Quand la ville dort (John Huston - 1950)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

Modérateurs : cinephage, Karras, Rockatansky

Avatar de l’utilisateur
Rick Blaine
Charles Foster Kane
Messages : 24077
Inscription : 4 août 10, 13:53
Last.fm
Localisation : Paris

Re: Quand la ville dort (John Huston - 1950)

Message par Rick Blaine »

Tutut a écrit :
Rick Blaine a écrit : (je ne fais pas référence à La Lettre du Kremlin, que je n'ai pas vu et que j'aimerais beaucoup voir)
Je suppose qu'il n'est toujours pas sorti en DVD. :(
Il y a l'annonce d'une sortie Z1 dans le topic des sorties naphta. Apparemment, Opening l'aurait annoncé en Z2 pour 2011, je croise les doigts.
Avatar de l’utilisateur
Tommy Udo
Producteur
Messages : 8689
Inscription : 22 août 06, 14:23

Re: Quand la ville dort (John Huston - 1950)

Message par Tommy Udo »

Je crois qu'on l'a déjà évoqué il y a quelques semaines dans le topic des bons plans mais je ne sais pas m'empêcher de le remettre ici :

Le collector (dans un bel étui cartonné bien rigide^^) de QUAND LA VILLE DORT est à 5,70 euros sur Amazon.fr :shock: :shock:
Une occasion de (re) découvrir ce chef-d'oeuvre de John Huston dans d'excellentes conditions ^^
Image
Federico
Producteur
Messages : 9462
Inscription : 9 mai 09, 12:14
Localisation : Comme Mary Henry : au fond du lac

Re: Quand la ville dort (John Huston - 1950)

Message par Federico »

Tommy Udo a écrit :Je crois qu'on l'a déjà évoqué il y a quelques semaines dans le topic des bons plans mais je ne sais pas m'empêcher de le remettre ici :

Le collector (dans un bel étui cartonné bien rigide^^) de QUAND LA VILLE DORT est à 5,70 euros sur Amazon.fr :shock: :shock:
Une occasion de (re) découvrir ce chef-d'oeuvre de John Huston dans d'excellentes conditions ^^
Spoiler (cliquez pour afficher)
Image
Glop Glop !! :D
Comme c'est du Warner, je suppose que la copie est nickel, non ?
Quid du documentaire sur le second DVD : est-il axé sur le film ou bien plus généraliste ?
Le contenu semble très différent du Zone 1 Warner qui - sur un seul disque - propose un commentaire de Drew Casper et James Whitmore.
Je me tâte, ça fait si longtemps que je veux revoir ce joyau... :|
Dernière modification par Federico le 9 déc. 12, 21:49, modifié 2 fois.
The difference between life and the movies is that a script has to make sense, and life doesn't.
Joseph L. Mankiewicz
Avatar de l’utilisateur
Tommy Udo
Producteur
Messages : 8689
Inscription : 22 août 06, 14:23

Re: Quand la ville dort (John Huston - 1950)

Message par Tommy Udo »

Tu peux foncer, Federico, la copie est superbe.
Pour le doc en bonus, je ne sais te répondre car je ne l'ai pas encore visionné...

Sinon, un petit test d'écranlarge (c'est le seul que j'ai trouvé...) : http://www.ecranlarge.com/dvd_review-list-3104.php

Le second DVD de cette édition contient le plat de résistance de l'interactivité, sous la forme du documentaire inédit Un coup de maître réalisé spécialement pour l'édition française. D'une durée approchant l'heure, il regroupe des critiques et des réalisateurs pour nous abreuver d'histoires quant au tournage et au contexte de Quand la ville dort, ainsi que d'analyses passionnantes du film sur ses aspects écriture et mise en scène. Cerise sur le gâteau, la nationalité des intervenants (français et non américains) nous évite la pommade d'éloges qui prévaut d'ordinaire dans les bonus qu'Hollywood consacre à ses classiques. Ce supplément est donc une belle réussite, même si certains thèmes (la place du film dans l'histoire du cinéma, entre autres) sont traités un peu succinctement.
Dernière modification par Tommy Udo le 9 déc. 12, 21:50, modifié 1 fois.
Federico
Producteur
Messages : 9462
Inscription : 9 mai 09, 12:14
Localisation : Comme Mary Henry : au fond du lac

Re: Quand la ville dort (John Huston - 1950)

Message par Federico »

Tommy Udo a écrit :Tu peux foncer, Federico, la copie est superbe.
Pour le doc en bonus, je ne sais te répondre car je ne l'ai pas encore visionné...
Sinon, un petit test d'écranlarge (c'est le seul que j'ai trouvé...) : http://www.ecranlarge.com/dvd_review-list-3104.php
Je venais pile de tomber dessus ! :)
Mais je me demande si je ne vais pas malgré tout craquer pour le Z1, appâté par le commentaire de Whitmore.
En fait, faut peut-être avoir carrément les deux éditions... :roll:
The difference between life and the movies is that a script has to make sense, and life doesn't.
Joseph L. Mankiewicz
Avatar de l’utilisateur
Frances
Assistant opérateur
Messages : 2819
Inscription : 3 oct. 12, 20:24

Re: Quand la ville dort (John Huston - 1950)

Message par Frances »

Encore un de mes films de chevet ! Une fin sublime ! J'échangerai des films entiers rien que pour la scène finale. Bouleversante !
"Il faut vouloir saisir plus qu'on ne peut étreindre." Robert Browning.
" - De mon temps, on pouvait cracher où on voulait. On n'avait pas encore inventé les microbes." Goupi
Mains Rouges.

Mes films du mois :
Spoiler (cliquez pour afficher)
Jan 21 : Cousin Jules
Fev 21 : Midnight special
Mar 21 : Nanouk l'esquimau
Avr 21 : Garden of stones
Mai 21 : Fellini Roma
Filiba
Doublure lumière
Messages : 413
Inscription : 5 mai 12, 18:51

Re: Quand la ville dort (John Huston - 1950)

Message par Filiba »

C'est aussi un des films de chevet de Jean-Pierre Melville.
C'est un des films que je revois au moins une fois par an
Federico
Producteur
Messages : 9462
Inscription : 9 mai 09, 12:14
Localisation : Comme Mary Henry : au fond du lac

Re: Quand la ville dort (John Huston - 1950)

Message par Federico »

Frances a écrit :Encore un de mes films de chevet ! Une fin sublime ! J'échangerai des films entiers rien que pour la scène finale. Bouleversante !
Et j'échangerai la collection de juke-box que je n'aurais jamais rien que pour les yeux exorbités de Sam Jaffe venant de filer un nickel à une bobby soxer, l'air de hushpuppy désolé du classieux Louis Calhern embarqué par les flics (et sa fameuse remarque que je ne citerai plus à l'encontre d'une pulpeuse d'avenir), la tête à claque tavelée de Marc Lawrence et le drôle de p'tit sourire en coin de l'adorable Jean Hagen. :D
The difference between life and the movies is that a script has to make sense, and life doesn't.
Joseph L. Mankiewicz
Filiba
Doublure lumière
Messages : 413
Inscription : 5 mai 12, 18:51

Re: Quand la ville dort (John Huston - 1950)

Message par Filiba »

Federico a écrit :
Frances a écrit :Encore un de mes films de chevet ! Une fin sublime ! J'échangerai des films entiers rien que pour la scène finale. Bouleversante !
Et j'échangerai la collection de juke-box que je n'aurais jamais rien que pour les yeux exorbités de Sam Jaffe venant de filer un nickel à une bobby soxer, l'air de hushpuppy désolé du classieux Louis Calhern embarqué par les flics (et sa fameuse remarque que je ne citerai plus à l'encontre d'une pulpeuse d'avenir), la tête à claque tavelée de Marc Lawrence et le drôle de p'tit sourire en coin de l'adorable Jean Hagen. :D
Jean Hagen est l'une des perles de la MGM d'aprés guerre. Dans Asphalt Jungle elle est touchante.
je donne toute la filmo de l'actrice qui joue la maîtresse de Louis Calhern (sauf les Wilder) pour le sourire triste de Jean Hagen quand elle va voir Sterling Hayden.
Federico
Producteur
Messages : 9462
Inscription : 9 mai 09, 12:14
Localisation : Comme Mary Henry : au fond du lac

Re: Quand la ville dort (John Huston - 1950)

Message par Federico »

Filiba a écrit :
Spoiler (cliquez pour afficher)
Federico a écrit : Et j'échangerai la collection de juke-box que je n'aurais jamais rien que pour les yeux exorbités de Sam Jaffe venant de filer un nickel à une bobby soxer, l'air de hushpuppy désolé du classieux Louis Calhern embarqué par les flics (et sa fameuse remarque que je ne citerai plus à l'encontre d'une pulpeuse d'avenir), la tête à claque tavelée de Marc Lawrence et le drôle de p'tit sourire en coin de l'adorable Jean Hagen. :D
Jean Hagen est l'une des perles de la MGM d'aprés guerre. Dans Asphalt Jungle elle est touchante.
je donne toute la filmo de l'actrice qui joue la maîtresse de Louis Calhern (sauf les Wilder) pour le sourire triste de Jean Hagen quand elle va voir Sterling Hayden.
Quand je pense que pour les Américains (enfin, ceux auxquels son nom dit encore quelque chose), elle fut avant tout une actrice de TV... ce qui hélas correspond à la majeure partie de sa carrière, bien trop écourtée sur grand écran. Qui ne l'empêchera pas de participer à cinq chefs d'oeuvre. Je me réjouis de pouvoir bientôt re-découvrir celui où elle fit ses débuts : Madame porte la culotte de Cukor (1949) et bien sûr de la revoir en désarmante copine d'Hayden. :D
The difference between life and the movies is that a script has to make sense, and life doesn't.
Joseph L. Mankiewicz
Federico
Producteur
Messages : 9462
Inscription : 9 mai 09, 12:14
Localisation : Comme Mary Henry : au fond du lac

Re: Quand la ville dort (John Huston - 1950)

Message par Federico »

Et paf !! Moi qui désespérais de trouver mon film du mois après quelques désillusions... OK, j'ai été au plus facile mais quel plaisir de remettre les yeux sur ce joyau dont les multiples visionnages n'altèrent pas un photogramme.

Parler de l'histoire ? A quoi bon ? Tout le monde ou presque la connaît. L'archétype du Film Noir avec un braquage et l'inévitable grain de sable dans la belle mécanique. A vrai dire, le sablier entier s'est versé dans les rouages. Dès le départ, une fatalité à la Chéri-Bibi semble déposée par de mauvaises fées. Ces mecs sont tous des losers dans leur domaine et puis d'ailleurs, peu importe qu'il y ait ou non braquage. C'est tout ce qui est autour qui intéresse Huston. Les hommes, les femmes et leurs motivations. Donc je ne parlerai que du casting.

Et là, faut avouer : quelle distribution d'anthologie ! :D :D :D


Louis Calhern est tellement ce grand bourgeois distingué que son goût du luxe et des belles pouliches fait se mouiller dans de sales combines*. Un avocat véreux ultra-chic passablement asséché par son 5 à 7 qui a justement la silhouette idéal d'un sablier, comme disent les Américains (hourglass figure)...
Image
Please do not move, honey, c'est une photo (pour ta) promo...

Sterling Hayden, un rugueux taillé dans la masse d'un chêne mais dont le visage de brute (son regard au pauvre témoin transi de trouille lors d'une séance d'identification !) a malgré tout conservé les traits du gamin du Kentucky qui rêve toujours du ranch familial.
Image
Est-ce que c'est d'ma faute à moi si je suis né grand et fort ?...

Jean Hagen, adorable et désarmante Doll, petite chose éperdue d'amour pour son grand costaud mais à la fierté courageuse (bouleversante scène où elle s'en va après avoir dit à Hayden qu'elle a trouvé à crécher chez une copine et où elle se retourne soudain dans l'escalier, les yeux brillants, pensant qu'il va lui proposer de rester... alors qu'il se contente avec une maladresse d'ado mal dégrossi de lui demander sa nouvelle adresse, l'andouille). :oops:
Image
Si je mets des faux-cils, c'est qu'il me rend marteau...

Sam Jaffe, inoubliable Doc avec son accent à couper au couteau, sa raideur germanique (il claque aristocratiquement des talons !), son sang-froid inébranlable et sa passion des très jeunes femmes. Plus d'une fois, il est à l'extrême limite d'en faire un personnage burlesque ce qui casserait toute l'ambiance et jamais ne la franchira (quand il parle des petites mexicaines, feuillette avec gourmandise un calendrier qui ne représente pas des toutous dans un panier, évoque le pays avec un taximan d'origine allemande et bien sûr dans SA grande scène avec la bobby soxer qui se trémousse pour lui**). Quel talent ! Mais bon, on savait de quelle trempe il était dès ses débuts en monarque cinglé de L'impératrice rouge puis après le Huston en savant à la Einstein du Jour où la Terre s'arrêta et en loyal Simonides de Ben-Hur.
L'étrange empathie qui se développe entre deux personnages aussi dissemblables que le Doc et Dix est une des grandes trouvailles du film. Ils partagent cependant la même faculté d'analyse froide et instinctive des situations et se méfient au premier coup d'oeil des maillons faibles du "set up" (Cobby et Emmerich). L'un par réflexion calculatrice, l'autre par réflexe animal... dont le Doc (outre son fameux penchant) n'est également pas dépourvu puisque son séjour en cabane lui fait renifler un flic à distance.
Image
Doc & Dix sont dans un sale bateau...
Image
Ein Tofgei qui n'a bas infenté la poutre, ein Chauffeure bankal et ein Kerl gui ne tort pas la nuit, cheu sens keu le Diske va sauter...

Image
Touyouno Mexikan Geurls ?



Marc Lawrence, un habitué des compositions de marlou à la petite semaine et d'abonné aux baffes en rafale (quelque chose comme le Daniel Cauchy du Noir), avec sa face d'ananas, ses faux-airs de Charlot et suintant par tous les pores dès qu'il palpe des billets.
Image
Giffle animée avec marque déposée :uhuh:


Les deux pires SOB du lot : Barry Kelley et son regard porcin de flic ripou et Brad Dexter, l'homme de main "intimidateur" de Calhern avec sa belle gueule aux inquiétants yeux trop clairs pour ne pas cacher une ordure.
Image
Image

Et of course Marilyn Monroe, que personnellement je n'ai jamais trouvée aussi mimi qu'ici, avec son corps sinon son coeur à son Tonton, ses petits "Yawp !" de gamine, ses rêves d'essayage de maillots de bain sur fond de plage cubaine et le gringue pas possible qu'elle fait au flic dans l’entrebâillement d'une porte après l'avoir traité de "big banana head" ! :D
Image
Come up and see me sometimes...

Résumée de la tête aux pieds par Calhern avec son "Some sweet kid..." Un diminutif qui lui va comme une robe à fourreau : sa silhouette à damner cache dix ans d'âge mental quand après avoir craché le morceau qui accuse son protecteur, elle a encore la naïveté de lui demander si leur projet de vacances tient toujours ! Comment ne pas savourer la réponse de Calhern à cet instant : "Don't worry, baby, you'll have plenty of trips..." C'est clair que plus d'un spectateur de l'époque du se faire la même réflexion : cette gisquette ira loin. :roll:
Image
- Tu me pardonnes mais je suis invitée chez l'oncle Jo...
- Well done. I can see your career rising in the east like the sun...
Image
Tout gentleman a bien droit à un dernier coup d'oeil avant le baisser de rideau...
Image
- Ecoute ma cocotte, je t'assure que tu étais très bien
(Mhhh... si Huston la coupe au montage, je garderai bien quelques chutes comme celle-là)

Et peut-être mon personnage préféré : James Whitmore***, épatant en barman bossu et boiteux, grand pote de Hayden et capable d'explosions de violence, surtout quand on moque son infirmité. Il y a du Cagney chez lui quand il vire manu militari de son estancot le mec qui vient de le traiter d'Humpty-Dumpty ou encore à la fin, passant l'air de rien devant la cellule de Cobby la balance pour brutalement se retourner avec une vivacité de singe pour lui serrer le kiki à travers les barreaux !
Image
Ma bosse, mon saigneur, n'est pas un porte-bonheur...
Image
Dans deux secondes, le Cobby, j'l'emplâtre. J'lui mets la tête en bas, j'lui fais vomir ses friandises...
Anthony Caruso est le plus effacé du lot en as du perçage de coffiot doublé d'un jeune papa. Un truand qui n'aime pas les voyous ni la violence et se fait surtout du mouron pour la toux de son marmot. Il sera peut-être pour cela la première victime du jeu de quilles, mortellement blessé dans des circonstances un peu bêtes.
Image
Quand on a charge de famille, difficile de percer dans le métier...
Image
- Tu sais que tu risques des brulures d'estomac ?
- La ferme, Kentucky ! Passe-moi la "soupe" !

Un des plus grands films de Huston qui, à l'image de ses autres chefs-d'oeuvre, porte sa thématique de prédilection : les pauvres rêves bassement humains d'adultes restés de petits enfants bavant le nez collé à la devanture d'une confiserie et qui un temps vont se croire les Rois du monde avant d'immanquablement retomber de haut.
Image

It's my golden retreat ! / It's coming home ! / It's troubles ! / Itse Moritos und Litteule Gueurlz !


Et que dire du thème musical de Miklós Rózsa et du somptueux noir et blanc aux cadrages grandioses d'Harold Rosson (cf l'ouverture avec Hayden errant dans un Los Angeles de fin du monde)...
Image
Image

Résultat des courses : toujours aussi parfait malgré plusieurs visions que je lui pardonne aussitôt ses rares points faibles comme l'exécution un peu trop facile du casse**** (parce que ce n'est qu'un épiphénomène de l'histoire) ou l'inévitable petit couplet sur la grandeur du métier de flic que Burnett aurait préféré voir au début mais qu'Huston eu néanmoins l'élégance de ne pas placer à la toute fin - comme il est d'usage dans les films noirs de l'époque - mais juste avant celle-ci. Et comme il s'agit d'une des plus émouvantes fins du cinéma américain... :oops:
Image
A horse, a horse, my kingdom for a horse...
Un dernier mot sur le DVD collector Warner Zone 2 : la copie est nickel-chrome (un petit bémol sur la piste audio qui aurait pu être un poil boostée).

Quant aux suppléments : c'est sympa d'avoir droit à une introduction d'époque par Huston himself mais ça reste court et anecdotique. Et pourquoi diable avoir superposé un doublage à la voix de sa fille Anjelica quand il suffisait de laisser la VO avec un sous-titrage ?! :shock: En même temps, ce qu'elle raconte n'a rien de bouleversifiant.

Pas encore regardé le docu de 52', certainement plus intéressant.


(*) Son couple bancal avec une épouse perpétuellement alitée pour laquelle il n'éprouve plus depuis longtemps qu'une tendresse fatiguée a plus que certainement inspiré le très cinéphile Corneau pour son duo Périer-Signoret de Police Python 357, bien que dans ce dernier, l'épouse a une bien plus grande influence sur un mari dont elle n'ignore rien de la double-vie.

(**) Dans "Caractères : moindres lumières à Hollywood", Philippe Garnier nous en apprend un peu plus sur cette actrice, Helene Stanley, qui débuta dans des films musicaux pour ados, servira de "live model" pour les dessins animés Disney... et fera un mariage pour le moins sulfureux avec le gangster Johnny Stompanato (celui-là même qui se fera dessouder par la fille de Lana Turner).
Image
Choliment animée, cette souris...

(***) Rien que pour lui, je suis très tenté de m'offrir aussi l'édition US du DVD car il participe aux commentaires.

(****) Anthony Caruso démonte le mur de briques comme si elles venaient d'être posées et le ciment encore humide / comment croire qu'un bijoutier détenant une telle fortune ait un système d'alarme aussi sommaire, même en 1950, avec juste un seul détecteur au bas de la salle des coffres / et le coup ahurissant de l'explosion du coffre qui comme par miracle fait rentrer les énormes gonds !!
Dernière modification par Federico le 22 déc. 12, 15:26, modifié 2 fois.
The difference between life and the movies is that a script has to make sense, and life doesn't.
Joseph L. Mankiewicz
Federico
Producteur
Messages : 9462
Inscription : 9 mai 09, 12:14
Localisation : Comme Mary Henry : au fond du lac

Re: Quand la ville dort (John Huston - 1950)

Message par Federico »

Je viens de regarder le docu sur le second DVD : "Un coup de maître : Quand la ville dort".

Bon, ça me rassure, j'ai l'impression de ne pas avoir écrit trop de khôneries (à part mes blagues de Carambar en légende des photos). :mrgreen:


Parmi les nombreux autres points abordés par les commentateurs (Guérif, Corneau, Brion, Laetitia Masson, Ciment, Yves Alion) :

- le film ne comportait aucune grande star (Sam Jaffe et Louis Calhern avaient de la bouteille mais Sterling Hayden n'avait pas encore vraiment percé et Marylin n'était encore qu'une jolie apparition) ;

- la musique de Miklós Rózsa est extrêmement discrète (je suis 100% d'accord avec Guérif pour qui la plupart des films noirs de l'époque sont plombés par une musique trop présente) ;

- W.R. Burnett vénérait les auteurs français du 19ème siècle (Mérimée, Balzac, Maupassant) ;

- le même Burnett n'aimait pas le final en pleine nature ensoleillée, trouvant préjudiciable de sortir de l'étouffement nocturne de la ville (ce en quoi il avait bien tort) ;

- ce même final (et... le "dada" de Dix Handley tout au long du film) porte vraiment la marque de Huston qui vouait une passion immodérée - et coûteuse - pour les chevaux ;

- il y a un travail rare sur les gros plans, bien plus fréquents que ce n'était alors de coutume ;

- les protagonistes ne sont jamais magnifiés pour en faire des figures mythiques mais au contraire des êtres banals (Guérif prend l'excellent exemple de l'arrivée du Doc en taxi dont on mettra du temps à découvrir les traits) ;

- il s'agit au moins autant d'un film social que d'un film noir (Ciment insiste sur le fait qu'à cette époque ultra-réactionnaire des USA, Huston et la plupart de ses interprètes passaient pour des gauchistes et donc qu'en aucun cas, le film ne refléta "l'air du temps" comme beaucoup le dirent) ;

- l'amitié entre Huston et Jaffe mais aussi avec Hayden (je pense qui quiconque se retrouvant entre ces deux colosses et durs-à-cuire se sentirait minuscule) ;

- Hayden voulait vraiment obtenir le rôle mais souffrait d'un manque de confiance en lui proportionnel à sa stature. Car jusqu'à présent, on ne le prenait que pour son physique et sa belle gueule qu'il avait de plus la réputation d'ouvrir souvent. Or, les grands studios préfèrent les acteurs dociles. C'est à la suite d'une audition où il joua la scène dans laquelle Dix raconte son rêve à Doll (audition qu'il acheva en larmes) que Huston sut qu'il tenait son acteur et un très bon ;

- les deux versions antagonistes de l'audition de Marylin : selon Huston, elle avait été parfaite, mais pas selon Donald Spotto, biographe de l'actrice qui insinue que Huston aurait été contraint de la prendre malgré lui pour compenser une dette (suite à... une histoire de canassons) :roll: ;

- la MGM, bien plus mal à l'aise avec le film noir et social qu'avec les romances et les musicals (à la différence de la Warner qui s'en était fait une spécialité) avait assez mal promu le film qui fut néanmoins très bien accueilli ;

- Louis B. Mayer exécrait le film dont il trouvait l'ambiance et les personnages laids et méchants (Brion raconte au passage un entretien surprenant entre Huston et Mayer à propos de La charge victorieuse) ;

- la trame du film sera plus tard transposée en western pour L'or du Hollandais de Delmer Daves en 1958, dans un cadre exotique pour Cairo de Wolf Rilla en 1963 (avec le pauvre George Sanders littéralement en pleine traversée du désert) et même en version blaxploitation pour Cool breeze de Barry Pollack en 1972 avec Pam Grier !* ;

- bon, évidemment, je n'avais pas cru nécessaire d'en parler tant c'est flagrant et lu 100 fois mais le film et le style Huston marqueront le jeune Stanley Kubrick qui pour son film de casse L'ultime razzia reprendra Sterling Hayden. Ciment note que les années 50 verront l'apogée du film de casse, y ajoutant Le coup de l'escalier mais oubliant Du rififi chez les hommes. Le commentaire cite aussi Bob le flambeur de Melville, grand admirateur d'Asphalt jungle dont la découverte l'avait tétanisé alors qu'il écrivait Bob le flambeur et qui pour cela avait décidé d'orienter son propre film de casse vers une tonalité plus légère. Melville le maniaque avait même trouvé que Huston était parvenu à y glisser les 19 situations possibles confrontant gendarmes et voleurs ! :shock: ;

- un des points les plus étonnants, c'est que la courte (mais ô combien marquante) prestation de Marylin n'avait alors pas soulevé un enthousiasme particulier, qu'elle allait quitter la MGM qui ne lui avait pas signé de contrat pour la Fox qui mit un certain temps avant de s'intéresser vraiment à elle** :shock: ;

- marrant aussi : la MGM avait au départ embauché Huston (auréolé de son Oscar pour Le trésor de la Sierra Madre) dans l'intention de lui faire tourner... Quo Vadis :shock: Par chance, la star pressentie, Gregory Peck eut un pépin de santé qui ajourna le projet et on se rabattit sur Quand la ville dort ;

Pour finir, ce docu m'a un peu plus donné l'envie de découvrir "Wanderer", l'auto-bio (et aussi récit de voyage maritime) que Sterling Hayden fit publier en 1963. Parce que j'apprécie énormément cet acteur qui était en prime un personnage réellement à part à Hollywood (sans doute encore plus chien fou et indépendant qu'un Mitchum) et que pour l'avoir rapidement croisé à la fin de sa vie, il m'avait sacrément impressionné avant même de l'avoir identifié. Il correspondait exactement à la description qu'en fait Corneau : "Une espèce de gros bébé d'Apocalypse qui fait peur et qu'on a envie de prendre dans ses bras en même temps". Brion le compare quant à lui fort justement au Lennie de Des souris et des hommes (impression uniquement visuelle, bien sûr car Hayden était tout sauf un demeuré).


(*) Il y aura aussi la série télévisée policière The asphalt jungle en 1961 +/- lointainement adaptée du roman de Burnett. Mais, détail amusant, l'une de ses vedettes, Jack Warden... aurait débuté comme figurant dans le film de Huston !

(**) Je ne suis pas d'accord avec Ciment qui trouve que son personnage d'Angela est bien moins naïf qu'on pourrait le croire car il oublie sa dernière question idiote à Emmerich. A noter que le visage seul de Marylin apparut sur l'affiche, pas son nom.
The difference between life and the movies is that a script has to make sense, and life doesn't.
Joseph L. Mankiewicz
Filiba
Doublure lumière
Messages : 413
Inscription : 5 mai 12, 18:51

Re: Quand la ville dort (John Huston - 1950)

Message par Filiba »

Federico a écrit : Pour finir, ce docu m'a un peu plus donné l'envie de découvrir "Wanderer", l'auto-bio (et aussi récit de voyage maritime) que Sterling Hayden fit publier en 1963.
trés bon en effet
Federico a écrit : Parce que j'apprécie énormément cet acteur qui était en prime un personnage réellement à part à Hollywood (sans doute encore plus chien fou et indépendant qu'un Mitchum) et que pour l'avoir rapidement croisé à la fin de sa vie, il m'avait sacrément impressionné avant même de l'avoir identifié.
eh ben, racontes!
Federico
Producteur
Messages : 9462
Inscription : 9 mai 09, 12:14
Localisation : Comme Mary Henry : au fond du lac

Re: Quand la ville dort (John Huston - 1950)

Message par Federico »

Filiba a écrit :
Federico a écrit : Pour finir, ce docu m'a un peu plus donné l'envie de découvrir "Wanderer", l'auto-bio (et aussi récit de voyage maritime) que Sterling Hayden fit publier en 1963.
trés bon en effet
Federico a écrit : Parce que j'apprécie énormément cet acteur qui était en prime un personnage réellement à part à Hollywood (sans doute encore plus chien fou et indépendant qu'un Mitchum) et que pour l'avoir rapidement croisé à la fin de sa vie, il m'avait sacrément impressionné avant même de l'avoir identifié.
eh ben, racontes!
Bah... C'est très anecdotique et je crois en avoir déjà parlé : c'était vers 1982-1983, je marchais sur un quai de Seine à Paris et juste en-dessous j'ai vu passer un géant à l'allure de marin-pêcheur, portant barbe en broussaille, une casquette de traviole, la chemise au vent et d'énormes sandales, un gros bouquin sous le bras. J'ai eu un flash à retardement en reconnaissant Sterling Hayden, exactement tel qu'il apparut dans Le privé d'Altman que j'avais découvert quelques mois avant. Un bref instant, j'ai pensé descendre juste pour lui serrer sa grosse pogne et lui baragouiner trois mots d'anglais de cuisine mais pas eu le courage (non seulement il était très intimidant mais en plus je ne suis pas du genre à jouer les fans transis). Plus tard, j'ai su qu'il avait à cette époque vécu à Paris sur sa péniche (qu'il avait baptisée Mary si ma mémoire est bonne). Par la suite, j'ai eu plus d'une fois l'occasion de rencontrer des personnages du monde du cinoche mais c'est de loin (au propre comme au figuré puisqu'il était à 5m de moi) celui qui m'aura le plus impressionné. :o
The difference between life and the movies is that a script has to make sense, and life doesn't.
Joseph L. Mankiewicz
Avatar de l’utilisateur
Frances
Assistant opérateur
Messages : 2819
Inscription : 3 oct. 12, 20:24

Re: Quand la ville dort (John Huston - 1950)

Message par Frances »

Federico, un grand merci pour ta belle chronique passionnée sur ce film ô combien passionnant. J'ai encore reçu une grande claque en le revoyant récemment. Pour moi il rassemble tous les ingrédients de la perfection. Un film magistral sans une seule fausse note...surtout pas la fin (n'en déplaise à certains) !
"Il faut vouloir saisir plus qu'on ne peut étreindre." Robert Browning.
" - De mon temps, on pouvait cracher où on voulait. On n'avait pas encore inventé les microbes." Goupi
Mains Rouges.

Mes films du mois :
Spoiler (cliquez pour afficher)
Jan 21 : Cousin Jules
Fev 21 : Midnight special
Mar 21 : Nanouk l'esquimau
Avr 21 : Garden of stones
Mai 21 : Fellini Roma
Répondre