Les vedettes masculines des films musicaux

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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Music Man
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Zeki Müren

Message par Music Man »

Puisque la Turquie fera peut-être un jour partie de la communauté européenne, apprenons à connaître ce pays en dehors des merveilles du palais de Topkapi, de la mosquée bleue et de la basilique Sainte Sophie. Quel fut le plus célèbre chanteur turc du 20ème siècle ? Zeki Müren, et il joua également dans 18 films entre 1953 et 1971. Chanteur légendaire à la voix d’or qui peut franchement étonner quand on regarde ses pochettes de disques des années 70 : est-ce un travesti, une femme ? Incontestablement un curieux personnage, presque unanimement révéré dans un pays qu’on aurait pu imaginer plus conservateur et totalement réfractaire à une ambiguïté ainsi affichée.
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Né en 1931 à Bursa, dans une famille bourgeoise, le jeune Zeki , diplômé de l’école des beaux arts peut s’enorgueillir d’avoir étudié auprès des plus grands artistes du pays comme Serif Içli, célèbre compositeur. Très vite, il se fait engager par la radio d’Istambul, et chante dans les plus luxueux night clubs de la capitale. Son répertoire est essentiellement inspiré des chansons folkloriques traditionnelles et de la musique orientale, avec également une solide influence européenne. Il interprète aussi bien des adaptations de Farid El Atrache « le Tino Rossi oriental » que des tangos ou même des traductions de chansons françaises. Son impeccable diction et la beauté de sa voix vont très vite en faire l’idole du pays, et spécialement du public féminin. En 1955, il remporte son premier disque d’or, et partir de là sera souvent élu meilleur chanteur de l’année.
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Alors qu’il triomphe dans les casinos, Zeki débute au cinéma dans des mélos musicaux similaires à ceux que tournaient à l’époque ses confrères du cinéma égyptien. C’est toujours la triste romance du chanteur pauvre amoureux de la riche jeune fille, promise à un autre. Dans sa dernière chanson (1955), Belgin Doruk (ravissante actrice rappelant Ann Blyth) quitte l'hopital pour asister à son show : elle meurt dans les coulisses en entendant son idole! Ce n’est pas un grand acteur mais sa voix et ses chansons (dont il est l’auteur pour la plupart) attirent dans les salles de nombreux spectateurs. Ni sa voix ni ses chansons ne m’ont emballé dans le disque brisé, son film le plus connu, et l’un des rares ressorti en DVD. En revanche, quand on regarde certains extraits de ses autres films, ses talents de chanteur ressortent davantage.
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Ses partenaires à l’écran sont les plus grandes vedettes du moment : les ravissantes Belgin Doruk (dans la dernière chanson -déjà citée- mais aussi le disque brisé 1959 et les pavés d’Istambul 1964) ou la blonde Filiz Akin (la noix de coco 1967).
En somme tout ce qu’il y a de plus conventionnel, si ce n’est peut être les paupières un peu trop bistrées ou les lèvres redessinées à la Valentino et la mise en plis impeccable.
En revanche, sur scène, le chanteur va petit à petit donner libre cours à sa fantaisie en adoptant un look de plus en plus kitsch, et des tenues qui s’apparentent davantage à des robes qu’à des costumes.
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Austin Powers ? non Zeki Müren

Le chanteur qui supervise et conçoit personnellement les décors de ses spectacles explique que ses tenues de scène sont inspirées de la Rome antique et des gladiateurs. On ne peut s’empêcher de songer à l’extravagant pianiste Liberace ou au cabaretiste Michou quand on voit Zeki, ses lunettes pailletées et ses incroyables toges en lamé qui auraient fait mourir d’envie Dalida. Dans sa revue, il apparaît sur une immense balançoire pendant que de la neige artificielle tombe du plafond.
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Un maquillage de plus en plus sophistiqué et de superbes coiffures vont finalement lui donner une apparence tellement féminine, qu’il n’a même plus l’air d’un travesti mais d’une vraie femme sur ses pochettes de disques. Mais cela n’a nullement enrayé le succès de l’artiste qui a toujours été respecté avec la même ferveur. Il était devenu pour les foules « le soleil de la nation » ou le « pacha » .
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Cela peut paraître paradoxal dans un pays où beaucoup de femmes sont voilées et où le parti islamiste a remporté une victoire électorale écrasante l’an dernier. Mais il existe une vieille tradition ottomane des « zenne », saltimbanques travestis chargés de divertir les foules, que Zeki puis d’autres artistes n’ont fait que poursuivre. En outre, Zeki Müren n’a jamais parlé jamais parlé publiquement de son homosexualité même s’il s’affichait ouvertement avec son compagnon et donnait de lui une image extrêmement camp.
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Anne Baxter en fin de carrière ? non Zeki Müren

Dans les années 80, Zeki Müren, connaît de tels problèmes de poids (130 kgs), qu’il ne se fait plus filmer qu’en très gros plan lors de ses shows à la télé. Miné par le diabète, il préfère vivre en reclus dans sa somptueuse propriété de Bodrum (terre natale de la déesse Hermaphrodite), prostré sur son trone, et fuir les paparazzis. Néanmoins, il accepte en 1996 de sortir de sa retraite pour recevoir un prix honorifique lors d’un gala. L’émotion est si forte que Zeki très affaibli décède dans les coulisses.
Un drame pour le pays. Son enterrement sera suivi par des milliers de personnes. Sa maison a été transformée en musée et a accueilli 200 000 visiteurs depuis son ouverture.
Pour découvrir la voix de Zeki Müren, sur youtube :
- un extrait d’un de ses films avec la belle Filiz Akin, où Zeki Müren chante fort bien :

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- -et pour le fun, son étrange version de Ne me quitte pas de Brel (beni terketme), un peu massacrée par une orchestration des plus « cheap ». J’aime pas trop…
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Dernière modification par Music Man le 20 avr. 08, 18:47, modifié 1 fois.
Music Man
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Freddy Quinn

Message par Music Man »

Le chanteur Freddy Quinn fut une des plus grandes gloires de la chanson allemande d’après guerre. Outre sa riche voix mélodieuse de baryton, et ses chansons nostalgiques évoquant de lointaines contrées et le mal du pays, le mythe de « Freddy » reposait également sur une image de baroudeur solitaire bien relayée par les médias, à la ville puis à l’écran. Au cinéma, il fut le héros d’une série de films d’aventures de série B portant son prénom (attention, ce n’est pas le célèbre ogre griffu incarné par Robert Englund), où tel Tintin, on le retrouvait tantôt au Brésil, tantôt au Canada où dans les mauvais quartiers de Hambourg. Toujours seul et fuyant vers de nouveaux horizons après avoir solutionné les problèmes des villageois du coin, tel un cow-boy d’un serial pour public familial. Le tout ponctué de chansons fort bien mises en valeur par sa chaude voix.
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Dans la vie de Freddy, il est difficile de discerner la légende de la réalité, tant les péripéties de son enfance furent relayées dans les journaux : né en 1931en Autriche, d’un papa américain et d’une mère journaliste, le petit garçon est « kidnappé » par son père après la séparation de ses parents et emmené aux USA. Après maintes difficultés sa maman va parvenir à le localiser et à le ramener en Europe : mais le courant ne passe pas entre Freddy et son beau père. Aussi, à 14 ans, il fuit aux States, avec des GI, afin de retrouver son papa…pour finir par apprendre que ce dernier est décédé depuis peu. Le jeune homme vivote en travaillant dans des cirques et en faisant des acrobaties et du trapèze. Il se rend également au Maroc et en Algérie où il chante dans différents petits cabarets pour distraire la légion étrangère. Complètement paumé, il s’enfonce dans la spirale de l’alcool. De retour à Hambourg, il est remarqué dans une taverne par des producteurs de la firme Polydor.
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L’immense succès remporté par son premier disque (qui bat tous les records de vente en Allemagne), une adaptation de « Memories are made of this » de Dean Martin, en moins swing mais en plus nostalgique le rend immédiatement célèbre. Très vite rassuré par son nouveau statut de vedette, le jeune chanteur abandonne sa vie dissolue pour se consacrer pleinement à son métier. En 1956, il étonne en enregistrant un rock n’roll (le premier en allemand ?) lors du tout premier concours eurovision de la chanson. Il aura davantage de succès avec son adaptation de Day O d’Harry Belafonte qui triomphe en Allemagne et même en France (où ses disques sortiront seulement sous le prénom de Freddy) où il chante la chanson avec un curieux accent antillais!

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Très vite, Freddy parait en guest star dans des films folkloriques : en dépit de ses courtes apparitions, les posters insistent nettement sur sa présence au générique. Il semble un peu timide et mal à l’aise dans la grande chance (1957), heimatfilm par excellence, où il fredonne un calypso dans un petit troquet. En 1959, Freddy décroche la tête d’affiche de « La guitare et la mer » agréable petit film qui plante le décor de l’univers du globe trotter solitaire : en dépit des deux femmes qui l’aiment en secret, Freddy préfère reprendre le large, avec le petit vagabond qui l’accompagne, car son univers n’a pas d’horizon, comme dans la belle chanson titre (reprise chez nous par les compagnons de la chanson).
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Freddy et la mélodie de la nuit (1960), dans lequel Freddy tient bien son rôle de chauffeur de taxi, possède un charme réel car il donne une peinture un peu glauque mais assez fascinante du Berlin nocturne. Grethe Weiser en vieille marchande de hot dogs est particulièrement émouvante. Les films suivants, bâtis sur un budget plus confortable proposent au public allemand quelques moments d’évasion : les montagnes rocheuses dans Freddy chante sous les étoiles (1960) ou les plages brésiliennes de Longue est la route (1960).
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Si les intrigues sont naïves au possible, on se délecte de ce Brésil d’opérette où Freddy, chaussé de tong et coiffé d’un chapeau de paille vocalise dans un bus bondé avec les autochtones. Plus tard dans le film, tel un Big Jim musclé, il chante une marche entraînante dans sa jeep qui s’enfonce dans la brousse. C’est fort dépaysant et amusant, si on a un peu de second degré. Les chansons sont souvent d’excellentes factures.
Coté atmosphère, on peut préférer celle de la verte et mystérieuse Erin cadre de « Seul le vent », où Freddy se retrouve confronté à des escrocs sans scrupules et chante dans la lande une mélodie prenante de toute beauté.
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Je laisse à d’autre la Polynésie carte postale de Freddy et la chanson des mers du sud (1962), musical de marins à l’allemande, où un collier de fleurs autour du cou, Freddy chante « Aloa » aux belles tahitiennes et à la française Jacqueline Sassard.
Si les plus jolies actrices allemandes lui donnent la réplique d'Heidi Brühl à Sabina Sesselmann, on ne lui prêtera aucune idylle avec ces nymphettes.
Si la presse et des journaux comme Bravo s’étendent volontiers sur le passé tumultueux de la star, un voile opaque est dressé sur sa vie sentimentale. Comme dans ses films, Freddy est-il destiné à la solitude, et incapable de tisser des liens durables ? ou gay comme le dira la rumeur ? En vérité, le chanteur était tout bêtement marié avec une femme de 13 ans de plus que lui, ce qui ne faisait pas assez glamour pour l’époque, et ne collait pas avec son image, aussi son union ne sera dévoilée qu’en….2002 !
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En 1962, Freddy triomphe sur scène dans un musical de Lothar Olias dont l’air principal « junge kommt bald wieder » , très "heimat" dans l'esprit, devient son plus gros succès discographique. La pièce est adaptée à l’écran l’année suivante par Werner Jacobs (Freddy et le nouveau monde 1964) : à l’univers désormais familier de Freddy, toujours déchiré entre son attirance pour le grand large et ses racines, se greffe une parodie de la télé américaine. Freddy est hilarant dans son pastiche forcé d’Elvis Presley, et Jayne Mansfield (la starlette américaine en perdition) apporte également une touche comique très appréciable (son twist est à hurler de rire). Les chansons sont tout bonnement superbes (et pas seulement junge kommt wider) et les numéros fort bien filmés.
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Avec son expérience des chapiteaux, il était inévitable de trouver un jour Freddy dans un film de cirque : Freddy et le saut de la mort se laisse voir et est en tous les cas bien plus agréable que la tentative de western parodique « Freddy et la chanson de la prairie », carbone maladroit du film tchèque Limonade Joe (à noter la présence d’un autre sex symbol en détresse : Mamie Van Doren). à la fin du film, Freddy alias Black Joe exécute en même temps les deux méchants avec des deux pistolets : un à sa droite, l'autre à gauche.
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En 1965, Freddy enregistre blue spanish eyes de Bert Kempfert. Reprise par Al Martino aux USA (et plus récemment par Franck Michael), cette scie romantique remportera un triomphe international. Autre tube en 1966 : la version allemande de la chanson du film les Bérets verts, une marche martiale reprise chez nous par …Bernard Tapie !
Alors que l’Allemagne connaît une révolution culturelle et sociale comparable à notre mai 68, Freddy Quinn se range aux cotés des réacs et des anti protestataires avec sa chanson Wir, qui est un peu le pendant « nos universités » de Philippe Clay. Un succès qui va vite lui donner une image de has been et ne fera rien pour faire évoluer sa carrière qui va désormais stagner et se diriger plutôt vers la country et le folk (il fera aussi la bande son de la version allemande du dessin animé Lucky Luke)
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Concurrencé par le jeune chanteur Heino dont la voix lui ressemble beaucoup, Freddy va beaucoup chanter sur scène et jouer dans des musicals comme le roi et moi. Après avoir connu de gros soucis avec le fisc, puis fait une tournée d’adieu en 2006, le chanteur a apparemment tourné le dos à sa vie d’artiste (il aurait même déclaré que ses fans ne l’intéressent plus !). Le décès de sa compagne le mois dernier, l’a plongé dans une telle affliction, que le chanteur a du être hospitalisé. Souhaitons à Freddy Quinn, à coup sûr une des plus belles voix de la chanson germanique, un prompt rétablissement.

Sur Youtube, Freddy dans « Longue est la route » :

En Allemagne est ressorti un coffret Cd incluant ses rares enregistrements français, ses succès espagnols, ses chansons en anglais, italien, serbe, portugais et même afrikaans. Et un coffret DVD à un prix attractif (sans STF).
Dernière modification par Music Man le 24 sept. 08, 09:38, modifié 3 fois.
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Major Dundee
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Message par Major Dundee »

Salut Music Man, j'avoue être assez bluffé par tes connaissances !
Quel boulot :wink:
J'ai été voir ton index et je me demande si Tommy Steele n'a pas plutôt sa place en Grande Bretagne plus qu'aux USA.
D'autre part, cela fait trois fois que je clique sur Bobby Darin et trois fois que je plante l'ordi. Je vais aller cliquer sur quelqu'un d'autre pour voir. Cela doit être ma connection qui déconne.
J'ai vu que Peter Kraus était dans la liste et cela m'a rappelé des souvenirs, j'avais acheté un 45 EP dans les sixties (peut-être deux) et j'aimais bien. Je me demande s'il ne jouait pas dans un film qui s'appelait "Les frénétiques" mais c'est vraiment un très vague souvenir. Je ne me rappelle que du titre, même pas du réalisateur.
En tout cas bravo et bonne continuation.

Edit : Je viens d'aller cliquer sur Cab Calloway et replantage d'ordi :oops:
Charles Boyer (faisant la cour) à Michèle Morgan dans Maxime.

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Henri Jeanson
Tom Peeping
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Message par Tom Peeping »

Merci pour ton post sur Zeki Müren, Music Man ! Tu m'as fait découvrir un artiste qui pourrait bien détrôner Liberace dans mon panthéon personnel des Merveilleux ! :D

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... and Barbara Stanwyck feels the same way !

Pour continuer sur le cinéma de genre, visitez mon blog : http://sniffandpuff.blogspot.com/
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Message par Music Man »

Merci Major, c’est super sympa. Pour les liens, j'ai fait exprès de mettre des pièges pour faire planter les micros :wink: . Mais chez moi, ça fonctionne bien.
Tu as raison, Tommy Steele mérite d’être déplacé en Angleterre. C’est son pays et il y a tourné la majeure partie de ses films. J’avais bien aimé son personnage dans half of sixpence (1966) réalisé par George Sidney, un pro de la comédie musicale. Ce film bien oublié compte quelques très bons moments.
S’agissant de Peter Kraus, il aura droit aussi à son portrait. Il passait parfois dans les shows TV d’Albert Reisner (avec sa copine Lill Babs) et a eu son petit quart d’heure de gloire en France. Celui qu’on surnomma le Presley allemand était en fait bien plus proche d’un gentillet Frank Alamo, à tous points de vue (il anime toujours des shows sur la ZDF) et un artiste moins talentueux que Freddy Quinn. Les Frénétiques de Josef Von Baky est en effet et de loin son meilleur film. Alors que ses autres films demeurent des bluettes pour ados, le film de Von Baky a nettement plus d’intérêt. Il dépeint des jeunes issus de la grande bourgeoisie, frimeurs et dépravés qui entraînent dans une de leur soirée arrosée deux timides filles de milieux ouvriers. L’une d’entre elle (l’excellente Sabine Sinjen) se laisse séduire par Peter Kraus qui la filme pendant leur ébats pour ensuite se moquer d’elle devant ses copains. Elle se suicide. C’est un film noir très sombre, assez manichéen, mais de très bonne facture.
Quant à Zeki Müren, Tom Peeping, c’est vraiment un sacré personnage! On peut trouver ses films en VCD et ses CDs dans le quartier turc de Paris, non loin du quartier indien (rue de Metz).
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Major Dundee
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Message par Major Dundee »

Cà y est, les liens marchent et j'ai pu aller voir ton analyse du grand Bobby Darin, Content de voir qu'un connaisseur comme toi le place à sa juste valeur. Pour moi c'est vraiment un grand chanteur et ce quel que soit le genre abordé. 8)
Je suis content de voir que je ne me suis pas trompé pour "Les frénétiques" car j'avais un doute. Par contre j'ai très peu de souvenirs du film. J'aimerais bien le revoir. :wink:
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Henri Jeanson
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Message par Lylah Clare »

Hello Music Man :D

Gros retard pour ma réponse concernant John Payne, d'autant plus impardonnable que tu as un peu écrit cette bio pour moi :oops: (enfin, parce que j'avais évoqué John Payne...)
C'est vrai qu'il était tout à fait charmant, doté d'un physique très agréable bien que conventionnel. Je regrette de n'avoir vu aucun des musicals que tu as cités, mais il n'est pas évident d'y avoir accès :roll:

Parmi ses rôles non musicaux, je signale un film noir -en couleurs :wink: - l'excellent Slightly Scarlet (Deux rouquines dans la bagarre), d'Allan Dwan (1956), où il partage l'affiche avec les deux appétissantes rouquines du titre français, Rhonda Fleming et Arlene Dahl.


Quant à Zeki Müren, le personnage est en effet assez haut en couleurs ! La référence qu'a faite Tom Peeping à Liberace me paraît très bien vue.


Encore une fois, tu nous ébahis avec ta culture en la matière ! Merci ! :D
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Re: les vedettes masculines des films musicaux (Index en page 1)

Message par Music Man »

Il était temps de rendre un hommage au chanteur Henri Salvador sur ce topic (la nouvelle de son décès a déjà été commentée dans la rubrique musique). Ce grand artiste et compositeur de la variété française a aligné les tubes de la fin des années 40 au milieu des années 70, entre chansons de charme jazzy, pastiches et refrains comiques, et réussi un incroyable come-back à l’aube de ce siècle, comme on en voit peu dans le milieu du show business, avec l’album Chambre avec vue, vendu à plus d’un million d’exemplaires. Evidemment, on se focalisera plutôt sur sa carrière au cinéma qui n’a rien de remarquable. Dixit Henri Salvador « ce sont des cons ces cinéastes : jamais ils n’ont demandé à Salvador de tourner pour eux ».
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Né en 1917 en Guyane, Henri Salvador débarque en métropole dans les années 30, où il se fait remarquer dans de petites formations de jazz. Il est engagé par le grand Ray Ventura, à la tête du plus populaire orchestre de variété en France (tout va très bien Mme la Marquise, tiens tiens, tiens), et s’embarque avec eux pour une grande tournée en Amérique du Sud (Ray Venture étant juif, ne pouvait continuer sa carrière pendant l’occupation allemande). Après guerre, on le retrouve toujours avec Ray Ventura et ses collégiens. L’orchestre qui avait déjà tourné quelques comédies musicales fort populaires avant guerre, reprend le chemin des studios de cinéma avec Henri dans ses bagages pour le film Mlle s’amuse (1947), plaisant musical avec la délicieuse Gisèle Pascal, en fille de millionnaire gâtée et capricieuse, qui se paie les services de l’orchestre à domicile, jour et nuit. Henri, avec ses facéties et grimaces a pris une place essentielle dans la formation, et on le remarque dans les chansons auxquelles il participe (la samba Maria de Bahia).
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Nous irons à Paris (1949) aura encore plus de succès. Ce musical rythmé et fort sympathique, qui compte les péripéties d’une radio libre, fera mouche auprès du jeune public et un des plus gros succès du genre musical en France. On se souvient notamment de la scène où Henri débarque en parachute avec les pétulantes et rondouillardes Peter sisters pour le show clandestin de la radio. Enfin, c’est tout le reflet d’une époque : je me souviens d’un vieux collègue qui avait adoré ce film dans son adolescence et mourait d’envie de faire partager ce cher souvenir en VHS avec ses petits enfants qui ont baillé d’ennui en le visionnant. Après sa séparation avec l’orchestre Ventura, Henri entame une carrière solo jalonnée de tubes : maladie d’amour (repris aux States par Sinatra), une chanson douce (une des plus attachantes chansons enfantines du 20ème siècle), si jolie (une délicieuse ballade jazzy) mais aussi des parodies de succès du moment (notamment du Bon voyage de Gloria Lasso) et des chansons de films (comme une île au soleil, ravissant calypso du lamentable film avec Harry Belafonte).
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Coté ciné, rien de terrible. Outre des participations en temps que guest dans Tartatin de Tarascon (1962) avec Francis Blanche ou le clair de lune à Maubeuge (bêtise bâtie autour de la personnalité et du tube unique de Pierre Perrin le chauffeur de taxi devenu chanteur comique), il tient des rôles plus importants dans Bonjour sourire (1956) de Claude Sautet avec Annie Cordy et Jimmy Gaillard (un navet que le réalisateur reniera par la suite, dont l’intrigue est mince : 4 comiques sont chargés de dérider une princesse morose), Accroche toi, y’a du vent, comédie burlesque policière tourné en Italie où les acteurs gesticulent et grimacent pour masquer l’indigence du scénario (une merde selon Mr Salvador) et Et qu’ça saute (1970) avec l’actrice de boulevard Amarande, une histoire d’ananas explosifs. Je n’ai pas vu, mais n’en ai lu rien de bon.
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Henri chante également « dans mon île » dans Europa ni notte (1958), un film italien qui propose une tournée des boites de nuit d’Europe, avec notamment le transsexuel Coccinelle et la célèbre danseuse espagnole Carmen Sevilla. Le rythme lent de la chanson aurait selon Henri inspiré Antonio Carlos Jobim, le créateur de la bossa nova. Enfin, selon les dires de Mr Henri, dont la modestie n’était pas la principale qualité, même si ses déclarations prétentieuses étaient toujours ponctués d’énormes éclats de rires. En tous les cas, même s’il fut le premier à enregistrer des rocks en France, sous le pseudo d’Henry Cording, il ne croyait pas du tout à la pérennité de ce genre : pour lui et Boris Vian, ce n’était qu’une parodie de plus.
En somme rien de bien glorieux. Henri pensait que sa couleur avait représenté un obstacle à une vraie carrière à l’écran : c’est hélas bien possible. Selon Jacqueline sa deuxième épouse et imprésario, les propositions pleuvaient mais le chanteur n’arrivait pas à trouver de rôle à son goût, et n’aimait pas être tributaire de toute une équipe et garder l’entière maîtrise de son travail. Il aurait aussi refusé un contrat à Hollywood aux cotés de John Wayne…(on a du mal à le croire…)
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Sous l’impulsion de Jacqueline, Henri négocie fort bien le virage des années yéyé (qui fut fatal à tant d’artistes de sa génération) en privilégiant les chansons tubesques (Minnie petite souris, Zorro, Juanita banana, mais non mais non, c’est pas la joie), au détriment des airs jazzy qu’il interprétait si bien. Je me souviens très bien de ses shows à la télé, très prisés par les enfants. Au début des années 70, ses chansons comiques pour enfant (les aristochats, petit lapin) marquent une réelle perte de qualité et auraient très bien pu être chantées par Carlos.
Après le décès de Jacqueline, Henri a bien du mal à faire évoluer sa carrière et se tourne plus volontiers vers les compétitions de pétanque que vers la chanson. Le disque « chambre avec vue » composé par Benjamin Biolay et Keren Ann va lui permettre d’effectuer un spectaculaire retour en piste, que personne n’aurait pu imaginer. Grâce à ce bel album, Henri a de nouveau pu aligner les tours de chant et les adieux dans des salles prestigieuses.
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Si sa personnalité ne semble pas des plus attachantes (ne parlons pas de ses problèmes avec son fils Jean-Marie Périer, qu’il a eu avec Jacqueline Porel, dont il ne s’est quasiment jamais occupé et avec lequel il était brouillé, ni avec son frère André Salvador qu’on a vu au cinéma dans des films de série Z comme la famille Cucuroux d’Emile Couzinet, et qui lui aussi était fâché avec Henri depuis des lustres), et que son auto satisfaction était des plus irritantes, c’est sans aucun doute un des grands artistes de la chanson française, très versatile. Mais on aurait tellement aimé le voir tomber le masque et son rire tonitruant et artificiel.
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Fernando Lamas

Message par Music Man »

Parmi les personnages faisant partie du folklore hollywoodien figure l’amant latin, séducteur impénitent et romantique adulé par les spectatrices. On se souvient notamment des mythiques Rudolf Valentino et Ramon Novarro dont le succès fut immense à l’ère du cinéma muet.
Dans les années 50, avec le malaise des grands studios et l’évolution des mentalités, l’amant latin devenait un type démodé et complètement désuet, réduit à figurer encore dans des films de genre tels ou les comédies musicales ou à apporter une touche de romantisme à des films d’aventure de série B .
C’est dans ces deux types de film que la MGM tenta de promouvoir et de distribuer le bel argentin Fernando Lamas, séducteur viril aux tempes argentées. Mais ses frasques et ses aventures sentimentales ont davantage intéressé le public que ses films.
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Né en 1915 à Buenos Aires de parents espagnols, Fernando Lamas est élevé par ses grands parents. Grâce à son physique athlétique et viril, il n’a pas de mal à obtenir quelques rôles au théâtre puis au cinéma. Son mariage avec l’actrice Perla Mux, surnommée la Deanna Durbin argentine, a probablement du l’aider dans son ascension. Parmi ses films argentins figurent évidemment quelques films de tango, mélo musicaux, où les passages dramatiques sont soulignés à coup de bandonéon et de chansons nostalgiques. Un de ses films est d’ailleurs censé retracer « l’histoire du tango » (1949), et la grande chanteuse du genre Tita Merello figure au générique.
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Cela dit, c’est dans une adaptation de l’éventail de Lady Windermere d’Oscar Wilde, avec Dolores Del Rio (un super mélo comme on les aime en Amérique du Sud) que l’acteur accèdera au rang de star…et attirera l’attention des producteurs hollywoodiens. Il tient un petit rôle dans un western dont la vedette est John Carroll : l’épouse de ce dernier lui arrange un screen test. La MGM, qui a déjà pris sous contrat un autre amant latin (Ricardo Montalban) est séduite par le bel argentin. Après des stages intensifs en anglais et des cours de chant pour perfectionner sa belle voix de baryton (on raconte qu’il connaissait toutes les chansons de Carlos Gardel et qu’il régalait les convives de ses parties en les interprétant), Fernando débute dans la gentille comédie riche jeune et jolie dont la mignonne Jane Powell est la vedette : un petit film sympa et sans conséquence dans un milieu très friqué (comme toujours dans les comédies produites par Pasternak : la pauvreté ne fait pas rêver) avec un Paris d’opérette pour décor. Fernando n’a déjà plus l’âge d’un jeune premier (36 ans) : il est donc ici le chevalier servant de Danielle Darrieux qui joue la mère de Jane Powell. Interrogée plus tard sur Lamas, Danielle Darrieux, qui a été précédemment mariée au playboy Rubirosa, ne semble pas avoir été troublée par l’acteur et lui a préféré l’intelligence de Wendell Corey.
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Si Darrieux est restée de marbre, on ne peut pas en dire autant des autres actrices d’Hollywood, tant l’acteur pourtant marié va en peu de temps déchaîner les passions. Lors du tournage de la veuve joyeuse (1952), il va vivre une liaison torride avec la voluptueuse Lana Turner (qui s’est vantée d’avoir connu 300 amants), bien relayée par les journaux à scandale. Si l’on se fie aux mémoires d’Esther Williams, les ébats entre les deux amants étaient si bruyants dans leur caravane qu’ils empêchaient tout le monde de dormir et provoquaient l’hilarité générale.
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Bien servi par cette romance passionnée, le film remportera un gros succès commercial. Sans posséder un seul instant l’humour ou la finesse de Lubitsch, il s’agit pourtant d’un spectacle luxueux, très agréable à l’œil et magnifiquement photographié. Comme Lana Turner ne sait pas chanter, plutôt que de lui choisir une doublure, la MGM a préféré confié presque toutes les chansons à Lamas qui s’en tire fort bien. J’avais offert ce film à une tante, fan d’opérettes, et elle avait été complètement emballée, bien plus que par la version de Lubitsch, à cause du technicolor et des chorégraphies. Elle a même prétendu avoir reconnu l’acteur principal qu’elle aurait vu sur la scène du Châtelet (ce qui impossible ! Avec qui l’a telle confondu : Tony Gama, Marcel Merkes ?).
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Avec Lana Turner

La liaison tumultueuse de Lamas fait grand bruit dans les journaux, leur séparation aussi : en pleine soirée mondaine, ils se disputent et Lana prend la porte avec Lex Barker (le tarzan des années 50). Pour se venger, Lamas sortira avec l’ex- femme de Lex Barker, la belle rouquine Arlene Dahl et l’épousa même en 1954 : une attitude jugée scandaleuse qui choqua Louella Parsons, la reine des échotières.
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Avec Esther Williams


Alors que la MGM avait concocté Lune de Miel au Brésil pour Lana et Fernando, le studio sera obligé de le remplacer par l’autre amant latin de son écurie, Ricardo Montalban.
On retrouve ensuite Fernando dans Traversons la manche (1953), aimable musical avec la reine des naïades, la ravissante Esther Willliams. Un gentil film familial réservant à la belle Esther quelques scènes de natation, notamment un ballet nautique avec Tom et Jerry : charmant. Doit-on préciser que Fernando et Esther eurent une liaison sur le tournage (elle précisa que c’était son partenaire de l’écran qui nageait le mieux) ? Afin d’éviter tout écart de conduite, c’est son épouse Arlene Dahl que Fernando retrouve ensuite dans le film d’aventures Singaree.
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Avec Rhonda Fleming

Après le succès de la veuve joyeuse, Fernando se voit confier encore une opérette archi connue, Rose Marie (1954). Mais malgré le technicolor, et les montagnes rocheuses, le film n’aura pas le succès du précédent. Las de jouer les bellâtres dans les opérettes, Lamas quitte la Métro. Est-il conscient que les autres studios n’ont pas grand-chose de mieux à lui proposer, Compte tenu de son orgueil démesuré, ce n’est pas certain.
Après une comédie musicale avec Rosalind Russell (l’héritière de Las Vegas), Fernando tente sa chance à Broadway où il se retrouve confronté avec un autre phénomène, la volcanique Ethel Merman ; les deux stars partageant la même arrogance, les disputes seront fréquentes.
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Après la naissance de son fils Lorenzo (un playboy qu’on a vu dans les années 80 dans les navrantes séries le rebelle et Falcon Crest), et son divorce avec Arlene Dahl, Fernando Lamas renoue avec Esther Williams, et lui propose le pire des chantages : il lui sera fidèle à condition qu’elle ne vive avec les enfants qu’elle a eu de ses précédents mariages ! :shock: Sous le charme, Esther accepte cet odieux compromis :( . En 1961, Lamas réalise un film espagnol avec sa femme, la fontaine magique, qui ne sera exploité ni chez nous, ni aux states. Sur l’affiche, il a exigé que son nom figure avant celui d’Esther. Si l’on en juge par les mémoires croquignolesques de Miss Williams, Fernando Lamas était un petit monstre d’égocentrisme et de vanité, très fier de son physique et se des performances sexuelles. Elle s’attarde notamment sur des détails physiques et des anecdotes coquines, qui sont certes drôles à lire, mais pas du tout classe de la part de la sirène des comédies familiales de la MGM.
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Dans les années 70, Fernando se tournera essentiellement vers les séries télévisées. Atteint d’un cancer au pancréas, Fernando Lamas décède en 1982. Lors de ses derniers mois à l’hôpital, l’acteur, alité, vérifiait à l’occasion avec un petit miroir, si la partie préférée de son anatomie était encore en forme* : la fin pathétique d’un macho.

*lu dans "the million dollar mermaid" la bio d'Esther Williams;


Un extrait de la fontaine magique de et avec Fernando lamas et sa dernière épouse Esther Williams
Dernière modification par Music Man le 4 nov. 12, 08:35, modifié 3 fois.
Ballin Mundson
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Re: les vedettes masculines des films musicaux (Index en page 1)

Message par Ballin Mundson »

Dans son livre, la fille de Marlene Dietrich, raconte que sa mère appelait ses pilules pour dormir des "Fernando Lamas", tellement elle le trouvait ennuyeux.
Dernière modification par Ballin Mundson le 5 mai 08, 14:50, modifié 1 fois.
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Re: les vedettes masculines des films musicaux (Index en page 1)

Message par Music Man »

De façon assez curieuse certains artistes aussi doués pour le chant que pour la comédie n’ont quasiment jamais eu l’occasion de réunir leurs talents dans une comédie musicale, et mené dès lors deux carrières séparées sur disque et à l’écran. Alors que Danièle Darrieux déclarait lors d’une interview à un chroniqueur sceptique qu’elle aurait adoré tourner dans une comédie musicale avec Jean-Claude Pascal, le chouchou des spectatrices des années 50, on compte tout juste dans l’abondante filmographie du beau comédien 2 ou 3 musicals où il ne chante même pas!. A qui la faute ? En tous les cas, pourquoi ne pas évoquer sur ce topic celui qui fut tour à tour acteur et chanteur de talent ?
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Né en 1927 dans une famille très aisée (il est l’arrière petit fils du grand couturier Charles Worth), Jean-Claude Pascal a une enfance très privilégiée. Après avoir combattu en tant que spahi aux cotés des troupes du Maréchal Leclerc dans la deuxième division blindée et participé à la libération de Strasbourg en novembre 1944. Il est décoré de la croix de guerre pour sa bravoure.
Grâce au soutien de sa famille, il travaille d’abord comme styliste chez Hermes puis Dior (même s’il prétend être peu doué pour le dessin), sympathise avec Hubert de Givenchy. Fasciné par le monde du théâtre, il se spécialise dans la création de costumes (il est notamment engagé à ce titre pour le Dom Juan de Molière mis en scène par Louis Jouvet et rencontre alors les stars qui le faisaient jadis rêver comme Edwige Feuillère ou le jeune acteur Michel Auclair qui l’encourage à embrasser une carrière de comédien. Il s’inscrit alors aux cours Simon.
Edwige Feuillère qui l’avait déjà repéré en tant que costumier propose alors au débutant de jouer à ses cotés le rôle d’Armand Duval dans la dame aux camélias. Une occasion inouïe pour un garçon inexpérimenté. Il fait sensation sur scène, non seulement pour sa grande beauté mais son impeccable diction. La maman d’un ami a eu l’occasion de voir ce spectacle très jeune et en garde un souvenir ému. Selon elle, il était magnifique et meilleur que Jean Marais et d’autres acteurs de l’époque.
Le succès théâtral lui ouvre les portes du cinéma pour le meilleur et pour le pire. Le meilleur, c’est sans doute une popularité immense auprès du public féminin, envouté par la voix et beauté du jeune acteur au profil d’ange, le pire c’est la médiocre qualité de la plupart de ses films, romances historiques où on le cantonne souvent à des rôles de séducteur. Il est rare qu’il croise un très bon réalisateur sur son chemin.
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On retiendra évidemment le rideau cramoisi d’Alexandre Astruc, un beau drame, tourné en muet, avec simplement un commentaire en off (curieusement confié à d’autres comédiens). Mais le grand public optera plutôt pour la suite historico-coquine de Caroline chérie, avec la pétulante Martine Carol, qui nous raconte les amours mouvementées d’une jeune fille pendant la révolution, souvent obligée de sacrifier sa vertu pour la bonne cause. Je l’avais vu enfant à la télé et avais trouvé ça très amusant. Jean Claude Pascal se contente d’être beau et participe à une sorte de menuet qu’il danse en collants pas spécialement virils. Le gros succès du film donnera lieu à une autre suite où Jean-Claude donne la réplique au nouveau sex-symbol Brigitte Bardot, dont le seul commentaire dans sa bio sera qu’elle ne risquait pas d’avoir une liaison avec !
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Je n’ai pas vu tous les films que Jean-Claude Pascal a alignés dans les années 50. Si la plupart furent des succès commerciaux, les critiques ne les ont pas épargnés. Sont-ils tous aussi creux qu’ils le prétendent ? Qui a vu la châtelaine du Liban ou Pêcheur d’Islande, pourtant tirés d’œuvres majeures? A vos plumes. C’est vrai que le remake du grand jeu (pourtant signé du grand Robert Siodmak) est plus que décevant et ne risque pas de faire de l’ombre à la version originale ! Pourtant, le film fit un malheur auprès des spectatrices, sous le charme du beau Jean-Claude en légionnaire. Comment un acteur encensé par les critiques pour ses premières prestations scéniques a-t’il pu se faire enfermer dans tant de rôles insignifiant comme cette lavandière du Portugal, bluette incolore et vaguement musicale avec la danseuse Paquita Rico, empruntant son titre à un tube de Jacqueline François ? (où deux agences de pub sont à la recherche d’une mère Denis pour venter les mérites de leur lessive). Jean-Claude Pascal se déclarera pourtant enchanté de l’avoir tourné.
Autre film pseudo-musical, un peu plus satisfaisant, Guinguette de Jean Delannoy avec la ballerine Zizi Jeanmaire.
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Est-il la victime de ce beau masque (pour reprendre le titre de son autobiographie), pour ne se voir proposer que des personnages sans profondeur dans des romances désuètes comme la belle et l’empereur avec Romy Schneider ? En tous les cas, à l’arrivée de la nouvelle vague, les cinéastes délaissent le bel acteur trop identifié à un cinéma de papa, factice et sans valeur.
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C’est alors que Jean-Claude Pascal va mettre de nouvelles cordes à son arc et se lancer dans la chanson. Tout le monde avait remarqué sa remarquable diction, mais lors de l’enregistrement de son premier disque, "déjà" en 1955(également au répertoire des soeurs Etienne), on pouvait croire à une lubie de comédien (on ne compte plus les acteurs ayant tenté leur chance dans la chanson, pour des résultats lamentables) : or, il se révèle un très talentueux chanteur, à la voix envoutante, raclant dans les notes graves. Autant on a pu reprocher à l’acteur d’avoir joué dans n’importe quoi, autant il va prendre grand soin dans le choix de ses chansons : au programme du Gainsbourg, Barbara, Brel, Aznavour et souvent Gilbert Bécaud avec lequel il est très intime (il le considérait comme son jumeau). En 1961, Jean-Claude Pascal remporte l’eurovision de la chanson avec Nous les amoureux, qui devient un gros succès commercial.
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Comme il l’expliquera bien plus tard, il s’agit d’un plaidoyer contre l’homophobie, ce que fort peu de gens ont du discerner à l’époque. C'est certainement une des rares chansons sensée à avoir remporté ce fameux concours; On le voit souvent à la télé où il fait la promo de ses nouveaux disques, notamment « soirées de prince », son autre succès (et fort jolie chanson) tout en grillant cigarettes sur cigarettes (comme Dean Martin, il chante souvent avec une cigarette à la main). En 1967, il tient le rôle d’un producteur de cinéma dans les 4 fiancés de Marisol, un musical plaisant avec l’adorable vedette espagnole. Elle se réserve toutes les chansons, et ne laisse pas même un refrain pour l’acteur français, qui commence à faire un peu âgé pour la toute jeune actrice.
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Pour faire un dernier pied de nez à l’écran, le grand séducteur des années 50 tient le rôle d’un eunuque dans deux films de la série des Angélique, romances épiques dans un esprit proche des Caroline chérie.
Il enregistre beaucoup de disques, surtout en Allemagne, dont certains thèmes de films (vivre libre, le docteur Jhivago) sans jamais connaître un aussi gros succès que Nous les amoureux et se tourne aussi vers des feuilletons tels comme le chirurgien de St Chad et le temps de vivre, le temps d’aimer dont le générique me trotte dans la tête (j’étais pourtant tout petit). A la fin de sa carrière, Jean-Claude Pascal s’est lancé dans la littérature avec des romans historiques (l’amant du roi, Marie Stuart), accueillis avec autant de dédain que le furent autrefois ses films. Il est mort en 1992 dans un relatif oubli.
On n’en parle plus guère et pourtant ce fut peut être un des meilleurs crooners de la variété française. Compte tenu de la médiocre qualité d’une bonne part de ses films, il n’est pas souvent mis à l’honneur dans les sites sur le cinéma, alors qu’il fut pourtant extrêmement populaire.
Alors, on le réhabilite Jean-Claude Pascal ? En tous les cas, dans ma discothèque, c’est déjà fait.
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Avec Magali Noël, ça fait très « cinéma de quartier »


le tube de Jean-Claude Pascal à l'eurovision
Dernière modification par Music Man le 7 juin 08, 22:59, modifié 7 fois.
Ballin Mundson
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Re: les vedettes masculines des films musicaux (Index en page 1)

Message par Ballin Mundson »

Je ne savais même pas qu'il était acteur. Quand j'étais petit, mes parents avaient recopié leurs vieux 33T de jean claude pascal sur des cassettes, qu'ils passaient inlassablement dans la voiture. Maintenant je connais encore une demi douzaine de ses chansons par coeur. je suis tout à fait d'accord avec toi sur la qualité de ses choix musicaux.
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Re: les vedettes masculines des films musicaux (Index en page 1)

Message par Music Man »

Ballin Mundson a écrit :Je ne savais même pas qu'il était acteur. .
ah bon, tu n'as pas vu les Caroline chérie? ou peut-être n'as-tu retenu que la gracile silhouette de Martine Carol... :wink: Image
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Major Dundee
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Re: les vedettes masculines des films musicaux (Index en page 1)

Message par Major Dundee »

Music Man a écrit :
Ballin Mundson a écrit :Je ne savais même pas qu'il était acteur. .
ah bon, tu n'as pas vu les Caroline chérie? ou peut-être n'as-tu retenu que la gracile silhouette de Martine Carol... :wink: Image
Moi c'est le contraire. J'ai très peu suivi sa carrière de chanteur (mis à part l'incontournable "Nous les amoureux"). Par contre je viens de jeter un oeil sur sa filmo et j'ai (presque) tout vu du "Grand patron" en 1951 jusqu'au "Rendez-vous" de 1961. J'ai vu ces films au fur et à mesure de leur sortie sur les écrans (faut dire que c'était quand même une grande vedette, comme on disait à l'époque). Par contre je n'en ai malheureusement pas gardé beaucoup de souvenirs (à part les titres :oops: ) hormis bien sûr les Caroline, Angélique, Le grand jeu, Alerte au Sud où il cotoyait Von Stroheim, et "Le fric" que j'ai enregistré il y a peu sur Ciné Polar.

J'édite pour remercier une fois de plus Music Man par rapport au travail accompli. C'est toujours un vrai plaisir de le lire et de partager son enthousiasme 8)
Dernière modification par Major Dundee le 7 juin 08, 22:43, modifié 1 fois.
Charles Boyer (faisant la cour) à Michèle Morgan dans Maxime.

- Ah, si j'avais trente ans de moins !
- J'aurais cinq ans... Ce serait du joli !


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Re: les vedettes masculines des films musicaux (Index en page 1)

Message par Marceline Bonheur »

Ah, Jean-Claude Pascal, j'en étais amoureuse :oops:
Des princes charmant comme lui, on n'en fait plus aujourd'hui, le moule est cassé, malheureusement :(
Tout ce qui n'est pas donné est perdu
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