Miriam Hopkins (1902-1972)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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francesco
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Miriam Hopkins (1902-1972)

Message par francesco »

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C'etait une typique "Southern belle", une Scarlette en vrai, une aristocrate authentique du cinéma, qui savait tenir la dragée haute a n'importe quel partenaire et pouvait voler un film, et a fortiori une scene, grace a sa présence dévastatrice.
On n' a jamais papillonne comme Miriam Hopkins, dont la fine silhouette et la vivacite, cette derniere prodigieuse, epuisante même, s'alliaient à une durete, une solidite, quelque chose qui tenait a la fois du diamant et de l'acier trempe et qui n'etait qu'a elle.

Les premiers roles au cinéma de ce grand nom du theatre, furent les plus brillants.
Elle débuta une association avec Lubitch qui déboucha sur au moins deux chef d'oeuvre. Dans Haute Pegre, en voleuse a la tire qui multiplie les déguisement, le brillant de son jeu n'etait surpasse que par l'alchimie qui se dégageait du couple Marshall-Kay Francis.
Dans Sérénade à 3 elle avait deux hommes (et quels hommes : rien moins que March et Cooper) pour elle et trouvait le role de sa vie : il faut avoir vu ce film pour comprendre se que s'encanailler avec elégance veut dire.

Parallelement deux autres grands réalisateurs surent tirer partie de sa theatralite bouillonante.

Mamoulian dans son Docteur Jeckyll et Mister Hyde en faisait une troublante figure de la féminite persécute. Difficile d'etre plus erotique que Miss Hopkins en jetant des dessous a la figure d'un monsieur. Nous etions en 33.
En 1935 elle tourne dans le premier film en technicolor Becky Sharp, d'apres Vanity Fair. Elle y gagna en tous cas une nommination aux oscars. On n'en parle ailleurs sur ce forum, mais en fait c'est le fait d'avoir vu aujourd'hui l'interpretatiom de Whiterspoon dans le meme personnage qui m'a donne envie de reactualiser ce portrait : autant Reese cherche a adoucir le personnage, a le rendre sympathique, autant Hopkins assume parfaitement le caractere impitoyable de l'ambitieuse, son energie, litteralement devastatrice. Une interpretation brillantissime en fait. On dit la meme chose de son interpretation de Temple Drake que je n'ai pas vu. Sans concession.

Troisieme figure a avoir compte pour Miriam Hopkins, et cette fois tout au long de sa carrière : Wiliam Wyler, lui meme. Il la dirige d'abord dans Ils etaient trois, des années plus tard il lui fait débuter sa carrière de grande dame bien conservée. D'abord dans L'Héritiere (1949). Son interprétation virtuose transcendait un role de faire valoir et elle gagna une nommination aux Golden Globes.
Il en fut de meme dans le très beau Un Amour désespére ou¹ elle fut simplement remarquable dans un role terriblement ingrat.
Enfin dans La Rumeur (1961), sublime adaptation du drame de Lilian Hellmann et accessoirement remake de Ils etaient trois, elle osait des maniérismes qui apres tout etait ceux du personnage de vieille actrice au chomage.

Ne nous attardons pas sur une rivalite célebre avec la grande Bette : restent deux films qui sont peut-etre le sommum de l'art de Miriam Hopkins. Le duo infernable fonctionnait extremement bien c'etait indéniable, et finalement c'etait Hopkins qui tirait son epingle du jeu. D'abord dans La Vieille Fille de Goulding (1949), beau film classique qui tourne autour d'un escalier, de quatre mariage et de plus d'un enterrement : Hopkins vipérine a souhait se révélait au cour d'une scene d'affrontement mémorable un monstre de mesquinerie. Voir son visage gracieux et aimable se durcir en une seconde effrayante etait une lecon pour tous les eleves des conservatoires.
Puis en 1943 dans L'impossible Amour, face a une Davis encore une fois victime, elle offrait un numéro splendide et extremement drole qui est une sorte de testament artistique.

Hopkins tourna beaucoup, surtout dans les années 30. Rappelons son role dans Barbary Coast de Hawks (1936), son espionne sudiste en jupon dans le western La Caravane héroique de Curtiz (on etait a 1000 lieus de la gentille Olivia de Havilland et finalement c'etait assez excitant), sa participation en toute fin de carrière (1961) a The Chase de Arthur Penn, et rappelons en hommage qu'elle n'hésitera à se charger -en 1933 !!!- du role si contreverse de Temple Drake base sur le scandaleux Sanctuaire de Faulkner. Preuve, s'il en etait besoin que celle qui fut plébiscite pour jouer Scarlett O' Hara par tous les sudistes purs et durs, n'eut jamais froid aux yeux !
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Ann Harding
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Message par Ann Harding »

Moi aussi, j'aime bien Hopkins qui avait un caractère très trempé....Il faut lire son interview dans les années 70 par John Kobal pour voir que même à cette époque, elle avait conservé son mordant!!!! Eludant les questions qui lui déplaisent.....Je crois que Bette Davis adorait la secouer!!!
Il y a un autre film intéressant à voir avec elle: The Stranger's Return-1933 de King Vidor. Elle y a un rôle atypique, plus sympathique que d'habitude. Ses scènes avec Lionel Barrymore, qui interprête son grand père sont très émouvantes.
Sinon, j'aime aussi sa Becky Sharp et Design for Living. Pour ce dernier, j'ai toujours un pincement au coeur en pensant au casting original imaginé par Lubitsch: Leslie Howard et Ronald Colman....Argh! Il dut se contenter de contract players de la Paramount. J'adore ce film qui américanise totalement la pièce de Coward, mais, j'imagine ce que Colman aurait pu faire dans le rôle de Cooper......
Quant à The Story of Temple Drake, il fut considéré très scandaleux à l'époque, mais, il a subi les foudres du censeur immédiatement, éliminant toute allusion choquante. On dit d'ailleurs que c'est ce film à lui tout seul qui a amené la censure (Production Code) en juillet 1934.......
bogart
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Message par bogart »

Suite à ma découverte du Docteur Jekyll j'évoquais l'érotisme troublant de cette comédienne.

Actrice que je connais peu en dehors des "Lubitsch" et d'Arthur Penn qui la fit tourner à la fin de sa carrière dans La poursuite impitoyable (1966) aux côtés de Marlon Brando, Robert Redford, Jane Fonda et Angie Dickinson.
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Ann Harding
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Message par Ann Harding »

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Miriam Hopkins terrorisée par Jack LaRue et Florence Eldridge dans The Story of Temple Drake.....Ca donne envie de le voir ce film :mrgreen:
francesco
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Message par francesco »

Au cours d'un reportage sur la figure feminne liberee au cinema dans les annees 30, j'ai appris que, si le film etait edulcore, la performance d'Hopkins ne l'etait absolument pas : elle composait avec ferocite le portrait d'une South Belle (encore !) qui finissait par assumer sa cruaute et sa nymphomanie ... tout un programme !
Davis et Hopkins se haissaient :
En 35 Davis remporta l'oscar devant Hopkins, favorite, ensuite elle fit un triomphe au cinema d'une piece qu'avait cree Hopkins : Jezabel (L'Insoumise), ensuite pendant le tournage de The Sisters, on pretendit que Davis avait une liaison avec Litvak, alors epoux d'Hopkins. Pendant les tournages de La Vieille fille et de L'Impossible amour, ce fut la guerre ouverte, Hopkins etant particulierement coriace. Goulding, pressenti pour realiser ce dernier film, simula un arret du coeur pour ne pas retravailler avec elles deux.
Hopkins a toujours la reputation d'etre insupportable et tres snob : elle ne frequentait que l'elite intellectuel theatral et meprisait quelque peu le cinema.
Symptomatiquement elle fut systematiquement ignoree des votants de l'academie, apres 35, et ce en depit de prestations tres brillantes dans des films "en vue" qui valaient systematiquement des recompenses a ses partenaires.
Elle a aussi ete elue "la femme avec laquelle il serait le moins bon de vivre sur une ile deserte" :mrgreen: :mrgreen: :mrgreen:
Je ne connais pas l'interview dont parle AnnHarding. C'est disponible ou ??????

Enfin, bref, en depit de tout cela, une fascinante personnalite cinematographique a mon avis. :D
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Ann Harding
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Message par Ann Harding »

francesco a écrit : Je ne connais pas l'interview dont parle AnnHarding. C'est disponible ou ??????
C'est dans le livre People Will Talk de John Kobal (Ed. Alfred A. Knopf, 1986) qui contient de nombreuses et passionantes interview de stars....McCrea, Anna Sten, Arletty......
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Supfiction
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Message par Supfiction »

Quels sont ses films disponibles en dvd ?

- Serenade à trois : est disponible dans le coffret gary Cooper zone 1
- Becky Sharp : en edition Bach Films (image mediocre bien entendu)
- Barbary Coast : en zone 1 avec vostf
- Docteur Jekyll : en bonus du dvd zone 2 du remake avec Ingrid Bergman et Spencer Tracy !

Pour ma part, ce sont les seuls que je connais.
Je ne possede pas Barbary Coast et je ne sais pas ce que vaut ce "western".. Quelqu'un en sait-il plus ?
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Ann Harding
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Message par Ann Harding »

Je n'ai pas vu Barbary Coast, mais ça a l'air intéressant. Hopkins était sous contrat chez Samuel Goldwyn quand elle l'a fait. Le film a été commencé par Wyler avec Cooper et Anna Sten , puis arrêté par Goldwyn et repris par Howard Hawks avec Hopkins et McCrea. le scénario est des duettistes Hecht et McArthur, bon signe! David Niven fait une micro-apparition dans un de ses tous 1ers rôles.....

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Message par joe-ernst »

Ann Harding a écrit :On trouve aussi:

The heiress en Z2 UK
Est-il sous-titré ?
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Message par Ann Harding »

joe-ernst a écrit :
Ann Harding a écrit :On trouve aussi:

The heiress en Z2 UK
Est-il sous-titré ?
Je ne crois pas...
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Message par joe-ernst »

Tant pis, mais merci pour la réponse !
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Re: Miriam Hopkins

Message par Ann Harding »

francesco a écrit :C'etait une typique "South belle",
Au fait, Francesco, on dit Southern Belle.... :wink:
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Message par francesco »

Oui tu as completement raison pour Southern et pas South.
Carrie, un amour desespere en Vf, etait disponible il y a encore peu un peu partout (traduire : a la fnac :mrgreen: ) dans la collection "Best of of Paramount".
C'est un film bouleversant, tire d'un tres beau roman de l'auteur de An American tragedy dans lequel Laurence Olivier offre une performance d'une finesse extraordinaire. Le role est tres fort. Jennifer Jones n'est pas en reste, mais c'est peut etre Hopkins dont on se souvient en priorite, tant son portrait d'une epouse cupide et mauvaise est frappant. Pourtant le role est relativement court.
Je n'ai jamais vu le film de Hawks, mais je sais que le debut s'inspire plus ou moins ouvertement de Morocco : une blonde mysterieuse qui arrive dans une ville.
Hopkins a tourne un certain nombre de films avec McCrea qu'elle retrouve ici : Goldwyn tenant a son idee de creer a l'ecran des couples "stables."

Parmis les films que je serais curieux de voir il y a donc The Story of Temple Drake et puis une curiosite de Curtiz Bernarth : The Lady with red hair, biographie d'une icone du theatre au tournant du XXeme siecle. Etant elle meme une vedette de la scene je me demande ce que ca peut donner.


PS : il faut reellement essayer de voir The Heiress, sous titrage ou pas : l'interpretation du quatuor principal (domine par une inoubliable Olivia de Havilland) vaut la peine !
francesco
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Message par francesco »

J'ai vu (je devrais dire nous avons vu !) Ville sans loi ... et franchement c'était un vrai plaisir (même si le film a mauvaise réputation)
Précisons qu'il s'agit bien d'une zone 1 mais qu'il y a un sous titrage français.
A part une fin que j'ai trouvé assez "plaquée" j'ai trouvé le film très agréable. Bon on ne sent pas spécialement que c'est du Hawks mais le personnage de Hopkins, encore une fois une femme dure et coriace sous des allures froufroutantes, est extrêmement intriguant, ce qui fait la force du film en fait, qui alterne séquence brumeuse (dans la nuit et le brouillard les personnages deviennent de véritables apparition) et moments ... enfumés (ben oui l'intrigue se passe dans un saloon quand San Francisco n'était pas encore une ville "civilisée" :mrgreen: )
Beau personnage de poète joué par Mc Crea. Dans le Tulard on écrit "on attend pendant tout le film qu'il sorte une matraque, un fusil ... et rien"
C'est franchement ne pas avoir compris le film qui porte justement sur la violence ! Robinson est, comme d'habitude, très bien dans un rôle peu amène de méchant impitoyable (bon en même temps c'est un registre qu'il connait bien)
Le scénario se suit avec intérêt et certaines séquences sont très réussies (l'arrivée d'Hopkins en bateau qui se dévoile soudain, dure et apre au gain, la rencontre du couple au cour d'une soirée orageuse, la pendaison rythmée comme une cérémonie du bras droit du méchant Robinson etc etc etc)
Beau vestiaire pour l'héroine (et pour Robinson couvert de franfreluches ! :uhuh: ) et photo "de qualité" en plus
kim
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Message par kim »

Dans Ville Sans Loi, Joel Mac Crea parle du personnage de Myriam Hopkins comme d'une apparition; mais si apparition il y a, c'est bien celle de Joel Mc Crea: son romantisme, sa poésie, sa beauté en font un ange perdu dans une cohorte de brutes assoiffés d'or, dont Hopkins et Robinson en sont les plus vils représentants !!
Quoiqu'Hopkins soit un tantinet plus humaine !!! :lol:

Très bon film, belle découverte pour ma part, qui ne reflète pas le style de Hawks, mais qui fait partie des pépites à découvrir.
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