Pour moi, Hitchcock n'est pas un cinéaste "classique" au sens esthétique du terme (comme l'étaient Ford ou Renoir), il est déjà moderne effectivement ("poésie de la trouvaille", j'aime bien ce terme ). Avec Welles, Kurosawa et d'autres, il fait le pont entre cinéma classique et cinéma des années 60/70.Alexandre Angel a écrit :Je crois que la réputation de maître du suspense (savamment entretenue par Hitchcock en personne) a été un coup de communication et de publicité de génie mais aussi, et ce n'est le moindre des paradoxes, a pu fausser le rapport que l'on pouvait entretenir avec ses films. A trop tout ramener au suspense, on a pu s'agacer des coutures saillantes de son cinéma et faire une espèce de blocage participatif. En tous cas, bien plus jeune, je me suis senti passer par là. Et jamais je ne me suis rendu tant service dans ma redécouverte de son œuvre (relativement récente) que lorsque je me suis décidé à voir en lui un cinéaste classique incroyablement visité par les trouvailles, l'invention, les idées, bref, par la modernité.. Hitchcock est un classique ET un moderne et ce n'est pas pour rien si les grands cinéastes contemporains de genre (Scorsese, Polanski..) sont aussi hitchcockiens, qu'ils l'admettent ou pas (je me souviens avoir entendu Polanski dire qu'il n'aimait pas Hitchcock). Ce qui fait vibrer chez Hitch n'est pas la vraisemblance, mais l'extrême modernité des trouvailles. Il y a chez lui une poésie de la trouvaille. Et, au risque de surprendre, si je devais nommer un artiste auquel comparer Hitchcock, ce serait....Hergé et sa ligne claire pétrie d'idées formelles fascinantes, nourrie par une réflexion permanente sur les apparences (cf tout le début des 7 Boules de cristal, par exemple)
Alfred Hitchcock (1899-1980)
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Re: Alfred Hitchcock (1899-1980)
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Re: Alfred Hitchcock (1899-1980)
Les modernes n'étaient d'ailleurs pas légions à cette époque dans le cinéma Hollywoodien (en même temps, c'est logique) et c'est clairement un moderne.
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Re: Alfred Hitchcock (1899-1980)
Hitchcock et James Bond: j'imagine que cette info était bien connue (je ne le savais pas même si ça semble logique)
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Re: Alfred Hitchcock (1899-1980)
Comme l'étaient Renoir et Ford, certes, mais, à sa façon à lui, il me semble qu'il relevait du classicisme.Strum a écrit :Pour moi, Hitchcock n'est pas un cinéaste "classique" au sens esthétique du terme (comme l'étaient Ford ou Renoir),
N'opposons pas classicisme et modernité. La modernité est pour moi un ressenti par facilement définissable. Hitchcock, comme Ford et Renoir, œuvrait déjà à l'époque du cinéma muet et comme eux, il était avant tout un raconteur d'histoires pas un esthète (même si c'est comme cela que nous le concevons), au sens où pouvaient le revendiquer des gens comme Stroheim ou Murnau, qui eux se détachaient sciemment du classicisme, provoquaient quelque chose. Hitchcock donne l'impression plus modeste d'être un simple conteur dans des genres balisés, mais d'exprimer son classicisme avec un sens de l'idée formelle non seulement novateur mais au rayonnement radical sur toutes les décennies à venir.AtCloseRange a écrit :c'est clairement un moderne.
Comme "le Temps de l'innonce" et "A tombeau ouvert", "Killers of the Flower Moon" , très identifiable martinien, est un film divisiblement indélébile et insoluble, une roulade avant au niveau du sol, une romance dramatique éternuante et hilarante.
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Re: Alfred Hitchcock (1899-1980)
Je le pensais moderne pas seulement dans sa forme mais aussi dans sa façon de distiller des thématiques globalement en avance sur son temps.Alexandre Angel a écrit :Comme l'étaient Renoir et Ford, certes, mais, à sa façon à lui, il me semble qu'il relevait du classicisme.Strum a écrit :Pour moi, Hitchcock n'est pas un cinéaste "classique" au sens esthétique du terme (comme l'étaient Ford ou Renoir),N'opposons pas classicisme et modernité. La modernité est pour moi un ressenti par facilement définissable. Hitchcock, comme Ford et Renoir, œuvrait déjà à l'époque du cinéma muet et comme eux, il était avant tout un raconteur d'histoire pas un esthète (même si c'est comme cela que nous le concevons), au sens où pouvaient le revendiquer des gens comme Stroheim ou Murnau, qui eux se détachaient sciemment du classicisme, provoquaient quelque chose. Hitchcock donne l'impression plus modeste d'être un simple conteur dans des genres balisés, mais d'exprimer son classicisme avec un sens de l'idée formelle non seulement novateur mais au rayonnement radical sur toutes les décennies à venir.AtCloseRange a écrit :c'est clairement un moderne.
J'aurais pu mettre aussi Wilder ou Preminger dans le lot des modernes.
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Re: Alfred Hitchcock (1899-1980)
Quatre de l'espionnage (1936)
1916 : une cérémonie funèbre honore la mémoire d'Edgar Brodie, soldat de Sa Majesté et écrivain. Mais tout cela n'est qu'une mise en scène, car Brodie est un espion qui va se voir confier une mission prioritaire. Sous le nom de Richard Ashenden, il doit se rendre en Suisse pour démasquer et abattre un espion allemand. Il est accompagné du Général, assassin sans pitié et coureur de jupons, et rencontre sur place Elsa que sa hiérarchie lui a assignée comme épouse. Ils identifient rapidement un suspect, mais Richard et Elsa tombent peu à peu amoureux et sont de moins en moins convaincus du bien-fondé de leur mission.
Perdu au milieu des grand classiques de la période anglaise d’Hitchcock (juste après Les 39 marches (1935) et un peu avant Jeune et Innocent (1937) et Une femme disparait (1938)), Agent Secret est plutôt considéré comme un opus mineur du maître du suspense. Adaptant un roman de Somerset Maugham, le film sans atteindre les hauteurs des œuvres précitées s’avère pourtant fondamental car il définit l’approche à venir d’Hitchcock dans le cadre du film d’espionnage. Des films comme Les Enchaînés (1946), La Mort aux trousses (1959) ou le plus tardif L'Étau (1969) dépeignent ainsi des personnages déchirés entre leurs sentiments et leur devoir, les romances naissantes ne pouvant survivre à la mission en cours. Agent Secret initie cette réflexion du réalisateur par sa description au premier abord froide et désinvolte du monde de l’espionnage. L’existence d’un agent a peu d’importance au regard de son devoir, à la manière de Brodie (John Gielgud) dont la mort est simulée pour lui permettre d’aller incognito traquer un agent allemand en suisse. La légèreté du ton surprend et préfigure presque la série des James Bond durant l’introduction, que ce soit l’entrevue avec le chef des services secret R (Charles Carson), l’acolyte mexicain pittoresque joué par Peter Lorre et bien sûr le jeu de séduction qui va s’instaurer avec l’agent féminin débutant Elsa (Madeleine Carroll). Tout ne semble qu’être prétexte aux bons mots et à une certaine extravagance dans cette vision ludique du renseignement en dépit des enjeux cruciaux.
L’ombre plane cependant sur cette légèreté de façade, que l’on peut déjà deviner à travers le personnage de Peter Lorre qui si l’on fait abstraction de son excentricité rigolard est un psychopathe en puissance (pas si loin de son M le Maudit) pourtant situé dans le camp des « gentils ». Le sale boulot demande pourtant ce type d’individu sans états d’âmes, y compris quand on se trompera de cible et assassinera un innocent. Elsa au départ vue comme une écervelée en quête de sensations fortes verra sa détermination ébranlée, tout comme Brodie perdant de son assurance machiste et les deux vont ainsi se rapprocher. Dans cette idée le fameux agent s’avérera être le personnage en apparence le plus superficiel. La mise en scène d’Hitchcock est soumise à cette prise de conscience, se faisant de plus en plus stylisée au fil des doutes croissant des héros qui constituent finalement le principal danger pour eux alors que l’exécutant froid Peter Lorre parait intouchable. La mort s’invite de façon tout d’abord onirique (la découverte du cadavre dans l’église et notamment ce plan en plongée au-dessus de l’orgue), détachée (Brodie assistant à l’assassinat du mauvais agent à distance) avant que la culpabilité frappe nos héros dans une séquence virtuose dans un fondu enchaîné dont la métaphore sur fond d’orchestre évoque le muet. Hitchcock agence certes quelques séquences d’actions et de suspense haletante (la poursuite dans l’usine) mais la tension repose moins la peur de ce qui sera fait aux personnages que de la crainte de ce qu’ils comptent faire.Infliger la mort ne semble plus aussi naturel et les sentiments face à cet ennemi seront des plus ambigus, ne se révélant pas entre sincérité et manipulations. Une ultime péripétie spectaculaire viendra résoudre le dilemme tout en affirmant un vrai positionnement moral. Hitchcock affinera avec bien plus de brio ces thématiques dans d’autres œuvres mais en dépit de ces maladresses Agent Secret s’avère passionnant. 4,5/6
1916 : une cérémonie funèbre honore la mémoire d'Edgar Brodie, soldat de Sa Majesté et écrivain. Mais tout cela n'est qu'une mise en scène, car Brodie est un espion qui va se voir confier une mission prioritaire. Sous le nom de Richard Ashenden, il doit se rendre en Suisse pour démasquer et abattre un espion allemand. Il est accompagné du Général, assassin sans pitié et coureur de jupons, et rencontre sur place Elsa que sa hiérarchie lui a assignée comme épouse. Ils identifient rapidement un suspect, mais Richard et Elsa tombent peu à peu amoureux et sont de moins en moins convaincus du bien-fondé de leur mission.
Perdu au milieu des grand classiques de la période anglaise d’Hitchcock (juste après Les 39 marches (1935) et un peu avant Jeune et Innocent (1937) et Une femme disparait (1938)), Agent Secret est plutôt considéré comme un opus mineur du maître du suspense. Adaptant un roman de Somerset Maugham, le film sans atteindre les hauteurs des œuvres précitées s’avère pourtant fondamental car il définit l’approche à venir d’Hitchcock dans le cadre du film d’espionnage. Des films comme Les Enchaînés (1946), La Mort aux trousses (1959) ou le plus tardif L'Étau (1969) dépeignent ainsi des personnages déchirés entre leurs sentiments et leur devoir, les romances naissantes ne pouvant survivre à la mission en cours. Agent Secret initie cette réflexion du réalisateur par sa description au premier abord froide et désinvolte du monde de l’espionnage. L’existence d’un agent a peu d’importance au regard de son devoir, à la manière de Brodie (John Gielgud) dont la mort est simulée pour lui permettre d’aller incognito traquer un agent allemand en suisse. La légèreté du ton surprend et préfigure presque la série des James Bond durant l’introduction, que ce soit l’entrevue avec le chef des services secret R (Charles Carson), l’acolyte mexicain pittoresque joué par Peter Lorre et bien sûr le jeu de séduction qui va s’instaurer avec l’agent féminin débutant Elsa (Madeleine Carroll). Tout ne semble qu’être prétexte aux bons mots et à une certaine extravagance dans cette vision ludique du renseignement en dépit des enjeux cruciaux.
L’ombre plane cependant sur cette légèreté de façade, que l’on peut déjà deviner à travers le personnage de Peter Lorre qui si l’on fait abstraction de son excentricité rigolard est un psychopathe en puissance (pas si loin de son M le Maudit) pourtant situé dans le camp des « gentils ». Le sale boulot demande pourtant ce type d’individu sans états d’âmes, y compris quand on se trompera de cible et assassinera un innocent. Elsa au départ vue comme une écervelée en quête de sensations fortes verra sa détermination ébranlée, tout comme Brodie perdant de son assurance machiste et les deux vont ainsi se rapprocher. Dans cette idée le fameux agent s’avérera être le personnage en apparence le plus superficiel. La mise en scène d’Hitchcock est soumise à cette prise de conscience, se faisant de plus en plus stylisée au fil des doutes croissant des héros qui constituent finalement le principal danger pour eux alors que l’exécutant froid Peter Lorre parait intouchable. La mort s’invite de façon tout d’abord onirique (la découverte du cadavre dans l’église et notamment ce plan en plongée au-dessus de l’orgue), détachée (Brodie assistant à l’assassinat du mauvais agent à distance) avant que la culpabilité frappe nos héros dans une séquence virtuose dans un fondu enchaîné dont la métaphore sur fond d’orchestre évoque le muet. Hitchcock agence certes quelques séquences d’actions et de suspense haletante (la poursuite dans l’usine) mais la tension repose moins la peur de ce qui sera fait aux personnages que de la crainte de ce qu’ils comptent faire.Infliger la mort ne semble plus aussi naturel et les sentiments face à cet ennemi seront des plus ambigus, ne se révélant pas entre sincérité et manipulations. Une ultime péripétie spectaculaire viendra résoudre le dilemme tout en affirmant un vrai positionnement moral. Hitchcock affinera avec bien plus de brio ces thématiques dans d’autres œuvres mais en dépit de ces maladresses Agent Secret s’avère passionnant. 4,5/6
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Re: Alfred Hitchcock (1899-1980)
Non, tu n'es pas le seul.Rashomon a écrit :Je m'excuse de détourner ce fil à des fins personnelles mais je ne me vois pas en créer un pour faire cette confidence qui me gêne un peu: je ne suis pas un fan de Hitchcock, et j'en aurais presque honte. Comprenons-nous bien: je reconnais que c'est un metteur en scène important, et j'aime beaucoup certains de ses films mais la plupart - y compris et surtout ceux considérés comme ses chefs-d'oeuvre - me laissent froid. Ce sont les scénarios qui me gênent le plus je crois - je ne suis pas un ayatollah du réalisme et de la vraisemblance, loin de là, mais les histoires que Hitch raconte me paraissent tirées par les cheveux, souvent mal construites et peu crédibles. Il y a aussi que Hitchcock tournait presque exclusivement en studio, ce qui me hérisse - le final de La mort aux trousses, par exemple, sent trop le carton-pâte (on n'est pas sur le Mont Rushmore et ça se voit) pour me "parler". Enfin, il y a la direction d'acteurs que je juge indifférente, voire aux abonnés absents - il y a de grandes interprétations chez Hitchcock, mais elles paraissent souvent accidentelles tant Hitch donne l'impression de ne soucier que de l'image que projettent ses acteurs, pas de leur jeu, mais qu'espérer d'autre d'un réalisateur qui avouait (en plaisantant à moitié) considérer les acteurs comme du bétail?
Ayant ainsi blasphémé je retourne me cacher avant que les tomates ou les pierres me tombent dessus, mais j'aimerais savoir s'il y a d'autres "Hitch-skeptics" sur ce forum ou si je suis une aberration.
En résumé, on a beau être un génie dans sa discipline (fabuleux cadreur, monteur), ça n'empêche pas d'être totalement à côté de la plaque sur les choses de la vie.Truffaut Chocolat a écrit :Alfred Hitchcok.
Psychose et Sueurs froides rentrent sans problème dans la catégorie des films qui ont changé l'histoire, OK.
Mais comme tous ses autres films, je ne les aime pas.
Sur la forme.
ça saute aux yeux qu'il était un maniaque du story-board. Ses acteurs ne s'expriment pas, ils sont totalement interchangeables et se déplacent comme des pions.
Sur le fond.
Son rapport aux femmes (et aux actrices…) complètement tordu, limite puéril, qui ampoule toute sa filmo.
Sa mentalité héritée de l'Angleterre Victorienne (on parle quand même du 19e siècle là), qui place la culpabilité au centre de tout.
Quand je vois un Hitchcock j'ai l'impression que celui qui filme est resté un petit garçon traumatisé par un passage au commissariat et qui fantasme sur des femmes trop belles pour lui.
Bref je n'arrive pas à dialoguer avec ses films, parce qu'ils racontent des peurs que je trouve ridicules et des fantasmes totalement à l'ouest.
En l'occurrence, les femmes, l'amour, tout ça.
Hitchcock, sans déconner ni aucun troll, a pour moi le cerveau d'un enfant dans le corps d'un homme de 40, 50, 60 ou 70 ans.
Qu'on trouve sa technique de réalisation pure fascinante et inspirante des décennies après ne me pose aucun problème, mais qu'on édite encore des livres d'analyse sur le fond de son oeuvre me laisse pantois.
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Re: Alfred Hitchcock (1899-1980)
Peut-être parce que ce n'est pas aussi réducteur que cela, non ?
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Re: Alfred Hitchcock (1899-1980)
Même si je vois assez vaguement ce que tu veux dire, ce serait limité à quelques films tardifs et bizarrement ceux qui sont considérés comme ses chef d'œuvre.Truffaut Chocolat a écrit :Non, tu n'es pas le seul.Rashomon a écrit :Je m'excuse de détourner ce fil à des fins personnelles mais je ne me vois pas en créer un pour faire cette confidence qui me gêne un peu: je ne suis pas un fan de Hitchcock, et j'en aurais presque honte. Comprenons-nous bien: je reconnais que c'est un metteur en scène important, et j'aime beaucoup certains de ses films mais la plupart - y compris et surtout ceux considérés comme ses chefs-d'oeuvre - me laissent froid. Ce sont les scénarios qui me gênent le plus je crois - je ne suis pas un ayatollah du réalisme et de la vraisemblance, loin de là, mais les histoires que Hitch raconte me paraissent tirées par les cheveux, souvent mal construites et peu crédibles. Il y a aussi que Hitchcock tournait presque exclusivement en studio, ce qui me hérisse - le final de La mort aux trousses, par exemple, sent trop le carton-pâte (on n'est pas sur le Mont Rushmore et ça se voit) pour me "parler". Enfin, il y a la direction d'acteurs que je juge indifférente, voire aux abonnés absents - il y a de grandes interprétations chez Hitchcock, mais elles paraissent souvent accidentelles tant Hitch donne l'impression de ne soucier que de l'image que projettent ses acteurs, pas de leur jeu, mais qu'espérer d'autre d'un réalisateur qui avouait (en plaisantant à moitié) considérer les acteurs comme du bétail?
Ayant ainsi blasphémé je retourne me cacher avant que les tomates ou les pierres me tombent dessus, mais j'aimerais savoir s'il y a d'autres "Hitch-skeptics" sur ce forum ou si je suis une aberration.
Truffaut Chocolat a écrit :Alfred Hitchcok.
Psychose et Sueurs froides rentrent sans problème dans la catégorie des films qui ont changé l'histoire, OK.
Mais comme tous ses autres films, je ne les aime pas.
Sur la forme.
ça saute aux yeux qu'il était un maniaque du story-board. Ses acteurs ne s'expriment pas, ils sont totalement interchangeables et se déplacent comme des pions.
Sur le fond.
Son rapport aux femmes (et aux actrices…) complètement tordu, limite puéril, qui ampoule toute sa filmo.
Sa mentalité héritée de l'Angleterre Victorienne (on parle quand même du 19e siècle là), qui place la culpabilité au centre de tout.
Quand je vois un Hitchcock j'ai l'impression que celui qui filme est resté un petit garçon traumatisé par un passage au commissariat et qui fantasme sur des femmes trop belles pour lui.
Bref je n'arrive pas à dialoguer avec ses films, parce qu'ils racontent des peurs que je trouve ridicules et des fantasmes totalement à l'ouest.
Bien sûr si tu penses la même chose des Enchaînés (où il n'y a pas la moindre de début de trace de ce dont tu parles et on pourrait en citer plein d'autres avec ce genre de personnage féminin), je ne peux plus rien pour toi.
C'est un peu comme si tu limitais ton appréciation de l'œuvre d'Hitchcock à ce que tu as entendu dire sur ses relations avec ses actrices et particulièrement Tippi Hedren.
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Re: Alfred Hitchcock (1899-1980)
Sans verser dans l'excès d'interprétation, l'œuvre d'un grand formaliste peut avoir beaucoup plus de fond que ne le pense même l'intéressé. La richesse du cinéma d'Hitchcock autorise l'exégèse et surtout, laisse transparaître bien plus de point de vue moral de la part de l'auteur,qu'il en soit pleinement conscient ou non, que tu sembles l'imaginer (vu que ça te laisse pantois ).Truffaut Chocolat a écrit :Qu'on trouve sa technique de réalisation pure fascinante et inspirante des décennies après ne me pose aucun problème, mais qu'on édite encore des livres d'analyse sur le fond de son oeuvre me laisse pantois.
Hitchcock, comme beaucoup de grands formalistes, distille aussi sa vision des choses morales. Il y a du tragique dans Les Oiseaux ou Psychose : regarde comme dans ce dernier, Hitchcock dote Janet Leigh d'une vraie humanité, en fait un vrai personnage dont la mort, au delà de l'effet d'épouvante, bouleverse parce que c'est celle d'un être humain que l'on a un peu appris à connaître. Et n'y a-t-il pas de l'empathie tragique pour l'Emmanuel Balestrero (Henry Fonda) du Faux Coupable? Et Doris Day qui apprend, dans L'Homme qui en savait trop, que son petit garçon a été enlevé, ne trouves-tu pas sa crise de nerf étonnamment déchirante? On pourrait trouver bien d'autres exemples..
Comme "le Temps de l'innonce" et "A tombeau ouvert", "Killers of the Flower Moon" , très identifiable martinien, est un film divisiblement indélébile et insoluble, une roulade avant au niveau du sol, une romance dramatique éternuante et hilarante.
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Re: Alfred Hitchcock (1899-1980)
Je ne l'ai pas vu et non, je ne suis pas aussi malhonnête que ça.AtCloseRange a écrit : Même si je vois assez vaguement ce que tu veux dire, ce serait limité à quelques films tardifs et bizarrement ceux qui sont considérés comme ses chef d'œuvre.
Bien sûr si tu penses la même chose des Enchaînés (où il n'y a pas la moindre de début de trace de ce dont tu parles et on pourrait en citer plein d'autres avec ce genre de personnage féminin), je ne peux plus rien pour toi.
C'est un peu comme si tu limitais ton appréciation de l'œuvre d'Hitchcock à ce que tu as entendu dire sur ses relations avec ses actrices et particulièrement Tippi Hedren.
Je ne ressens rien de tout ça, je suis navré.Alexandre Angel a écrit :Sans verser dans l'excès d'interprétation, l'œuvre d'un grand formaliste peut avoir beaucoup plus de fond que ne le pense même l'intéressé. La richesse du cinéma d'Hitchcock autorise l'exégèse et surtout, laisse transparaître bien plus de point de vue moral de la part de l'auteur,qu'il en soit pleinement conscient ou non, que tu sembles l'imaginer (vu que ça te laisse pantois ).Truffaut Chocolat a écrit :Qu'on trouve sa technique de réalisation pure fascinante et inspirante des décennies après ne me pose aucun problème, mais qu'on édite encore des livres d'analyse sur le fond de son oeuvre me laisse pantois.
Hitchcock, comme beaucoup de grands formalistes, distille aussi sa vision des choses morales. Il y a du tragique dans Les Oiseaux ou Psychose : regarde comme dans ce dernier, Hitchcock dote Janet Leigh d'une vraie humanité, en fait un vrai personnage dont la mort, au delà de l'effet d'épouvante, bouleverse parce que c'est celle d'un être humain que l'on a un peu appris à connaître. Et n'y a-t-il pas de l'empathie tragique pour l'Emmanuel Balestrero (Henry Fonda) du Faux Coupable? Et Doris Day qui apprend, dans L'Homme qui en savait trop, que son petit garçon a été enlevé, ne trouves-tu pas sa crise de nerf étonnamment déchirante? On pourrait trouver bien d'autres exemples..
Dans son cinéma je vois beaucoup de fantasmes, de meurtres, de manipulation, de frustration...
Et c'est à mes yeux une des raisons pour lesquelles on accorde énormément de crédit à son oeuvre, parce qu'elle est archi rembourrée de pulsions, de désirs et de peurs très intenses.
Je vais pas refaire le coup d'Eros et Thanatos mais quand tu as ça, tu peux tenir en haleine n'importe qui.
Surtout quand c'est exprimé avec autant d'intensité et de personnalité (et oui, y'a pas besoin d'avoir lu des bouquins ou connaitre sa vie perso pour le deviner ).
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Re: Alfred Hitchcock (1899-1980)
J'ai un peu de mal à comprendre ton analyse. Chez Hitchcock, ce que tu appelles le "fond" transparait dans sa mise en scène (exemple typique : la scène introduisant Madeleine dans Vertigo : elle sort du restaurant en passant devant un miroir : on sait alors déjà qu'elle est double, et qu'il y a derrière les apparences une vérité distincte) et il me parait difficile de séparer les deux ou de faire l'impasse sur ce qui les unit. C'est grâce aux obsessions hitchcockienne que sa mise en scène est si brillante. On lui accorde du crédit non pas à cause de sa vision du monde mais parce que c'est un des rares cinéastes qui a réussi à unir forme et fond, à faire parler ses images, qui montre les apparences et suggèrent en même temps qu'elles sont trompeuses. La forme de ses films continue donc de dire des choses à ceux qui les regardent aujourd'hui, et continuera à faire la joie des exégètes et des cinéphiles du futur, comme c'est le cas pour toutes les grandes oeuves d'art qui révèlent à chaque époque des facettes différentes.Truffaut Chocolat a écrit :En résumé, on a beau être un génie dans sa discipline (fabuleux cadreur, monteur), ça n'empêche pas d'être totalement à côté de la plaque sur les choses de la vie.
En l'occurrence, les femmes, l'amour, tout ça.
Hitchcock, sans déconner ni aucun troll, a pour moi le cerveau d'un enfant dans le corps d'un homme de 40, 50, 60 ou 70 ans.
Qu'on trouve sa technique de réalisation pure fascinante et inspirante des décennies après ne me pose aucun problème, mais qu'on édite encore des livres d'analyse sur le fond de son oeuvre me laisse pantois.
Concernant les femmes et l'amour, tes accusations me laissent également perplexe, comme si tu ramenais toute la filmographie d'Hitchcock à ses relations difficiles avec Tippi Hedren et Kim Novak (et oui, contrairement à pléthore de réalisateurs, lui était trop laid pour arriver à coucher avec ses actrices). Car c'est au personnage d'Hitchcock lui-même que tu sembles en vouloir plus qu'à ses films (tu parles de ses rapports "tordus" avec les femmes, tu condamnes "l'Angleterre victorienne" comme si c'était quelque chose d'épouvantable, alors que l'époque victorienne, c'est aussi Darwin et son origine des espèces, Oscar Wilde, Dickens, les soeurs Bronte, etc.). Or, Ingrid Bergman a-t-elle jamais eu un plus beau rôle que celui de son personnage des Enchainés, qui est un film qui épouse son point de vue si bien qu'on trouve Grant trop dure avec elle ? Elle est sublimée par Hitchcock également dans La Maison du Dr. Edwards où, à ses côtés, Peck apparait bien fade. Dans Rebecca, Hitchcock réalise son film exclusivement du point de vue du personnage de Joan Fontaine et Olivier n'est qu'une silhouette lointaine, plus encore que dans le roman de Daphné du Maurier. De même dans Soupçons, où Fontaine fait face à un Grant franchement menaçant et antipathique. L'Ombre d'un doute, autre film qui prend le parti et le point de vue de la femme (la nièce de l'oncle tueur). Grace Kelly a-t-elle jamais été plus belle et libre que dans La Main au collet, où son personnages est merveilleux d'intelligence et de séduction ? Son apparition en caméra subjective dans Fenêtre sur cour n'est-elle pas magique ? Dans La mort aux trousses, Eve Kendall est un magnifique personnage de femme et Hitchcock se moque gentiment des relations de grand enfant entre Roger Thornhill et sa maman. Regarde encore comme Hitchcock change le mythe de Pygmalion dans Vertigo : dans le mythe grec, les femmes sont naturellement infidèles et impudiques et Pygmalion sculpte une statue parce qu'il trouve les femmes indignes ; il tombe amoureux de la statue qui prend vie (récompense divine pour celui qui sculpte, pour la régenter, la diriger, la femme); en parallèle, les vrais femmes sont transformées en statue - c'est un mythe très misogyne, écrit contre les femmes, comme nombre de mythes grecs (Pandore, etc.). Chez Hitchcock, au contraire, c'est Scottie, l'homme, qui est responsable de son malheur et de celui de Madeleine ; si Scottie n'avait pas voulu "sculpter" Judy en Madeleine, la fin tragique ne serait pas survenue et ils auraient peut-être pu vivre heureux ensemble. Ne vois-tu pas qu'Hitchcock condamne ici la propension de l'homme à vouloir créer une femme à l'image d'une pseudo femme idéale (qui n'existe pas, Madeleine n'existant pas) et qu'Hitchcock affronte peut-être dans ce film ses propres démons ? D'ailleurs, les réalisateurs ne sont-ils pas tous des pygmalions à leur manière ?
Pardon pour le caractère désorganisé de cette liste rapide et non exhaustive, mais je me demande comment tu résous le paradoxe de ta position : d'un côté, Hitchcock a sublimé les femmes dans ses films en faisant de ses actrices les héroïnes de nombre de ses films (compare le rôle des femmes dans les films hollywoodiens de la même époque) et d'un autre côté tu mets en cause son traitement des femmes dans ses films en faisant valoir un argument externe relatif aux 'choses de la vie" et à l'éducation d'Hitchcock. Or, le cinéma, et a fortiori le cinéma hollywoodien classique (même si du point de la forme, Hitchcock est un faux classique, il appartient évidemment au Hollywood classique), ne montre pas vraiment les "choses de la vie" (chacun peut faire la part des choses et s'en apercevoir). Le cinéma, en tant qu'art, n'imite pas la nature et n'a pas l'ambition de le faire. Il montre autre chose, il crée un monde à part qui permet de mieux comprendre le vrai monde (sans doute qu'en réalisant certains de ses films, Hitchcock s'est mieux compris lui-même), et il est indéniable qu'Hitchcock a créé un monde de cinéma assez fascinant où de nombreuses grandes actrices ont eu le beau rôle. Par ailleurs, si l'on se met à mettre au ban les artistes au nom du critère d'une vision du monde dépassée, il ne va plus rester grand monde d'acceptable parmi les artistes du passé (par exemple, si je devais reprendre ce genre d'argumentaire, je dirais que je suis davantage gêné par la vision de la femme d'Albert Cohen dans Belle du Seigneur (qui finit bien mal pour Ariane) que par celle d'Hitchcock, etc. ; on n'en finit pas une fois la boite de Pandore ouverte).
Enfin, quant tu dis, qu'il place "la culpabilité au centre de tout", ne vas-tu pas un peu vite ? Tout son cinéma consiste à dire que celui qu'on croyait coupable... et bien, n'est pas coupable en fait... ce qui me parait démontrer en réalité une certaine méfiance vis-à-vis du thème chrétien de la culpabilité, en tout cas une méfiance beaucoup plus grande que tu ne sembles le croire. Le grand thème Hitchcockien, à mon avis, c'est plutôt celui de l'apparence. Il faut aller derrière l'apparence des choses, pour trouver la vérité, si tant est qu'elle existe (après tout, Kaplan n'existe pas).
Si Hitchcock "est un petit garçon dans un corps d'adulte" comme tu le prétends, alors on parle d'un petit garçon sacrément doué et en avance pour son âge.
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Re: Alfred Hitchcock (1899-1980)
J'suis d'accord : ses personnages tombent amoureux / sont séduits par des images ou des représentations. Femmes ou hommes.Strum a écrit :J'ai un peu de mal à comprendre ton analyse. Chez Hitchcock, ce que tu appelles le "fond" transparait dans sa mise en scène (exemple typique : la scène introduisant Madeleine dans Vertigo : elle sort du restaurant en passant devant un miroir : on sait alors déjà qu'elle est double, et qu'il y a derrière les apparences une vérité distincte) et il me parait difficile de séparer les deux ou de faire l'impasse sur ce qui les unit. C'est grâce aux obsessions hitchcockienne que sa mise en scène est si brillante. On lui accorde du crédit non pas à cause de sa vision du monde mais parce que c'est un des rares cinéastes qui a réussi à unir forme et fond, à faire parler ses images, qui montre les apparences et suggèrent en même temps qu'elles sont trompeuses. La forme de ses films continue donc de dire des choses à ceux qui les regardent aujourd'hui, et continuera à faire la joie des exégètes et des cinéphiles du futur, comme c'est le cas pour toutes les grandes oeuves d'art qui révèlent à chaque époque des facettes différentes.Truffaut Chocolat a écrit :En résumé, on a beau être un génie dans sa discipline (fabuleux cadreur, monteur), ça n'empêche pas d'être totalement à côté de la plaque sur les choses de la vie.
En l'occurrence, les femmes, l'amour, tout ça.
Hitchcock, sans déconner ni aucun troll, a pour moi le cerveau d'un enfant dans le corps d'un homme de 40, 50, 60 ou 70 ans.
Qu'on trouve sa technique de réalisation pure fascinante et inspirante des décennies après ne me pose aucun problème, mais qu'on édite encore des livres d'analyse sur le fond de son oeuvre me laisse pantois.
Concernant les femmes et l'amour, tes accusations me laissent également perplexe, comme si tu ramenais toute la filmographie d'Hitchcock à ses relations difficiles avec Tippi Hedren et Kim Novak. Car c'est au personnage d'Hitchcock lui-même que tu sembles en vouloir plus qu'à ses films. Ingrid Bergman a-t-elle jamais eu un plus beau rôle que celui de son personnage des Enchainés, qui est un film qui épouse son point de vue si bien qu'on trouve Grant trop dure avec elle ? Elle est sublimée par Hitchcock également dans La Maison du Dr. Edwards où, à ses côtés, Peck apparait bien fade. Dans Rebecca, Hitchcock réalise son film exclusivement du point de vue du personnage de Joan Fontaine et Olivier n'est qu'une silhouette lointaine, plus encore que dans le roman de Daphné du Maurier. De même dans Soupçons, où Fontaine fait face à un Grant franchement menaçant et antipathique. L'Ombre d'un doute, autre film qui prend le parti et le point de vue de la femme (la nièce de l'oncle tueur). Grace Kelly a-t-elle jamais été plus belle et libre que dans La Main au collet, où son personnages est merveilleux d'intelligence ? Son apparition dans Fenêtre sur cour n'est-elle pas magique ?
Strum a écrit : Par ailleurs, si l'on se met à mettre au ban les artistes au nom du critère d'une vision du monde dépassée, il ne va plus rester grand monde d'acceptable parmi les artistes du passé (par exemple, si je devais reprendre ce genre d'argumentaire, je dirais que je suis davantage gêné par la vision de la femme d'Albert Cohen dans Belle du Seigneur (qui finit bien mal pour Ariane) que par celle d'Hitchcock, etc. ; on n'en finit pas une fois la boite de Pandore ouverte).
Mais ça n'a rien à voir avec ce qui est acceptable ou pas.
Ça a un lien avec ce que tu penses, toi en tant que personne.
Mon prof de Lettres adorait Les nuits Blanches de Dostoïevski.
Moi je vois un type qui a fait un blocage sur une fille et qui reste enfermé pour le restant de ses jours.
Je ne vois pas de belle idée sur l'amour comme le disait mon prof.
Et je suis pas en train de dire que Dosto est bon à jeter aux orties, ça n'a rien à voir.
Je prétends absolument pas prouver quoi que ce soit ou avoir raison, c'est simplement un ressenti.Strum a écrit : Enfin, quant tu dis, qu'il place "la culpabilité au centre de tout", ne vas-tu pas un peu vite ? Tout son cinéma consiste à dire que celui qu'on croyait coupable... et bien, n'est pas coupable en fait... ce qui me parait démontrer en réalité une certaine méfiance vis-à-vis du thème chrétien de la culpabilité, en tout cas une méfiance beaucoup plus grande que tu ne l'impliques. Le grand thème Hitchcockien, à mon avis, c'est plutôt celui de l'apparence. Il faut aller derrière l'apparence des choses, pour trouver la vérité, si tant est qu'elle existe (après tout, Kaplan n'existe pas).
Si Hitchcock "est un petit garçon dans un corps d'adulte" comme tu le prétends, alors on parle d'un petit garçon sacrément doué et en avance pour son âge.
Sur la forme et sur la mise en scène, je suis même pas la moitié d'un milliardième de réalisateur, tout ce que je peux faire, c'est l'apprécier.
Ou pas d'ailleurs.
Le fond, c'est le seul aspect où je peux jouer « « « d'égal à égal » » » note le nombre de guillemets.
Un réalisateur ou un créateur est avant tout quelqu'un de chair et de sang, avec sa vision des choses (parfois morale) qui a des qualités et des défauts.
Etre un grand créateur ne signifie pas être intelligent pour moi, ce sont deux choses différentes.
Quand il crée, il le fait avec toute sa subjectivité et moi je reçois ça avec la mienne.
Les films d'Hitchcock, je les trouve creux et superficiels, et pour reprendre un mot que les améwicains aiment bien, pas insightful.
Combien trouvent Vertigo (exemple que tout le monde connait) d'un romantisme désespéré et fabuleux ?
Moi je vois l'histoire d'un type qui tombe amoureux d'une image.
Et ça, c'est un fantasme de petit garçon, digne d'une cour d'école.
A l'âge adulte, ça se transforme par un type qui poursuit une fille jusque devant chez elle – et ça arrive tous les jours.
Je peux pas trouver ça beau, pertinent ou même mignon.
Parce que je suis très pragmatique sur ces choses-là.
Et sur la culpabilité : ben, oui l'idée est que celui qui est coupable ne l'était pas vraiment. Ou qu'il faut se méfier des apparences si tu veux.
Reste que dans ses films, on tourne autour de ça avec des variations.
Peut-être parce qu'à l'époque, la peur de la police, des institutions voire de l'État se justifiait.
C'était une autre temps.
Aujourd'hui, je vois ça avec le sourire en coin.
J'ai peut-être tort, mais c'est comme ça.
Je ne vois rien ni ne retiens rien d'intéressant dans les Oiseaux, Marnie, Psychose, Fenêtre, Le crime était presque parfait, Frenzy, L'inconnu du nord-express, et d'autres que j'ai oublié, et que tu as cité (le poids du passé dans Rebecca, c'est tellement, radicalement, opposé à ma façon de voir les choses...)
J'aime bien La mort aux trousses, parce que c'est ludique.
Y'a un peu de ça dans les 39 marches, aussi.
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Re: Alfred Hitchcock (1899-1980)
Mais on n'est pas obligé de comprendre le comprendre le comportement névrotique de Stewart pour y adhérer ou y trouver une force dramatique?Truffaut Chocolat a écrit :Combien trouvent Vertigo (exemple que tout le monde connait) d'un romantisme désespéré et fabuleux ?
Moi je vois l'histoire d'un type qui tombe amoureux d'une image.
Et ça, c'est un fantasme de petit garçon, digne d'une cour d'école.
A l'âge adulte, ça se transforme par un type qui poursuit une fille jusque devant chez elle – et ça arrive tous les jours.
Je peux pas trouver ça beau, pertinent ou même mignon.
Parce que je suis très pragmatique sur ces choses-là.
Et l'important n'est pas tant le pourquoi mais comment Hitchcok utilise des formes pour matérialiser tout ça: le cercle (symbole de la réincarnation), le double, la façon de suivre de quelqu'un dans les rues de San Francisco, d'utiliser la topologie d'une ville.
Qui mieux que Hitchcock arrive à transcender ce que véhicule une rue, un paysage, une maison et à en faire des endroits "mythiques"?
La forme est constamment en accord avec le fond (les scènes répétées/doublées).
D'une certaine façon, le fantasme de petit garçon dont tu parles est "presque" accessoire au plaisir esthétique qu'il peut fournir.
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