Fureur Apache (Robert Aldrich - 1972)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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Wall of Voodoo Fan
Machino
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Message par Wall of Voodoo Fan »

Il est à noter que le DVD de Ulzana's Raid / Fureur Apache ne contient pas le doublage français d'époque, mais un redoublage passe-partout. Bien entendu, rien n'est indiqué sur le boîtier du DVD. Cela devient une (consternante) habitude chez Universal. :(
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Alfred Kralik
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Message par Alfred Kralik »

Effectivement alléchant.
Et Aldrich, c'est pas rien ! :wink:
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dortmunder
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Message par dortmunder »

blaisdell a écrit : Un film complexe, culotté. Bien évidemment la critique post-soixante-huitarde n'a pas aimé ce film à l'opposé de la bien-pensance et des raccourcis. Mais ce n'est pas très grave car LE PARRAIN ou DIRTY HARRY eurent également des soucis dans la presse française.
Un film majeur.
D'une facon générale, un certain courant critique monte sur ses ergots dès que l'on écorne le mythe rousseauiste du "bon sauvage".
Comme si un peuple (en l'occurence, les apaches dans le très bon Ulzana's raid ) allait laisser des allogènes envahir leurs terres et détruire leurs racines, sans combattre férocement
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Randolph Carter
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Message par Randolph Carter »

Wall of Voodoo Fan a écrit :Il est à noter que le DVD de Ulzana's Raid / Fureur Apache ne contient pas le doublage français d'époque, mais un redoublage passe-partout. Bien entendu, rien n'est indiqué sur le boîtier du DVD. Cela devient une (consternante) habitude chez Universal. :(
C'est un genre de pratique qu'il convient de dénoncer.A la limite,ça frise l'arnaque.
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Strum
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Message par Strum »

J'ai finalement pu voir le film. C'est très bien, avec une approche assez étonnante, séche, sans lyrisme, réaliste et quasi-ethnologique, de l'incompréhension existante entre les indiens et la cavalerie américaine. Très bon scénario.
claudecloclo
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Message par claudecloclo »

Randolph Carter a écrit :
C'est un genre de pratique qu'il convient de dénoncer.A la limite,ça frise l'arnaque.
D'après mes sources, un certain nombre de consommateurs ont agi au civil contre Universal et ont obtenu le ... remboursement des DVD contenant uniquement un redoublage à la place de la 1ère VF.
Walt Disney a aussi perdu des procès pour avoir changé les doublages sans en apposer l'avertissement sur le DVD.
bruce randylan
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Message par bruce randylan »

Fureur Apache
Excellent western noir, violent et intense qui confronte deux mondes ( le "civilisé" et celui des indiens ) pour pointer du doigt la complexité de l'âme humaine et sa fascination pour la mort.
C'est aussi une confrontation entre deux mondes au niveau de la mise en scène. L'héritage de Ford se sent dans le soin apporté au cadrage, à la photo, à la psychologie tandis que les fulgurances sanglantes se tournent vers Peckinpah et le cinéma italien.

La confrontation et la dualité se retrouvent de toute façon au coeur de tout le film devenant un grand film sur la schizophrénie ( l'indien devenu traqueur de ses frères de sang, les soldats américains tombant dans la mutilation qu'il condamne chez leurs enemis, le jeune lieutenant remettant en cause sa conception du monde et de la religion etc... ) dont l'absence de manichéeisme a du marquer John Woo ( on peut penser à Windtalkers )
Burt Lancaster est une nouvelle fois immense.

bref, on peut appeler ça un putain de film :D
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Alfred Kralik
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Message par Alfred Kralik »

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Passionnant de bout en bout, ménageant des zones de suspense propres à limer quelque peu les nerfs du spectateur," Ulzana's raid" est un western diablement charpenté, âpre, désenchanté.
Pour Aldrich, rien ne s'est passé; sa vision du fait indien n'est ni fordienne, ni "walshienne" (!) : lui a ses deux yeux et, comme si c'était tout naturel, nous donne deux lectures du problème qui finiront par se rejoindre dans les dernieres scènes.
C'est le "bon" indien du film, Ke-Ni-Tay, personnage fort, qui sert à l'analyse, se définissant lui-même, au fil des discussions avec Mc Intosh et le jeune Ltnt De Buin, comme semblable à ses congénères de "l'autre camp".
Sans manichéisme, Aldrich démontre la complexité des mentalités : sans concessions, il oppose deux sortes d'humains dont l'une, finalement, ne vaut pas plus que l'autre.
Ce désenchantement est traduit ici par le personnage interprété, et de quelle manière !, par le grand Burt Lancaster dont on ne s'étonnera pas qu'il ait, à deux reprises, traversé l'atlantique pour servir Visconti, tant son jeu est à trois journées de cheval de celui d'un Wayne, viscéralement "américain".
Le personnage du Lieutenant DeBuin, tout jeune officier fraîchement émoulu de West Point (comme on dit) est admirablement croqué : ce "bébé soldat", verra progressivement les certitudes dont il est bardé battues en brèche les unes après les autres.
Ma lecture du film se traduit par une nette impression de pessimisme sur la nature humaine : il dresse un constat désabusé sur la guerre, arguant qu'en ce domaine, les horreurs d'un bord ne sont que réponse à celles de l'autre (et vice versa).
J'avais lu et/ou entendu (?) qu'"Ulzana's raid" était un film facho (!).
Le découvrant, je pense que c'est un film "clairvoyant".

Sur les autres aspects, outre une photographie au scalpel (au scalp ?) de Joseph Biroc, j'ai particulièrement apprécié la musique de Frank De Vol (entendu dans "Dirty Donzen", du même Aldrich) qui correspond à ma conception de la musique de film, un soutien efficace, sans thème principal redondant (à l'opposé, par exemple, de celle de "La charge de la 8ème brigade", vu la veille).

Le DVD Universal, après un début qui fait craindre le pire, est somme toute très correct,
contrasté avec quelques faiblesses dans les scènes sombres, mais éclatant la plupart du temps.

Lire l'excellente chronique -lue à l'instant après rédaction de ce commentaire- de William Lee sur notre site préféré.
Ici, quoi : http://www.dvdclassik.com/Critiques/fur ... he-dvd.htm
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Message par Alfred Kralik »

FUREUR APACHE (suite)
Tavernier/Coursodon :
"... western violent et original, qui fut méconnu à sa sortie.
Près de vingt ans après "Apache", Robert Aldrich en donne l'envers : une vision antidémagogique, inconfortable, sombre et lucide des rapports avec les Indiens.
Un scénario rigoureux d'Alan Sharp qui refuse tout manichéisme."


Ca me va. :wink:
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Roy Neary
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Message par Roy Neary »

Alfred Kralik a écrit :J'avais lu et/ou entendu (?) qu'"Ulzana's raid" était un film facho (!).
Le découvrant, je pense que c'est un film "clairvoyant".
C'est probablement un jugement émanant d'une certaine critique française des années 70. Imprégnée de maoïsme jusqu'à la moelle, elle considérait fasciste tout film ne vantant pas les mérites du Kholkoze ou du Soviet Suprême. :lol: Et si le film venait des USA, c'était encore pire. Je crois que même Peter Watkins aurait pu être considéré comme un social-démocrate pré-"gauche caviar" a leurs yeux. :mrgreen:
Avec le recul, et même en me plaçant dans le contexte d'une époque source de grands débats idéologiques, je n'ai que du mépris pour ces gens qui ont entretenu une vision malsaine du monde et bercé d'illusions (et quelles illusions !) un grand nombre de citoyens.
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Max Schreck
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Message par Max Schreck »

Roy Neary a écrit :
Alfred Kralik a écrit :J'avais lu et/ou entendu (?) qu'"Ulzana's raid" était un film facho (!).
Le découvrant, je pense que c'est un film "clairvoyant".
C'est probablement un jugement émanant d'une certaine critique française des années 70.
Est-ce que ce n'était pas un peu la même chose chez les critiques américains (les mêmes qui traitaient Dirty Harry de film facho) ? Aldrich ne cherchant pas ici le politiquement correct aurait tout aussi bien pu embarasser ses compatriotes.
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Kevin95
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Message par Kevin95 »

Max Schreck a écrit :
Roy Neary a écrit : C'est probablement un jugement émanant d'une certaine critique française des années 70.
Est-ce que ce n'était pas un peu la même chose chez les critiques américains (les mêmes qui traitaient Dirty Harry de film facho) ? Aldrich ne cherchant pas ici le politiquement correct aurait tout aussi bien pu embarasser ses compatriotes.
Merci Pauline Kael (auto-proclamé reine du bon gout) ! :roll:

Sinon, Aldrich n'a jamais eu de critiques unanimes en France et a carrément été méprisé pour être gentil par celles américaines, cela expliquerait la volonté de fer d'Aldrich, de bousculer la conscience made in USA, et le problème qu'il avaient pour mettre en oeuvre ses films.

Mais quel filmo et quel réal (qui à la manière d'un Peckinpah ou d'un Fuller, a fait des films qui n'ont pas viellit d'un poil) ! :D
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Re: Fureur Apache

Message par Nestor Almendros »

Encore une réévaluation pour moi (revu sur RTL9).

Effectivement le scénario est excellent et propose une confrontation prenante et réaliste entre deux mondes qui ne se retrouveront jamais. Je m'attendais à un film pro-indien plus évident et j'ai eu sous les yeux un constat très subtil. Car l'indien y est décrit comme un fin stratège, judicieux dans ses choix d'attaque, ce qui n'est pas si courant: on est bien au-delà du simple sauvage sanguinaire. Si certaines de ses pratiques apparaissent comme sauvages, le scénario est truffé d'éléments qui relativisent ce comportement: relations avec le gouvernement américain (cf pendant l'interrogatoire des deux vieux apaches), réactions proches du lynchages de certains soldats, etc.
Au-delà de la très bonne intrigue de la poursuite (et des tactiques) ce qui m'a aussi beaucoup surpris, c'est la violence du film. C'est une violence visuelle où les jets de sang apparaissent mais sont vite coupés (on n'en voit que quelques photogrammes à chaque fois), Aldrich préférant un évènement rapide dans un plan vite coupé car l'effet est d'autant plus impactant. Et le film ne se contente pas de présenter un réalisme cru sur les méfaits de guerre des Apaches (avec leurs victimes), le film est aussi très violent avec les réactions de certains personages américains. Je pense évidemment à ce soldat qui n'hésite pas à tuer d'une balle la mère du gamin, pour qu'elle ne soit pas capturée et torturée par les Apaches. Ou à ce même soldat qui, juste après, se suicide pour les mêmes raisons. C'est l'un des éléments les plus forts du film qui provoque un rejet psychologique certain et qui permet de montrer nettement les limites de ces deux univers qui se rencontrent.

Je l'ai vu avec la vf d'origine, je pense, et c'était assez bizarre: plusieurs fois dans le film, le montage son s'est fait remarquer. Comme si, dans la vf, on avait placé la musique n'importe comment (je suis certain qu'en vo elle n'est pas la même à certains moments, voire pas du tout peut-être), et coupé avec aussi de peu de manière. Les passages d'une scène à l'autre ont ainsi semblé très abrupts, parfois, à cause des coupures de musique.
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Re: Fureur Apache

Message par Huw Morgan »

Nestor Almendros a écrit :Encore une réévaluation pour moi (revu sur RTL9).

Effectivement le scénario est excellent et propose une confrontation prenante et réaliste entre deux mondes qui ne se retrouveront jamais. Je m'attendais à un film pro-indien plus évident et j'ai eu sous les yeux un constat très subtil. Car l'indien y est décrit comme un fin stratège, judicieux dans ses choix d'attaque, ce qui n'est pas si courant: on est bien au-delà du simple sauvage sanguinaire. Si certaines de ses pratiques apparaissent comme sauvages, le scénario est truffé d'éléments qui relativisent ce comportement: relations avec le gouvernement américain (cf pendant l'interrogatoire des deux vieux apaches), réactions proches du lynchages de certains soldats, etc.
Au-delà de la très bonne intrigue de la poursuite (et des tactiques) ce qui m'a aussi beaucoup surpris, c'est la violence du film. C'est une violence visuelle où les jets de sang apparaissent mais sont vite coupés (on n'en voit que quelques photogrammes à chaque fois), Aldrich préférant un évènement rapide dans un plan vite coupé car l'effet est d'autant plus impactant. Et le film ne se contente pas de présenter un réalisme cru sur les méfaits de guerre des Apaches (avec leurs victimes), le film est aussi très violent avec les réactions de certains personages américains. Je pense évidemment à ce soldat qui n'hésite pas à tuer d'une balle la mère du gamin, pour qu'elle ne soit pas capturée et torturée par les Apaches. Ou à ce même soldat qui, juste après, se suicide pour les mêmes raisons. C'est l'un des éléments les plus forts du film qui provoque un rejet psychologique certain et qui permet de montrer nettement les limites de ces deux univers qui se rencontrent.

Je l'ai vu avec la vf d'origine, je pense, et c'était assez bizarre: plusieurs fois dans le film, le montage son s'est fait remarquer. Comme si, dans la vf, on avait placé la musique n'importe comment (je suis certain qu'en vo elle n'est pas la même à certains moments, voire pas du tout peut-être), et coupé avec aussi de peu de manière. Les passages d'une scène à l'autre ont ainsi semblé très abrupts, parfois, à cause des coupures de musique.
La version diffusée sur TCM que j'ai vu en VOST comporte les même changements abrupts dont tu parles. On passe d'une séquence à l'autre en interrompant la musique et en enchainant sur une séquence qui semble être déjà commencée. Peut être est-ce le "montage au scalpel" que Tavernier & Coursodon évoquent à propos d'Aldrich !
Joe Wilson
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Re: Fureur Apache (Robert Aldrich - 1972)

Message par Joe Wilson »

Très beau film, qui prolonge et s'oppose à Bronco Apache . La mise en scène est rude et sèche, et chaque scène nourrit ce sentiment d'incompréhension, d'abattement face à l'expression de la violence humaine. Aldrich se détourne de tout idéalisme et à travers la poursuite d'Ulzana, cerne une noirceur, une rage qui ne peuvent trouver d'apaisement. Comme le mentionne McIntosh, ce n'est plus de la haine mais une nécessité de survie, un drame quotidien.
Les attaques indiennes sont brèves, telles des secousses, et chaque instant est lié à un désespoir étouffant : c'est la détresse muette d'un enfant caressant la main de sa mère décédée. La mort est figée dans une horreur tragique.
Aldrich ne juge pas, renvoie soldats et Apaches dos à dos, leur destin étant mêlé dans cet affrontement sans fin. Sa vision est particulièrement sombre, mais pourtant, par la nécessité d'une ouverture à l'autre, d'une force de vie, Fureur apache parvient à contrer tout nihilisme. C'est une lutte permanente, incohérente, mais qui doit toujours tendre vers un espoir, même sans illusions. Le personnage du lieutenant, malgré des tentatives de renoncement, représente cet état d'esprit...il doit saisir l'héritage de McIntosh. Celui-ci va jusqu'au bout d'un parcours solitaire où il n'a fait que donner de lui-même. Lancaster, ambigu entre pessimisme et conviction, est encore une fois magnifique.
Si par instants, le film est un peu trop bavard, je pense notamment aux échanges entre le lieutenant et Ke-Ni-Tay (autre personnage décisif dans son excès, soldat et Apache...portant en lui la démesure d'un conflit, les traces d'une souffrance)....le propos d'Aldrich prend toute sa dimension dans sa conclusion. Magnifique gestion de l'espace, ampleur du cadre, gravité du récit. Impressionnant.
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