Point limite (Sidney Lumet - 1964)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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cinephage
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Re: Point limite (Sidney Lumet)

Message par cinephage »

Watkinssien a écrit :Oui ça y fait ! :)

C'est vrai que Fonda est impeccable dans le film !
Absolument.
Pour revenir à la peur que tu évoquais, le fait est que dans Point Limite, on a un président très honorable, qui dirige et décide. Donc on est concerné par la gravité de la situation, mais rassuré par le sérieux avec lequel la situation est gérée.
Alors que dans Docteur Folamour, très vite, on a l'impression que personne ne contrôle rien, ce qui est sans doute moins réaliste, mais bien plus effrayant.
I love movies from the creation of cinema—from single-shot silent films, to serialized films in the teens, Fritz Lang, and a million others through the twenties—basically, I have a love for cinema through all the decades, from all over the world, from the highbrow to the lowbrow. - David Robert Mitchell
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Demi-Lune
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Re: Point limite (Sidney Lumet, 1964)

Message par Demi-Lune »

Je me suis pris une baffe dans la tronche avec ce film d'une rigueur absolue. Peut-être LE film de Guerre froide avec Octobre Rouge, en tout cas celui qui aura le mieux illustré la stratégie de la Destruction Mutuelle Assurée et ses mécanismes jusqu'au-boutistes. D'ailleurs le film reste tout à fait contemporain, son propos validant intemporellement les dangers doctrinaux d'une escalade ou d'une perte de la maîtrise du feu nucléaire. En traitant cette gestion de crise bilatérale avec un premier degré kafkaïen effrayant, Lumet réussit un film à la fois édifiant, ultra-réaliste et haletant où s'illustre une nouvelle fois la qualité scénaristique de son œuvre. L'exercice du huis-clos n'est jamais rébarbatif, car le réalisateur nous prend à la gorge avec sa suggestion oppressante d'un désastre annoncé, à la fois au travers de dialogues brillants et des quelques contrechamps sur les écrans de bord extrêmement dramatiques. Tout aussi remarquable, c'est le fait que malgré la gestion du compte-à-rebours et sa densité, Lumet parvienne à identifier des caractérisations crédibles pour chaque personnage même s'il y a des stéréotypes (le Président au sang-froid, le théoricien civil cynique, etc). Tout fonctionne grâce à un casting homogène et inspiré (Fonda est grand) et certaines scènes libèrent quelque chose de puissant dans le drame, comme l'épouse du pilote qui supplie son mari de ne pas larguer les bombes ou cet échange téléphonique entre le général américain et le maréchal soviétique, où on s'imagine que comme son interlocuteur US, le maréchal étudie le dossier de son homologue et se rend compte qu'ils sont finalement du même moule.
Je n'ai jamais été un grand fan du Docteur Folamour, donc vive Point limite et merci Sidney.
Federico
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Re: Point limite (Sidney Lumet - 1964)

Message par Federico »

J'ai mis le temps mais j'ai enfin terminé la lecture du thriller original de Burdick et Wheeler. Même en connaissant l'histoire par cœur et son atroce dénouement, sa sidérante intrigue reste passionnante. Les auteurs (qui étaient, je crois, des universitaires) ont un grand art de la description psychologique des personnages dont on apprend beaucoup plus que dans les deux adaptations. Jamais nommé, le président américain, décrit comme un homme jeune et décontracté, élevé et éduqué sur la côte Est, est clairement JFK. Le protagoniste le plus - dangereusement - fascinant reste Groeteschele, cette terrifiante incarnation du réalisme le plus glacial, et il m'a été impossible de ne pas lui juxtaposer la performance de Walter Matthau (Hank Azaria est très bien dans la version TV de Frears mais il a plus l'air de sortir d'un épisode de Mad men, de l'ENA ou d'un congrès de caciques du MEDEF). Description très fine aussi des équipages de bombardiers avec un officier supérieur désespéré par l'absence totale d'état d'âme de ses jeunes co-équipiers, presque informatisés/robotisés avant l'heure (le roman était aussi une mise en garde contre la déshumanisation du monde à venir).
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The difference between life and the movies is that a script has to make sense, and life doesn't.
Joseph L. Mankiewicz
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