Le Cavalier de la mort / Les Massacreurs du Kansas (De Toth)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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Roy Neary
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Le Cavalier de la mort / Les Massacreurs du Kansas (De Toth)

Message par Roy Neary »

Et hop ! Voila deux films d'André De Toth chroniqués d'un coup d'un seul par Jeremy Fox ! :D
Selon notre westerner classikien, un peu sévère avec De Toth (ben oui, j'ai le droit de m'exprimer aussi, non ? :mrgreen: ), l'un des films vaut bien plus le détour que l'autre, ce qui ravira ceux qui privilégient les DVD zone 2.

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Jeremy Fox
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Re: Le Cavalier de la mort (Z2) / Les Massacreurs du Kansas

Message par Jeremy Fox »

Roy Neary a écrit : Selon notre westerner classikien, un peu sévère avec De Toth
Attention, j'apprécie néanmoins beaucoup le cinéaste dont Tavernier dit justement que ses westerns ne sont pas ce qu'il a fait de mieux : beaucoup de métier mais je n'y retrouve jamais le génie d'un Boetticher.

Hier soir justement, revu La trahison du Capitaine Porter qui, avec un tel scénario, aurait pu être bien meilleur. De Toth nous délivre un honnête western mais qui ne tient pas entièrement ses promesses car, une fois encore, la dernière partie est bien trop vite expédiée.
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Roy Neary
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Message par Roy Neary »

Disons que je trouve Springfield Rifle très intéressant par son sujet et sa mise en scène. Quant à The Indian Fighter, j'adore comme toi et je trouve même que le cinéaste sauve parfois une certaine routine du scénario. Je ne pense pas que De Toth et Boetticher soient si éloignés que tu le dis en terme qualitatif, bien que différents dans leur style (plus de sécheresse et d'économie chez Boetticher).
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Jeremy Fox
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Message par Jeremy Fox »

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Le Cavalier de la Mort (Man in the Saddle, 1951) de André de Toth
COLUMBIA


Avec Randolph Scott, Joan Leslie, Ellen Drew, Alexander Knox, Richard Rober, John Russel
Scénario : Kenneth Gamet d’après une histoire d’Ernest Haycox
Musique : George Duning
Photographie : Charles Lawton Jr.
Une production Harry Joe Brown pour la Columbia


Sortie USA : 02 décembre 1951


N’ayant pas pu voir Ramrod avec Joel McCrea et Veronica Lake, le premier western du cinéaste datant de 1947 (mais celui-ci devrait être édité par Wild Side Video normalement en 2012), Le Cavalier de la mort est notre première rencontre avec le troisième réalisateur qui, avec Ray Enright et Budd Boetticher, fera le plus tourner Randolph Scott dans le genre qui nous intéresse ici. La série de six westerns qu’il réalisera avec l’acteur, si elle n’atteint pas (loin s’en faut) les cimes de la série des Boetticher, contient pas mal de très belles choses à commencer par cette première collaboration produite par Harry Joe Brown. De toute manière, ce n’est pas compliqué : les amateurs de série B ne risquent guère d’être déçu quand ils tomberont sur un western de Randolph Scott produit sous l’égide du studio Columbia. Il y avait eu Gunfighters de George Waggner, Coroner Creek de Ray Enright, The Nevadan de Gordon Douglas et Santa Fe d’Irving Pichel, tous quatre ne serait-ce que plaisant. Man in the Saddle est encore un cran au-dessus, sans cependant atteindre des sommets et jouant toujours dans la cour de la série B, encore faut-il le savoir pour ceux qui n’en sont pas fan.

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Le modeste Rancher Owen Merritt (Randolph Scott) n’est pas à la fête. Il vient d'être abandonné par la jolie mais pragmatique Laure Bidwell (Joan Leslie) qui le trouvait trop peu ambitieux. Ne voulant pas attendre que la fortune tombe du ciel, elle se jette dans les bras du "Cattle Baron" Will Isham (Alexander Knox) qui, lui, ne recule devant rien pour agrandir son domaine (« I've never owned half of anything. ») Elle l’épouse tout en lui avouant qu’il s’agit d’un mariage purement intéressé. Mécontent de ne pas être aimé et jaloux de son ex-rival, Will Isham va essayer de s’en débarrasser s'adjoignant à cet effet les services de l’inquiétant Fay Dutcher (Richard Rober). Owen était pourtant résigné à supporter le voisinage de ce 'despote' mais le jour où deux de ses hommes sont assassinés par des tueurs à gages au service d’Isham, il décide de ne plus se laisser faire et au contraire de riposter. Dans sa lutte, il obtiendra l’aide de la jeune Nan (Ellen Drew), amoureuse de lui mais elle-même assidûment poursuivie par un dangereux psychopathe faisant partie des hommes de main de Will Isham, l’inquiétant Hugh Clagg (John Russell)...

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Né en Hongrie en 1912, fils d’un officier des Hussards, André De Toth entre dans l’industrie cinématographique en 1931. Touche-à-tout, il sera tour à tour scénariste, monteur, acteur puis assistant réalisateur. En 1939, expatrié en Angleterre, on le voit au générique d’œuvres de Zoltan Korda telles que Le Voleur de Bagdad. Il gagne ensuite les USA où il débute en conduisant des camions avant d’être de nouveau engagé par un autre réfugié, le même Korda qui le place réalisateur de seconde équipe sur Le Livre de la jungle. Il devient cinéaste attitré dès l’année suivante se spécialisant dans les films de genre, aussi à l’aise dans l’aventure, les thrillers ou les films d’espionnage. Entre-temps, parmi ses plus belles réussites, il faut noter sa participation au scénario du magnifique La Cible humaine (The Gunfighter) d’Henry King pour lequel il manquera de peu l’Oscar. Répétons-le, surnommé ‘4ème borgne d’Hollywood’ (les trois autres étant John Ford, Raoul Walsh et Fritz Lang), De Toth a donc, dans le domaine du western (quantitativement le genre le plus représenté dans sa filmographie), succédé à Ray Enright et précédé Budd Boetticher dans l’illustration du mythe de l’acteur rigide au "visage de pierre", Randolph Scott.

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En trichant un peu avec petite vue sur l’avenir, on peut dire Le Cavalier de la mort est l’un des meilleurs parmi les six films que Randolph Scott tournera sous la direction d’André de Toth. Il contient déjà toutes les figures de style et les ‘thématiques’ que le cinéaste développera dans ses autres westerns. En tout cas, après Quand les Tambours s’arrêteront (Apache Drums) d’Hugo Fregonese, ce western prouvait à nouveau à ceux qui en auraient douté que la série B dans ce domaine pouvait être esthétiquement et sylistiquement très 'chiadée' !! Il faut voir l’utilisation qui est faite des ombres, des sources de lumière et de la couleur, Charles Lawton Jr s’amusant à éclairer des séquences sombres (et elles sont légions dans le courant du film dont quasiment la moitié se déroule de nuit) par des tâches de couleur justement : les roues jaunes de la carriole d’Alexander Knox lors de la première séquence, toujours le jaune des lampes dans le clair-obscur des bureaux ou des chambres, encore le jaune en premier plan d’une bouteille en verre qui va se faire ‘éclater’ deux secondes après, le vert des tables de jeux dans la pénombre du saloon… Ce jeu sur les ombres et les couleurs, cette stylisation inhabituelle dans un western atteindra son sommet lors du gunfight dans l’obscurité puis, bien avant Yojimbo, lors du duel final se déroulant (sans aucune intervention de la musique) au milieu d'une tempête de vent et de poussière. Plastiquement, le style de la photo et de la mise en scène s’apparente dans l’ensemble assez à expressionnisme ; il en va de même lorsque De Toth filme de longues chevauchées nocturnes à contre-jour (à l’aide de nuits américaines ici parfaitement bien utilisées).

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Hormis ses belles idées de mise en scène, Man in the Saddle bénéficie d’une histoire assez prenante. En provenance directe du film noir, un certain fatalisme règne sur ce film ; Owen Merritt cherche à fuir un passé qui ne cesse de le poursuivre. Owen ayant été quittée par la femme qu’il aimait par dessus tout l’a pourtant toujours constamment sous les yeux, cette dernière se retrouvant être sa voisine ; et il faut que son époux soit son pire ennemi. Au début, Owen est résigné, ne sachant pas quoi faire, dans quel camp se situer, se laissant même aller à boire pour oublier ses peines de cœur. Que ses amis se fassent tuer devant lui ne le fait réagir, pas bouger le petit doigt pour se révolter et réagir comme un ‘héros’ qu’il serait censé être, série B et Randolph Scott obligent ! Il faudra des pertes humaines plus proches ou répétées un peu trop souvent pour qu’il commence à retrousser ses manches. Randolph Scott interprète au départ un personnage plutôt ambigu, nous faisant souvent nous demander (tout au moins durant la première demi-heure) quelle est sa motivation. De Toth et son scénariste Kenneth Gamet aiment donc à brouiller les pistes mais tout cela devient plus limpide et manichéen une fois que leur valeureux héros a ouvert les yeux. Dès la séquence du Stampede, l’histoire, toujours bien écrite, devient alors plus convenue.

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Donc au final, malgré une certaine complexité, une intrigue riche en rebondissements et constamment dynamique (ce n’est pas pour rien qu’Owen Merritt lâche laconiquement cette phrase à un moment du film : « No Time to Talk »), rien de bien neuf ni de très original contrairement à ce qu’aurait pu nous faire croire le prologue. Hormis quelques surprises plutôt bienvenues et des coups de théâtres incessants, le scénario devient plus sage et traditionnel à mi parcours. L’histoire de Ernest Haycox (l’auteur de ‘Stagecoach’ qu’a adapté John Ford pour La Chevauchée Fantastique) fait néanmoins que l’on s’attarde sur les différents personnages, la plupart motivés par un code de l’honneur qu’ils se sont d’emblée définis, guidés ainsi par une certaine loyauté ; malgré la faible durée du film, nous avons donc le temps de nous y attacher car tous soigneusement écrits et interprétés y compris les deux rôles féminins. De l’action, il y en a à la pelle dans Le Cavalier de la mort (à noter surtout la bagarre démesurée à poings nus entre Randolph Scott et John Russell au bord des cascades ; bravo aux cascadeurs même si ces derniers ressemblent assez peu aux acteurs qu’ils doublent), les protagonistes nous sont proches car intéressants et psychologiquement bien fouillés, les relations qui les unissent ou désunissent assez fortes et, plastiquement parlant, nous l’avons déjà abordés, c’est tout à fait réussi d’autant plus que les paysages sont très variés (de la sécheresse rocailleuse de Lone Pine à de vastes étendues verdoyantes) et très photogéniques, filmés souvent à l’aide d'une succession de panoramiques à 180°, très élaborés, la figure de style préférée du cinéaste.

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Parmi les autres points positifs, rajoutons y la présence de Cameron Mitchell, des ‘punchlines’ parfois assez drôles, un bon score de George Duning et une très belle ballade chantée par l’un des chanteurs de Country les plus populaires de l’époque, Tennessee Ernie Ford que l’on peut même voir dans ses œuvres puisqu’en plus du générique, il la réinterprète lors d’une séquence de veillée de cow-boys autour d’un feu de camp. Dommage que certaines facilités viennent enrayer l’harmonie du ton presque mélodramatique des vingt premières minutes ; les scénaristes n’auraient jamais du y intégrer cet humour malvenu surtout confié au personnage du mexicain interprété par Alfonso Bedoya. Dommage aussi cette fin on ne peut plus abrupte. Mais bon, tout ceci n’est pas bien grave ; nous sommes bel et bien devant une série B comme on les aime avec un Randolph Scott dont on ne dira jamais assez qu’il fut l’incarnation parfaite du cow-boy 'classique' hollywoodien, ici encore une fois parfait.

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Les Massacreurs du Kansas (The Stranger Wore a Gun, 1953) de André De Toth
COLUMBIA


Avec Randolph Scott, Claire Trevor, Joan Weldon, George Macready, Alfonso Bedoya, Lee Marvin, Ernest Borgnine, Pierre Watkin
Scénario : Kenneth Gamet d’après une histoire de John W. Cunningham
Musique : Milton Drake
Photographie : Lester White (Technicolor)
Un film produit par Harry Joe Brown pour la Columbia


Sortie USA : 30 juillet 1953

Mauvaise année westernienne pour André de Toth qui aura vu presque coup sur coup sortir ses deux plus mauvais films dans le genre. Les Massacreurs du Kansas est certes un petit cran au dessus de Last of The Comanches (Le Sabre et la flèche) mais s'avère néanmoins lui aussi très médiocre. Il s'agit pourtant d'une production Harry Joe Brown pour la Columbia tout comme l'était, du même réalisateur, Man in the Saddle (Le Cavalier de la mort) avec déjà Randolph Scott comme acteur principal et Kenneth Gamet à l'écriture. A travers cet exemple, il est une nouvelle fois facile de vérifier que deux films avec quasiment les mêmes éléments et les mêmes équipes peuvent aboutir à des résultats pratiquement opposés. Pour André de Toth, entre ces deux westerns, il y eut, toujours avec Randolph Scott le plaisant mais oubliable Les Conquérants de Carson City (Carson City) puis, toujours pour la Warner, en revanche cette fois-ci l'un des meilleurs westerns du studio : La Mission du Commandant Lex (Springfield Rifle). Donc, malgré les deux dernières grosses déceptions (dont le film qui nous concerne ici), la filmographie westernienne d'André De Toth demeure pour l'instant sur un versant très positif.

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Espion pour Quantrill durant la Guerre de Sécession, Jeff Travis (Randolph Scott) décide de l’abandonner après l’avoir vu tuer de sang froid un vieil unioniste de ses amis et mettre à sac la ville de Lawrence au Kansas tout en massacrant ses habitants. Mais le conflit terminé, on ne lui pardonne pas d’avoir combattu aux côtés de ce 'boucher' et, après avoir plusieurs fois échappé à la mort, il doit sur les conseils de son amie Josie (Claire Trevor) se réfugier en Arizona, où il pense pouvoir recommencer une nouvelle vie moins agitée. A Prescott, il rencontre Jules Mourret (George Macready), tenancier du saloon, qui sait tout de son passé ayant lui aussi été au service de Quantrill. Mourret, de prime abord honnête homme, tient en fait la ville sous sa coupe et fait dévaliser par son gang l’or transporté dans les diligences. Connaissant les antécédents du nouveau venu, Mourret voudrait l’avoir à son service. Mais Travis, tombé amoureux de la fille du propriétaire de la compagnie de transport et écœuré des méthodes expéditives de Mourret, va essayer de rétablir un semblant d’ordre dans la ville. Pour se faire, il devra jouer un triple jeu...

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On retrouve donc ici Randolph Scott sous la direction d'un de ses réalisateurs de prédilection et dans un film qu’il a coproduit avec son ami Harry Joe Brown pour la Columbia, le dernier en date étant l'excellent Hangman's Knot (Le Relais de l'or maudit) de Roy Huggins dont The Stranger wore a Gun reprend certains de ses lieux de tournage (et probablement certains plans), les paysages secs et rocailleux de Lone Pine. Le Cavalier de la mort contenait déjà toutes les figures de style et les 'thématiques' que De Toth développera dans ses autres westerns dont Les Massacreurs du Kansas. En provenance directe du film noir, un certain fatalisme règne sur les ceux œuvres. Que ce soient Owen Merritt (Le Cavalier de la mort) ou Jeff Travis ici, les deux hommes cherchent tous deux à fuir un passé qui ne cesse de les poursuivre. Jeff Travis ne peut pas faire un pas sans que le fait d’avoir travaillé pour Quantrill le fasse haïr partout où il passe. Au début de chacun des deux westerns, ses personnages sont résignés, ne savent pas quoi faire, dans quel camp se situer, Owen se laissant même aller à boire pour oublier ses peines de cœur. Que leurs amis se fassent tuer devant eux ne les fait pas bouger le petit doigt pour se révolter et réagir comme des 'héros' qu’ils seraient censés être, série B et Randolph Scott obligent ! Il faudra des pertes humaines plus proches ou répétées un peu trop souvent pour qu’ils commencent tous deux à retrousser leurs manches. Randolph Scott interprète dans les deux cas des rôles plutôt ambigus, nous faisant souvent nous demander (tout au moins durant les premières demi-heures) quelles sont leurs motivations. De Toth et son scénariste Kenneth Gamet aiment donc à brouiller les pistes mais tout cela devient plus limpide et manichéen une fois que leurs valeureux héros ont ouvert les yeux.

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Malgré une certaine complexité, des intrigues riches en rebondissements et constamment dynamiques, rien de bien neuf ni de très original contrairement à ce qu’auraient pu nous faire croire leurs prologues. Toute la mise en place des Massacreurs du Kansas est parfaitement bien écrite et laissait présager bien plus que ce qu'il en ressortira au final. Le film débute par le massacre (historiquement réel) de 180 habitants de la ville de Lawrence et le meurtre de sang-froid d’un ami de Travis, ce dernier étant présent mais n’intervenant pas. Hormis quelques surprises plutôt bienvenues et des coups de théâtres incessants, les scénarios des deux premiers De Toth/Scott/Brown deviennent plus sages et traditionnels à mi parcours et au bout du compte, avec les mêmes ingrédients, le même scénariste, le même réalisateur et une bonne partie des mêmes acteurs, l’un des film est réussi, l’autre assez médiocre. Dans Le Cavalier de la mort, l’histoire de Ernest Haycox (Stagecoach) faisait que l’on s’attardait un peu sur les différents personnages ; malgré la faible durée du film, nous avions eu le temps de nous y attacher car tous soigneusement écrits et interprétés y compris les deux rôles féminins. C'est tout l'inverse qui se produit ici.

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Si l’on voulait d’ailleurs s’amuser à faire la comparaison rôle par rôle entre les deux films, l’avantage reviendrait systématiquement au premier. Même si Claire Trevor est plus célèbre, elle fait pâle figure face à Joan Leslie. La différence est encore plus accentuée concernant les 'méchants' et, si vous vous rappelez d’un célèbre adage hitchcockien qui disait que plus le méchant était réussi plus le film l’était aussi, Alexander Knox et son complexe d’infériorité bat par KO l’insignifiant George MacReady. Alors oui, Les Massacreurs du Kansas nous offre l’une des premières occasions (avant Un Homme est passé de John Sturges et L’Empereur du Nord de Robert Aldrich) de voir ensemble deux des seconds rôles de teigneux les plus réjouissants du cinéma mais Lee Marvin n’a qu’un temps de présence très court et effectivement, Ernest Borgnine est l’une des rares raisons de pouvoir prendre du plaisir à ce western totalement bâclé et aux qualités d’écriture bien moindre que celle de Man in the Saddle, le film nous faisant souvent sombrer dans l’ennui malgré l’action incessante.

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De l’action, il y en avait à la pelle aussi dans Le Cavalier de la mort mais les protagonistes nous étaient plus proches car intéressants et psychologiquement bien fouillés, les relations qui les unissaient ou désunissaient bien plus fortes et, plastiquement parlant, en plus d’une belle utilisation du Technicolor par Charles Lawton, on y décelait pas mal de très bonnes idées de mise en scène qu'on peut au contraire compter sur les doigts d'une main au sein de The Stranger wore a Gun. Si certains avaient pu remarquer la doublure de Randolph Scott lors du titanesque combat qui l’opposait à John Russell, rien de comparable avec la ridicule doublure d’Ernest Borgnine lors d’une non moins percutante bataille à poings nus dans Les Massacreurs du Kansas. Ce détail insignifiant en est un parmi tant d’autres qui nous prouve que ce dernier film semble avoir été tourné sans grande conviction ou alors dans le seul but de fournir un film de plus en 3D pour les salles de cinéma, ce western étant le premier à 'bénéficier' de cette nouveauté ; la même année le cinéaste tournait une œuvre d’une toute autre envergure avec cette technique, L’Homme au masque de cire (House of Wax). Dans le western, pas mal d’objet nous sont jetés à la figure et l’effet devait être saisissant lorsque par exemple, la torche d’un des incendiaires de Quantrill s’approche de la caméra en très gros plan. Étonnamment, d’autres séquences sont filmées à plat toujours avec pour but de nous donner une sensation de relief. Peine perdue, ces scènes qui sont des séquences de poursuites, donneraient presque l’impression d’avoir été réalisées par Ed Wood ! De vilains stock-shots quasiment en noir et blanc sont projetés en arrière-plan, l’avant-plan étant occupé par des rochers et buissons en cartons de couleurs vives posés sur rails qui sont actionnés pour donner une impression de mouvements. Le résultat est hideux (était-il le même en 3D ?)

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Si le maître mot de The Stranger Wore a Gun est 'Action', les amateurs devraient être comblés car ça n'arrête pas une seconde, malheureusement au détriment d'une écriture solide du scénario (qui annonce pourtant Yojimbo et Pour une poignée de dollars, le personnage de Randolph Scott prétendant se joindre à deux bandes ennemies afin qu’elles finissent par s’autodétruire) et des personnages. D'ailleurs, concernant les protagonistes, ils ne possèdent ici aucune épaisseur et l'on prend De Toth et Gamet en flagrant délit de pitrerie assez déplorable ; en effet, on a un peu de peine à voir Alfonso Bedoya & Joseph Vitale cabotiner à mort sans jamais nous décocher un sourire. Résultat, ça bouge mais on n'a jamais eu le temps de s'attacher à quiconque et c'est tout juste si l'ennui ne pointerait pas le bout de son nez. Trop rapide et trop schématique, un western trépidant mais sans âme pour lequel on n’a même pas pris la peine de faire écrire une musique originale, la BOF étant composée de morceaux empruntés à droite à gauche. Reste une très bon premier quart d'heure, une impressionnante séquence d'incendie qui vient clore le film et un Randolph Scott seul à tirer son épingle du jeu. C'est bien faible. Espérons que le cinéaste saura relever la tête dans les années qui suivront. Mon petit doigt me dit que c'est ce qui arrivera !
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Roy Neary
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Message par Roy Neary »

Jeremy Fox a écrit :Intrigue d'espionnage dans un cadre westernien si je me souviens bien ?
Oui, avec Randolph Scott qui s'infiltre dans un gang de confédérés. Très chouette souvenir de Dernière Séance !
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Message par Jeremy Fox »

Roy Neary a écrit :
Jeremy Fox a écrit :Intrigue d'espionnage dans un cadre westernien si je me souviens bien ?
Oui, avec Randolph Scott qui s'infiltre dans un gang de confédérés. Très chouette souvenir de Dernière Séance !
Gary Cooper plutôt :wink:
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Message par Roy Neary »

Jeremy Fox a écrit :Gary Cooper plutôt :wink:
Euh oui... :shock: :oops:
C'est cette mise en page du jour qui me hante !! :lol: :oops:
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Message par bogart »

Jeremy Fox a écrit :
Roy Neary a écrit : Oui, avec Randolph Scott qui s'infiltre dans un gang de confédérés. Très chouette souvenir de Dernière Séance !
Gary Cooper plutôt :wink:
Egalement très bon souvenir de ce Springfield Rifle qui lors de sa sorti ne rencontra pas son public : il est vrai que Cary Cooper avait tourné ce film juste après " Le train sifflera trois fois" :mrgreen:
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Message par Jeremy Fox »

bogart a écrit :
Egalement très bon souvenir de ce Springfield Rifle qui lors de sa sorti ne rencontra pas son public : il est vrai que Cary Cooper avait tourné ce film juste après " Le train sifflera trois fois" :mrgreen:
Ah oui, je comprends mieux : les spectateurs n'avaient pas envie de somnoler deux fois de suite :mrgreen:

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Message par Jeremy Fox »

Roy Neary a écrit :
Jeremy Fox a écrit :Intrigue d'espionnage dans un cadre westernien si je me souviens bien ?
Oui, avec Gary Cooper qui s'infiltre dans un gang de confédérés. Très chouette souvenir de Dernière Séance !
Vu à l'instant. Pas désagréable mais encore une fois des personnages totalement sacrifiés à l'intrigue et c'est bien dommage. Inférieur à Man in the Saddle donc. Je vais poursuivre le cycle puisque je viens juste de me rendre compte avoir les 6 westerns avec Randolph Scott.
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Message par Julien Léonard »

Très très belle chronique !! :D Ou est-ce qu'on peut se procurer les Randolph Scott sortis dernièrement chez Columbia pour pas cher ?? :wink:
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Jeremy Fox
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Message par Jeremy Fox »

Julien Léonard a écrit :Très très belle chronique !! :D Ou est-ce qu'on peut se procurer les Randolph Scott sortis dernièrement chez Columbia pour pas cher ?? :wink:
Merci :wink:

13.99 euros sur Cdiscount. Les meilleurs du lot sont à mon avis Ville sans loi et ce Cavalier de la mort
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Message par dortmunder »

Une remarque en songeant au Cavalier de La mort et plus généralement aux films de De Toth, Boetticher, Karlson et consorts; c'est l'extreme cohérence des scènes de bagarres, filmées en plan large et/ou moyen, nerveuses à souhait, mais totalement LISIBLES.
Tu peux la secouer tant que tu veux, la dernière goutte est toujours pour le pantalon. Vieux proverbe
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Message par Jeremy Fox »

dortmunder a écrit :Une remarque en songeant au Cavalier de La mort et plus généralement aux films de De Toth, Boetticher, Karlson et consorts; c'est l'extreme cohérence des scènes de bagarres, filmées en plan large et/ou moyen, nerveuses à souhait, mais totalement LISIBLES.
Exact. Revu pas plus tard que ce midi Riding Shotgun de De Toth et la titanesque bataille finale à l'intérieur du saloon est d'une limpidité absolue tout en étant extrêmement découpée. Il y aurait quelques leçons de mise en scène à prendre pour la réalisation des scènes d'action dans ces séries B.
Julien Léonard
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Message par Julien Léonard »

Jeremy Fox a écrit :Il y aurait quelques leçons de mise en scène à prendre pour la réalisation des scènes d'action dans ces séries B.
Yeah, de la bonne série B péchue qui fait qu'on aime le B !! :wink:
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