La rencontre du grand mufti de Jerusalem avec Hitler ainsi que le paiement par les allemands de subsides en vue de soulèvements en Palestine étant attestés historiquement, les scènes que tu mentionnes avec le "nazi" y sont sans doute une allusion, qu'on peut trouver maladroite. Il est certain que le film prend le point de vue des israeliens, mais c'est logique puisqu'il raconte principalement l'histoire de réfugiés juifs arrivant en Israël. En outre, les dérives violentes et nationalistes de l'Irgoun ne sont pas passées sous silence par le film.cinephage a écrit :Très amateur du cinéma de Preminger, je trouve que, si Exodus est un film intéressant, on est quand même loin des meilleurs titres du cinéaste. L'intrigue est effectivement très découpée, à tenter de regrouper des évènements historiques de nature très différente, et d'inégal intérêt. On passe de moments passionnants à des exposés un peu barbants, de séquences romantiques en confessions souterraines, d'évasions spectaculaires en village assiégé. Certes, le film a le mérite de retracer une histoire riche en évènements, mais il y gagne un encombrant coté fourre-tout qui en gêne la lisibilité.
Comme le signal le texte, la quasi-absence des palestiniens, et l'étrange nazi qu'on voit à leur tête, est tout de même un souci... Mais à mon sens, en embrassant une thématique aussi vaste, Preminger ne peut que renoncer à émouvoir ou atteindre le spectateur. Ni les relations aux enfants, ni l'histoire d'amour, ni la relation fraternelle contrariée, n'ont le temps de se construire sur autre chose que du factuel (cf par exemple le très pesant laïus sur les enfants traumatisés de la shoah, servi par le docteur à Eva Marie Saint, mais dont observera jamais la vérité dans le film, il ne s'agit que d'ajouter du factuel).
Mais je ne pense pas que le fait que le film adopte un point de vue historique doive être mis à son débit. On ne peut demander au cinéma d'être totalement neutre ou juste historiquement alors même qu'aucun livre d'Histoire ne l'est totalement, que l'Histoire est souvent écrite par des vainqueurs, et est en dernière analyse affaire de points de vue se croisant et que personne n'est à même de réconcilier dans une parfaite neutralité. Dans Exodus, le point de vue adopté permet au film de dérouler une histoire que je trouve passionnante. Et s'il est vrai que le film condense un maximum de faits, ou se construit sur du "factuel" comme tu le dis, et qu'il s'articule autour de blocs narratifs massifs (mais fort bien agencés) au détriment parfois de ses personnages, je reste très admiratif de la capacité de Preminger à conjuger grand spectacle et Histoire dans ce film avec plusieurs morceaux de bravoure que je n'ai pas oubliés, sur un sujet très compliqué sur lequel je doute que quiconque puisse faire un film qui plaise au plus grand nombre ou rende justice à chaque protagoniste.
J'ajouterai, ce qui pourra éclairer mon "un des tous meilleurs Preminger", que je ne peux me considérer comme un amateur de Preminger au sens où Laura, par exemple, m'a laissé circonspect. En revanche, ce qui m'exonérera peut-être un peu cette fois aux yeux des amateurs de Preminger, je préfère un Autopsie d'un Meurtre à Exodus.