La condition de l'homme (Masaki Kobayashi - 1959/61)
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La condition de l'homme (Masaki Kobayashi - 1959/61)
*La condition de l'homme (Ningen no joken) de Masaki Kobayashi (1959-1961)
Je ne sais pas trop quoi dire sur ce film incroyable, que je viens de revoir... Seulement il me semble juste d'y consacrer un topic. Et comme le film ressort à la fin de l'année chez Carlotta, ça me semble le bon moment pour en parler, ce film restant injustement trop méconnu, en comparaison de son importance.
Avant tout, il faut savoir qu'il s'agit d'un des plus longs films du monde, atteignant presque les 10h. Que peut-on bien raconter un film durant autant de temps ?
****
1943 - Nous suivons le destin d'un homme, Kaji, un jeune idéaliste qui pour être exempter de son devoir envers sa patrie en guerre, accepte un poste de travail dans un camp minier, accompagné de sa jeune femme. Charger de s'occuper des ouvriers, il se rend vite compte que leurs conditions de travail sont épouventables... Mais aussi, la police militaire charge le camp de garder et faire travailler quelques 600 prisonniers de guerre chinois. Ces derniers seront traiter comme de véritable bêtes. Kaji le non-violent, se dressant donc contre tous ses supérieurs, luttera de son mieux pour la cause de tous les travailleurs ainsi que celles des prisonniers.
Finalement, Kaji le gêneur est mobilisé et doit partir à l'armée. Là-bas, ses idéaux ne sont guère plus appréciés, et il ne se fait que peu d'amis. Il part finalement au front pour une guerre terrible, laissant derrière lui sa femme qu'il n'a revu qu'une fois depuis sa mobilisation...
La guerre finie, Kaji, accompagné de quelques soldats en vie, entreprend un très long et terrible voyage afin de rentrer au pays, la faim et la nature hostile ne leur faisant pas de cadeau. Mais Kaji et finalement fait prisonnier par les russes...
****
Ce sont donc les grandes lignes de ce films en partie autobiographique, Masaki Kobayashi ayant été lui aussi mobilisé en Mandchourie et fait prisonnier. Le cinéaste se laisse aller à une critique humaniste sans concession, dénoncant l'injustice, la violence, la cruauté, la guerre... la connerie humaine ! Le tout est teinté d'un pessimisme souvent douloureux, les actions de cet utopiste de Kaji étant constamment vouées à l'échec.
Réalisé durant trois longues années, Kobayashi livre un film géant, impressionnant, cruel et très bouleversant, cela avec une maîtrise qui laisse béat d'admiration (si ce n'est certains effets comme ces cadrages obliques que certains jugent un peu vieillots - je ne trouve pas), ponctué de scènes franchements époustouflantes (l'arrivée des prisonniers - leur révolte - la longue scène de guerre avec les chars - ou bien Kaji dans la neige dans un final sublime...) et d'images inoubliables.
Le film est constitué de trois parties (bien sûr indissociables, puisqu'il s'agit d'un seul et même film) : 1. ll n'y a pas de plus grand amour - 2. Le Chemin de l'éternité - 3. La prière du soldat, et en revoyant la première moitiée de la seconde partie que j'avais un peu oublié, une chose m'a très surprise. En effet, on peut se demander si Stanley Kubrick a vu La condition de l'homme avant de réaliser son Full Metal Jacket (ça saute vraiment aux yeux)
Kaji, qui se retrouve donc à l'armée, fait de son mieux pour épauler un soldat, le bouleversant Obara, qui fait toujours tout de travers et ne réussissant jamais dans les épreuves d'entrainement. Par conséquent, Obara se fait terriblement maltraiter et humilier par ses supérieurs hiérarchique ainsi que par les autres soldats. Celui ci à bout finira par commettre l'irréparable.
On retrouve bien avec Guignole et Baleine une histoire très semblable à celle de Kaji et Obara. Seulement ça reste plus fort, plus cruel et bouleversant chez Kobayashi.
Durant cette longue histoire, on retrouve, outre Kaji et sa femme, un nombre fabuleux de personnages, beaucoup étant très passionnants, que se soit parmis les collègues et les prostitués du camps, les prisonniers, ainsi que le jeune Chen, ou parmis les soldats, les infirmières de l'armée... Un nombre très étonnant de portraits sont donc dressés, mais aussi superbement interprétés. Il est d'ailleurs étonnant de voir le nombre d'acteurs de hautes volée qui traversent l'écran : Minoru Chiaki - Susumu Fujita - Sô Yamamura - Hideko Takamine - Chishu Ryu - Seiji Miyaguchi... Sans oublier celui qu'on ne pourra plus oublier après avoir vu ce film, l'immense Tatsuya Nakadai, dans le rôle de Kaji.
Masaki Kobayashi a choisi cet acteur peu connu à l'époque mais qu'il avait déjà dirigé, alors que personne ne l'attendait. Nakadai deviendra par la suite un des acteurs les plus importants de sa génération au japon (et au monde) et considèrera toujours Kaji comme le rôle le plus important sa belle carrière (avec celui celui qu'il a tenu dans le classique Harakiri du même Kobayashi).
C'est en effet un de ses rôles les plus mémorables et poignant. Il est tellement passionnant de suivre l'évolution de son personnage durant ces longues heures (de plus en plus passionnantes au fur et à mesure qu'elles passent), jusqu'à ce final qui prend littéralement aux trippes (un des plus beaux mais pessimiste que j'ai vu).
La condition de l'homme est un film hors du commun (sans doute l'oeuvre la plus importante de l'auteur de Harakiri, Kwaidan et Rébellion), un monument du cinéma mondial et un immense chef-d'oeuvre qui doit absolument être redécouvert. Quel joie de savoir qu'il débarque bientôt en dvd chez nous. Je ne peux que vous encourager à vous ruer dessus lors de sa sortie, le but de ces minables lignes étant surtout de vous en donner envie.
Un de mes films préférés !
Je ne sais pas trop quoi dire sur ce film incroyable, que je viens de revoir... Seulement il me semble juste d'y consacrer un topic. Et comme le film ressort à la fin de l'année chez Carlotta, ça me semble le bon moment pour en parler, ce film restant injustement trop méconnu, en comparaison de son importance.
Avant tout, il faut savoir qu'il s'agit d'un des plus longs films du monde, atteignant presque les 10h. Que peut-on bien raconter un film durant autant de temps ?
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1943 - Nous suivons le destin d'un homme, Kaji, un jeune idéaliste qui pour être exempter de son devoir envers sa patrie en guerre, accepte un poste de travail dans un camp minier, accompagné de sa jeune femme. Charger de s'occuper des ouvriers, il se rend vite compte que leurs conditions de travail sont épouventables... Mais aussi, la police militaire charge le camp de garder et faire travailler quelques 600 prisonniers de guerre chinois. Ces derniers seront traiter comme de véritable bêtes. Kaji le non-violent, se dressant donc contre tous ses supérieurs, luttera de son mieux pour la cause de tous les travailleurs ainsi que celles des prisonniers.
Finalement, Kaji le gêneur est mobilisé et doit partir à l'armée. Là-bas, ses idéaux ne sont guère plus appréciés, et il ne se fait que peu d'amis. Il part finalement au front pour une guerre terrible, laissant derrière lui sa femme qu'il n'a revu qu'une fois depuis sa mobilisation...
La guerre finie, Kaji, accompagné de quelques soldats en vie, entreprend un très long et terrible voyage afin de rentrer au pays, la faim et la nature hostile ne leur faisant pas de cadeau. Mais Kaji et finalement fait prisonnier par les russes...
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Ce sont donc les grandes lignes de ce films en partie autobiographique, Masaki Kobayashi ayant été lui aussi mobilisé en Mandchourie et fait prisonnier. Le cinéaste se laisse aller à une critique humaniste sans concession, dénoncant l'injustice, la violence, la cruauté, la guerre... la connerie humaine ! Le tout est teinté d'un pessimisme souvent douloureux, les actions de cet utopiste de Kaji étant constamment vouées à l'échec.
Réalisé durant trois longues années, Kobayashi livre un film géant, impressionnant, cruel et très bouleversant, cela avec une maîtrise qui laisse béat d'admiration (si ce n'est certains effets comme ces cadrages obliques que certains jugent un peu vieillots - je ne trouve pas), ponctué de scènes franchements époustouflantes (l'arrivée des prisonniers - leur révolte - la longue scène de guerre avec les chars - ou bien Kaji dans la neige dans un final sublime...) et d'images inoubliables.
Le film est constitué de trois parties (bien sûr indissociables, puisqu'il s'agit d'un seul et même film) : 1. ll n'y a pas de plus grand amour - 2. Le Chemin de l'éternité - 3. La prière du soldat, et en revoyant la première moitiée de la seconde partie que j'avais un peu oublié, une chose m'a très surprise. En effet, on peut se demander si Stanley Kubrick a vu La condition de l'homme avant de réaliser son Full Metal Jacket (ça saute vraiment aux yeux)
Kaji, qui se retrouve donc à l'armée, fait de son mieux pour épauler un soldat, le bouleversant Obara, qui fait toujours tout de travers et ne réussissant jamais dans les épreuves d'entrainement. Par conséquent, Obara se fait terriblement maltraiter et humilier par ses supérieurs hiérarchique ainsi que par les autres soldats. Celui ci à bout finira par commettre l'irréparable.
On retrouve bien avec Guignole et Baleine une histoire très semblable à celle de Kaji et Obara. Seulement ça reste plus fort, plus cruel et bouleversant chez Kobayashi.
Durant cette longue histoire, on retrouve, outre Kaji et sa femme, un nombre fabuleux de personnages, beaucoup étant très passionnants, que se soit parmis les collègues et les prostitués du camps, les prisonniers, ainsi que le jeune Chen, ou parmis les soldats, les infirmières de l'armée... Un nombre très étonnant de portraits sont donc dressés, mais aussi superbement interprétés. Il est d'ailleurs étonnant de voir le nombre d'acteurs de hautes volée qui traversent l'écran : Minoru Chiaki - Susumu Fujita - Sô Yamamura - Hideko Takamine - Chishu Ryu - Seiji Miyaguchi... Sans oublier celui qu'on ne pourra plus oublier après avoir vu ce film, l'immense Tatsuya Nakadai, dans le rôle de Kaji.
Masaki Kobayashi a choisi cet acteur peu connu à l'époque mais qu'il avait déjà dirigé, alors que personne ne l'attendait. Nakadai deviendra par la suite un des acteurs les plus importants de sa génération au japon (et au monde) et considèrera toujours Kaji comme le rôle le plus important sa belle carrière (avec celui celui qu'il a tenu dans le classique Harakiri du même Kobayashi).
C'est en effet un de ses rôles les plus mémorables et poignant. Il est tellement passionnant de suivre l'évolution de son personnage durant ces longues heures (de plus en plus passionnantes au fur et à mesure qu'elles passent), jusqu'à ce final qui prend littéralement aux trippes (un des plus beaux mais pessimiste que j'ai vu).
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Un de mes films préférés !
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Excellente nouvelle que cette édition en dvd pour la fin de l'année.Ta chronique m'a donné envie de revoir ce monument du cinéma mondial qui reste scandaleusement méconnu dans notre beau pays(sa duréé a fait reculer tous les distributeurs)Heureusement reste la vidéo qui permet de faire revivre le chef d'oeuvre de Kobayashi (et il a de sacrés bons films à son actif).Esperons que l'édition sera à la hauteur!
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Re: La condition de l'homme - Masaki Kobayashi (1959-61)
Bravo pour ta chronique. Cela donne furieusement envie de le voir. J'adore le cinéma japonais depuis la vision à Chaillot au début des années soixante, d'un film de Nagisa Oshima qui s'appelait "Blousons noirs" si mes souvenirs sont exacts car je ne l'ai jamais revu nulle part. Je ne crois même pas qu'il ait bénéficié d'une sortie en France ??k-chan a écrit :Je ne sais pas trop quoi dire sur ce film incroyable, que je viens de revoir...
On a pas été très gaté au niveau cinéma japonais en France à part Kurosawa, quelques Mizoguchi, Kaneto Shindo dont le très critiqué "Onibaba" me plait tellement que je suis capable de me le repasser en boucle plusieurs fois de suite sans m'en lasser, je suis complètement sous le charme. Tous mes amis me disent que c'est nul!!!
Allez vivement le Kobayashi
- k-chan
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Merci à vous !
Sachez que mon petit texte ne rend absolument pas compte de la grandeur, de la force, et de la richesse de ce film. Il faut le voir pour le croire. Dommage que personne l'ayant vu (hormis Randolph) ne vienne en parler. Car il y aurait bien des choses à ajouter (Fatalitas ?? ) .
Encore 7 mois à attendre, avant la sortie du dvd, un peu long en effet. Ceux qui ont du retard dans leurs visionnages on intérêt à rattrapper leur retard, parce que caler 10h pour un film...
Sachez que mon petit texte ne rend absolument pas compte de la grandeur, de la force, et de la richesse de ce film. Il faut le voir pour le croire. Dommage que personne l'ayant vu (hormis Randolph) ne vienne en parler. Car il y aurait bien des choses à ajouter (Fatalitas ?? ) .
Encore 7 mois à attendre, avant la sortie du dvd, un peu long en effet. Ceux qui ont du retard dans leurs visionnages on intérêt à rattrapper leur retard, parce que caler 10h pour un film...
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Vu et adoré. Une oeuvre monumentale dont je me refuse à parler car je préfère garder mes bilels pour plus tard
Les films sont à notre civilisation ce que les rêves sont à nos vies individuelles : ils en expriment le mystère et aident à définir la nature de ce que nous sommes et de ce que nous devenons. (Frank Pierson)
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- k-chan
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OuiPhilip Marlowe a écrit :Mais comme c'est 3 parties distinctes on peut prolonger ses entractes non?k-chan a écrit : Encore 7 mois à attendre, avant la sortie du dvd, un peu long en effet. Ceux qui ont du retard dans leurs visionnages on intérêt à rattrapper leur retard, parce que caler 10h pour un film...
Là j'ai essayé de le voir en entier, mais je n'ai pas pu. J'ai quand même regarder les parties 2 et 3 d'un seul trait, et c'est déjà éprouvant.
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- n'est pas Flaubert
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De toute façon, n'est-ce pas typiquement le genre de film à voir en trois parties, pour mieux s'impreigner de la richesse de l'ensemble ? Le voir en continu serait alors presque un obstacle à la compréhension globale du film en tuant tout recul.
C'est ainsi le cas pour la trilogie d'Apu de Satyajit Ray qui se décline en trois films. C'est sublime, mais si fort, si émouvant, qu'il ne me viendrait pas à l'idée de le revoir autrement que par film séparé (chaque film m'avait fait pleurer comme une madeleine).
C'est ainsi le cas pour la trilogie d'Apu de Satyajit Ray qui se décline en trois films. C'est sublime, mais si fort, si émouvant, qu'il ne me viendrait pas à l'idée de le revoir autrement que par film séparé (chaque film m'avait fait pleurer comme une madeleine).
- Vic Vega
- Roi du BITE
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Les trois volets se complètent mais ils ont chacun leur cohérence narrative, thématique... autonome. Ils peuvent donc être vus aussi bien d'un trait si on s'en sent le courage que séparément. Le plus important de toute manière concernant de tels films, c'est d'abord qu'on les voie...Strum a écrit :De toute façon, n'est-ce pas typiquement le genre de film à voir en trois parties [...]?
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- Euphémiste
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- Inscription : 14 avr. 05, 20:28
- Localisation : Québec
Wow, 10h !
Un film sur 4 dvd... faut le faire.
Bien sur je ne l'ai jamais vu.
Un film sur 4 dvd... faut le faire.
Bien sur je ne l'ai jamais vu.
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