Lewis Milestone (1895-1980)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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Profondo Rosso
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Re: Notez les films naphtas - Mai 2010

Message par Profondo Rosso »

La Gloire et la Peur de Lewis Milestone (1959)

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Corée 1953. Les Américains et les Chinois tentent d'établir une ligne de démarcation afin de signer l'armistice. Mais les militaires chinois occupent une colline où doit passer la ligne de démarcation. Aussitôt les Américains déclarent la guerre aux Chinois.

Récit d'un fait méconnu et révoltant de la guerre de Corée, le film dépeint la bataille désespéré que mène le bataillon dirigé par Gregory Peck pour s'emparer d'une colline sans aucune valeur militaire où stratégique. La Chine et les Etats Unis se trouvant en négociation pour l'armistice, ce bastion insignifiant prend soudainement des enjeux gigantesque tout en provoquant une situation ridicule et révolatante pour les soldats en place. Impossible en effet pour aucune des deux nation de renforcer les effectifs pour s'assurer la victoire car cela serait perçu comme une provocation, mais se retirer serait synonyme de perdre la face dans le cadre des après négociations entre les deux pays. Ce sont donc les soldats qui pâtissent de ces tergiversations, avec des combats désespéré et sanglant dans les tranchées jalonnant la colline, pilonné par les chinois. Lewis Milestone, spécialiste du film de guerre (on lui doit la remarquable première version de "A l'ouest rien de nouveau") film au plus près ses hommes à bout de forces et plongés en plein doute, à coup de travelling le long des tranchées où des plan surplombant les collines avec des soldats au aguets où en déroute sous les coups de feu incessants. L'autre point intéressant est de montrer l'impact sur la psychologie des soldats de ce contexte de combat tout particulier où ils se sentent abandonnés par leur hiérarchie, notamment le personnage Woody Strode essayant de se dérober au combat sans succès. L'excellente idée (reprise plus tard par Aldrich dans "Trop tard pour les héros") et de la torture psychologique infligée par les chinois qui tourmentent leur ennemis et les font douter avec un soldat les harcelant sans cesse par l'intermiédiaire d'un haut parleur pour faire vaciller leur détermination. Gregory Peck est remarquable en chef essayant de maintenir le cap malgré la déroute, masquant le plus qu'il peut les interrogations que suscitent en lui les ordres insensés de sa hiérarchie le forçant à poursuivre un combat perdu d'avance. Dans les seconds rôle on retrouve également de tout jeunes Martin Landau ou George Peppard. Très solide film de guerre. 4,5/6
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cinephage
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Re: Notez les films naphtas - Mai 2010

Message par cinephage »

Profondo Rosso a écrit : La Gloire et la Peur de Lewis Milestone (1959)

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Corée 1953. Les Américains et les Chinois tentent d'établir une ligne de démarcation afin de signer l'armistice. Mais les militaires chinois occupent une colline où doit passer la ligne de démarcation. Aussitôt les Américains déclarent la guerre aux Chinois.
(...) Lewis Milestone, spécialiste du film de guerre (on lui doit la remarquable première version de "A l'ouest rien de nouveau") film au plus près ses hommes à bout de forces et plongés en plein doute, à coup de travelling le long des tranchées où des plan surplombant les collines avec des soldats au aguets où en déroute sous les coups de feu incessants.(...) 4,5/6
J'avais pour ma part encore plus apprécié cet excellent film de guerre, aux images et aux situations entêtantes : dans la catégorie "film de guerre", Pork Chop Hill figure parmi ce qui se fait de meilleur.
I love movies from the creation of cinema—from single-shot silent films, to serialized films in the teens, Fritz Lang, and a million others through the twenties—basically, I have a love for cinema through all the decades, from all over the world, from the highbrow to the lowbrow. - David Robert Mitchell
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Ann Harding
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Re: Lewis Milestone (1895-1980)

Message par Ann Harding »

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Hallelujah I'm a Bum! (1933, L. Milestone) avec Al Jolson, Madge Evans, Frank Morgan, Harry Langdon et Chester Conklin

Bumper (A. Jolson) a élu domicile dans Central Park. Il y règne en roi et est même l'ami du maire de New York (F. Morgan). Un jour, il sauve du suicide June (M. Evans), la maîtresse de celui-ci. Elle a perdu la mémoire...

Ce film est un OVNI dans la production de l'époque. Une comédie musicale sociale où les héros sont des clochards et des miséreux. Mais loin d'être malheureux de leurs sorts, il chante le bonheur d'être sans le sou, sans travail et sans contraintes. Al Jolson campe Bumper, 'le roi de Central Park', un sans-logis joyeux et quelque peu anar. Il est entouré de son ami noir Acorn et de Egghead (H. Langdon) le balayeur municipal aux idées marxistes. Le film est étonnant à plus d'un titre. D'abord la musique et les lyrics signés Richard Rogers et Lorenz Hart ont une forme de dialogue rythmés et rimés. Jolson se taille la part du lion avec un grand nombre de chansons, en particulier la chanson-titre: 'Hallelujah, I'm a bum'. Milestone filme tout cela avec beaucoup de maestria en utilisant habilement une grue. Mais, c'est le ton du film qui m'a vraiment surprise. Le scénariste Ben Hecht s'attaque aux méfaits de l'argent qui corrompt les âmes. Le film est un hymne à ceux qui n'ont rien et ne cherchent pas à avoir plus. Le personnage de Madge Evans va servir de révélateur. Après avoir tenté de se suicider, ayant perdu la mémoire, elle devient l'amie de Bumper. Celui-ci décide soudain de s'intégrer dans cette société qu'il rejetait en travaillant dans une banque. Le film est finalement assez nostalgique. Et on retrouve à l'affiche deux grands comiques muets, alors en perte de vitesse, Harry Langdon et Chester Conklin. Ce film me semble être une des plus grandes réussites de Milestone. Le film est disponible en DVD en Z1 US avec STF.
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Ann Harding
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Re: Lewis Milestone (1895-1980)

Message par Ann Harding »

Image L. Wolheim et T. Meighan

The Racket (1928, L. Milestone) avec Thomas Meighan, Louis Wolheim et Marie Prevost

Chicago, Nick Scarsi (L. Wolheim) règne sur le marché de l'alcool clandestin. Il a des appuis nombreux parmi la police et les politiciens. Mais, un policier intègre, le capitaine James McQuigg (T. Meighan) va essayer de l'arrêter...

Ce film muet de Lewis Milestone peut être considéré comme un des tous premiers films noirs. C'est d'ailleurs en revoyant The Big Heat (1953, F. Lang) qui développe des thématiques assez similaires que j'ai eu envie de revoir The Racket. Le film a été produit par Howard Hughes et a disparu de la circulation pendant près de 80 ans avant d'être restauré en 2004. Milestone utilise une adaptation d'une pièce de Broadway où E.G. Robinson avait brillé dans le rôle de Nick Scarsi. Mais, pour le film, le gangster est joué par l'excellent Louis Wolheim qui apporte une touche d'ironie à son gangster sans foi ni loi. Ses échanges avec Thomas Meighan ressemble à un jeu du chat et de la souris. Il l'invite même à diner avec ses amis gangsters ; une petite soirée qui vire rapidement au règlement de comptes avec le gang adverse. Thomas Meighan apporte sa décontraction et son flegme dans le rôle de McQuigg. Il ne se fait guère d'illusions sur la corruption au sein de la police et parmi les édiles de Chicago. Il ira néanmoins jusqu'au bout. Il en vient lui aussi à utiliser des méthodes légèrement hors la loi pour venir à bout de son adversaire. En effet, Scarsi est tellement bien protégé que même lorsqu'il commet un meurtre, son avocat l'attend déjà au poste de police avec un Habeas Corpus pour le faire relâcher. McQuigg va lui aussi biaiser et utiliser habilement la grappe de journalistes qui passent la journée au poste de police pour répandre certaines informations. Le film est une grande réussite grace à ses excellents interprètes très typés dans tous leurs rôles: les journaleux gratte-papiers qui picolent en douce, les flics et les gangsters au faciès peu engageant. Milestone sait rendre l'atmosphère glauque du Chicago de la prohibition avec humour. Le film est très bien mis en scène en particulier les scènes d'action où s'affrontent les gangs. La dernière partie se déroule entièrement dans un commissariat et cette unité de lieu rappelle The Front Page que Milestone mettra en scène quelques années plus tard. Une belle réussite.
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Re: Lewis Milestone (1895-1980)

Message par allen john »

Vu et apprécié, hier soir: Two arabian Knights (1927), de Milestone. Une belle rareté, dont la copie prouve qu'il était temps de le sauver, de nombreuses instances de début de décomposition nous gâchant (un peu) le plaisir pris à cette joyeuse comédie...

http://allenjohn.over-blog.com/article- ... 91965.html
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Re: Lewis Milestone (1895-1980)

Message par someone1600 »

J'ai vu ce film a TCM et mon enregistrement s'est arreté au moins 20 min avant la fin du film alors que j'avais programmé pour la durée que notait le site de TCM... :(
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Re: Lewis Milestone (1895-1980)

Message par allen john »

Mutiny on the Bounty (Lewis Milestone, 1962)

C'est curieux comme certains tournages, certes pharaoniques, finissent par donner des films maudits, à la réputation ternie à tout jamais: on pense à Cleopatra, qualifié un peu partout de désastre, en particulier par ceux qui ne l'ont pas vu, ou qui en ont un vague souvenir, et puis il y a ce film. J'avoue d'entrée que la meilleure version de cette histoire reste le film MGM de 1935, réalisé par un Frank Lloyd en grande forme (il avait ses moments d'égarement, lui aussi), avec Clark Gable en Fletcher Christian, et surtout l'immense Charles Laughton en Capitaine Bligh. Le parti-pris romantique, assimilable à la guerre d'indépendance, avec Bligh en représentant de l'Angleterre et les principaux mutins interprétés par des Américains (Gable, mais aussi Franchot Tone), faisait de la mutinerie un idéal, et de la fuite à Pitcairn une sorte de nouveau Mayflower... Rien de tout ça avec ce Bounty tragique.

Si on veut analyser les raisons du désamour total vis-à-vis de ce film, on peut accuser la longueur (182 mn actuellement, dont 15 de prologue, entr'acte, et intermède musicaux, mais une version antérieure ajoutait un prologue et un épilogue qui devaient porter la durée à 192 mn), le fait que Milestone soit en bout de course, et manque parfois singulièrement d'imagination; les discussions entre les marins sensées clarifier l'histoire finissent par irriter, avec leur didactisme lourd; Le fait enfin que l'intermède Tahitien soit parfois trop long. Pour le reste, le film trahit moins l'histoire que l'autre, avec un Christian-Brando qui ne profite jamais de sa décision de révolte, trop marqué par son propre acte de trahison. On est assez près de l'histoire, dans laquelle les mutins ont effectivement massacrés les gens qu'ils avaient ramené de Tahiti avant de s'entretuer. La fin possède une certaine beauté ironique, bien dans l'air du temps (Cleopatra, Lawrence of Arabia).

Bon, franchement, si ce n'est pas le meilleur, on peut quand même y trouver d'excellents moments, et même, mais oui, des traits d'humour. Bligh, interprété par Trevor Howard gagne une humanité ambigue, mais l'acteur sait y faire pour rendre le personnage odieux. Je suis plus réservé avec le personnage de Brando, dont la transformation m'apparait trop rapide, même si l'acteur a fait des efforts, notamment avec son accent Anglais (Contrairement à Gable!!). De toute façon je suis toujours réservé face à Brando! Et puis le format est propice à de superbes plans de navigation: le film a au moins un certain souffle, après tout!

http://allenjohn.over-blog.com/article- ... 93907.html
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Re: Lewis Milestone (1895-1980)

Message par Bugsy Siegel »

Ann Harding a écrit :The Racket (1928, L. Milestone) avec Thomas Meighan, Louis Wolheim et Marie Prevost
Je me suis dit : j'espère que c'est un film Warner, et non ! C'est un film Paramount donc encore un muet que nous ne verrons probablement jamais en DVD.
on faisait queue devant la porte des WC comme au ciné lors du passage de l'Atlantide à l'écran. Jean Ray, Hôtel de Famille, 1922
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Cathy
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Re: Lewis Milestone (1895-1980)

Message par Cathy »

Je reposte ici la critique d'un des films qui est un de mes gros chocs de ces derniers mois
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L'Ange des Ténèbres, Edge of Dakrness (1943) - Lewis Milestone

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La révolte des habitants d'un petit village norvégien contre l'occupant nazi.


Vu la date de sortie du film et le message final, nous sommes clairement dans le film de propagande et de résistance, mais le film n'en demeure pas moins un chef d'oeuvre ! Milestone réussit à faire à travers un film de guerre, un portrait d'une communauté de pêcheurs, même s'ils sont commandés par un résistant chef et sa fiancée, chaque villageois est la vedette du film. Le film est prenant, car il montre aussi la peur de l'occupant (sans doute pour motiver les troupes), mais finalement la fin de Koenig le commandant de la section annonce celle d'Hitler deux ans plus tard. Le film dénonce l'occupation des nazis, mais montre aussi le quotidien de ce village qui semble vivre presque normalement, les relations équivoques qui peuvent naître entre occupés et occupant, comme cette histoire tendre entre la gérante de l'hôtel et un allemand qui semble retrouver à travers elle sa défunte femme, il y a aussi ces collabos clairement montrés même si certains naturellement vont se repentir, ces peureux, ces courageux, ces résignés à l'occupation qu'un évènement peut faire basculer d'un côté ou de l'autre. Chaque habitant semble dépeint que ce soit le pêcheur norvégien ou le soldat allemand, conscient que la révolte peut survenir à tout moment.

La scène la plus forte est certainement celle de cet homme qui vient refuser sa maison aux allemands et voit toutes ses affaires brûlées devant les habitants qui entonnent l'hymne norvégien. Le film est en flashback, on sait que les allemands et les villageois ont péri dans ce village. Et là encore pour le message d'effort de guerre, c'est un officier allemand qui dicte un rapport de ce qui s'est passé, dépeignant le courage des uns et autres. Durant la première partie nous avons une évocation de la vie de ces pêcheurs, et suite au viol de l'héroîne, le déclenchement de la rébellion et ces scènes de carnage immenses censés provoquer un choc sur le spectateur de l'époque, mais qui sont encore très fortes actuellement. Alors oui, film de propagande, mais magistralement mené par Errol Flynn qui bien que héros du film ne paraît qu'un personnage parmi tant d'autre, Ann Sheridan en meneuse de combats, Walter Huston père plein de dignité et de force, Nancy Coleman partagée entre sa Pologne natale et le destin des norvégiens, ou encore Judith Anderson.
Milestone nous gratifie de superbes gros plans, mais aussi de scènes d'action rondement menées. La scène de l'église est elle aussi magistrale avec tous ces habitants évoquant leur volonté de résistance, tout en surveillant les arrivées possibles des allemands, évoquant chacun leur accord avec la rebellion ou pas, avec aussi ce pasteur qui est partagé entre la voix de la paix et celle plus patriotique. Le film est prenant, rondement mené, et montre une résistance méconnue celle des norvégiens contre les occupants allemands.

Une superbe découverte en tout cas ! Et clairement un chef d'oeuvre méconnu !
feb
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Re: Lewis Milestone (1895-1980)

Message par feb »

La Gloire et la Peur (Pork Chop Hill) - Lewis Milestone (1959)
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Un bataillon américain doit s'emparer d'une colline, la fameuse "Pork Chop Hill" et tenter de la conserver malgré les assauts des soldats chinois, le silence radio des subalternes et l'absence de renforts. Sans aucune valeur stratégique, Pork Chop Hill est simplement une zone de combat qui est au centre des négociations sino-américaine : l'armistice est sur le point d'être signé et aucun des 2 camps ne veut abandonner ce lopin de terre à l'ennemi ou envoyer des renforts, synonyme de faiblesse ou de provocation. Les soldats américains sont donc obligés de partir à l'assaut de cette colline sans savoir combien de temps ils vont pouvoir tenir...

Lewis Milestone nous plonge dans cette bataille inspirée de faits réels et accompagne réellement l'action : l'ascension de la colline par le bataillon tenu par le Lieutenant Joe Clemons (excellent Gregory Peck), le "saute-mouton" incessant entre les différents trous d'obus, l'accalmie dès qu'une tranchée est atteinte. Les hommes ne s'arrêtent jamais et Milestone semble suivre le même principe puisqu'il fait évoluer sa caméra constamment pour mieux placer le spectateur dans le conflit : longs travellings latéraux lors du début de l'ascension de la colline, caméra mobile qui suit les hommes à couvert derrière les sacs de sables ou dans les tranchées, plans sur les visages marqués par la fatigue ou le désespoir, etc. A cette mobilité de la caméra, Milestone associe un montage très lisible et dynamique qui accentue cette impression de mouvement vers le haut de la colline comme si le réalisateur nous faisait comprendre que le repli est impossible et que la seule issue possible est l'affrontement avec les chinois au sommet de Pork Chop.
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En plus de la fatigue physique et de la difficulté à se déplacer sur cette colline, les hommes du Lieutenant Clemons doivent également subir la fatigue morale et psychologique sous plusieurs formes : les pertes humaines augmentent avec la progression, les renforts n'arrivent jamais, les supérieurs semblent les oublier et un soldat chinois les harcèle, via des hauts parleurs, de messages destinés à les déstabiliser. Milestone ne montre pas la mort sous sa forme la plus crue (pas de corps criblés de balles, de corps déchiquetés) mais cherche plutôt à nous faire ressentir ce que les soldats peuvent justement ressentir sur le champ de bataille : le refus de mourir pour la Corée et pour ce lopin de terre sans intérêt, la sensation d'être abandonné par ses supérieurs, la mort qui surprend les hommes lors d'un moment de répit. Cette sensation atteint son paroxysme lors de la séquence finale où les hommes sont encerclés par les soldats chinois après avoir atteint le sommet....
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Lewis Milestone offre, avec Pork Chop Hill, un film de guerre prenant, à la très belle photo N&B (le DVD MGM propose malheureusement un master 1.85 au format 4/3 qui ne permet pas d'en profiter au maximum et qui présente pas mal de points blancs et de lignes verticales), sans temps morts, dont la tension monte crescendo avec l'avancée des soldats sur cette colline et où Gregory Peck offre une interprétation solide dans le rôle de ce lieutenant devant suivre les ordres malgré le cout en vies humaines. Le film de Milestone est un film important car prenant place dans un conflit peu représenté au cinéma et on peut dire que Pork Chop Hill est au film de guerre sur la Corée ce que Go tell the Spartans (1978) est au film de guerre sur le Vietnam : une demonstration de la conne**** humaine en temps de guerre et du sacrifice de ces hommes sur le champ de bataille.
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Lewis Milestone sur le tournage
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Rick Blaine
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Re: Lewis Milestone (1895-1980)

Message par Rick Blaine »

Bon, je ne vais définitivement pas tarder à le regarder celui là! :mrgreen:
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Re: Lewis Milestone (1895-1980)

Message par Jeremy Fox »

Rick Blaine a écrit :Bon, je ne vais définitivement pas tarder à le regarder celui là! :mrgreen:
Ca fait envie hein ? Les trois images côte à côte sont des captures du DVD ?
feb
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Re: Lewis Milestone (1895-1980)

Message par feb »

Jeremy Fox a écrit :
Rick Blaine a écrit :Bon, je ne vais définitivement pas tarder à le regarder celui là! :mrgreen:
Ca fait envie hein ? Les trois images côte à côte sont des captures du DVD ?
Non malheureusement j'ai trouvé ces captures sur le net car le DVD est au format 1.85 4/3.
EDIT : j'ai réalisé quelques captures du film : http://www.dvdclassik.com/forum/viewtop ... 5#p2100645
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Re: Lewis Milestone (1895-1980)

Message par Julien Léonard »

Très content de lire l'avis de feb ! Intéressant point de vue.

C'est l'un de mes films de guerre préférés (top 20 sans problème), et l'oeuvre qui m'a fait définitivement apprécier Lewis Milestone. C'était déjà le cas sur les extraordinaires A l'ouest rien de nouveau (celui-là est juste gigantesque !) et L'ange des ténèbres, mais La gloire et la peur m'a prouvé qu'il pouvait se renouveler jusqu'à la fin de sa carrière et montrer n'importe quel conflit (WW 1 côté allemand, WW 2 en Norvège, guerre de Corée) avec le même talent exceptionnel.

J'ai peu de films de lui en DVD et blu-rays (juste 6), mais je l'aime énormément. :wink:

Quant au DVD, comme le dit feb, il n’est pas génial, mais il est bien géré, avec un beau noir et blanc et de bons contrastes. Dommage pour le format vidéo 4/3 (format cinéma respecté par contre).
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feb
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Re: Lewis Milestone (1895-1980)

Message par feb »

Rain - Lewis Milestone (1932)
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Un bateau est contraint de faire escale sur la petite ile du Pacifique Sud, Pago Pago, en raison d'une possible épidémie de choléra à son bord. Parmi les passagers se trouvent le missionaire Alfred Davidson (Walter Huston) et sa femme (Beulah Bondi), le Dr MacPhail (Matt Moore) et sa femme ainsi que la prostituée Sadie Thomson (Joan Crawford) qui fuit San Francisco pour rejoindre Apia, capitale des Samoa. Ils se retrouvent tous hébergés dans le petit hotel de Joe Horn (Guy Kibbee) où Sadie passe son temps à boire et à danser avec les Marines postés sur l'ile au grand désespoir de Davidson. Très rapidement, l'homme décide "d'affronter" la jeune femme en lui demandant de revenir dans le rang, en s'appuyant sur sa foi inébranlable en Dieu mais il fait face au refus de Sadie.

Vexé et décidé à faire revenir la femme dans le droit chemin, il réussit à convaincre le gouverneur de l'île de la renvoyer à San Francisco afin de purger la peine de prison à laquelle elle tente d'échapper (pour un crime que nous ne connaitrons pas). Le sergent O'Hara (William Gargan), amoureux de Sadie dès son arrivée, lui propose de quitter l'île pour rejoindre Sydney mais il ne peut que constater le pouvoir du message de l'homme de Dieu sur Sadie qui s'est transformée physiquement et a accepté de repartir à San Francisco pour purger sa peine...


Seconde adaptation de la nouvelle Rain (Sadie Thomson) (écrite par W. Somerset Maugham à qui l'on doit entre autres Of Human Bondage, The Painted Veil ou The letter), après l'excellent Sadie Thomson de Raoul Walsh avec Gloria Swanson, cette version réalisée par Lewis Milestone est une pure réussite qui repose sur la prestation de Joan Crawford, celle de Walter Huston et enfin sur la maitrise technique du réalisateur. Rain a été un échec lors de sortie en octobre 1932 et a affecté l'actrice qui, jusque là, n'avait jamais connu un tel revers au sein de la MGM. Prêtée à la United Artists pour cet unique film, Joan Crawford a été fortement critiquée par la presse et par ses fans qui n'ont pas accepté de découvrir leur actrice dans le personnage de la prostituée Sadie Thomson. Mais si on regarde le film aujourd'hui en prenant soin de se pencher sur la carrière passée et future de Crawford, on se rend compte que le film de Milestone est un tournant dans sa filmograhie et que ce rôle est un des meilleurs qui lui a été donné de jouer aux cotés de ceux de Mildred Pierce, de Crystal Allen dans The Women ou de Vienna dans Johnny Guitar.

Le film n'a pas commencé depuis 10 minutes que Milestone nous présente Sadie Thomson tel qu'on pouvait l'imaginer...
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...maquillage lourd, clope au bord des lèvres, tenue légère et un "Hey Boys" qui caractérise parfaitement le personnage. Joan Crawford casse l'image qu'elle avait commencée à se forger au sein de la MGM en se plongeant dans le personnage de cette prostituée qui fuit un passé difficile - et dont on connaitra rien durant le film - qui ne cherche qu'à profiter de la vie et des hommes suivant le principe du "live and let live". En face de l'actrice se dresse un Walter Huston menaçant et qui, sous couvert de la tache que lui a confié le Seigneur, représente la civilisation, une civilisation qui affronte les sauvages dont Sadie fait partie : ceux dont la vie n'est pas guidée par Dieu, ceux qui vivent dans le péché et qui ne se nourrissent pas "du pain de l'esprit" et qui ne boivent pas "les eaux de la vie éternelle". Davidson va trouver en Sadie Thomson un être égaré qu'il faut remettre sur le droit chemin et qui doit être puni pour ses péchés afin de se voir offrir les clés du Salut : tel un guide spirituel, il va montrer à Sadie comment racheter son âme qu'elle a vendue au Mal et va transformer la jeune femme en la faisant culpabiliser.
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Au fur et à mesure, le révérend augmente sa pression envers Sadie, son travail de réhabilitation en devient obsessionnel et la jeune femme, qui se montre méprisante au début, se transforme peu à peu jusqu'au coup de grâce représenté par la dénonciation auprès du gouverneur; la jeune femme est bloquée, prise au piège et ne peut que subir ses assauts qui vont définitivement la faire basculer de l'autre coté. La transformation psychologique de Sadie s'accompagne d'une transformation physique : la prostituée vulgaire et enjouée laisse place à une femme nature où maquillage et tenue légère n'existent plus et qui accepte d'être jugée pour ses péchés.
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Rain repose donc sur cet affrontement continu entre Sadie Thomson et Alfred Davidson qui profite du jeu remarquable de ses 2 interprètes mais si le film fonctionne aussi bien c'est aussi grâce au travail d'un 3ème élément en la personne de Lewis Milestone qui démontre ici sa maitrise technique et son ingéniosité de la mise en scène. Le réalisateur démontre un sens du cadre tout bonnement incroyable pour un film de 1932 et il réussit à placer, dans une unité de lieu aux dimensions réduites (le baraquement qui fait office d'hôtel), des mouvements de caméra qui semblent passer aux travers des murs et s'affranchir des plafonds. Le film n'est jamais statique, ne s'apparente à aucun moment à du théâtre filmé et le dynamisme insufflé par le réalisateur apporte plus de force à l'image et aux thèmes abordés par le film :

- rotation autour du gramophone pour accompagner Sadie et son partenaire de danse,
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- long plan séquence où la caméra précède le couple Sadie/O'Hara, pour s'arrêter, puis accompagner en travelling latéral avant de faire un tour derrière un poteau afin de la filmer sur la terrasse (il faut le voir en mouvement),
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- utilisation de plongée, contre-plongée ou de gros travelings pour donner encore plus de force à l'image,
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Milestone s'appuie également sur un magnifique travail de Oliver T. Marsh dont la photographie N&B, magnifique, (dommage que le DVD Wild Side ne propose pas une restauration digne de cette photo) se marie parfaitement aux décors naturels de l'île. Cette photo est également un point important lors des close-up sur l'actrice et lorsque le personnage de Sadie Thomson se transforme et révèle une Joan Crawford naturelle et dont le visage capte parfaitement l'éclairage mis en place par Marsh.
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Il faut également mettre en avant l'utilisation intelligente de la pluie qui oblige les personnages à rester dans l'hôtel et qui ne cède sa place au soleil qu'à la toute fin du film lors du matin du départ de Sadie pour San Francisco...
Spoiler (cliquez pour afficher)
...Sadie qui est redevenue elle-même après que le corps du missionnaire ait été retrouvé sur la plage. On comprend que l'homme s'est égorgé pour avoir, la nuit précédente, cédé au péché en rentrant dans la chambre de Sadie. Cette dernière est donc libre de quitter l'île au bras de O'Hara pour refaire sa vie en Australie.
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La nouvelle apparition de Sadie répond alors à celle du début du film et n'est que le résultat de la rencontre entre la femme et le missionnaire.
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Rain est un film important dans la carrière de Joan Crawford car il lui offre un rôle taillé sur mesure où elle peut s'exprimer et également parce qu'il est dirigé par un réalisateur qui maitrise parfaitement sa caméra et dont le sens de la mise en scène (que l'on retrouve dans des films comme All Quiet on the Western Front, Edge of Darkness ou Pork Chop Hill) sert idéalement ce film qui mérite clairement une vraie restauration...
Dernière modification par feb le 29 janv. 12, 19:17, modifié 1 fois.
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