Les Westerns 2ème partie

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

Modérateurs : cinephage, Karras, Rockatansky

Chip
Electro
Messages : 949
Inscription : 22 oct. 08, 10:26

Re: Les Westerns 2ème partie

Message par Chip »

Vu " la rançon de la peur", il y a bien longtemps, je dois avoir un enregistrement VHS. James Griffith (1916-1993) outre ses talents de comédien, écrivait des chansons et des scénarios, participa aux scripts de deux westerns tournés en Espagne : " Shalako" et " Catlow " (sous le nom de J.J. Griffith, il fut aussi scénariste et acteur d'un film de Russ Meyer " Lorna " (Lorna)(1965). En 1948, il fit partie de l'orchestre de Spike Jones.
kiemavel
Assistant opérateur
Messages : 2231
Inscription : 13 avr. 13, 09:09

Cattle Empire

Message par kiemavel »

Image
Cattle Empire ( 1958 )
Réalisation : Charles Marquis Warren / Production : Robert Stabler (20th Century Fox) / Scénario : Endre Bohem et Eric Norden d'après une histoire de Daniel B. Ullman / Photographie : Brydon Baker / Musique : Paul Sawtell et Bert Shefter

Avec : Joel McCrea (John Cord), Gloria Talbott (Sandy Jeffrey), Don Haggerty (Ralph Hamilton), Phyllis Coates (Janice Hamilton), Bing Russell (Douglas Hamilton), Richard Shannon (Garth)

John Cord vient de passer 5 ans en prison et revient dans la ville de Hamilton où avaient eu lieu les évènements qui avaient entrainé sa condamnation. Arrivés à destination après des mois passés à convoyer du bétail, les cow-boys de Cord, qui était alors le plus réputé des convoyeurs, avaient mis à sac la ville, se livrant à des violences qui avaient provoqué la mort ou grièvement blessé plusieurs habitants de la petite ville d'éleveurs. Malgré qu'il ai purgé sa peine, la population avide de vengeance veut lui faire payer les exactions commises bien des années plus tôt. Alors que Cord est trainé dans les rues de la ville accroché à un cheval, Ralph Hamilton, un rancher influent, intervient et bien difficilement parvient à mettre fin au lynchage. Le lendemain, Hamilton, lui même devenu aveugle suite aux violences, propose à Cord de reprendre son ancien métier, estimant qu'il est le seul homme capable de mener à destination de Fort Clemson où une importante garnison vient de s'installer, un troupeau de plusieurs milliers de bêtes à une période de l'année où la plupart des points d'eau sont à sec. La situation financière des éleveurs de la région étant désastreuse, ils acceptent à contrecoeur la décision d'Hamilton de proposer l'emploi à Cord mais ce dernier décline d'abord l'offre, acceptant en revanche celle de Garth, l'ancien second de Hamilton devenu son principal concurrent et qui va tenter de le devancer au fort. Alors que Cord a promis de rejoindre Garth et son troupeau après quelques jours de piste, il finit par accepter de guider le troupeau de Hamilton et des autres éleveurs, exigeant leur présence à ses côtés durant le long périple…
Image
7 ans après L'enfant du désert (Cattle Drive) tourné en 1951, Joel McCrea convoyait du bétail pour la 2ème et dernière fois de sa carrière. Après les Cattle King et les Cattle Queen (il y en eu au moins deux), Cattle Empire ? Pourquoi pas mais on est ici quand même très loin de La rivière rouge, le modèle du genre car ce film de Charles Marquis Warren est selon moi un de ses plus médiocres. Warren n'a jamais brillé par ses mises en scène mais celui qui était avant tout écrivain et scénariste, lorsque l'histoire était bonne pouvait signer de bons westerns (Hellgate, Tension à Rock City) voir même un très bon (Little Big Horn) mais ici tout ou presque est raté. Je crois que les moyens devaient être très limités et ça se voit car, à priori, tous les plans larges sur le bétail proviennent de stock-shots. On a l'impression que le producteur a du fournir 200 têtes pendant 3 jours en disant au metteur en scène : Marquis (il ne l'appelait pas par son petit nom. On a le respect de l'aristocratie à Hollywood), tu tournes tout ce que tu peux et pour le reste on filmera en plans serrés. Avec un peu de savoir faire, un bon metteur en scène aurait pu créer l'illusion mais en l'occurrence, Warren, non. Dans quelques séquences, notamment dans le final, nous voyons en même temps, dans le champ, certains des acteurs principaux et le bétail mais la plupart du temps, Warren serre sur les acteurs et les bêtes sont bien souvent invisibles. C'est un détail -peut-être- mais cela donne tout de même une idée de l'implication et du savoir faire d'un metteur en scène et du soin apporté à la réalisation. Ce qui pourrait paraitre anecdotique est révélateur de l'impression que l'on a jusqu'au bout : à tous points de vue, on a l'impression d'assister à un bâclage.
Image
Car si "l'immersion" est raté, Warren a aussi été loin de tirer parti de tout l'éventail des situations dramatiques exploitables dans un tel sujet. A aucun moment on n'a l'impression d'assister à la traversée que l'on nous présentait comme impossible en raison de l'aridité des territoires traversés. On entend parler de rivières asséchées mais on n'en voit pas et Warren ne sait pas rendre compte de la dureté des conditions de travail, des privations, etc…Presque jusqu'au bout, aucun danger non plus ne vient de l'extérieur, les indiens sont ici totalement absents par exemple. J'ai l'impression que tous ces aspects n'intéressaient pas vraiment Warren et qu'il ne comptait que sur les ennemis de l'intérieur -qui sont effectivement souvent les plus intéressants- pour tenir le public en haleine et qu'il comptait exploiter à fond en revanche les tensions découlant des vieux antagonismes impliquant les éleveurs contraints de se joindre à l'expédition et venus là en trainant des pieds ; ainsi qu'Hamilton, leur leader moral et bien entendu Cord. Ça aurait pu être intéressant si les personnages avaient été mieux présentés mais Warren s'est débrouillé pour que dès les prémisses de l'histoire, on ne croit en rien et pour donner au public une information qui évente l'un des rares enjeux un peu excitant de cette histoire, c'est à dire le rôle que les uns et les autres avaient pu tenir dans les événements tragiques survenus 5 ans plus tôt.
Image
Le film s'ouvre donc sur un lynchage. Toute la population de Hamilton exprime sa haine envers Cord et on évoque les exactions d'un homme qui semble monstrueux mais dès la première séquence où nous voyons Joel McCrea s'exprimer, c'est le même bon Joel (à quelques exceptions près) que d'habitude que nous voyons et il n'y a d'emblée aucune ambiguité sur ce personnage. Il s'agit même d'une séquence sentimentale au cours de laquelle nous découvrons que Janice, la femme de Ralph Hamilton, le riche rancher à qui Cord doit la vie, est son ancienne fiancée et qu'elle avait épousé Hamilton dès les premiers temps de son incarcération. Or, le "monstre", s'il exprime du coup de la rancoeur, semble plus près de verser sa larme que de vouloir se venger. On a donc un monstre…sentimental…Aussitôt après, Hamilton, le mari, pourtant lui aussi une victime de Cord, lui propose de reprendre du service et de convoyer les bêtes de tous les ranchers des environs, ce qui parait étonnant compte tenu de la scène initiale mais, soit, on pourrait accepter que par nécessité économique, les éleveurs laissent leur méfiance et leur haine de coté pour se mettre au service de Cord…à condition que cela débouche sur quelque chose d'intéressant mais il n'en est rien car Warren commet la bêtise de vendre la mèche dès le premier échange entre Hamilton et Cord. On comprend donc très tôt que Joel McCrea, dont il émane de toute façon tout du long malgré une dureté de façade une sorte de noblesse blessée, était plus victime que coupable. A partir de là, même si on apprend en détails la vérité sur ce qui s'était réellement produit 5 ans plus tôt qu'à la fin du récit, plus rien ne tient et en tout cas on anticipe presque tous les événements.
Image
On anticipe l'essentiel des conséquences entrainées par la promesse faite par Cord de guider les deux clans concurrents (et d'ailleurs ses quelques allers et venus entre les deux troupeaux sont invraisemblables). Nous n'avons plus d'incertitudes quant à l'attitude que Cord va adopter vis à vis de ses lyncheurs. Si Cord ne représente pas une menace, ce n'est pas plus le cas des ranchers qui se soumettent assez docilement aux ordres de l'homme haÏ : un coup de feu en l'air suffit en général pour les faire rentrer dans le rang. La romance n'a pas plus inspiré Warren. Le convoi comprend deux femmes, toutes deux amoureuses de notre Joel. Janice Hamilton, l'ex fiancée, aime Joel. Joel aime Janice...mais c'est finalement un trop brave type pour piquer la femme d'un handicapé (je rappelle que Hamilton est aveugle). Rideau … Sandy, la très jeune fille d'un employé et ami de Cord est folle de notre vieux beau mais les scènes que cela entraine sont encore plus pénibles et je préfère jeter un voile pudique sur le grotesque de l'attitude de notre ingénue nunuche qui se cache pour regarder à la dérobé notre vieux beau préféré. Reste un final plutôt enlevé et qui justifie le titre belge de ce film inédit en France : La chevauchée des vaqueros. Les interprètes sont très moyens à l'exception de Richard Shannon, très bien dans le rôle de Garth, le concurrent de Hamilton. C'est le seul qui aura vraiment à souffrir de la cruauté de Cord mais ce n'est que justice car c'était un voleur :D . Un western passable. DVD gravé (vost)
Image
Spoiler (cliquez pour afficher)
Image
Image
Le danger représenté par des cow-boys surexcités, qui se saoulent et se livrent à tous les excès après des mois de privations a été utilisé assez souvent dans le western. C'est le cas dans un autre western de Charles Marquis Warren qui sera le prochain film que j'évoquerais dans ce sujet.
Dernière modification par kiemavel le 30 oct. 16, 15:53, modifié 3 fois.
kiemavel
Assistant opérateur
Messages : 2231
Inscription : 13 avr. 13, 09:09

Re: Les Westerns 2ème partie

Message par kiemavel »

Chip a écrit :Je ne sais pas si tu as le dvd de " Bad men of Tombstone" (j'ai époué un hors-la-loi)(1949) de Kurt Neumann avec Barry Sullivan et Broderick Crawford , récemment paru chez Archive WB collection, ton avis sur ce petit western noir, m'intéresse, j'ai enfin pu le revoir dans cette copie correcte de l'éditeur, et le film mériterait bien une analyse dans cette rubrique.
Pas vu. Une vraie rareté celui là. Le film a bonne réputation et puis Barry Sullivan + Broderick Crawford, je vais prendre. Merci car je ne savais pas que ce DVD était disponible. Les autres westerns de Neumann que je connais ne sont pas extraordinaires : Le kid du Texas, L'attaque de Fort Douglas (pas vu depuis très longtemps. Je n'ai pas le DVD parait-il exécrable sorti chez nous) et même L'enfant du désert, qui est sympathique, me parait quand même facultatif.
Chip a écrit :Vu " la rançon de la peur", il y a bien longtemps, je dois avoir un enregistrement VHS. James Griffith (1916-1993) outre ses talents de comédien, écrivait des chansons et des scénarios, participa aux scripts de deux westerns tournés en Espagne : " Shalako" et " Catlow " (sous le nom de J.J. Griffith, il fut aussi scénariste et acteur d'un film de Russ Meyer " Lorna " (Lorna)(1965). En 1948, il fit partie de l'orchestre de Spike Jones.
Merci. La aussi j'ignorais tout de cet aspect là de la carrière de James Griffith !
Chip
Electro
Messages : 949
Inscription : 22 oct. 08, 10:26

Re: Les Westerns 2ème partie

Message par Chip »

" Bad men of Tombstone" ( j'ai épousé un hors-la-loi), on en parle un peu sur westernmovies. La copie dvd Artus films de " l'attaque de fort Douglas", n'est pas exécrable, pas parfaite certes, mais c'est regardable. Le film contient de nombreux stock shot du film de Ford " drums along the mohawks ", notamment la course de Fonda, le film ne casse rien, mais Allison Hayes, Lori Nelson et surtout Rita Gam en squaw méritent le détour et Neville Brand en indien, ce n'est pas triste :P . Le film est proposé en VO, VO s/t et VF. Le film est présenté par George Ramaïoli ( Pike Bishop sur western movies).
Avatar de l’utilisateur
Jeremy Fox
Shérif adjoint
Messages : 99625
Inscription : 12 avr. 03, 22:22
Localisation : Contrebandier à Moonfleet

Re: Les Westerns 2ème partie

Message par Jeremy Fox »

Rashomon
Machino
Messages : 1024
Inscription : 7 avr. 14, 14:16

Re: Les Westerns 2ème partie

Message par Rashomon »

Vu coup sur coup trois productions A.C. Lyles sur Paramount Channel - "Condamné à être pendu", "Toute la ville est coupable" et "Fort Utah" et j'aurais du mal à en effacer le (mauvais) souvenir. Si le premier était visible, grâce notamment à des acteurs mieux conservés, les deux autres relèvent de la gériatrie pure et simple: on prend des "vedettes" qui ont du kilomètre au compteur et on leur fait "jouer" des histoires aux ressorts antédiluviens même pour l'époque, le tout mollement réalisé par des tâcherons avec un budget tout mini rikiki. Abominable.
kiemavel
Assistant opérateur
Messages : 2231
Inscription : 13 avr. 13, 09:09

Re: Les Westerns 2ème partie

Message par kiemavel »

Chip a écrit :" Bad men of Tombstone" ( j'ai épousé un hors-la-loi), on en parle un peu sur westernmovies. La copie dvd Artus films de " l'attaque de fort Douglas", n'est pas exécrable, pas parfaite certes, mais c'est regardable. Le film contient de nombreux stock shot du film de Ford " drums along the mohawks ", notamment la course de Fonda, le film ne casse rien, mais Allison Hayes, Lori Nelson et surtout Rita Gam en squaw méritent le détour et Neville Brand en indien, ce n'est pas triste :P . Le film est proposé en VO, VO s/t et VF. Le film est présenté par George Ramaïoli ( Pike Bishop sur western movies).
Bad men of Tombstone est commandé (13 euro + frais de port). Pour L'attaque de fort Douglas, le test de Jeremy Fox confirme ce que tu disais, c'est moins mauvais que je ne le pensais mais c'est quand même un petit souvenir et je reste pour l'instant avec ma copie (qui est elle pour le coup vraiment toute pourrie et en VF)
kiemavel
Assistant opérateur
Messages : 2231
Inscription : 13 avr. 13, 09:09

Re: Les Westerns 2ème partie

Message par kiemavel »

Rashomon a écrit :Vu coup sur coup trois productions A.C. Lyles sur Paramount Channel - "Condamné à être pendu", "Toute la ville est coupable" et "Fort Utah" et j'aurais du mal à en effacer le (mauvais) souvenir. Si le premier était visible, grâce notamment à des acteurs mieux conservés, les deux autres relèvent de la gériatrie pure et simple: on prend des "vedettes" qui ont du kilomètre au compteur et on leur fait "jouer" des histoires aux ressorts antédiluviens même pour l'époque, le tout mollement réalisé par des tâcherons avec un budget tout mini rikiki. Abominable.
Je me souviens surtout de Johnny Reno (Toute la ville est coupable) et moi aussi j'ai un souvenir pénible de ce film, surtout qu'on y retrouvait un de mes acteurs préférés, Dana Andrews, mais bien fatigué…
kiemavel
Assistant opérateur
Messages : 2231
Inscription : 13 avr. 13, 09:09

Tension at Table Rock

Message par kiemavel »

Image
Tension à Rock City - Tension at Table Rock (1956)
Réalisation : Charles Marquis Warren / Production : Sam Wiesenthal (RKO) / Scénario : Winston Miller d'après le roman Bitter Sage de Frank Gruber / Photographie : Joseph Biroc / Musique : Dimitri Tiomkin

Avec : Richard Egan (Wes Tancred), Dorothy Malone (Lorna Miller), Cameron Mitchell (Le shérif Fred Miller), Billy Chapin (Jody), Royal Dano (Harry Jameson), Edward Andrews (Kirk), John Dehner (Hampton), Deforest kelley (Jim Breck), Angie Dickinson (Cathy)

Une bande de hors-la-loi dirigée par Sam Older tente d'échapper à une milice lancée à leur poursuite. En compagnie de Wes Tancred, son complice et ami, Il parvient à rejoindre la cachette du gang où l'attend sa femme Cathy. En désaccord avec les méthodes employées par Older, qui avait notamment abattu un autre de leurs complices en cours de route, Tancred annonce son départ à Cathy. Elle lui propose de s'enfuir avec lui mais il la repousse, puis lorsqu'il s'apprête à partir, Older, à la fois par jalousie et parce qu'il redoute d'être dénoncé, tente de lui tirer dans le dos mais Tancred est le plus prompt à dégainer. Il abat Older juste avant que la milice ne fasse irruption dans la maison. Pour se venger de Tancred, Cathy prétend qu'il a abattu son mari de sang froid. Il est jeté en prison avant d'être libéré quelques semaines plus tard sur intervention du gouverneur. Alors qu'il croit pouvoir démarrer une nouvelle vie, il découvre que son histoire, déformée par la rumeur, s'est propagée et est même devenu une chanson populaire dans laquelle on raconte l'histoire de Wes Tancred, celui qui a abattu son meilleur ami dans le dos…Dès lors, on lui cherche querelle partout où il passe à tel point qu'il fini par fuir les villes. Alors qu'il vient tout juste d'être engagé sous un faux nom comme garçon d'écurie dans un relai isolé tenu par un veuf à moitié infirme aidé de son jeune fils, des hommes projetant d'attaquer la prochaine diligence prennent le contrôle des lieux. Le vieil homme tente de s'interposer mais il est abattu avant que Tancred ne les abattent à leur tour sous les yeux du jeune Jody. Tancred conduit alors le jeune garçon à Table Rock, une ville dont le shérif est l'oncle de l'enfant...
ImageImageImage
En dehors de Little Big Horn, ce western est surement le meilleur réalisé par Charles Marquis Warren. Il faut néanmoins passer l'épreuve d'un début complètement raté. La courte séquence au cours de laquelle la femme de Sam Older, interprétée par Angie Dickinson (qu'on ne voit plus par la suite), se voit repousser par Tancred et qui par vengeance ment sur les circonstances de la mort de son mari est assez grotesque. C'était en tout cas une façon extrêmement malhabile d'amener ce thème du mauvais garçon, de l'as de la gâchette cherchant à échapper à son passé et à rétablir son honneur. Pourtant commis en état de légitime défense, le meurtre d'un proscrit célèbre qui avait la réputation d'être une sorte de Robin des bois redistribuant le produit de ses vols (mais en réalité c'était une crapule et c'est pour cette raison que Tancred voulait quitter sa bande) va le rendre extrêmement impopulaire. Son nom, bientôt connu de tous, va être synonyme de trahison et de lâcheté, une chanson populaire circulant de ville en ville lui rappelant sans cesse l'injuste et exécrable réputation qui le précède. Dans sa phase initiale, le film de Warren présente donc des points communs avec le film de Samuel Fuller, J'ai tué Jesse James ; le personnage de Sam Older (interprété par Paul Richards) s'inspirant sans doute de Jesse James et celui de Tancred, de son assassin Bob Ford. Quant à la chanson infamante (et infâme en français…puisque je ne connais ce film qu'en version française et qu'elle y avait été traduite et chantée par un massacreur inconnu), elle vient peut-être de la chanson populaire américaine Jesse James dont le texte s'apparente à La balade de Wes Tancred qu'on entend fredonner plusieurs fois dans la première partie du film.
ImageImageImage
Mais malgré le point commun initial avec le film de Fuller, c'est à L'homme des vallées perdues (Shane) que le scénario emprunte le plus. On y retrouve le mystérieux inconnu, habile tireur et courageux. L'enfant rempli d'admiration pour l'inconnu. Le père, "héros" du quotidien mais pas un héros tout court. Ici, il s'agit de deux personnages, tous les deux diminués et/ou lâche et faible. La mère (ici la tante) qui tombe amoureuse de l'inconnu…et même dans le final le tueur engagé par le clan adverse. Mais Warren rend avec des intérêts. La relation entre Tancred et Jody est complexe et ambiguë. La chanson sur Tancred est arrivée jusqu'au relai tenu par son père et on peut voir une certaine ironie dans le fait que Jody, tout en admirant Tancred, raille sans le savoir le même homme à travers la chanson que lui aussi fredonne. Ce décalage est d'ailleurs exploité jusqu'au bout dans la relation entre les deux personnages. Celui interprété par Van Heflin dans le film de George Stevens est donc ici divisé en deux. Il y a d'abord Burrows, le père biologique (interprété par Joe De Santis). C'est un homme vieillissant et diminué (il boite) mais il ne manque pas de courage. Il n'est simplement pas de taille à se mesurer aux 3 bandits et il est abattu avant qu'eux mêmes ne le soient par Tancred sous les yeux de Jody. Puis ce personnage est prolongé par le shérif Fred Miller (interprété par Cameron Mitchell), l'oncle de l'enfant. Lui aussi est un homme diminué, soufrant de séquelles physiques (il a été en partie défiguré) mais surtout morales car il ne supporte plus la pression inhérente à son métier : il a été gagné par la peur à la suite du dernier raid des cow-boys qui sont à nouveau annoncés en ville quand Tancred et Jody arrivent à Table Rock. Et enfin, le femme de Miller, Lorna (interprétée par Dorothy Malone). C'est le personnage qui reste le plus proche de celui que tenait Jean Arthur.
ImageImageImage
Après un assez long préambule qui n'est pas à négliger car il introduit dans l'histoire le jeune Jody (Billy Chapin) et sa relation avec Tancred, c'est donc à Table Rock (rebaptisé Rock City dans la version française) que se passe l'essentiel de l'action. Sur ces bases sommairement exposées, comme je le signalais dans le texte précédent, c'est l'arrivée en ville de Hampton (John Dehner) et de sa cinquantaine de cow-boys -qui viennent s'y défouler après avoir passé de longs mois à convoyer du bétail- qui va révéler les êtres derrière les apparences avec pour événement initial le meurtre d'un habitant par un cow-boy aviné. A partir de là, l'action se développe sans failles ni fautes de gout ; elle est soutenue et reste intéressante jusque dans l'épilogue et du coté de la mise en scène, si je ne vois rien d'extraordinaire, certaines séquences sont très bien réglées par Warren, notamment un formidable gunfight et on ne déplore en tout cas aucune des maladresses de mise en scène que l'on pouvait voir même dans Little Big Horn dès que Warren devait filmer des séquences d'action (c'est le seul point faible de ce film).

Je n'en dis pas plus sur ce qui constitue le coeur (ou l'un des coeurs) de l'intrigue, cad le trio central : Richard Egan, Dorothy Malone, Cameron Mitchell. Un mot en revanche sur les interprètes. Cameron Mitchell est excellent en shérif tourmenté. Richard Egan fait son maximum. Ce n'est pas un grand interprète mais il s'en sort très bien même si ses sourires parfois un peu niais gâchent un peu la fête. Le seul personnage faible, mal exploité et un peu gâché par son interprète, c'est Lorna, l'épouse du shérif. Certains plans sur le visage désolé et les moues boudeuses de Dorothy Malone sont en trop. Par contre, dans un film comportant beaucoup de seconds rôles interprétés par des comédiens bien connus, quelques uns trouvent des rôles marquants. On retrouve Paul Richards (Sam Older) et Angie Dickinson (Cathy, sa compagne) dans une seule séquence -certes maladroite voir pire- mais tout deux y sont irréprochables et on remarquait déjà plus particulièrement la sensualité de miss Angie. Par la suite, on remarque Royal Dano dans le rôle de Harry Jameson, l'éditeur de la feuille de chou de la petite ville. Et surtout l'excellent Edward Andrews (Kirk), le propriétaire des bars et salles de jeu de la ville qui, au contraire de la plupart des habitants, voit d'un très bon oeil l'arrivée des cow-boys. Cet acteur jouait souvent les types inquiétants derrière son allure tranquille de notable. Il a eu parfois un grain (dans le thriller), ici il se contentait d'être sournois et affairiste. Mais le meilleur du coté des seconds rôles reste le surprenant DeForest Kelley, qui n'apparait que dans le final dans le rôle de Jim Breck, un tueur à gages engagé pour supprimer des gêneurs sans savoir que l'un d'eux est son ami Tancred. Il est remarquable en tueur souriant dans une séquence qui débute comme les retrouvailles entre deux bons copains.

Pour l'anecdote, les gens chargés de la version française étaient des créatifs…et parfois pour des conneries. On se demande pourquoi Sam Murdock est devenu Sam Older. Wes Tancred est devenu Will Tancred…et même pourquoi la ville de Table Rock est devenu Rock City. vu en VF

Deux personnages secondaires plus particulièrement remarqués :
ImageImage
Edward Andrews - Royal Dano
Pendant le tournage :
Spoiler (cliquez pour afficher)
Image

Angie Dickinson - Richard Egan

Image

Charles Marquis Warren - Richard Egan
Avatar de l’utilisateur
Supfiction
Charles Foster Kane
Messages : 22217
Inscription : 2 août 06, 15:02
Localisation : Have you seen the bridge?
Contact :

Re: Les Westerns 2ème partie

Message par Supfiction »

le film de Warren présente donc des points communs avec le film de Samuel Fuller, J'ai tué Jesse James ; le personnage de Sam Older (interprété par Paul Richards) s'inspirant sans doute de Jesse James et celui de Tancred, de son assassin Bob Ford. Quant à la chanson infamante (et infâme en français…puisque je ne connais ce film qu'en version française et qu'elle y avait été traduite et chantée par un massacreur inconnu), elle vient peut-être de la chanson populaire américaine Jesse James dont le texte s'apparente à La balade de Wes Tancred qu'on entend fredonner plusieurs fois dans la première partie du film.
La chanson du film est effectivement infâme en français, je confirme ! Une horreur. La VF parlée n'est pas beaucoup mieux, j'ai l'impression qu'il s'agit d'un doublage fait à la va-vite pour un passage télé.
Je ne sais pas si la légende a été aussi injuste envers le "lâche Robert Ford", je n'ai que le cinéma pour juger (qu'il s'agisse de Henry King, Fritz Lang, Nicholas Ray ou Andrew Dominik, j'avais le dvd du Samuel Fuller mais sans sous-titres, du coup je ne l'ai toujours pas vu).

Bien vu pour le parallèle avec Shane. Je ne suis pas fan des gosses dans les westerns, mais là ça va, le gamin est supportable. Richard Egan a une bonne gueule bien qu'il soit un peu mono-expression avec son sourire crispé. J'aime bien son duel au soleil final avec son copain, le Dr. McCoy. Simple mais ça fait toujours plaisir aux (grands) enfants.

Sinon, tu as bien fait de préciser pour les fans d'Angie Dickinson qu'elle avait un tout petit rôle dans ce western, c'est le moins qu'on puisse dire. En revanche, c'est une curiosité car je crois que je ne l'ai jamais vu aussi jeune.
Chip
Electro
Messages : 949
Inscription : 22 oct. 08, 10:26

Re: Les Westerns 2ème partie

Message par Chip »

Avant " Tension at Table rock ", on a pu voir la belle Angie dans 5 autres westerns :
- man with the gun ( l'homme au fusil) (1955) Richard Wilson
- the return of Jack Slade (1955) Harold Schuster
- Tennessee's Partner (le mariage est pour demain/ le bagarreur du Tennessee)(1955) Allan Dwan
- Hidden guns (1956) Albert C. Gannaway
- gun the man down (1956) le premier et le meilleur film d' Andrew V. Mc Laglen
5 films que j'ai vus en salles ou(et) en dvd. A l'état de chrysalide dans ces films, elle sera beaucoup plus à son avantage dans le " Rio Bravo" de Hawks.
kiemavel
Assistant opérateur
Messages : 2231
Inscription : 13 avr. 13, 09:09

Re: Les Westerns 2ème partie

Message par kiemavel »

Supfiction a écrit :Bien vu pour le parallèle avec Shane. Je ne suis pas fan des gosses dans les westerns, mais là ça va, le gamin est supportable. Richard Egan a une bonne gueule bien qu'il soit un peu mono-expression avec son sourire crispé. J'aime bien son duel au soleil final avec son copain, le Dr. McCoy. Simple mais ça fait toujours plaisir aux (grands) enfants.

Sinon, tu as bien fait de préciser pour les fans d'Angie Dickinson qu'elle avait un tout petit rôle dans ce western, c'est le moins qu'on puisse dire. En revanche, c'est une curiosité car je crois que je ne l'ai jamais vu aussi jeune.
:D La séquence est quand même bien amenée et appréciable même par les plus murs, voir par les carrément blets (les pourris ? ). Mais c'est sûr qu'aujourd'hui on voit plus trop de gars commencer par se regarder de travers avant de se faire face dans la rue principale du village, même chez moi à la campagne ça ne se fait plus.

Pour McCoy, si on est facilement distrait par des détails, on peut s'amuser du fait qu'il se retrouve engagé par un chef (des méchants) qui s'appelle Kirk (interprété par Edward Andrews). En revanche, je n'ai vu personne avec de grandes oreilles.

Au sujet d'Angie Dickinson, c'est vrai qu'elle est bien jeunette dans celui ci mais comme Chip l'a indiqué, on l'avait déjà vu auparavant dans le genre. Dans celui ci effectivement, elle n'est que d'une séquence et elle disparait au bout de 5 min.
Dernière modification par kiemavel le 1 mai 15, 10:04, modifié 1 fois.
Avatar de l’utilisateur
Supfiction
Charles Foster Kane
Messages : 22217
Inscription : 2 août 06, 15:02
Localisation : Have you seen the bridge?
Contact :

Re: Les Westerns 2ème partie

Message par Supfiction »

Chip a écrit :Avant " Tension at Table rock ", on a pu voir la belle Angie dans 5 autres westerns :
- man with the gun ( l'homme au fusil) (1955) Richard Wilson
- the return of Jack Slade (1955) Harold Schuster
- Tennessee's Partner (le mariage est pour demain/ le bagarreur du Tennessee)(1955) Allan Dwan
- Hidden guns (1956) Albert C. Gannaway
- gun the man down (1956) le premier et le meilleur film d' Andrew V. Mc Laglen
5 films que j'ai vus en salles ou(et) en dvd. A l'état de chrysalide dans ces films, elle sera beaucoup plus à son avantage dans le " Rio Bravo" de Hawks.
tu veux dire que tu les as vu en 1955 ? Nom de Zeus! :shock:
kiemavel
Assistant opérateur
Messages : 2231
Inscription : 13 avr. 13, 09:09

Re: Les Westerns 2ème partie

Message par kiemavel »

Supfiction a écrit :
Chip a écrit :Avant " Tension at Table rock ", on a pu voir la belle Angie dans 5 autres westerns :
- man with the gun ( l'homme au fusil) (1955) Richard Wilson
- the return of Jack Slade (1955) Harold Schuster
- Tennessee's Partner (le mariage est pour demain/ le bagarreur du Tennessee)(1955) Allan Dwan
- Hidden guns (1956) Albert C. Gannaway
- gun the man down (1956) le premier et le meilleur film d' Andrew V. Mc Laglen
5 films que j'ai vus en salles ou(et) en dvd. A l'état de chrysalide dans ces films, elle sera beaucoup plus à son avantage dans le " Rio Bravo" de Hawks.
tu veux dire que tu les as vu en 1955 ?
Possible car Chip a déjà plusieurs fois évoqué sa découverte de certains westerns au cinéma, à Paris, mais jusque là plutôt dans les années 60
Nom de Zeus! :shock:
C'est en 55 que se retrouve McFly :wink: Tu l'as donc aussi vu en VF celui là
O'Malley
Monteur
Messages : 4602
Inscription : 20 mai 03, 16:41

Re: Les Westerns 2ème partie

Message par O'Malley »

Les portes de l'enfer de Charles Marquis Warren (1951)
Agréablement surpris par ce petit western qui se hisse, à mon sens, légèrement au-dessus de la moyenne du genre de part son cadre insolite (la prison souterraine dans la roche, au milieu du désert), sa mise en scène aussi sèche que les personnages et le décor et surtout son sous-texte politique anti-macchartyste assez courageux, qui compensent largement les faiblesses du script et une fin bâclée. On nous bassine du courage de Carl Foreman et Stanley Kramer pour Hign Noon (alors que vraiment le thème de lâcheté collective dépasse largement le cadre politique de l'époque sans que que le film de Zinneman, je trouve, le rattache précisément à la période) alors que là, nous avons une intrigue avec un homme interprété par Sterling Hayden (avec le passif personnel que l'on sait) qui est envoyé en prison par un tribunal militaire pour avoir aidé (côtoyé) momentanément des guerilleros (sic!), après en avoir été même un quelques années auparavant (c'est surtout son passé qui lui est reproché au moment du procès). De plus, le commandant de la prison lui promet, un peu plus tard dans le film, la liberté s'il dénonce ses anciens complices. Et alors, là, qui joue le commandant? Ward Bond (avec les opinions politiques du monsieur que l'on sait)...

Bref, le véritable western anti-maccarthyste (avec le Johnny Guitar de Nicholas Ray où l'on retrouve à nouveau Hayden et Bond) n'est t-il pas plutôt celui-ci?

Donc bravo à Sidonis d'avoir extirpé ce curieux petit western des limbes de l'oubli et de lui avoir donné une nouvelle vie...
Dernière modification par O'Malley le 1 mai 15, 11:01, modifié 3 fois.
Répondre