Akira Kurosawa (1910-1998)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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Jeremy Fox
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Re: Akira Kurosawa (1910-1998)

Message par Jeremy Fox »

Après une première salve en mars 2016, Carlotta poursuit sa rétrospective Kurosawa en ressortant en salle cette semaine huit nouveaux titres (dont deux inédits, dont Le Plus dignement que vient de chroniquer Antoine Royer à l'occasion) dans des copies numériques restaurées.

Nous en profitons également pour vous proposer notre top Kurosawa.
kiemavel
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Re: Akira Kurosawa (1910-1998)

Message par kiemavel »

Philippe Paul a fait son possible pour défendre ses films noirs 8)

1. L'Ange ivre
2. Les Salauds dorment en paix
3. Chien enragé
4. Entre le ciel et l'enfer

Etablir le top 10 d'un tel cinéaste, ça doit être une torture. Quitte à me contredire, pour moi ce serait Chien enragé tout en haut.
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Rick Blaine
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Re: Akira Kurosawa (1910-1998)

Message par Rick Blaine »

kiemavel a écrit :Philippe Paul a fait son possible pour défendre ses films noirs 8)

1. L'Ange ivre
2. Les Salauds dorment en paix
3. Chien enragé
4. Entre le ciel et l'enfer
J'aime beaucoup tout ce que j'ai vu de Kurosawa, mais je trouve qu'il est encore plus grand dans le genre noir. Son style, son rythme s'y prêtent tout particulièrement. :D
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The Boogeyman
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Re: Akira Kurosawa (1910-1998)

Message par The Boogeyman »

Yojimbo bluray wildside.
Des décalages entre le son et l'image.
Ça se remarque sur le mouvement des lèvres mais c'est encore plus flagrant sur les sons : Portes et volets qui claquent, Seibei qui fait claquer ses mains après avoir donné 25 pièces d'or à Sanjuro, ...

Le plus surprenant c'est que ça vient ça part tout du long.
Parfois c'est calé et d'autres non.
" Accélère minouche !" - Michel Poiccard /// “When you have to shoot shoot don't talk” - Tuco Benedicto Pacifico Juan Maria Ramirez /// "Alors tu vois où elles nous ont menées tes ondes négatives, tu devrais avoir honte.” - Oddball dit Le Cinglé /// "Wake up !... Time to die" - Leon Kowalski /// "C'est quoi minouche ?" - Patricia Franchini
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jhudson
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Re: Akira Kurosawa (1910-1998)

Message par jhudson »

Une pure hypothèse, ça ne viendrait pas de plan ayant été post synchronisé?

Il y en a toujours quelques un dans les films, ça évite de refaire des plans ayant eu des problémes de son lors de la prise de vue.
The Eye Of Doom
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Re: Akira Kurosawa (1910-1998)

Message par The Eye Of Doom »

Revu hier pour la troisième ou quatrième fois la forteresse cachée ( dont le titre originel selon Wikipedia Trois salauds dans la forteresse cachée).
Film mineur au mieux léger selon certains critique qui préfèrent Vivre ou Barberousse, je trouve ce film toujours aussi jubilatoire : c'est un de mes Kurosawa préférés par son mélange d'action épique, d'humour et d'humanisme.
La mise en scène et la photo en scope sont superbe. Chaudement recommendable.

Spoiler (cliquez pour afficher)
Bien que le film soit un pur film d'aventure, la force de Kurosawa est de ne jamais laisser le spectateur oublier l'horreur de la condition des personnages et du contexte de la guerre.
Au delà des péripéties du recit, le film s'organise ainsi autour de trois scènes majeures qui comptent parmi les plus belles réussies de Kurosawa
Le film démarre de façon brutale par une engueulade comique des deux paysans abrutis, suivie de la mort assez atroce d'un guerrier. On est tout de suite dans l'ambiance. Suit une des description de l'enfer les plus hallucinantes: on y voit l'équivalent de la légion des damnés de la terre envoyée creuser dans un cul de basse fosse inondé. Ensuite c'est une mutinerie sauvage, oú la masse compacte des malheureux massacre les gardiens puis tombé sous les balles.
C'est avec la scene des drogués à la fin d " entre le ciel et l enfer", une des visions les plus dantesque du cinéma de Kurosawa.

Nos deux "Heros" en échappent par miracle mais on sait tout sur le destin de creuseurs de tombes qui les attends s ils survivent.

Le second moment essentiel se situe au 2/3 du film avec la séquence du relais oú nos protagonistes vont passer la nuit.
Là encore, pas de fichis, de blabla, de scene introduction superflue, ... on est plongé en quelques travelling dans la réalité de ce relais-hôtel de bas étage avec la scene crue oú un maquereau tente de vendre une jeune fille sans grand charme, qu'il regrette d'avoir achetée une pièce d'argent. Entre cet échange et la description en deux plans du travail des serveuses du boui-boui, tout est dit sans emphase sur la terrible condition féminine de l'époque.

Ces deux visions permettent la force de la troisième : le fête du feu, la dense jubilatoire autour du grand bûcher qui célèbre l'illusion de la vie et la nécessité de brûler son existence. Moment magnifique qui va seller le destin des personnages. A noter le jeu subtil tragi-comique, les personnages voient littéralement leur butin flambait et sont contraint de danser avec la foule, entre résignation et enthousiasme communicatif. Nul doute que ce moment de déchaînement physique prend plus de sens grâce à la vision sans fard sud nous as donnée Kurosawa de la vie du peuple.
Cette fête exutoire sera le moment de conversion de la princesse, qui in fine permettra la fin heureuse du film.

Mais le film n'est pas un pensum misérabiliste mais un recit d'aventures truculentes, en témoigne l'autre morceau de bravoure que constitue le duel à la lance.

La seule réserve que je vois est que la partie dans la forteresse est un peu longue: d'une durée de 2h20, le film aurait probablement gagner avec 10 min de moins sur sa première partie.
Les deux Heros du film et les personnages qui intéressent vraiment Kurosawa sont bien sûr les deux paysans: C'est sur eux que s'ouvre et se clôt le film : sales, grossiers, pleutres, geignards, querelleurs, avides, ... ils sont indécrottables. Il faut ici citer le nom des deux acteurs, complices réguliers de Kurosawa (des 7 samouraïs jusqu'a Kagemusa) :

Kamatari Fujiwara joue Matashichi (le petit gringalet)
Minoru Chiaki joue Tahei (le grand qui "colle").

Toujours a la limite de l'outrance et le cabotinage, mais sans jamais y tomber, ils livrent une performance tragi-comique extraordinaire. On peut citer le passage hilarant oú ils tentent de mimer les chevaux allant boire à la rivière, ou quand ils tirent à la courte paille qui violera la princesse, avant d être misérablement maintenu en respect par la servante ou quand ils reviennent tenter de grappiller les derniers morceaux d'or dans les cendres, oú quand ils rudoient les deux malheureux soldats qui portent les sacs.
Face aux autres personnages, sympathiques mais plutot stéréotypés, Kurosawa leur réservent les meilleures scènes et leur confie la dynamique du film.
C'est d'abord pour eux qui faut aller voir ce film magnifique.
villag
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Re: Akira Kurosawa (1910-1998)

Message par villag »

[quote="The Eye Of Doom"]Revu hier pour la troisième ou quatrième fois la forteresse cachée ( dont le titre originel selon Wikipedia Trois salauds dans la forteresse cachée).
Film mineur au mieux léger selon certains critique qui préfèrent Vivre ou Barberousse, je trouve ce film toujours aussi jubilatoire : c'est un de mes Kurosawa préférés par son mélange d'action épique, d'humour et d'humanisme.
La mise en scène et la photo en scope sont superbe. Chaudement recommendable.

Même avis, j’attends toujours le BR de ce film.....!
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Rick Deckard
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Re: Akira Kurosawa (1910-1998)

Message par Rick Deckard »

villag a écrit :j’attends toujours le BR de ce film.....!
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Re: Akira Kurosawa (1910-1998)

Message par villag »

Merci....
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Jeremy Fox
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Re: Akira Kurosawa (1910-1998)

Message par Jeremy Fox »

Antoine Royer nous parle de La Forteresse cachée qui vient de sortir en Bluray chez Wild Side.
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hansolo
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Re: Akira Kurosawa (1910-1998)

Message par hansolo »

Merci pour cette belle chronique !
Je vais revoir ce film ce dimanche en salles :)

Je l'ai découvert (et par la même occasion Kurosawa) il y a une dizaine d'années, au détour d'un article traitant de Star Wars qui en parlait.
Je trouve que les influences de ce film sur Star Wars sont loin d'être anecdotiques.
Il est certes ridicule de limiter l'intérêt de découvrir le film pour son influence sur l'œuvre de Lucas, mais je pense qu'un certain nombre de ma génération à découvert l'oeuvre - voire le cinéaste - suite à l'évocation de l'inspiration de Star Wars (tout comme certains cinéphiles des années 60' ont sans doute découvert l'oeuvre de Kurosawa suite à l'adaptation des 7 Samouraïs par Sturges).
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Re: Akira Kurosawa (1910-1998)

Message par The Eye Of Doom »

hansolo a écrit :Merci pour cette belle chronique !
Je vais revoir ce film ce dimanche en salles :)
.
Chanceux !
Bon, moi c'était il y a un mois... mais pour un peu j'y retrounerais presque.
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ed
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Re: Akira Kurosawa (1910-1998)

Message par ed »

hansolo a écrit : Je trouve que les influences de ce film sur Star Wars sont loin d'être anecdotiques.
Il est certes ridicule de limiter l'intérêt de découvrir le film pour son influence sur l'œuvre de Lucas, mais je pense qu'un certain nombre de ma génération à découvert l'oeuvre - voire le cinéaste - suite à l'évocation de l'inspiration de Star Wars (tout comme certains cinéphiles des années 60' ont sans doute découvert l'oeuvre de Kurosawa suite à l'adaptation des 7 Samouraïs par Sturges).
Le fait que George Lucas, ayant cité le film parmi les influences de Star Wars, ait incité les cinéphiles fans de ses films à découvrir La forteresse cachée, c'est en effet loin d'être anecdotique.
Maintenant, les liens effectifs entre les deux films (que je cite dans mon texte), eux, le sont (en tout cas à mes yeux). Je voulais surtout affirmer qu'il ne faudrait pas que ce soit "la" raison pour découvrir le film de Kurosawa.
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k-chan
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Re: Akira Kurosawa (1910-1998)

Message par k-chan »

Merci ed pour cette chronique, ton enthousiasme me fait vraiment plaisir. La forteresse cachée est un film jubilatoire, suffisamment subtil pour en faire plus qu'un simple divertissement. Certainement pas un film mineur dans la filmographie de Kurosawa. J'aurais aimé que tu insistes plus sur les similitudes avec Les hommes qui marchent sur la queue du tigre. Kurosawa aimait dire qu'il n'aimait pas les remake, ou qu'il n'y voyait pas d'intérêt, et malgré l'infini respect que j'ai pour lui, je pense qu'il n'était pas honnête à ce sujet, puisque certains de ces films sont des doubles de certains autres de ces films. Le thème du double... une prédilection chez lui ! :mrgreen:
- Ran évoque sans mal un mélange entre Kagemusha et Le château de l'araignée
- Dodes'kaden va clairement de paire avec Les bas-fonds, qui forme une trilogie supposée sur les bas-fonds avec Barberousse
- Chien enragé est un négatif de L'ange ivre
- Le sugata sanshiro de 1965 réalisé par Seichiro Uchikawa a clairement été contrôlé par Kurosawa, parce que ce dernier ne pouvait/voulait pas le réaliser. Ce film a servit de prétexte à la réalisation de Barberousse (même décors et même acteurs, donc deux films pour le prix d'un), mais je pense que Kurosawa avait en tête de refaire un film parfait à partir de ses deux premiers Sugata Sanshiro, en supprimant au passage les scènes anti-américain du second volet de 1945.

Et donc La forteresse cachée, qui va sans problème de paire avec Les hommes qui marchent sur la queue du tigre. Deux films d'aventure dont les similitudes sont frappantes :
- même histoire d'évasion au travers des bois, de passage de frontière, et de personnages cachant leurs identités
- Le prince Yoshitsune (très chétif, voire androgyne), équivalent à la princesse Yuki
- Benkei le protecteur charismatique devenant le puissant Rokurota
- Le porteur bouffon incarné par Enoken est le même boulet comique, parfois utile, que les deux paysans Matashichi et Tahei
- Et la présence de Susumu Fujita, qui dans les deux films aide clairement nos amis à avancer (même si ce n'est pas explicite dans le premier film, on se doute qu'il sait à qui il a affaire, et qu'il se contente de faire comme si...)

A vrai dire je suis presque persuadé que Kurosawa a écrit son scénario de La forteresse cachée en partant des Hommes qui marchent sur la queue du tigre.
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Kevin95
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Re: Akira Kurosawa (1910-1998)

Message par Kevin95 »

LES SALAUDS DORMENT EN PAIX (WARUI YATSU HODO YOKU NEMURU) d'Akira Kurosawa (1960) révision

Film noir à tendance mélodramatique et diplômé en économie. Les salauds dorment en paix narre la longue vengeance d'un employé modèle pour récurer la réputation de son père licencié et poussé au suicide. Rarement Akira Kurosawa n'aura eu la main aussi lourde contre ses contemporains, le Japon qu'il peint n'est qu'une entreprise au format XL où tous les coups sont permis et où chacun doit au final rendre des comptes à plus haut classé. La séquence du mariage en intro est d'une efficacité radicale, toute la complexité des rapports humains, le sens de la hiérarchie poussé et les sentiments biaisés sont mis en scène. Seul une petite demi-heure dépasse de l'ouvrage, le film aurait gagné à perdre du poids au compteur pour paraitre plus vif et colérique (beaucoup trop de larmes versées à mon goût). Sans ça, Les salauds dorment en paix a le coté vénéneux de futurs films autours des règlements de compte financiers en entreprise, de L'Imprécateur de Jean-Louis Bertuccelli (1977) à Wall Street d’Oliver Stone (1987), la sobriété japonaise en plus. Le plan final sur les culbutes d'un employé au téléphone fait froid dans le dos et constitue sans doute la scène la plus "méchante" du cinéma de Kurosawa.
Les deux fléaux qui menacent l'humanité sont le désordre et l'ordre. La corruption me dégoûte, la vertu me donne le frisson. (Michel Audiard)
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