Jerzy Kawalerowicz (1922-2007)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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frédéric
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Message par frédéric »

David Locke a écrit :J'ai vu Train de Nuit (Pociag) hier soir, et c'est superbe.

L'envoûtement est total, aidé par une ritournelle jazzy et mélancolique, qui apparaît dès le début. De même, l'excitation de se voir embarqué dans un voyage vers l'inconnu au milieu d'inconnus ne se relâche jamais. En effet, l'intrigue à suspense est diablement construite, et puis surtout, chaque personnage garde jusqu'au bout sa part de mystère et d'humanité indéfinissable.

Pourtant, à mon sens, la plus grande réussite du film est la captation de ces moments détachés de l'intrigue : le train qui file dans la nuit et passe un tunnel ou un pont, les champs au petit matin avec les chiens qui aboient, le bord de mer avec ces vagues qui semblent caresser sans fin l'âme de ces deux femmes restées à bord quand tout le monde est parti...

Ce train de nuit est bien plus qu'un petit thriller hitchcockien : une invitation au voyage.
J'avais bien aimé ce film (si c'est celui que je crois) vu sur Arte. J'ai enregistré PHARAON, pas encore vu.
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Joe Wilson
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Re: Notez les films naphtas : Août 2010

Message par Joe Wilson »

Mère Jeanne des Anges (Kawalerowicz)

Jerzy Kawalerowicz s'empare de la trame des "possédées de Loudun" pour livrer un film d'une grande puissance expressive, osant et risquant à chaque instant l'excès. La mise en scène dévoile l'horreur intime avec beaucoup d'intensité, les visages révélant des impressions d'hallucination et d'effroi. Plastiquement, le film est remarquable dans sa rigueur et son austérité, laissant place à des outrances rageuses qui accompagnent le combat démesuré des protagonistes. Recherche d'un équilibre, d'une rédemption, d'une connaissance de soi et du monde...Kawalerowicz pose des interrogations, bouscule le spectateur. Seul regret, une certaine rigidité dans la progression du récit, une distance qui laisse parfois une admiration un peu froide...contrastant avec la violence affective du propos.
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Jeremy Fox
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Re: Jerzy Kawalerowicz (1922-2007)

Message par Jeremy Fox »

Mère jeanne des Anges : la critique du film et du DVD
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Re: Jerzy Kawalerowicz (1922-2007)

Message par Jeremy Fox »

Baba Yaga Films a été créée en 2008 par Jean-Marc Zekri, directeur du Reflet Médicis à Paris. Cette petite société de distribution défend une ligne éditoriale courageuse en rééditant des films de Joseph Morder, Jean-Marie Straub, André Delvaux ou en encore Marguerite Duras, mais aussi en accompagnant des auteurs contemporains comme Pierre Léon, Marie Vermillard et Joël Brisse.

La sortie ce mercredi de Mère Jeanne des Anges de Jerzy Kawalerowicz est une nouvelle preuve de l'audace de ce distributeur pas comme les autres. Rendez-vous donc dans les salles pour découvrir ce film singulier, rare et formellement splendide !
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Demi-Lune
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Re: Jerzy Kawalerowicz (1922-2007)

Message par Demi-Lune »

Pour moi Kawalerowicz, c'était jusqu'ici le fascinant Pharaon, probablement ce qu'on a réalisé de mieux sur l’Égypte ancienne. Mais il faut compter aussi avec Mère Jeanne des Anges (1961) au titre de ses réussites. Formellement, cette variation autour de l'histoire des possédées de Loudun démontre à chaque cadrage, à chaque composition, à quel point Kawalerowicz est un virtuose de la mise en scène. Bien que l'action se déroule au XVIIe s., l'épure de la reconstitution, qui se réduit au couvent et à l'auberge attenante, possède la force d'évocation du Bergman de La source ou du Vláčil de Marketa Lazarova, entre austérité et mysticisme. Ça pourrait être chiant mais ça ne l'est jamais, grâce à la tension sourde qui émane des images. Rien que le plan subjectif d'entrée dans la cour du monastère donne le ton. Chuchotements, gros plans (comme disait bruce randylan, ceux sur le visage inquiétant de Lucyna Winnicka sont mémorables), N&B superbement contrasté, tout concourt au malaise en suggérant des puissances indicibles que le quasi huis-clos rend d'autant plus étouffantes. Car contrairement à l'approche carnavalesque de Ken Russell dix ans plus tard, ici le sujet de possession est surtout le théâtre d'un questionnement sur la foi, le Mal, la rédemption, bref des choses avant tout psychologiques qui annoncent dans une certaine mesure le traitement de William Friedkin (que je soupçonne d'avoir vu ce film - à un moment, Jeanne des Anges prend d'ailleurs la position de "l'araignée"). Avec très peu, le film donne à ressentir ce vertige qui dévore les personnages, ce combat intime contre les ténèbres... qu'il prenne la forme de la peur du diable ou celle d'un amour défendu. On va pas se mentir, c'est un film froid et pessimiste, qu'on ne peut sans doute qu'admirer un peu extérieurement, mais il y a une telle maîtrise cinématographique là-dedans que ce serait dommage de passer à côté. Et le plan final (cette cloche qui se balance dans un silence rompu par des pleurs) flanque des frissons d'émotion.
La richesse du cinéma est-européen des années 1960 fout décidément souvent la trique.
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Rick Blaine
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Re: Jerzy Kawalerowicz (1922-2007)

Message par Rick Blaine »

Près de 4 ans après avoir découvert avec bonheur Pharaon, je me suis enfin replongé dans Kawalerowicz avec Train de nuit.
Une expérience fascinante, qui nous plonge de bout en bout - à l'exception d'une scène particulièrement marquante - dans un train qui nous conduit vers la côte polonaise. SI le film s’intéresse à deux personnages principaux, dont le rapport n'est pas sans évoquer un ton Bergmanien, il parvient également à faire exister les dizaines de voyageurs présents dans le train, parfois en un seul plan. La mise en scène est virtuose, mais c'est surtout l'atmosphère envoutante créée par Kawalerowicz qui passionne, comme s'il reconstituait l'humanité entière dans un train. Une intrigue policière remarquablement menée sert de colonne vertébrale au film, et de point de départ à sa séquence la plus marquante, pour maintenir juste ce qu'il faut de suspense et d'intérêt strictement dramatique au film. Mais ce n'est pas ce qui domine : la destinée de chacun de ces individus, marquée par de belles performances d'acteur et soulignée par une entetante musique jazzy, est au cœur de ce film riche et touchant.
O'Malley
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Re: Jerzy Kawalerowicz (1922-2007)

Message par O'Malley »

Tous ces avis me donne bien envie de découvrir ce réalisateur dont j'avais beaucoup aimé il y a bien longtemps Pharaon et dont il y a un titre qui me fait plus particulièrement de l'oeil pour son sujet et sa sublime musique de Morricone : Maddalena (1971).
J'ai aussi tendance à le confondre avec Jerzy Skolimowski. :oops:
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Rick Blaine
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Re: Jerzy Kawalerowicz (1922-2007)

Message par Rick Blaine »

Maddalena j'aimerai bien aussi, pour les mêmes raisons.
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