Greta Garbo (1905-1990)

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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Frances
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Re: Greta Garbo (1905-1990)

Message par Frances »

feb a écrit :Merci pour ton retour sur ce livre :wink:
J'attends le tien avec impatience. Ta perception sera peut être différente.
Ahhh je ne regrette pas mon achat, c'est vrai que Cukor, Lubitsch, Mamoulian, Feyder, Niblo ou Goulding sont loin d'être le haut du panier. :mrgreen:
Tu oublies Sjöström :fiou: Et si ne l'as pas encore lu je te laisse découvrir les descriptions toutes en nuances de sa beauté fanée prématurément. :mrgreen:
En attendant ça m'a donné envie de lire "La duchesse de Langeais" :D
"Il faut vouloir saisir plus qu'on ne peut étreindre." Robert Browning.
" - De mon temps, on pouvait cracher où on voulait. On n'avait pas encore inventé les microbes." Goupi
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Music Man
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Re: Greta Garbo (1905-1990)

Message par Music Man »

Frances a écrit :
Un renoncement de René de Ceccatti.

Image
Et c’est en poursuivant la lecture que l’on prend alors conscience que de Ceccatty a éprouvé le besoin de déconstruire le mythe pour l’ériger à nouveau.
Excellente analyse, Frances. Merci :)
feb
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Re: Greta Garbo (1905-1990)

Message par feb »

Frances a écrit :Tu oublies Sjöström :fiou:
On ne saura jamais si c'était un bon film malheureusement...
Et si ne l'as pas encore lu je te laisse découvrir les descriptions toutes en nuances de sa beauté fanée prématurément. :mrgreen:
Je pense qu'il n'y a rien de nouveau sur ce sujet qui ressort à chaque fois que l'on parle d'elle et j'imagine que la description doit être faite toute en nuance :mrgreen:
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Frances
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Re: Greta Garbo (1905-1990)

Message par Frances »

Music Man a écrit : Excellente analyse, Frances. Merci :)
Merci Music Man. :D
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allen john
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Re: Greta Garbo (1905-1990)

Message par allen john »

Queen Christina (Rouben Mamoulian, 1933)

S'il est un film et un seul qui puisse être envisagé sous l'angle d'une Garbo "auteur", c'est bien celui-ci; elle l'a voulu, l'a porté, et lui a été associé jusqu'à sa mort et même au-delà, comme en témoignèrent les hommages qui fleurirent dans la presse et sur les autres médias à l'occasion de son décès: passage obligé, le fameux plan final de ce film de 1933, sensé représenter la résignation et l'abandon de sa carrière par une Garbo arrivée au bout de ses envies en 1941. Il n'y avait sans doute pas une grande envie de faire ce film à la MGM, alors que les premiers films parlants de l'actrice témoignaient surtout de la tentation de l'enfermer dans des stéréotypes, des femmes fatales malgré elles. Le désir de romantisme de Garbo pouvait par contre s'accomoder de ce qui était une sorte de guerre de studio, entre la Paramount et la MGM, qui rivalisaient par star interposées. A ce petit jeu, la star de la Paramount était Marlene Dietrich. Il y a par endroits dans Queen Christina des passages qui peuvent être un clin d'oeil au style développé par Sternberg, mais l'ironie est que celui qui réalise cette biographie réinventée d'une reine de Suède est Rouben mamoulian, qui allait peu de temps après diriger Marlene Dietrich à la firme concurrente, dans des conditions pas vraiment idéales (The song of songs).

La reine Christine de Suède est lasse de faire le jeu de la cour et du royaume, de signer des déclarations de guerre ou de cautionner des politiques qui ne vont pas dans le sens de ses aspirations. Désireuse d'ouvrir la Suède à la culture étrangère, elle tend la main à ses ennemis et rivaux européens, et se désole d'avoir si peu de temps pour elle-même. Elle a des amants, dont Magnus Gabriel de la Gardie (Ian Keith), elle a des amies, dont la comtesse Ebba (Elizabeth Young), sa confidente. Mais elle n'aime rien tant qu'à partir pour un ou deux jours chasser en compagnie de son valet-ange gardien Aage (C. Aubrey Smith). La cour souhaite ardemment que la reine se marie afin de préserver la couronne, et avec un Suédois pour couper court à toute folie nationaliste, les prétendants étrangers se bousculant au portillon. C'est en ces circonstances qu'elle rencontre un envoyé du roi d'espagne, Don Antonio (John Gilbert). Elle est habillée en homme, ils sont amenés à partager une chambre, et tombent instantanément amoureux l'un de l'autre. Au retour, il va falloir choisir: la raison d'état, qui la pousserait à se marier avec le héros national Karl Gustav (Reginald Owen), ou celle du coeur, qui lui permettrait de vivre le parfait amour avec son bel Espagnol... La révolte menace, les intrigues de cour se forgent, il lui faudra vite faire son choix...

Honnêtement, le choix est vite anticipé par le public; celle à laquelle on a si souvent fait dire 'I want to be left alone' dans ses films, pouvait-elle vraiment faire autrement que d'abdiquer? Dans une oeuvre comme celle-ci, dont la mise en scène classieuse et inventive de Mamoulian sert surtout d'écrin à la prise de pouvoir par Greta Garbo elle même de son rôle et de son film, l'actrice affirme sa propre croyance en une liberté totale, un abandon des responsabilités pour pouvoir vivre à sa guise par une femme de pouvoir. Elle met tout son art dans cette idée, depuis la première scène ou on la voit (Elle ou sa doublure) galoper pour rentrer au palais, gardant la caméra dans son dos jusqu'à ce moment ou elle se tourne enfin, puis enlève son chapeau. A l'inverse, elle est vue toute entière dans la si fameuse scène de l'auberge, lorsque la reine après sa nuit d'amour avec Antonio, s'imprègne de chaque détail de la pièce, passant une main tendre sur chaque meuble, finissant en se couchant de façon langoureuse sur le lit... elle utilise le corps, comme pour faire une déclaration d'identité: le garçon manqué qui chevauche bon train, la femme aimée et qui peut enfin être elle-même, qui marche dun meuble à l'autre dans une robe de chambre informe... deux extrêmes, oui, mais deux affirmations d'indépendance. Ce que sont aussi la première scène, qui voit la toute jeune Christine couper court au texte qu'on lui a fait apprendre, la scène d'abdication, dans laquelle elle (re)devient le centre de tout après avoir vu la stabilité nationale voler en éclat suite aux intrigues de cour, ou encore et surtout la scène finale, ou garbo devient la figure de proue d'un vaisseau qui part pour nulle part, garant d'une liberté chèrement acquise, au gout amer, mais qui sera pleinement assumée.

A ses côtés, l'actrice a insisté pour avoir son ancien partenaire et compagnon John Gilbert (Flesh and the devil, Love, A woman of affairs). Un geste largement commenté dans tous les sens: action charitable, retour de service (l'acteur avait beaucoup fait pour que Greta Garbo se sente plus à l'aise dans sa carrière en 1926), ou intuition géniale? Quoi qu'il en soit, c'était un excellent choix: l'acteur est parfaitement à sa place dans le rôle impétueux de ce Don qui lui permet occasionnellement de faire une discrète auto-parodie, comme dans la scène de l'auberge, avant que l'Espagnol n'ait découvert que cet impétueux jeune homme qui l'accompagne n'est autre qu'une jeune femme. Mamoulian pourtant ne se trompe pas de personnage principal, et réserve au duel fatal entre Don Antonio et Magnus une ellipse: ce qui compte n'est pas la mort du Don, mais bien le fait que Christina perde son amant, nuance...

Film d'une incroyable beauté, superbe réinterprétation de l'histoire, le film doit beaucoup à la sensibilité de Mamoulian, qui a parfaitement dosé les mouvements de la star dans ses scènes-clés, et qui fait tomber toutes les barrières avec une caméra discrètement mobile. Il a aussi su insuffler un soupçon d'ambiguité sur le personnage ô combien controversé de la Reine Christine, dont les rapports éventuels entre Garbo et Elizabeth Young tels qu'ils apparaissent à l'écran via un baiser pas si chaste, cachent une réalité complexe, autour des dépictions d'une bi-sexualité triomphante, voire agressive, un refus de se plier à la seule dimension féminine de son personnage (Revendiquant en particulier le fait qu'elle assumait la lourde tâche d'un homme en accédant au trône). Cette ambiguité permet au cinéaste de jouer sur les frontières entre les sexes, comme dans le long passage de l'auberge. Elle permet aussi aux auteurs (Garbo ET Mamoulian) d'interroger les rapports entre le pouvoir et le genre, masculin ou féminin. L'abdication de Christina serait en fait la prise de pouvoir de la femme contre les conventions, et vers la liberté totale. Une liberté absolument pas mise de côté lorsque l'être aimé meurt. Le sommet émotionnel du film, qui permet à garbo de vraiment exprimer un sentiment complexe à l'écran sans apparemment rien faire, sera aussi le sommet de sa carrière. Pas le sommet des succès de la MGM... tant pis.

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Re: Greta Garbo (1905-1990)

Message par Rick Blaine »

Chouette texte, très interessant!!

Parmi les Garbo que j'ai vu, c'est mon préféré, assez nettement.
allen john
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Re: Greta Garbo (1905-1990)

Message par allen john »

Rick Blaine a écrit :Chouette texte, très interessant!!

Parmi les Garbo que j'ai vu, c'est mon préféré, assez nettement.
Merci.

Moi aussi, avec Ninotchka...
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Re: Greta Garbo (1905-1990)

Message par Rick Blaine »

allen john a écrit : Moi aussi, avec Ninotchka...

Dans la catégories des films que je dois bientôt regarder depuis plusieurs années, il est en bonne place celui-là. :mrgreen:
J'en espère beaucoup en tout cas.
allen john
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Re: Greta Garbo (1905-1990)

Message par allen john »

Rick Blaine a écrit :
allen john a écrit : Moi aussi, avec Ninotchka...

Dans la catégories des films que je dois bientôt regarder depuis plusieurs années, il est en bonne place celui-là. :mrgreen:
J'en espère beaucoup en tout cas.
Simple clin d'oeil, en attendant:

"Veux-tu qu'on te laisse seule, Camarade?
-Non!".
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Re: Greta Garbo (1905-1990)

Message par Frances »

Texte passionnant Allen jones. Mille mercis pour cette relecture de la Reine Christine.
Je te cite : "L'abdication de Christina serait en fait la prise de pouvoir de la femme contre les conventions, et vers la liberté totale." Tout est dit et c'est tellement vrai.
Et effectivement Garbo et son personnage se fondent et se confondent par moment. Le refus de se marier, de ne pas avoir d'enfant, de jouir de sa liberté. N'oublions pas que le scénario est signé Salka Viertel, une proche de la Divine qui lui a écrit un rôle sur mesure.
Dernière modification par Frances le 30 avr. 13, 14:51, modifié 1 fois.
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Re: Greta Garbo (1905-1990)

Message par Flavia »

Rick Blaine a écrit :Chouette texte, très interessant!!

Parmi les Garbo que j'ai vu, c'est mon préféré, assez nettement.
Je ne suis pas experte en Garbo comme certains sur le forum :mrgreen: mais La Reine Christine à mon humble avis est un de ses meilleurs rôles avec Camille et Ninotchka, et puis The Mysterious Lady où elle vampirise l'écran.
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Re: Greta Garbo (1905-1990)

Message par Frances »

je rajouterai "A woman of affairs" :wink:
"Il faut vouloir saisir plus qu'on ne peut étreindre." Robert Browning.
" - De mon temps, on pouvait cracher où on voulait. On n'avait pas encore inventé les microbes." Goupi
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feb
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Re: Greta Garbo (1905-1990)

Message par feb »

allen john a écrit :Queen Christina (Rouben Mamoulian, 1933)
Merci allen john. :wink:
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Re: Greta Garbo (1905-1990)

Message par allen john »

feb a écrit :
allen john a écrit :Queen Christina (Rouben Mamoulian, 1933)
Merci allen john. :wink:
Ce fut un plaisir!
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Re: Greta Garbo (1905-1990)

Message par feb »

Et je ne peux qu'inviter Rick à découvrir le film :wink:
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