter. Le Lubitsch subtile, adepte de l'ellipse, n'est pas encore né à son arrivée en Amérique. Peut-être est-ce la vision de A Woman of Paris (L'opinion publique, 1923) de Chaplin qui le mettra sur la voie ? Pickford gardera un souvenir détestable de ce tournage et elle laissera à l'abandon le négatif du film (contrairement à ses autres films qui furent préservés). On ne peut donc découvrir ce film que grâce à une copie très médiocre qui ne permet pas d'en apprécier la beauté visuelle.
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Re: Mary Pickford (1892-1979)

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Poor Little Rich Girl (Pauvre Petite Fille Riche, 1917)de Maurice Tourneur avec Mary Pickford

Gwendolyn (M. Pickford) est la seule enfant d'un couple de riche New-Yorkais qui la délaisse. La mère est trop occupée par sa vie mondaine et le père par ses actions à Wall Street pour prêter attention à leur fille. Elle passe la journée avec des domestiques peu amènes qui ne l'aime pas. Elle rêve de pouvoir sortir de chez elle et de pouvoir jouer avec les autres enfants du quartier...

Voilà un résumé qui pourrait induire en erreur. Ce film de Maurice Tourneur n'a rien d'un roman de la Comtesse de Ségur. Mary Pickford y joue certes une petite fille de 11 ans avec beaucoup de malice. Mais, nous ne sommes pas face à une histoire à l'eau de rose. Gwendolyn est trimbalée de domestique en précepteur toute la journée et ne rêve que de faire toutes les bêtises de son âge. A peine lui a-t-on mis un vêtement de garçon -pour la punir- qu'elle se lance dans une bataille à coup de boue avec les garnements du coin. Gwendolyn est un garçon manqué qui ne supporte pas les petites filles riches de son milieu qui sont des teignes. Mais, le film prend un tour quasiment phantasmagorique dans la deuxième partie. Alors que Gwendolyn a été droguée par une des domestiques qui voulaient sortir, elle se retrouve dans un monde parallèle où tous les personnages de sa vie quotidienne se retrouvent sous un autre masque révélateur. On pourrait presque penser au Magicien d'Oz si l'univers n'en était pas bien plus noir. Gwendolyn est perdue dans un cauchemar où toutes expressions entendues dans la vie de tous les jours prennent une nouvelle dimension. La gouvernante 'à deux visages' a réellement deux faces et le gentil majordome surnommé 'silly ass' devient un âne. Gwendolyn ne comprend pas toutes ces expressions imagées qui deviennent une sorte de Symphony in Slang comme le fera Tex Avery. Toutes ces séquences annoncent The Blue Bird (1918) que Maurice Tourneur tournera peu après.La rencontre finale de Gwendolyn avec la mort, sous la forme d'une femme voilée souriante, montre l'incroyable talent des opérateurs de Maurice Tourneur (J. van den Broek & L. Andriot). Mary Pickford est la formidable interprète de ce film magnifique ainsi que la productrice. Elle est un petit démon qui ne désire qu'une chose: l'amour de ses parents. Un très beau Tourneur qui vient tout juste d'être restauré et devrait bientôt être disponible en DVD chez Milestone Films.
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The Hoodlum (1919, S. Franklin) avec Mary Pickford, Kenneth Harlan et Ralph Lewis

Amy Burke (M. Pickford) est une jeune fille riche et gâtée de la 5ème Avenue qui vit avec son richissime grand-père (R. Lewis). Mais, un jour, elle décide de suivre son père John Burke, un sociologue qui étudie la vie des gens dans les bas quartiers new-yorkais. Amy se transforme en vrai fille de la rue...

Mary Pickford a tourné de nombreux films avec Sidney Franklin. Celui-ci est une comédie dramatique très bien faite avec une reconstitution en studios hallucinante de vérité des bas quartiers de New-York. Mary se transforme en garçon manqué qui organise des parties de dés endiablés au grand dam du policier local. Dans une séquence qui ressemble à un film de Chaplin, elle se jette dans un toboggan à charbon pour échapper au flic. Mary a très souvent joué sur cette opposition entre les riches et les pauvres comme dans Stella Maris (1918) ou Amarilly of Clothes-Line Alley (1918), deux films de Marshall Neilan. Ici, elle accède à l'univers des immigrants grâce à son père, un sociologue. Le film est d'ailleurs très juste dans sa description de la vie de ceux-ci. Le juif d'Europe Centrale est constamment en train de s'echarper avec son voisin irlandais irascible. On retrouve là tout le monde de ceux qui espèrent réussir aux Etats-Unis. Mais, le film montre que certains n'ont pas tous les mêmes chances. Cette mère malade avec ses nombreux enfants ne pourrait survivre sans la charité offerte in-extremis par le grand-père d'Amy. Néanmoins, le film est moins efficace que les deux sus-mentionnés où Mary Pickford est une fille du peuple avec un talent certain. Cette nouvelle restauration de la Pickford Film Foundation est une pure merveille. Espérons qu'elle sera publié bientôt en DVD chez Milestone Films après une diffusion sur TCM US.
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