Lino Ventura (1919-1987)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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Julien Léonard
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Re: Lino Ventura (1919-1987)

Message par Julien Léonard »

Concernant Un papillon sur l'épaule, un grand coup de chapeau à Gaumont pour la sortie blu-ray... Car avec un tel film (500 000 entrées environ à sa sortie, un échec compte-tenu du potentiel habituel de Ventura), fallait pas s'attendre à un raz-de-marée pour les ventes... Un film unique en son genre dans le paysage français, avec un très très grand Ventura (bon ça, c'est normal).
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julien
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Re: Lino Ventura (1919-1987)

Message par julien »

Un bon petit film en effet avec une atmosphère assez kafkaïenne qui rappelle un peu par moment le Frantic de Polanski. C'est même meilleur que Frantic je trouve.
Dernière modification par julien le 21 avr. 12, 13:28, modifié 1 fois.
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Jeremy Fox
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Re: Lino Ventura (1919-1987)

Message par Jeremy Fox »

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La Gifle de Claude Pinoteau - 1974


Jean Douélan (Lino Ventura), 50 ans, est professeur de géographie dans un lycée parisien. Bourru au grand cœur, il élève seul sa fille Isabelle (Isabelle Adjani), 18 ans, étudiante en première année de médecine. Il est en effet séparé depuis quelques années de sa femme Hélène (Annie Girardot), partie en Australie avec son amant et qui vit désormais en Grande Bretagne avec un anglais pittoresque. Sa nouvelle compagne, Madeleine (Nicole Courcel), vient à son tour de le quitter sentant leur relation sur le déclin. A ces désarrois d’ordre sentimentaux s’ajoutent des problèmes professionnels pour Jean : s’étant battu avec des policiers en civils qui rossaient un étudiant, sa direction demande à ce qu’il soit mis à pied ou muté. Ce qui ne facilite pas ses rapports avec l’exubérante Isabelle d’autant que cette dernière aimerait prendre son indépendance pour aller vivre avec Marc (Francis Perrin). Une dispute éclate qui se termine par une gifle magistrale. Sans prévenir son père, Isabelle fugue alors en moto avec Remy (Jacques Spiesser) pour aller rejoindre sa mère en Angleterre…

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La Gifle, classique de la comédie de mœurs à la française et surtout champion des rediffusions télévisuelles, est le deuxième des onze films de Claude Pinoteau après Le Silencieux, très bon film d’espionnage avec déjà Lino Ventura en tête d’affiche. Auparavant, le réalisateur débuta comme accessoiriste puis régisseur, avant de devenir assistant réalisateur dès 1948, notamment sur des films devenus des incontournables de notre cinématographie signés Jean Cocteau (Les Parents terribles), Jean-Pierre Melville (Les Enfants terribles), Henri Verneuil (Un singe en hiver) ou encore Claude Lelouch (L'aventure c'est l'aventure). Il ne passera donc derrière la caméra qu’après 25 ans de bons et loyaux services pour le 7ème art, avec deux très gros succès consécutifs, La Gifle étant même récompensé par ses pairs en obtenant le très convoité Prix Louis-Delluc en 1974. Belle gratification pour un cinéaste comme Pinoteau qui, amoureux du cinéma de Frank Capra et de Ernst Lubitsch, avait toujours rêve de tourner une comédie. Lino Ventura tournera à nouveau deux fois avec lui (L’homme en colère en 1979 puis La septième cible dans les années 80).

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Si ce dernier film est aujourd’hui imbuvable, il fit cependant du jour au lendemain une star de son actrice principale. Il en avait été de même pour Isabelle Adjani avec La Gifle après qu’elle ait néanmoins déjà été à l’affiche du Petit bougnat de Bernard Toublanc-Michel ainsi que de Faustine et le bel été de Nina Companeez, et bien après s’être fait remarquer sur les planches dès son rôle d’Agnès dans l’école des femmes à la Comédie Française. C’est Jean-Loup Dabadie qui, voyant jouer au théâtre la jeune comédienne dans Ondine de Giraudoux, décide d’écrire le scénario de La Gifle à son intention. Dabadie, c’était déjà le tendre et savoureux scénariste de quelques uns des plus beaux films de Claude Sautet (Les Choses de la vie ; César et Rosalie), Philippe de Broca (La Poudre d’escampette) ou Yves Robert (Salut l’artiste). Après La Gifle, il ne s’arrêtera pas en si bon chemin, à tel point qu’il n’est pas exagéré d’estimer qu’il a quasiment effectué un parcours sans faute, du dytique Un éléphant ça trompe énormément / Nous irons tous au paradis d’Yves Robert en passant par Violette et François de Jacques Rouffio, Clara et les chics types de Jacques Monnet, Le Sauvage de Jean-Claude Rappeneau, Attention une femme peut en cacher une autre de Georges Lautner… Presque uniquement des chroniques de mœurs teintées de sa petite musique bien à lui, douce-amère, tendre, mélancolique et touchante. "Le sujet m’a plu car Dabadie, Pinoteau et moi-même avions des filles ; nous avons voulu faire une comédie intergénérationnel en faisant appel à nos propres expériences de père" dira Lino Ventura. Et effectivement, le scénario est constitué entre autres de multiples anecdotes survenues à chacun d’entre eux en tant que père d’une adolescente.

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Et la réussite est au rendez vous, les auteurs ayant parfaitement bien capté l’air du temps, leur ‘comédie passionnelle’ (comme aimait à la décrire le cinéaste) étant désormais devenue, outre un classique mérité de la comédie de mœurs, un document sociologique très intéressant sur le milieu des années 70. Et pas que sur la jeunesse d’ailleurs, contrairement à ce que nous aurions pu penser en se souvenant d’Adjani comme principale protagoniste ainsi que du pitch la mettant en avant. Car, contrairement aux deux Boum (écrites par Danièle Thomson qui ne possède pas le don d'observation de Dabadie), les adultes ne sont ici pas de simples faire-valoir et tiennent au contraire une place d’une égale importance avec celles des jeunes, Dabadie et Pinoteau dépeignant avec autant d’attention les pérégrinations d’Isabelle et de ses amis que le portrait de ses parents. On assiste donc également aux relations du père et de sa maîtresse, du père et de son ex-femme, du père et de sa fille, ainsi qu'aux problèmes professionnels auxquels il est confronté… Pas vraiment d’intrigue bien solide (ce qui n’est pas nécessairement un défaut ; et en l’occurrence ce n’en est pas un) mais, comme la plupart du temps avec Dabadie, des tranches de vie, plus précisément une description de la vie quotidienne de grands adolescents à cette époque de libération des mœurs, et de leurs relations avec les adultes, qu'ils soient ou non de la famille. Guère de surprises pour la plupart des parents qui devraient tous plus ou moins se reconnaitre ici (que ce soit se souvenir de leur propre jeunesse ou des difficultés rencontrées avec leurs adolescents), les problèmes relationnels liés à la jeunesse étant toujours plus ou mois les mêmes depuis… Socrate… quoiqu’en disent les mauvaises langues ou les vieux grincheux à la mémoire courte qui veulent voir en la jeunesse un fléau du présent sans se rappeler qu’ils furent les mêmes calamités pour leurs aînés.

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Mal-être de jeunes adultes ("je suis mal et je n’arrive pas à l’expliquer" se plaint Isabelle) qui n’en disposent pas moins d’une vitalité exacerbée souvent agaçante pour leurs parents qui ont du mal à suivre leur rythme ("Je n’arrive plus à la photographier : elle bouge trop"), La Gifle brosse un portrait très juste de cette génération si l’on excepte le personnage de Morillon interprété par Francis Perrin qui est surtout là pour faire le clown (ce qu’il fait d’ailleurs assez bien ; en tout cas, au moins dans le film de Pinoteau), à l’origine de quelques gags et fous rires pour le spectateur (le match de foot entre autres, au cours duquel il tente 'une approche' du père pour lui demander de vivre avec sa fille). Il est très plaisant de trouver dans la peau de ce groupe de jeunes de futurs grands comédiens tels Nathalie Baye, Jacques Spiesser, Richard Berry ou André Dussolier, certains ne faisant que de très brèves apparitions. Nostalgie aussi pour les quarantenaires/cinquantenaires par le fait de retomber sur quelques repères visuels de ce milieu des années 70 tels, outre les voitures, les posters de Charlie Brown, les Tee-shirts ‘University of Texas’ ou encore le Homecraft (Pinoteau semblant avoir été fasciné par ce moyen de transport, s’y appesantissant bien durant une bonne minute)… et étonnement de constater ou se remémorer que l'on avait le droit à l’époque de fumer même au sein des amphis ou durant les examens écrits. Même si le film est bien ancré dans son époque, la jeunesse du 21ème siècle devrait néanmoins se retrouver dans celle exubérante d’il y a quarante ans, pouvant ainsi constater que pas grand-chose n’a changé dans leurs relations avec leurs parents. Elle devrait pouvoir se reconnaitre dans le personnage d’Isabelle, très justement interprété par une Isabelle Adjani qui n’a jamais été aussi convaincante que dans la comédie ; elle le confirmera d’ailleurs au travers Violette et François de Jacques Rouffio, Clara et les chics types de Jacques Monnet ou encore Tout feu tout flamme de Jean-Luc Rappeneau.

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Ici, tour à tour craquante, fatigante et attachante, elle nous livre une très bonne prestation pleine de vie et de fantaisie grâce à un débit rapide et une belle capacité dans la rupture de ton, ses abrupts accès de colère (dont l'un sera le déclencheur de la fameuse gifle qui couvait pourtant depuis pas mal de temps) s’avérant vraiment très crédibles, venant nous rappeler que nous ne sommes pas ici dans une pure comédie mais plutôt dans une chronique. Aux côtés de la toute jeune Isabelle Adjani nous trouvons parmi les personnages masculins un Francis Perrin parfait en bouffon survolté et un Lino Ventura fortement attachant dans son personnage du père dépassé par les évènements aussi bien sentimentaux que professionnels, qui doit ainsi tout en se remettant en question, apprendre à se séparer de sa fille qui souhaiterait ardemment voler de ses propres ailes. Il forme un couple très attendrissant avec une Annie Girardot qui ne démérite pas, cocasse en maîtresse fantasque d’un pittoresque anglais, et auparavant avec une Nicole Courcel épatante durant son faible temps de présence en début de film dans le rôle de sa nouvelle maîtresse. La rupture en cours est d'ailleurs très bien décrite, un sentiment de tristesse sourdant avec mélancolie sous le comique de situation.

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Pour le reste l'immense compositeur Georges Delerue concocte une jolie partition qui culmine lors de la virée à moto en Angleterre et Claude Pinoteau, avec professionnalisme, emballe le tout avec rythme et vivacité à défaut de génie. Sur fond de conflit des générations, un portrait juste, touchant, sensible, drôle et à postériori nostalgique de la jeunesse et des classes moyennes en ce début de la présidence giscardienne. Une jolie comédie de mœurs qui ne s’est pas démodée, une œuvre pleine de fraîcheur, un des très bons films sur les liens amour/haine entre un père et sa fille, qui doit beaucoup à son scénariste et son magnifique don d’observation de la société française.
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Re: Lino Ventura (1919-1987)

Message par Lord Henry »

Je n'ai pas vu le film de Deray, mais en revanche Frantic m'a donné le sentiment d'avoir plus à voir avec Hitchcock qu'avec Kafka.
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julien
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Re: Lino Ventura (1919-1987)

Message par julien »

Oui certes. Enfin, kafkaïen c'est un peu un terme bateau, couramment utilisé dés que l'univers d'un homme ordinaire bascule soudainement dans une sorte de cauchemar illogique, mais bon j'ai pas trouvé mieux. Mais il y a un peu du Kafka aussi j'ai Hitchcock je pense. The Wrong man par exemple.
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Re: Lino Ventura (1919-1987)

Message par Jeremy Fox »

Un taxi pour Tobrouk vient de sortir en DVD et en BR chez Gaumont
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Re: Lino Ventura (1919-1987)

Message par Supfiction »

Salut aux fans de Lino.
Je cherche des avis sur le film LE BATEAU D'EMILE.
Apparemment ce film ne dois pas être très connu, en dépit de son casting incroyable car pour l'instant je n'ai pas trouvé grand chose.

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Le film existe en dvd pack double programme chez LCJ..


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Re: Lino Ventura (1919-1987)

Message par Federico »

Le bateau d'Emile... C'est vrai qu'il n'est pas le plus connu (ou diffusé) des films du genre. Pas inoubliable mais à voir pour son casting de monstres (Simon et Brasseur), les engueulades Ventura-Girardot et les empoignades Ventura-Brasseur. Même si, personnellement, ces dernières ne valent pas celles de La métamorphose des cloportes et que question "je reviens au pays pour reprendre les affaires familiales suite aux derniers voeux d'un vieil original", je préfère Ventura en gugusse de Montauban (riante cité que, comme chacun sait, il vaut mieux ne pas quitter)... :wink:
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Re: Lino Ventura (1919-1987)

Message par Jerome »

il y a un doc en ce moment sur cine + classic sur Denys de la patellière. Pas encore vu mais le film est peut-être traité.
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Re: Lino Ventura (1919-1987)

Message par Supfiction »

J'ai commandé ce double dvd sur Priceminister. En espérant que l’image de ces dvds LCJ soit bonne..
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Re: Lino Ventura (1919-1987)

Message par Jerome »

Cent jours à palerme sort en mai 2013 chez TF1 Video.
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Re: Lino Ventura (1919-1987)

Message par Rick Blaine »

Jerome a écrit :Cent jours à palerme sort en mai 2013 chez TF1 Video.
Avec une VO, contrairement à l'édition LCJ?
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Re: Lino Ventura (1919-1987)

Message par tindersticks »

Il devait sortir en Août en Blu-ray.

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Re: Lino Ventura (1919-1987)

Message par Filiba »

Est ce que Lino Ventura n'est pas doublé dans la VO ? Il me semble qu'il avait exprimé son mécontentement à ce sujet.
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Re: Lino Ventura (1919-1987)

Message par Jerome »

Filiba a écrit :Est ce que Lino Ventura n'est pas doublé dans la VO ? Il me semble qu'il avait exprimé son mécontentement à ce sujet.

oui, il est doublé en italien, j'en parle dans le bonus qui sera joint au BR, avec une itw de sa fille.
Pas de Vo possible car les deux montages sont trop différents et les droits aussi. comparatif ici : http://www.movie-censorship.com/report.php?ID=481295
Il y aura aussi un reportage d'époque sur le tournage.
Dernière modification par Jerome le 9 nov. 12, 14:48, modifié 2 fois.
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