Le Western américain : Parcours chronologique II 1950-1954

Rubrique consacrée au cinéma et aux films tournés avant 1980.

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Jeremy Fox
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Woman they almost Lynched

Message par Jeremy Fox »

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La Femme qui faillit être lynchée (Woman they almost Lynched, 1953) de Allan Dwan
REPUBLIC


Avec Joan Leslie, Audrey Totter, Brian Donlevy, John Lund, Ben Cooper, Jim Davis
Scénario : Steve Fisher
Musique : Stanley Wilson
Photographie : Reggie Lanning (noir et blanc)
Un film produit par Allan dwan pour la Républic


Sortie USA : 20 mars 1953


Si Allan Dwan fut un réalisateur non seulement d'une endurance à toute épreuve (sa carrière s'étend sur de très nombreuses décennies) mais dans le même temps extrêmement prolifique, sa filmographie westernienne est finalement, en regard de l'ensemble, assez restreinte. Si jusqu’à présent il avait signé dans ce domaine des films de plus en plus plaisants, le dernier en date étant le très attachant Montana Belle avec Jane Russell dans le rôle-titre, rien encore qui ne nous avait préparé à une réussite comme celle que constitue Woman they almost Lynched. Même s'il ne peut prétendre atteindre des sommets, il s'agit d'un western assez unique en son genre (et là, rien que le titre aurait pu nous mettre la puce à l'oreille), très novateur au niveau des situations présentées ainsi que par le fait de donner les rôles principaux à des femmes, leurs pendants masculins leur servant surtout de faire-valoir. La donne la plus courante concernant le western se retrouve donc ici totalement inversée. Vous me rétorquerez qu'il y avait déjà eu quelques westerns au sein desquels les femmes avaient une importance considérable (Montana Belle justement mais aussi Duel au soleil de King Vidor, L'Ange des maudits (Rancho Notorious), de Fritz Lang…) mais jamais encore à ce point : dans le cas présent, ce sont non moins que trois femmes qui non seulement tirent les ficelles mais portent aussi le film sur leurs épaules. La Femme qui faillit être lynchée sera la dernière œuvre d’Allan Dwan avant sa collaboration (fructueuse et admirée par la cinéphilie française) avec Benedict Bogeaus. Il est encore produit par la petite compagnie Republic dirigée par Herbert J. Yates, celle qui nous avait déjà ravi avec La Charge héroïque (She Wore a Yellow Ribbon) de John Ford.

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1865. La Guerre de Sécession n'est pas terminée mais à Border City, petite bourgade située dans les régions montagneuses des Ozark, on ne veut plus en entendre parler, le conflit ayant déjà engendré bien trop de violence en son sein. On comprend mieux pourquoi quant on sait qu'elle est située sur la frontière séparant les États du Missouri (nordiste) et de l'Arkansas (sudiste). Aucun homme n'étant assez courageux pour y faire régner la loi, madame le Maire Delilah Courtney (Nina Varela) a pris les choses en main, déclarant sa ville neutre. En vertu de cette neutralité, elle a décidé de pendre haut et court toute personne prenant clairement partie pour l'un des deux camps, les soldats étant carrément interdits de séjour. Alors que Sally Maris (Joan Leslie) est en route pour y retrouver son frère Bill, sa diligence est attaquée par les Quantrill's Raiders qui déciment l'escorte constituée de soldats Yankees avant de continuer à accompagner l'équipage jusqu'à bon port ; au cours du reste du voyage, Sally tente de réformer et de donner une leçon de respectabilité à l'une des jeunes recrues de Quantrill dont elle ne sait pas encore qu’il s’agit de... Jesse James (Ben Cooper)…

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Même si la narration pourrait sembler un peu longue, je conseille de continuer à lire ce pitch pour appréhender toute l'originalité et l'apparente cocasserie du postulat de départ.

… Nous voici donc à Border City ! Ayant une idée derrière la tête, Quantrill (Brian Donlevy) espère pouvoir prendre légalement possession d'une mine située aux alentour de la ville ; non seulement madame le maire refuse de la lui vendre mais lui donne 24 heures pour quitter les lieux avec sa bande. Quant à Sally, à peine le temps de saluer son frère Bill que ce dernier se fait descendre par Lance Horton (John Lund) qui a dégainé en état de légitime défense pour éviter un bain de sang ; en effet, Bill, était entré dans une rage folle en constatant que Kate (Audrey Totter), son ex-maîtresse qui lui avait été kidnappée deux ans auparavant, est devenue l'épouse légitime de son ravisseur, Quantrill en personne. Il était sur le point de débuter une vraie tuerie si Lance ne l’avait pas abattu avant. Sally, héritière du saloon dont Bill était le tenancier, s'apprête à le vendre pour pouvoir repartir dans le Michigan. Mais elle apprend que Bill était surtout propriétaire de dettes. N'ayant plus d'argent pour retourner d'où elle vient et constatant qu'elle ne pourra pas trouver de travail respectable, elle finit par se décider à reprendre la succession du défunt, à diriger l'établissement avec l'aide des trois danseuses et du pianiste...

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… Et nous n'en sommes même pas au tiers du film ; et nous n’avons même pas encore évoqué les rôles que joueront respectivement les personnages joués par John Lund ou Audrey Totter. Le premier, tombé amoureux de la sœur de celui qu’il a été obligé de tuer, se révèlera être un espion à la solde des confédérés ; la seconde, épouse du tristement célèbre Quantrill (dans la réalité aussi d’ailleurs), deviendra l’ennemie juré de Sally avant de venir pleurer sur son épaule. Mais n’allons pas plus loin dans les développements de l'intrigue pour laisser quelques surprises à ceux qui découvriront ce film au scénario très riche ! Il est vrai qu'à la lecture de son ‘squelette’ ci-dessus, on pourrait très bien croire à une parodie. Mais contrairement à ce que l'on a par ailleurs pu lire à droite (Jean Tulard), à gauche (Phil Hardy), il n'en est rien, Allan Dwan prenant son histoire on ne peut plus au sérieux, ‘sérieux' n’étant pas forcément synonyme de sombre mais de sincérité ; en l’occurrence, Dwan semble croire très fort à son intrigue et à ses personnages qu’il aime et anime avec une grande tendresse, ne s’en moquant à aucun moment et n’utilisant jamais la moindre touche d’ironie. Dwan est un cinéaste du premier degré et c’est cette naïveté un peu anachronique qui jusqu’à présent rend le ton de ses westerns aussi reconnaissable (un des personnages parle même à un moment, le plus sérieusement du monde, du "Miracle of Love"). Et c'est d’ailleurs une des premières composantes de la réussite de son film : à partir d'une histoire presque totalement invraisemblable, limite caricaturale même, Steve Fisher nous pond sans aucun cynisme un scénario et des dialogues remarquablement bien écrits, sans presque de baisse de rythme et qui prend constamment le spectateur par surprise tout en nous présentant une belle galerie de personnages, tous plus ou moins attachants, aucun réellement méchant.

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Honneur aux femmes puisque ce sont elles qui ont pour une fois les rôles les plus importants. Tout d’abord Nina Varela dans le rôle du maire, grosse femme imposante, despotique mais très intelligente, entourée de conseillers exclusivement féminins. Puis Audrey Totter, l’inoubliable épouse de Robert Ryan dans le chef-d’œuvre du film de boxe réalisé par Robert Wise, Nous avons gagné ce soir (The Set-up) ; elle interprète ici l’épouse de Quantrill, ex-chanteuse de saloon qui n’hésite pas à jouer du poing et du pistolet. Si elle en fait un peu trop dans la première partie (on aurait très bien pu se passer de sa première chanson alors qu'elle est vêtue en cow-girl ; sa façon de se déhancher lors du duel fait un peu ‘too much’...), elle sait ensuite nous émouvoir et les larmes qu’elle verse sur les épaules de Joan Leslie ne nous laissent pas indifférents. Joan Leslie justement qui, contrairement à ce que nous laissait penser l’affiche, tient le rôle principal de cette histoire, celui de Sally, jeune femme douce et respectable qui va se retrouver du jour au lendemain à la tête d’un établissement de jeu et qui plus tard va ‘faillir être lynchée’. Actrice au visage très doux, elle était inoubliable dans son propre rôle dans une comédie musicale de propagande signée Delmer Daves, le touchant et très réussi Hollywood Canteen. Elle était aussi l’actrice principale du premier et excellent western qu’André de Toth tourna avec Randolph Scott, Le Cavalier de la mort (Man in the Saddle). Loin d’avoir vu toute sa filmographie, il se pourrait néanmoins fort bien que Sally Maris soit l’un de ses plus beaux rôles. Dans le film de Dwan, elle est en tout cas formidable aussi bien en femme respectable qu’en tenancière de saloon. Et puis, s'il y eut déjà un vigoureux pugilat entre deux femmes dans Femme ou démon (Destry Rides Again) de George Marshall, celui opposant Audrey Totter et Joan Leslie est encore bien plus spectaculaire ; quant au duel qui s’ensuit quelques minutes plus tard entre les deux mêmes femmes, il s'agit très probablement d'une première, les deux rivales s’avançant face à face au centre de la rue principale, revolver sur les côtés… Deux séquences assez marquantes puisque non seulement innovantes mais solidement réalisées.

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Les hommes du film s’avèrent un peu en retrait et le schématisme de la description de certains est un peu dommageable en comparaison de la richesse d’écriture d’ensemble ; par exemple celle sans subtilité du rustre Cole Younger joué par Jim Davis. Sinon, Ben Cooper est plutôt convaincant dans la peau du jeune Jesse James que Sally tente de ramener à la raison et nous sommes contents de voir Brian Donlevy reprendre le personnage de Quantrill qu’il tenait déjà dans Kansas en feu (Kansas Raiders) de Ray Enright. Mais le plus important reste John Lund, l’acteur qui tenait le rôle principal dans le beau western pro-indien de George Sherman, Au Mépris des lois (The Battle of Apache Pass). Espion sudiste amoureux d’une femme yankee dont il a été obligé de tuer le frère, son personnage demeure mystérieux et très attachant tout du long. Ce sont aussi deux figurants masculins qui ouvrent le film, un vieillard assis sur un trottoir jouant d’une sorte de harpe puis un petit garçon qui cherche à assister à un spectacle de rue autour duquel tout le monde semble s’être rué : non moins qu'un lynchage dont le ‘monsieur Loyal’ se trouve être une femme ! Départ franchement inhabituel qui semblait vouloir nous faire constater d’emblée l’originalité du film devant lequel nous étions assis. Et comme indiqués à plusieurs reprises dans le cours de ce texte, nous ne serons pas au bout de nos surprises d'autant que l'évolution psychologique de la plupart des personnages principaux est loin d'être inintéressante non plus.

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Suite à cette présentation de la petite ville, Dwan et son scénariste nous font assister à une attaque de diligence qui aurait été en fait mise en place par William Witney. Il s'avère tout à fait vraisemblable que ce roi du serial, habitué à diriger des cascadeurs chevronnés et des scènes d’action mouvementées, en soit à l’origine. Une chose est certaine, elle est d’une redoutable efficacité (admirez ce cavalier sautant debout d’un cheval à l’autre pour aller se jeter sur un ennemi !) Du grand art d’autant que la scène est remarquablement bien montée et rythmée sans pour autant en oublier les paysages alentour constamment mis en valeur par la même occasion. Dwan nous avait déjà fait la démonstration de son espèce de lyrisme de la mise en scène lors des séquences d'action en plein air au cours de Montana Belle ; il récidive ici avec, en plus de la splendide attaque de diligence, une autre trépidante course poursuite entre cinq soldats nordistes chevauchant derrière Audrey Totter : la caméra vibre et respire, s’attarde avec une remarquable aisance aussi bien sur l’action que sur les lieux au sein desquels elle se déroule, tout cela aidé par une très belle musique d’un compositeur qui m'était encore inconnu, Stanley Wilson. Même constat concernant le duel au cours duquel la topographie de la petite ville est superbement utilisée. Pas de doute à avoir quant à la solidité de la mise en scène de Dwan car si l’action reste confinée à une portion congrue, lorsqu’elle se met en marche, elle s’avère d’une efficacité à toute épreuve.

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On notera quelques facilités scénaristiques, parfois un peu de précipitation, un coup de mou à mi parcours et un Happy-End vite expédié mais la psychologie assez fouillée des protagonistes, la qualité de l’interprétation, la vitalité, l’originalité et la tendresse de l’ensemble emportent le morceau. Au sein de ce Far-West que certains protagonistes décrivent comme ‘dépravé par l’argent’, chacun recherche néanmoins dans ce western une espèce de respectabilité ; et si la ville devient une véritable poudrière avec l’arrivée des soldats dans la dernière partie, tout se terminera pour le mieux, les sentiments et les élans du cœur s'avérant plus importants pour Dwan que les conflits qui n'auront plus lieu d'être avec la fin de la Guerre de Sécession. Si le cinéaste fera encore mieux par la suite dans ce domaine, il nous livre ici un western qui sortait des sentiers battus et que les éditeurs devraient penser à vite nous proposer en DVD !
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Re: Woman they almost Lynched

Message par feb »

Enfin la critique c'est pas trop tôt :mrgreen: Beau travail Jeremy :wink:
Jeremy Fox a écrit :A suivre : L'Homme des vallées perdues (Shane) de George Stevens avec Van Heflin et Jean Arthur
8) Impatient de lire ta critique sur ce film que j'aime beaucoup...
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Flavia
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 2 (50

Message par Flavia »

Moi aussi impatiente de connaitre ton avis M. Jeremy Fox :D
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 2 (50

Message par someone1600 »

Tu donnes envie de découvrir le film en tout cas. Malheureusement je ne crois pas en posseder un enregistrement... :(
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Jeremy Fox
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 2 (50

Message par Jeremy Fox »

Pas d'inquiétudes à avoir à propos de Shane ; je dois d'ailleurs être un des seuls que Brandon De Wilde n'agace pas :mrgreen:
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 2 (50

Message par Rick Blaine »

Jeremy Fox a écrit :Pas d'inquiétudes à avoir à propos de Shane ; je dois d'ailleurs être un des seuls que Brandon De Wilde n'agace pas :mrgreen:
:mrgreen: :fiou:



Le Dwan par contre à l'air très intéressant.
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Jeremy Fox
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 2 (50

Message par Jeremy Fox »

Avant de revenir dessus plus longuement (d'ici 24 ou 48 heures), je continue à trouver l'interprétation du jeune Brandon De Wilde d'une grande justesse :twisted:

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J'aimerais d'ailleurs bien avoir l'avis de Wagner sur le sujet :wink:
Lord Henry
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 2 (50

Message par Lord Henry »

Histoire de patienter:
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Jeremy Fox
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 2 (50

Message par Jeremy Fox »

Et d'ailleurs aussi, Brandon De Wilde joue un des rôles principaux dans un épisode de Hawaii police d'état et il était encore très bien
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Jeremy Fox
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 2 (50

Message par Jeremy Fox »

Lord Henry a écrit :Histoire de patienter:
Spoiler (cliquez pour afficher)

Come back Shame :lol: :lol:
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Shane

Message par Jeremy Fox »

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L'Homme des vallées perdues (Shane, 1953) de George Stevens
PARAMOUNT


Avec Van Heflin, Jean Arthur, Brandon De Wilde, Jack Palance, Ben Johnson, Edgar Buchanan, Emile Meyer, Elisha Cook Jr.
Scénario : A.B. Guthrie Jr.
Musique : Victor Young
Photographie : Loyal Griggs (Technicolor)
Un film produit par George Stevens pour la Paramount


Sortie USA : 23 avril 1953

En 1935, George Stevens réalisait Annie Oakley (La Gloire du cirque), film qui narrait la biographie de cette femme douée dans le maniement des armes et qui fit partie du Wild West Show de Buffalo Bill. C'est Barbara Stanwick qui tenait le rôle titre mais, malgré ces pointures devant et derrière la caméra, le film s'avérait très mauvais. La version musicale de George Sidney (Annie reine du cirque) sera une toute autre réussite. Entre temps, George Stevens était devenu l'un des chouchous de la critique américaine avec comme point d'orgue Une Place au soleil (A Place in the Sun) mettant en scène le couple Montgomery Clift / Liz Taylor. Shane (dont la base de l'intrigue n'est autre que l'éternelle querelle entre fermiers et éleveurs) sera la première et unique incursion du cinéaste dans le western ; elle sera accueillie avec enthousiasme par la critique et le public, tout au moins américain.

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Shane a été le western au plus grand succès commercial des années 50 : 9 millions de dollars en Amérique seulement et six nominations aux Oscars, succès bien plus grand que le seront par la suite des classiques devenus indémodables comme La prisonnière du désert (The Searchers) de John Ford ou Rio Bravo de Howard Hawks. Il a même longtemps été considéré aux États-Unis comme le plus grand western hollywoodien. On ne peut pas dire que sa cote d’amour en France ait été la même : une partie de la critique française en a même fait l’archétype du faux bon western et cette réputation lui colle encore aujourd’hui à la peau ; Yves Kovacs dans son ouvrage intitulé "Le western" résume assez bien la pensée d’un grand nombre à son propos en le qualifiant de "film pesant et compassé devenu le prototype du western académique." Objectivement, force est de constater que, des deux côtés de l’Atlantique, on a beaucoup exagéré ! Shane n’est ni un chef-d’œuvre ni encore moins un mauvais film ; il ne méritait pas en France un tel mépris et un tel purgatoire, loin s’en faut. Depuis, il a retrouvé la place qui lui convenait au sein des grands classiques du genre !

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Un cavalier solitaire, Shane (Alan Ladd), arrive dans une petite vallée du Wyoming. Il fait halte dans une ferme où vit paisiblement la famille Starrett, Joe (Van Heflin), Marian, son épouse (Jean Arthur) et leur petit garçon de 10 ans, Joey (Brandon De Wilde). Marian n’est pas insensible au charme mystérieux du nouveau venu (s'étaient-ils déjà cotoyés par le passé ?) ; quant au jeune Joey il est tout simplement subjugué et fasciné par cet homme, d’une habileté remarquable au pistolet, qu’il vénère comme un héros. Shane partage alors quelques temps la vie des Starrett, les aidant dans leurs tâches quotidiennes, jusqu’au jour où il doit reprendre les armes pour défendre ses hôtes. En effet, dans ce petit coin de paradis, les fermiers se heurtent à l’hostilité des éleveurs qui veulent garder les grands espaces libres de toute clôture pour en rester les maîtres. Pour arriver à ses fins et faire capituler les cultivateurs, Ryker (Emile Meyer), le chef des éleveurs, en vient même à engager un tueur, tout de noir vêtu, le terrifiant Wilson (Jack Palance). La lutte s’annonce terrible…

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Un an avant Shane, Fred Zinnemann réalisait avec Le train sifflera trois fois (High Noon le premier "sur-western" comme l’a surnommé la critique, tentative 'd’intellectualisation' du western traditionnel visant surtout à approfondir la psychologie des personnages. Belle et louable initiative de faire entrer un genre considéré encore comme peu sérieux par un grand nombre dans son âge adulte. Mais souvent à cette occasion, une certaine pesanteur de la mise en scène ou un ton sentencieux sont venus gâcher en partie ce que le western possédait de plus important, le rythme, la vigueur et surtout la spontanéité. High Noon en est un parfait exemple car sa trop grande austérité et le message un peu trop appuyé ont fait de lui un film décharné, sec et en fin de compte assez ennuyeux (sans pour autant être honteux, attention !). Il n’en est pas de même pour cet western unique qu’est L’homme des vallées perdues. Unique par le fait qu’il mélange simplicité du ton et subtilité psychologique, qu’il oscille constamment entre d’une part, une naïveté et un manichéisme assumés, et d’autre part une violence et un réalisme qui ont clairement influencé Sam Peckinpah, Sergio Leone et Clint Eastwood, ça ne fait aucun doute.

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Le fait que le film soit vu à hauteur d’un enfant de 10 ans justifie le côté "bigger than life" de l’intrigue et des personnages, cette vision quelque peu idéalisée de l’Ouest. Joey, à cet âge, a besoin de se représenter et de croire en des héros purs et durs ; d’un autre côté, "les méchants" doivent aussi l’être de la tête aux pieds. Son regard porté sur le monde nous donne donc à voir des personnages archétypiques mais cette approche mythique que l’on pourrait effectivement trouver simplificatrice ou caricaturale, est amplement légitimée par l’idée qu’ont eue Stevens et ses scénaristes de mettre leur caméra à hauteur de Joey (de nombreuses contre-plongées sont utilisées en cours de film). Par la suite, nombre de chefs-d’œuvre divers et variés que seront La nuit du chasseur (Night of the Hunter) de Charles Laughton, Les contrebandiers de Moonfleet (Moonfleet) de Fritz Lang (dont la fin est d'ailleurs assez ressemblante) ou Du silence et des ombres (To kill a mockingbird) de Richard Mulligan, exploiteront cette vision mais avec encore plus de maîtrise et un peu moins de schématisme. Mais n’accablons pas plus George Stevens avec de telles comparaisons, il ne le mérite pas surtout que son western reste néanmoins de très haute volée. Revenons-y et tentons de vous faire ressentir le ton tout à fait original qui parcourt ce film.

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Shane fait irruption au moment opportun dans la vie de cette famille ; cavalier solitaire et las, venant de nulle part, habillé d’un vêtement de daim clair et immaculé et portant des armes scintillantes. Il représente le modèle parfait du héros rêvé par les petits garçons. Ce "chevalier rédempteur" repartira d’ailleurs tel qu’il était venu après s’être acquitté de sa tâche "divine" : "l’homme sans nom"’ de Leone et "l’étranger" de Pale Rider ne sont pas bien loin. Sur un très beau thème de Victor Young (peut-être le plus beau de sa carrière au milieu d’une partition tout de même inégale), le générique le voit arriver sur son cheval par la gauche de l’écran et, devançant de 15 ans le cinéma de Leone, en immense plan d’ensemble, sa minuscule silhouette traverse doucement l’écran de part en part la caméra fixant sans bouger cette vaste étendue, Shane n’étant qu’un minuscule point au milieu de cette immensité. Puis, par la saveur poétique toute particulière de la somptueuse et saisissante photographie de Loyal Griggs (qui remporta à juste titre un Oscar), nous avons l’impression de nous retrouver à voir l’un de ses films pour enfants de Clarence Brown, tel que Jody et le faon (The Yearling). En effet, comme dans ce chef-d’œuvre, un Technicolor lumineux et magnifique nous laisse stupéfait : la beauté fulgurante de ces premiers plans de paysages aux cieux immenses et bleus, un élan venant s’abreuver dans une rivière limpide, est indiscutable. Un romantisme, un "rousseauisme" même, faussement naïf puisqu’il sera plus tard battu en brèche. Comme dans le magnifique film de Clarence Brown cité ci-dessus, l’enfant va devoir maintenant être confronté à la violence et à la mort.

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Mort représentée par le personnage du tueur joué par Jack Palance, Wilson, le double maléfique de Shane ; d’ailleurs Morris ne s’y est pas trompé car pour l’inspiration de son personnage de Phil Defer, il n’a pas eu à forcer le trait, Wilson étant déjà un cliché parfait du "bad guy". Il est inoubliable dans sa façon d’être habillé, de se déplacer, de se tenir à cheval, de parler, de sourire et même de tuer : la scène du meurtre de Elisha Cook est d’ailleurs impressionnante pour l’époque, d’une violence radicale et d’un réalisme qui jure avec ce que nous avions vu auparavant : en découvrant cette scène aujourd’hui, on comprend mieux quand Peckinpah disait que Shane était son film préféré. Pour cette scène, George Stevens a tenu a conserver des variations de luminosité spectaculaires qui n’auraient pas été gardées en temps normal car peu tolérables. La rue est détrempée par la pluie et boueuse au point que l’on vient à s’y enfoncer. Et quand Elisha Cook fait mine de mettre en joue Jack Palance, celui-ci l’envoie Ad patres sans réfléchir : un coup de revolver et l’impact de la balle de 45 fait voler avec une force peu commune le malheureux qui s’effondre au milieu de la rue. Cette scène et le décor de la ville à l’intérieur de laquelle les maisons sont rangées sur une seule ligne font encore une fois penser aux westerns des années 70, de Clint Eastwood en particulier. Mais attention, aucune complaisance dans la violence : le réalisateur, depuis son retour de la Seconde Guerre Mondiale, ne pouvait plus la supporter et il essayait ici de la stigmatiser en la rendant la plus réaliste, la moins héroïque possible. Quant aux deux homériques pugilats que l'on trouve au cours du film, ils sont d'une étonnante brutalité.

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A la lecture de ces lignes, vous vous êtes sûrement dits qu’effectivement ce film était bien simpliste, mais nous sommes encore loin de la vérité. Le manichéisme n’est qu’apparent puisque la perception de l’enfant est bien entendu faussée. A côté de ces paysages lyriquement magnifiés par l’utilisation quasi constante du téléobjectif qui rapproche encore plus les majestueuses montagnes de Teton Valley, les décors et les costumes des personnages principaux, du père en particulier, sont très réalistes, élimés et sales (fait rarissime à l’époque dans le western), les rues sont boueuses et Stevens accorde une attention réaliste aux objets de l’époque (Van Heflin feuillète un catalogue de vêtements) et aux travaux quotidiens de la ferme. Les personnages sont eux aussi bien plus complexes que veut bien les voir Joey. Shane, le "modèle parfait", est un personnage finalement assez trouble et secret, on ne connaît rien de lui ni de son passé mystérieux et ses sursauts de défiance lorsqu’il entend un bruit quelconque peuvent faire penser qu’il n’a pas la conscience tranquille ou qu’il est poursuivi. La sobriété de jeu de Alan Ladd colle vraiment très bien au personnage. Après ses inoubliables prestations dans Whispering Smith de Leslie Fenton et Branded de Rudolph Maté, l'acteur continue à remarquablement bien choisir les westerns dans lesquels il tourne.

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Marian, l’épouse aimante et dévouée, est pourtant attirée par cet homme mystérieux qui lui fait rêver à de lointains horizons : son personnage donnera naissance à ceux encore plus fouillés et émouvants que jouera par deux fois Vera Miles dans La prisonnière du désert et L’homme qui tua Liberty Valance ; même liens complexes et affectifs plein de sous entendus qui se tisseront entre elle et John Wayne dans les deux films de Ford, entre Jean Arthur et Alan Ladd dans Shane. Nous ne saurons d'ailleurs jamais les relations qu'il y a pu avoir entre les deux ou même si seulement ils se sont connus ou non. Dommage seulement que Jean Arthur, pour son dernier rôle au cinéma à 53 ans, paraisse trop âgée pour le personnage et que George Stevens soit obligé de la filtrer à outrance lors des gros plans sur son visage. Van Heflin, avec sa rudesse habituelle, ne doit pas être oublié : c’est à travers le personnage de Joe, le brave fermier laborieux que, pour Joey et le spectateur, la réflexion sur l’héroïsme va se faire ; la violence est-elle nécessaire, doit-on se servir des armes pour que votre enfant vous considère comme un héros… ? Après Tomahawk de George Sherman, encore un excellent choix de la part de ce très grand comédien. Quant au jeune Brandon De Wilde, trop souvent décrié, il s'avère constamment juste.

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Le scénariste A.B. Guthrie Jr (auteur entre autres de La captive aux yeux clairs (The Big Sky) prend encore plus de risque avec Ryker, le chef des éleveurs, car, le temps d’une scène, il nous ferait presque croire que c’est lui qui a raison de vouloir chasser les fermiers des terres avoisinantes. Son ressentiment et son exaspération offrent un point de vue historique assez juste puisque juridiquement, il avait tous les droits pour lui. La séquence de sa venue à la ferme des Starrett pour faire valoir ses prérogatives nous fait alors entrevoir un personnage assez convaincant et qui, lui aussi, se bat pour ses idées, pas si mauvaises que ça. Nous nous mettons à douter un instant mais la présence de Jack Palance à ses côtés nous rappelle à l’ordre et nous fait en fin de compte choisir le bon camp. Quant au revirement de Ben Johnson (d'un charisme extraordinaire à nouveau, aussi bon ici que chez John Ford), il est lui aussi très bien vu : alors que Stevens nous l’avait montré comme une grosse brute dans la spectaculaire scène du pugilat, nous ne nous attendions absolument pas à ce qu’il vienne prévenir les fermiers après une prise de conscience douloureuse. Nous sommes donc bien assez loin de la simplicité apparente des données de départ.

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Une œuvre charnière, "l’aboutissement du western romantique" selon Christian Viviani, un film qui va ouvrir la voie à un plus grand réalisme et une plus grande violence et qui influencera dans le genre toute la génération de cinéastes des années 60 : il se serviront de cette trame à des fins de variations toutefois plus ironiques. Cependant, Shane n’est pas entièrement satisfaisant ; la faute en incombe d’une part au scénario qui fait retomber la tension vers le milieu du film, de l’autre au réalisateur qui se fait parfois trop solennel et un peu pompeux. Si à certains moments, il prend majestueusement son temps (trop quelquefois), à d’autres il nous étonne par le nombre de plans et la diversité des angles utilisés : les deux scènes homériques de bagarres sont d’une grande modernité à ce niveau là mais cette différence de style d’une scène à l’autre gâche un peu le plaisir total que l’on aurait pu ressentir si le film avait été plus cohérent dans ces effets, donc plus harmonieux. Mais ne boudons pas notre plaisir, les éléments incriminés sont loin de prendre toute la place et l’Ouest boueux, sanglant et violent de George Stevens reste gravé dans la mémoire de l’amateur de western tout comme le poignant "Shane ! Come back" résonnant sur le fondu final et qui nous laisse les larmes aux yeux : une sorte d’adieu à une certaine innocence désormais perdue du western en même temps que du petit garçon.
Lord Henry
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 2 (50

Message par Lord Henry »

Voilà une chronique très enrichissante.
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fargo
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Re: Le Western américain : Parcours chronologique Part 2 (50

Message par fargo »

Lord Henry a écrit :Voilà une chronique très enrichissante.
Tout à fait, ( encore une belle chronique, Jeremy, mais est-ce encore utile de le préciser? ), et qui m'a donné envie d'acheter le DVD, pour continuer ma découverte des westerns dans l'ordre chronologique.
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Jeremy Fox
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Fort Ti

Message par Jeremy Fox »

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Fort Ti (1953) de William Castle
COLUMBIA


Avec George Montgomery, Joan Vohs, Irving Bacon, James Seay
Scénario : Robert E. Kent
Musique : Ross DiMaggio
Photographie : Lester White & Lothrop B. Worth (1.37 Technicolor)
Un film produit par Sam Katzman pour la Esskay Pictures Corporation


Sortie USA : 01 mai 1953


1759. Français et anglais se disputent toujours la possession des régions du Nord Est de l’Amérique du Nord. Le capitaine Horn (George Montgomery), un des rangers du célèbre Major Rogers (Howard Petrie), se rend à Albany chez le gouverneur pour lui demander de l’aide, les indiens alliés des français se faisant de plus en plus menaçants. Et d’ailleurs, en voulant rendre visite à sa sœur et à ses neveux et nièces, Horn trouve la maison brûlée et ses habitants volatilisés. Il apprend qu’ils ont été kidnappés par les ‘peaux rouges’ qui les ont conduits au fort Ticonderoga, plus familièrement appelé Fort Ti et où se trouve l’armée française. Horn constate également que son beau-frère est un espion au service de l’ennemi, sa famille ayant été prise en otage au moment où il menaçait de se dénoncer, jusque-là obligé de trahir sa patrie pour ne pas risquer la vie de ses proches. Avec les Roger’s Rangers, lui et Horn vont partir délivrer les membres de leur famille ; en chemin ils sauvent la vie de la jolie Fortune Mallory (Joan Vohs) des griffes d’un indien sur le point de la violer…

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Depuis 1943 William Castle a déjà tourné plusieurs dizaines de longs métrages, surtout des films noirs à la réputation plutôt flatteuse. Au sein de son corpus de 10 westerns, Fort Ti fait partie des productions Columbia fauchées du producteur médiocre qu’était Sam Katzman, spécialisé dans les Eastern se déroulant au 18ème siècle, ayant pour toiles de fond la guerre entre français et anglais pour la possession des terres du Nord Est de l’Amérique à l’époque du Dernier des Mohicans. Des films de série Z interchangeables, réutilisant les mêmes décors et costumes sans aucun soucis de véracité historique, en l’occurrence Joan Vohs semblant sortir tout droit d’un film se déroulant durant les années 1950, les intérieurs ayant également presque pu servir pour une fiction dont l'intrigue se situerait à l’époque du tournage. Mais que ceci ne vous refroidisse pas et ne vous décourage pas de découvrir d’autres westerns de ce cinéaste dans l'ensemble plus apprécié par les amateurs de films policiers, de films fantastiques et d’horreur que par les aficionados du genre qui nous concerne ici. Le réalisateur était d'ailleurs dans l'ensemble à priori plus doué pour le marketing que pour la pure mise en scène. Dans son autobiographie, il racontait que c'était en voyant les files d'attente devant les cinémas pour voir Les Diaboliques de H.-G. Clouzot qu'il eut l'idée de réaliser des films d'angoisse ou d'horreur pour empocher le pactole ; il ne s'est en effet jamais caché de les avoir tournés par pure opportunisme commercial, devenu un véritable roi du teaser.

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William Castle réalisera donc neuf autres westerns, aucun ne possédant une très bonne renommée malgré le fait que des titres comme Battle of Rogue River ou Cave of the Outlaws soient tout à fait honorables. Ce n’est évidemment pas le cas de Fort Ti, petit navet inconséquent, réalisé sans conviction et écrit à la va vite comme la plupart des autres productions de Katzman traitant de la même période telles La Hache de la vengeance (When the Redskins Rode) de Lew Landers ou Le Trappeur des grands lacs (The Pathfinder) de Sidney Salkow déjà avec un George Montgomery fadasse ; mais à sa décharge, avec toute la bonne volonté du monde, comment le comédien aurait-il pu se sortir de personnages aussi falots, aussi inconsistants ?! Le producteur ne cherchant qu’à faire de l’argent sans aucune considérations artistiques, le scénariste et le réalisateur semblent tout aussi peu concernés l’un que l’autre et du coup l’histoire s'avère aussi peu captivante que les séquences d’actions se révèlent molles. Il s’agissait du premier western en 3D et l’on ne compte plus les plans où l’on voit des objets divers et variés –flèches, torches enflammées…- arriver sur la caméra en direction du spectateur ; seulement le cinéaste semble ici ne s’être soucié que de ce gimmick technique sans ne penser à rien d’autre, le procédé devenant vite répétitif et pénible.

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Les Roger’s Rangers et leurs tenues vertes kakis, nous les connaissions déjà grâce à King Vidor qui en avait fait les personnages principaux de son film Le Grand passage (Northwest Passage), Spencer Tracy interprétant le major Rogers tenu ici sans aucune conviction par Howard Petrie. Mieux vaut donc se tourner à nouveau vers ce film d’une toute autre envergure, celui de William Castle ne possédant aucun sens épique, aucune rigueur que ce soit au niveau de l’écriture ou de la réalisation, la preuve la plus flagrante étant le passage dans quelques séquences et d’un plan à l’autre… d’une saison à l’autre... sans qu'il ne s'agisse aucunement d'ellipses ! Malgré tout ceci, on pourra néanmoins sourire devant l’extrême naïveté de certaines scènes, à la vue des effets spéciaux totalement grotesques comme celui des chauve-souris, de celle des cascadeurs semblant parfois sauter sur des trampolines lors de séquences d’action lamentablement filmées et rythmées, à l’écoute de l’accent à couper au couteau des soldats français… ou bien encore se rincer l’œil au vu de la très jolie comédienne Joan Vohs, seule véritable compensation/consolation à tant de médiocrité.

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Est-ce bien nécessaire de s’appesantir plus longuement sur un film qui n’en vaut pas le coup et qui ne plaira probablement pas à grand monde à l'exception peut-être de quelques nostalgiques ayant découvert ces films à l’époque de leurs sorties ?! Quoiqu’il en soit, un western sans charme, sans âme et sans quelconque intérêt.
feb
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Re: Shane

Message par feb »

Jeremy Fox a écrit :L'Homme des vallées perdues (Shane, 1953) de George Stevens
8) Chronique nickel M. Fox.
Petite correction Jeremy, Jean Arthur a 53 ans dans Shane (c'est dans A foreign affair qu'elle a 48 ans) :wink:
Et Jean Arthur ne parait pas trop âgée, c'est simplement une superbe actrice dans la force de l'âge :fiou: :mrgreen:
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