Le Virginien (1962-1971) Universal

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Jeremy Fox
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Re: Le Virginien

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1.23- The Money Cage

Réalisation : Alan Crosland Jr.
Scénario : Jameson Brower d'après une histoire de Donn Mullaly
Guest Star : Steve Forrest
Première diffusion 06/03/1963 aux USA - Jamais diffusé en France
DVD : VOSTF
Note : 7/10

Le pitch : Dans le train qui la ramène, Lydia, la fille du banquier de Medicine Bow, est prise à partie par un commerçant un peu trop entreprenant. Mais l’élégant Will Martin (Steve Forrest) vient à sa rescousse. Il s’avère que les deux hommes sont complices et que leur petit manège est destiné à ce que Lydia ait entière confiance en Will afin qu’elle puisse le faire plus aisément entrer en contact avec les notables de la ville. Ce sont les prémices de la mise en place d’une escroquerie à grande échelle ayant pour base la découverte de pétrole aux alentours. Mais une crise financière va mettre à mal leur arnaque…

Mon avis : James Drury est aux abonnés absents de ce 23ème épisode qui repose principalement sur les épaules du duo composé de la Guest Star Steve Forrest et de Bethel Leslie, comédienne ayant principalement tournée pour la télévision mais qui au cinéma aura néanmoins été l’épouse de Sean Connery dans le chef-d’œuvre de Martin Ritt, Traître sur commande (The Molly Maguires). Et il faut bien se rendre à l’évidence, non seulement les deux acteurs nous offrent des interprétations remarquables mais le couple qu’ils forment est totalement convaincant, grandement touchant tout du long jusqu’à cette dernière image profondément romantique, de nombreux auteurs de la série s'étant dernièrement avérés être de grands sentimentaux. Scénaristiquement parlant, The Money cage est un épisode basé sur deux escroqueries consécutives par le fait que la première ait capoté faute à une panique banquière s’étant propagée comme une trainée de poudre dans tout le pays. Autant dire qu’il fallait que l’écriture soit rigoureuse afin que cette fiction romantico-financière sans la moindre séquence d’action puisse captiver jusqu’au bout et ne jamais ennuyer. Et c’est effectivement le cas ! Je préviens avant d’aller plus loin qu’il est assez difficile d'écrire sur cet épisode sans en dévoiler quelques surprises ou retournements de situations. A bon entendeur !

Comme souvent, The Money Cage débute assez légèrement avec la découverte d'un sympathique trio d’escrocs dirigé par un homme raffiné, galant et d’une grande élégance, celui interprété par un excellent Steve Forrest -dans la vie le frère de Dana Andrews-, un de ces très bons seconds rôles hollywoodiens. Son nom ne vous dira certainement rien mais vous l'avez probablement déjà croisé à de nombreuses reprises : il s’agissait –pour rester dans le domaine du western- du frère aîné d'Elvis Presley dans Les Rodeurs de la plaine (Flaming Star) de Don Siegel ainsi que l'inoubliable tueur à gages dans le trop mésestimé La Diablesse en collants roses (Heller in Pink Tights) de George Cukor. Très classieux, doté d’un physique fortement avantageux et d’une profonde intelligence, son personnage subira une forte évolution au fur et à mesure de l’avancée de l’intrigue, au point que sa complice et maitresse -jouée par la charmante Joanna Moore- comprendra que leurs relations est sur le point de se terminer et qu’elle doit désormais faire place à sa rivale qui sera bien mieux assortie à l’homme qu’il est devenu entre temps, "ayant enfin acquis une conscience et plus du tout méprisant à l'encontre de la nature humaine" comme c'était le cas avant cette dernière arnaque. Difficile d’en dire plus -et c’est déjà beaucoup- de peur de trop en déflorer. Ce qu’il faut juste savoir est que la première escroquerie consistait pour Will -et après s’être fait passer pour un géologue-, à faire croire aux citoyens de Medicine Bow que leur terres recélaient probablement de gros gisements de pétrole afin de les inciter à spéculer sur cette opportunité et à investir leur argent dans l’exploration du sous-sol ; dollars qui auraient bien évidemment atterris directement dans la poche des magouilleurs avant que ces derniers ne se volatilisent.

Virage inattendu à mi-parcours puisque nos gentils arnaqueurs se rendent compte que l’hameçon reste désespérément vide, situation encore plus mise à mal par l'apparition d'une crise financière et d'un vent de panique qui se répand à propos de banques qui feraient faillite à l’Est des USA. Et voilà que l’histoire prend un nouveau tournant intéressant, presque documentaire, montrant ce qui découle de cet affolement qui à priori n’a pas de raisons d’avoir lieu puisqu’en l’occurrence la banque de Medicine Bow est saine, tout comme sa gestion et son directeur. Quoiqu’il en soit et au risque probable de faire faire faillite à l’établissement bancaire, les habitants décident tous ensemble de retirer leur argent au plus vite ; et ce malgré les tentatives du juge Garth de rassurer ses concitoyens d’autant qu’il serait le premier à être pénalisé par cette banqueroute qui fait grandement penser au futur Krach de Wall Street. Sur quoi Will a une nouvelle idée qui donne son titre à l’épisode –idée pas plus philanthropique que la première mais lui donnant l'occasion de rebondir- : remplir une cage grillagée de billets de banque afin de soulager les clients qui pourraient ainsi voir concrètement leurs liquidités et pouvant même les palper : "They don't want logic or a lecture on how sound your bank is. They want to see their money... Fight fire with fire. The panic is psychological, so you use psychology to lick it." Nous n’en dirons guère plus sauf que par cette analyse on appréhende aisément la profonde perspicacité de notre aigrefin et que le dénouement de cette 'affaire financière' sera l’occasion d’une très belle séquence 'à la Capra'. Quant à la romance qui réunit notre élégant filou à la fille du banquier, elle n’est pas avare de très jolies scènes superbement dialoguées et accompagnées du même très beau et entêtant thème musical que dans le précédent épisode.

Puis nous nous dirigons vers une troisième partie qui nous fait voyager jusqu'à Denver, avec elle aussi son lot de surprises et un final magnifiquement écrit et réalisé se terminant sur un superbe travelling arrière ascendant. Il faut dire que le scénariste Jameson Brower et le réalisateur Alan Crosland Jr rivalisent de sensibilité, voire cette longue séquence à la banque de Denver, quasi muette. A signaler aussi un excellent Dayton Lummis dans le rôle du banquier, des relations 'jouissivement' très ambiguës voire amorales entre notre trio de séduisants fraudeurs -puisqu’il semble y avoir eu un ménage à trois- et que l’on est à nouveau témoin de la complicité touchante entre Trampas et Steve qui n’ont néanmoins qu’un rôle très accessoire dans cet épisode pas forcément surprenant mais cependant fort habilement mené et en fin de compte plutôt très réussi, entre intrigue policière, suspense socio-économique et histoire d’amour. Dommage que le Happy-End mette un terme à une conclusion qui aurait pût être aussi amère que bouleversante. La morale est néanmoins très belle et nous en ressortons le sourire aux lèvres avec une envie de partir à la recherche des autres fictions dans lesquelles aurait joué la trop méconnue mais adorable Bethel Leslie.

Avec illustrations
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Shin Cyberlapinou
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Re: Le Virginien

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https://www.amazon.fr/Virginien-Int%C3% ... +virginien

Saison 1 à 31 euros.Il n'y en aura pas pour tout le monde...
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Lockwood
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Re: Le Virginien

Message par Lockwood »

Globalement d'accord avec toi, Jeremy Fox, sur l'épisode "The Golden Door" avec une première partie du procès que j'avais trouvé lourde et peu passionnante. La fin avait cependant ranimé mon intérêt, avec un twist assez inattendu et le personnage de Karl Böhm qui prenait par la même une dimension plus intéressante

Je viens de voir la note que tu as attribué à l'épisode suivant avec Ida Lupino, je suis bien curieux de savoir ce que tu lui reproches.
Etant donné que j'ai visionné le 2eme coffret avant le 3 eme, je me suis rendu compte après coup qu'il partageait pas mal de similitudes avec l'épisode de Bette Davis (en moins convaincant cela dit)

En ce qui me concerne, j''avance petit à petit dans le coffret saison 2 partie I (j'ai vu les 6 premiers épisodes) et c'est vraiment d'un très bon niveau... J'aurai l'occasion d'y revenir plus tard !
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Jeremy Fox
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Re: Le Virginien

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1.24- The Golden Door

Réalisation : John Brahm
Scénario : Maxwell Shane d’après une histoire de Roy Huggins
Guest Star : Karl Boehm & Robert Duvall
Première diffusion 13/03/1963 aux USA - Jamais diffusé en France
DVD : VOSTF
Note : 6/10

Le pitch : Alors qu’ils allaient lui rendre visite, Trampas et Betty trouvent un de leurs voisins assassiné. Les soupçons se portent immédiatement sur Karl Rilke (Karl Boehm) et sa jeune épouse, un couple itinérant d’émigrants lituaniens ; en effet ils semblaient non seulement être les seuls à se trouver à proximité de la maison de la victime lorsque le drame s’est produit mais on trouve également dans leur carriole un fusil lui appartenant. Le juge Garth va être contraint de retourner au prétoire puisqu’il décide de défendre cet homme dont il est à peu près certain de l'innocence malgré les dires du fils du défunt (Robert Duvall)…

Mon avis : Avec derrière la caméra le réalisateur John Brahm (The Lodger, Jack l’éventreur, Hangover Square, The Locket) ainsi que Maxwell Shane à l’écriture (le scénariste de 50 Days to Moose Jaw, l’un des plus beaux épisodes de la saison 1) d'après une histoire du très bon Roy Huggins, on pouvait s’attendre à un grand moment d’autant plus lorsque l'on sait que The Golden Door est très apprécié des amateurs de la série et qu’il repose avant tout sur les épaules de l’excellent Lee J. Cobb, Garth reprenant ici le chemin du tribunal pour se faire l'avocat de la défense d'un immigrant Letton accusé de meurtre alors même que son épouse est sur le point de lui donner un enfant. Non pas que l'épisode soit mauvais -loin de là- mais un curieux constat semble presque devenir une réalité -tout du moins concernant cette saison initiale-, à savoir que ce sont les réalisateurs les plus célèbres -surtout pour avoir principalement tourné pour le 7ème art- qui se révèlent les moins à l’aise lorsqu'il doivent se plier aux règles et exigences de la petite lucarne ; c’est ainsi que Samuel Fuller, William Witney et maintenant John Brahm nous auront livré parmi les épisodes les plus faibles de la série ; pas spécialement au niveau de la mise en scène qui s’avère à peu près égale d’un épisode à l’autre mais plutôt dans la direction d’acteurs moins sobre que chez les réalisateurs cantonnés au petit écran.

Ici, outre un manque de finesse dans l’écriture, c’est surtout l’interprétation peu nuancée de Karlheinz Böhm qui empêche cette fiction de nous tenir plus puissamment en haleine. Rappelons que le comédien est surtout connu pour avoir tenu le rôle de l’Empereur François-Joseph d’Autriche dans la célébrissime série des Sissi avec Romy Schneider. Dans cet épisode du Virginien, non pas qu’il soit imbuvable mais nous aurions aimé lui voir un registre un peu plus étendu ou varié. Ici, quasiment tout du long, il est un homme taciturne, presque constamment grimaçant ou faisant la moue. Alors certes, il est clair que son protagoniste se retrouve en fâcheuse posture, mais le jeu un peu grossier de Böhm nous empêche néanmoins d’éprouver de l’empathie à son encontre. Ce qui au départ pouvait passer pour du culot –un pauvre innocent peu aimable- devient assez vite répétitif et pénible. Il en va de même pour Ilse Taurins, aussi jolie femme que comédienne peu aguerrie. Le reste du casting est plutôt très bon avec notamment un tout jeune et inquiétant Robert Duvall mais surtout un magistral Lee J. Cobb qui nous livre ici une formidable prestation au point de voler la vedette à son entourage. Garth a été ‘désigné volontaire’ pour reprendre du service au prétoire mais cette fois-ci plus du tout dans le fauteuil du juge mais en tant qu'avocat de la défense (c'est d'ailleurs le seul 'spoiler' qui vous sera dévoilé au cours de ce texte). Sa véhémence, son talent d’orateur, son intelligence et son bon sens feront que nos yeux seront principalement tournés vers son personnage qui avec sa voix puissante défend avec force conviction son client dont il est déterminé à sauver la tête.

Il faut dire qu’il trouve face à lui un redoutable adversaire en la personne du procureur que joue le jeune Paul Carr, avec qui il aura l’occasion de se lancer dans de dantesques joutes oratoires. Cet acteur peu connu -et qui ressemble étonnement à Gary Clarke, le comédien qui tient le rôle de Steve- était déja très bon en jeune fou de la gâchette qui perdra tous ses moyens au moment de devoir réellement se défendre dans Posse from Hell (Les Cavaliers de l’enfer) de Herbert Coleman, un des bons westerns de série B avec Audie Murphy. L’intrigue se déroulant durant une bonne moitié de sa durée dans le tribunal, il ne faut pas s’attendre à beaucoup d’action mais plutôt à plusieurs pistes de réflexions autour du fonctionnement d'une démocratie, des particularités de la justice américaine, de l’American Dream, de la difficulté pour les migrants à se faire accepter et intégrer au sein de la société -tiens donc- ou encore plus globalement autour de ce que l'on appelle communément 'Law and order'. C’est ainsi que l’on apprend -ou que l’on nous remémore- qu’à l’orée du 20ème aux USA -et même encore maintenant pour certaines de ces ‘règles’- un accusé ne pouvait pas être jugé deux fois de suite pour le même crime, que n’importe quel citoyen pouvait prendre les armes pour arrêter un quidam s’il le soupçonnait de félonie, que le travail d’un avocat était avant tout d’établir un ‘reasonable doubt’ et d’en convaincre le jury, que les habitants de l’Ouest américain étaient encore -ou déjà- très méfiants vis-à-vis des étrangers…

Si l’aspect ‘Trial Fiction’ s’avère dans l’ensemble un poil décevant -l’épisode se situant plusieurs crans en dessous du magnifique The Judgment- il nous aura cependant permis d’assister à un grand numéro de Lee J. Cobb et à deux ou trois séquences délicieuses nous remémorant la complicité qui existait entre les hommes du ranch Shiloh y compris entre patrons et employés, ici entre Garth et Trampas lors du procès, ainsi qu'entre Garth et le Virginien lors d’une touchante scène nocturne au cours de laquelle le juge en pleine déprime, ne sachant pas comment mener sa plaidoirie du lendemain, demande à son régisseur -occasion d'appréhender la qualité des dialogues- : "Have you ever felt completely empty ? Unless some little seed drops from out of heaven tonight, I haven't the slightest idea what I'm going to do in that courtroom tomorrow." C’est enfin un épisode intéressant qui nous questionne sur la responsabilité de chacun dans le bon fonctionnement de la démocratie américaine : "That's one of the obligations in a democracy. To make it work everyone must take responsibility." Mineur mais pas inintéressant avec pour conclure un final assez touchant et plutôt progressiste !
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Jeremy Fox
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Re: Le Virginien

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1.25 – A Distant Fury

Réalisation : John English
Scénario : Howard Browne d’après une histoire de Roy Huggins
Guest Stars : Howard Duff & Ida Lupino
Première diffusion 20/03/1963 aux USA - ? en France
DVD : VF et VOSTF
Note : 5.5/10


Le Pitch : Ed Frazier (Howard Duff) vient d'être libéré de prison pour bonne conduite après avoir purgé une peine de trois ans ; il avait volé une somme de 30,000 dollars qui n'ont d'ailleurs jamais été retrouvé. Steve qui avait témoigné contre lui lors de son procès se sent en danger, pensant qu'Ed est revenu à Medicine Bow dans le but de se venger ; il semblerait pourtant d'après ses dires que ce ne soit pas le cas. Le soir, Ed rejoint en cachette la femme qu'il aime (Ida Lupino) dont la fille est courtisée par Steve. Un drame va avoir lieu qui va mettre le cow-boy du ranch Shiloh dans une situation embarrassante...

Mon avis : Roy Huggins étant devenu le producteur exécutif de la série après le départ de Charles Marquis Warren, il profite en ce dernier tiers de saison pour caser de nombreuses de ses histoires, des intrigues pour la plupart plus proches du film policier que du western ; il les signe sous le pseudonyme de John Francis O'Mara. Rappelons que sa seule et unique réalisation pour le cinéma fût Le Relais de l’or maudit qui nous faisait regretter qu'il n’ait pas persévéré dans ce métier. Il fût néanmoins remarqué dans le fameux 50 ans de cinéma américain de Bertrand Tavernier et Jean-Pierre Coursodon, ces derniers écrivant à la rubrique scénariste : "Roy Huggins mérite d’être cité pour la nostalgie qu’il a gardée pour le film noir. Du thriller il a conservé l’ambiance trouble, les péripéties nombreuses, les points de départs étranges ou originaux, l’ambiguïté morale". Profitons pour lui rendre un rapide hommage à notre tour : professeur de l’université de Californie en 1939 puis ingénieur dans l’industrie pendant la guerre, Roy Huggins se tourna ensuite vers la littérature et écrivit trois romans policiers, des nouvelles puis des scénarios tirés d’abord de ses propres ouvrages. Il devient ensuite l’un des scénaristes les plus féconds de la Columbia : citons Gun Fury (Bataille sans merci) de Raoul Walsh, Three Hours to Kill de Alfred Werker, mais surtout l’un des plus beaux films noir romantiques des années 50, Pushover (Du plomb pour l’inspecteur -1954) de Richard Quine. En 1952, il met donc en scène pour une société indépendante un scénario dont il est entièrement l’auteur, l'excellent Hangman’s Knot, l'un des meilleurs westerns avec Randolph Scott. Il souhaite désormais avoir le contrôle total de ses films à une époque où cette pratique est vue de travers par les gros pontes des studios ; à force de persévérance il réussit à obtenir ce qu'il voulait, pas en tant que cinéaste mais en devenant scénariste et producteur de séries télévisées fort célèbres. Depuis 1961, il ne se consacre plus qu’à la petite lucarne et nous avons de nombreux aperçus de son travail grâce au Virginien.

Howard Browne qui a déjà adapté plusieurs de ses histoires dont la superbe If you have Tears avec Robert Vaughn, Dana Wynter & Nancy Sinatra, revient pour écrire cet épisode qui s'avère malheureusement assez moyen car au final assez peu captivant. Sa première partie est pourtant intéressante, abordant la paranoïa qui atteint Steve alors qu'il croit dur comme fer qu'un homme qui a été en prison faute en partie à son témoignage revient en ville pour se venger de lui. Ce qui peut se comprendre d'autant plus qu'il se sent suivi et qu'ils se retrouvent souvent sur les mêmes lieux ; mais comme lui rétorque l'ex-prisonnier, la ville n'étant pas très grande, il est logique qu'ils se croisent régulièrement. Comme par hasard, Steve courtise la fille d'une veuve qui semble avoir eu une romance avec Ed, son 'harceleur'. Bref, une situation assez tendue qui se termine à mi-parcours par un drame -un meurtre- dont le spectateur est témoin, coupant alors court à tout suspense concernant l'enquête qui va s'ensuivre. Mais comme nous avons pu le constater à de nombreuses reprises, cette forme d'écriture est régulièrement employée dans la série, les auteurs souhaitant se concentrer avant tout sur la psychologie des personnages en donnant de l'avance aux spectateurs qui connaissent d'emblée la clé de l'affaire et qui ne se focalisent alors plus que sur le questionnement de savoir comment les protagonistes vont pouvoir se tirer de cette difficile situation. Le mystère étant éventé assez vite, nous assistons alors à une investigation menée par Steve qui, même s'il a été relaxé par la justice, est toujours cru coupable par la population d'un crime dont il va s'évertuer à prouver qu'il en est innocent.

Faute à une absence de tension et d'une quelconque thématique passionnante, à deux romances auxquelles on a un peu de mal à croire par défaillance d'alchimie à l'écran au sein des couples formés, à un certain manque de rigueur dans l'écriture du scénario -dont une machination dont je ne peux pas vous dire grand chose au risque de vous dévoiler des éléments très important de l'intrigue- ainsi qu'à une interprétation assez moyenne de la jeune Joey Heatherton, l'épisode n'est guère captivant même si les Guest Stars -mari et femme à la ville- s'en sortent plutôt bien. Il s'agit du méconnu Howard Duff -très bon en Sam Bass dans La Fille des prairies de George Sherman aux côtés de Yvonne de Carlo- ainsi que de Ida Lupino que l'on ne présente plus et qui fut surtout célèbre pour avoir été l'une des premières femmes réalisateurs à Hollywood durant les années 50. Elle interprète ici une femme d'âge mûre qui veut par tous les moyens donner à sa fille la chance d'avoir un avenir radieux ainsi que la richesse qu'elle regrette de n'avoir jamais réussi à obtenir pour elle-même. Dans le rôle du shérif de Medicine Bow, Ross Elliott acquiert encore un peu plus de prestance, son temps de présence étant ici assez conséquent, son personnage faisant montre d'une grande assurance et surtout d'une autorité et d'une force de caractère qu'on ne lui connaissait pas. A plusieurs reprises nous sommes témoins qu'il sait se faire respecter y compris par Steve qui sort la tête basse de ses confrontations avec l'homme de loi ; ce dernier sait le remettre à sa place sans se démonter mais Steve ne lui en tiendra pas rigueur puisque l'épisode se terminera sur leur réconciliation autour d'un verre.

Pas grand chose à dire de la mise en scène du réalisateur britannique John English qui fut le principal collaborateur de William Witney à la Republic alors qu'ils tournaient tous deux les célèbres serials que furent Zorro's Fighting Legion et Dreams of Fu Manchu, et qui en solo réalisa d'innombrables westerns de séries avec Roy Rogers ou Gene Autry ; sa médiocre utilisation des décors en studio gâche la séquence de suspense mettant en scène Ida Lupino et qui semblait devoir être le climax de l'épisode. Parmi les petites surprises on notera que nos héros n'ont pas spécialement le beau rôle, que ce soit un Steve très soupe au lait ainsi que Trampas qui se fait reprendre par le Virginien faute à ses blagues parfois un peu douteuses en certaines circonstances. On signalera également la présence une deuxième fois consécutive de Paul Carr dans le rôle du procureur, à nouveau confronté au juge Garth. Pas mauvais ni désagréable à suivre mais guère passionnant surtout après que l'excellent Howard Duff ait dut quitter l'épisode.
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Jeremy Fox
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Re: Le Virginien

Message par Jeremy Fox »

Lockwood a écrit :
En ce qui me concerne, j''avance petit à petit dans le coffret saison 2 partie I (j'ai vu les 6 premiers épisodes) et c'est vraiment d'un très bon niveau... J'aurai l'occasion d'y revenir plus tard !
Ca promet de bonnes soirées :D
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Jeremy Fox
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Re: Le Virginien

Message par Jeremy Fox »

Rajout un peu plus avant de l'épisode 24 que j'avais oublié d'intégrer ici. Pour les textes illustrés c'est toujours au même endroit :wink:
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Lockwood
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Re: Le Virginien

Message par Lockwood »

Petit retour sur les 5 premiers épisodes de la saison 2;

(sauf pour le 4ème épisode que je n'ai pas pu voir pour l'instant)

« Ride a dark trail » (2x01); cette saison débute par un épisode de flashback centré sur le personnage de Trampas.. j'ai l'impression que celui-ci est le personnage le plus utilisé pour les épisodes les plus dramatiques depuis le début de la saison 1 et il faut avouer que Doug McClure se débrouille très bien dans ce registre (à l'exception du dernier épisode de la saison 1). Cet épisode ne fait pas exception avec ce récit de vengeance bien mené malgré un scénario somme toute très classique. La principale originalité réside dans la mise en valeur, réussie, du tempérament flambeur, bon vivant du personnage dont le comportement puéril met en danger un de ces amis.
Spoiler (cliquez pour afficher)
Trampas abandonne son binome endormi (joué par un Royal Dano qui apparait déjà pour la 3eme fois de la série), seul dans la nuit et à la merci des loups qu'ils doivent chasser.
Le dénouement est lui-même plutôt téléphoné, mais le talent dramatique dont fait preuve Doug McClure dans l'une des dernières scènes ne nous laisse pas de marbre ; 6,5/10

« To make this place remembered » (2x02) :
Episode de procès plutôt atypique car il s’intéresse au jugement posthume d'un jeune homme pendu par plusieurs citoyens d'une petite bourgade, à la suite de la mort suspicieuse d'une jeune fille. L'épisode vaut pour l'affrontement entre 2 conceptions de la justice, incarnée par le juge Garth (l'avocat) et le personnage du procureur joué par l'excellent John Dehner, dont le délitement progressif au fil de l'épisode est assez marquant. Un épisode qui n'est pas exempt de défauts (des ficelles un peu faciles, comme le relevait Hellrick) mais progressiste, et mettant bien en valeur les jugements hâtifs et comportements douteux de personnages qui se voient trop vertueux. A noter la présence de Joan Blondell en guest star; 7/10

« No tears for Savannah » (2x03):
On se doutait que le Virginien était un homme de bon goût en matière de femme (Dolores Hart dans "The Mountain on the Sun" en est un exemple évocateur) et cet épisode confirme cette tendance, car on apprend que l'individu a connu une romance douloureuse avec Gena Rowlands (ni plus ni moins - d'ailleurs, celle-ci a visiblement une faculté à faire tourner les cœurs car ce n'est pas moins de 4 personnages qui lui tourne autour dans cet épisode). Sur le papier, cet épisode est l'un des plus impressionnant depuis le début de la saison 1; Gena Rowlands donc, Everett Sloane, Stephen McNally et Harold Gould, sans compter Vaughn Taylor, dont la tête nous donne facilement l'impression de l'avoir croisé dans pas mal de longs métrages de l'époque.
Sur le papier seulement... car dans les faits, tout cela ne s'agence pas parfaitement, loin de là.. La romance entre James Drury et Gena Rowlands est dans un premier temps peu convaincante, mais la dernière partie de l'épisode nuance quelque peu ce jugement. Stephen McNally peine à faire sa place, à cause d'un personnage dont on a du mal à cerner les motivations jusqu'à la dernière scène. Cela dit, l'intrigue n'est pas sans intérêt même si le noeud principal(le virginien et le juge Garth viennent en aide à un personnage accusé de meurtre) est une constante dans cette série... pour l'originalité, on repassera. Cependant, l'habileté de cet épisode est de se focaliser sur l'appel du procès plutôt que sur le procès en lui-même, ce qui génère plusieurs rebondissements, bien appuyé par le talent d'Everett Sloane. Malgré tous les défauts évoqués, cet épisode se laisse suivre avec un certain intérêt jusqu'à un dernier acte dans le désert, qui fait enfin la part belle au couple Gena Rowlands - James Drury..; 6/10

The Evil That Men Do (2X05):
Tout simplement un de meilleurs épisodes depuis le début de la série. Encore une fois, une problématique souvent abordée sur petit et grand écran, celui de la ré-insertion des délinquants. Le thème est également très actuel et nous renvoie à des clivages gauche/droite récent sur le sujet. Un épisode parlant donc, mais dont la force réside principalement dans le personnage joué par la guest star du jour; Robert Redford.
Non seulement le personnage est particulièrement bien dessiné (orphelin à qui personne n'a donné la chance, il est sujet à des accès de violences difficiles à réprimer.. accès de violence dont il a conscience qu'elle est peu compatible avec une vie en liberté et qu'il préfère réguler en vivant isolé de tous, dans l'égoïsme et l'individualisme). Il faut tout le talent de Robert Redford pour donner vie à ce personnage.. Et le fait que l'intrigue soit prévisible au possible n'handicape que peu l'épisode.
A noter qu'il s'agissait de l'épisode préféré de Roberta Shore (je trouve d'ailleurs qu'il s'agit du meilleur épisode de son personnage); 8/10
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Re: Le Virginien

Message par Jeremy Fox »

Lockwood a écrit :
"Echo of Another Day" (1x26) est un épisode apparemment mésestimé, certains reprochant le scénario un peu court et le remplissage un peu trop voyant. En ce qui me concerne, c'est un de mes épisodes préféré avec le meilleur méchant que j'ai vu jusqu'à présent dans cette série, celui-ci étant servi par un John Dehner inquiétant et sarcastique à souhait. Les joutes entre celui-ci et l'autre guest star du jour, Bradford Dillman sont très agréables et le scénario est certes linéaire, mais fait la part belle à l'ensemble des personnages (y compris Trampas, régulier de la série mis en avant sur cet épisode). Et le final attendu ne déçoit pas. Bref, je suis bien curieux de savoir ce qu'en pensera Jeremy Fox..

Que du bien avec deux remarquables interprétations de Guest Star, Bradford Dillman et John Dehner. Un grand épisode !
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Re: Le Virginien

Message par Lockwood »

Jeremy Fox a écrit :
Lockwood a écrit :
"Echo of Another Day" (1x26) est un épisode apparemment mésestimé, certains reprochant le scénario un peu court et le remplissage un peu trop voyant. En ce qui me concerne, c'est un de mes épisodes préféré avec le meilleur méchant que j'ai vu jusqu'à présent dans cette série, celui-ci étant servi par un John Dehner inquiétant et sarcastique à souhait. Les joutes entre celui-ci et l'autre guest star du jour, Bradford Dillman sont très agréables et le scénario est certes linéaire, mais fait la part belle à l'ensemble des personnages (y compris Trampas, régulier de la série mis en avant sur cet épisode). Et le final attendu ne déçoit pas. Bref, je suis bien curieux de savoir ce qu'en pensera Jeremy Fox..

Que du bien avec deux remarquables interprétations de Guest Star, Bradford Dillman et John Dehner. Un grand épisode !

8)
Avec le recul, j'ai trouvé que cet épisode était un des plus jouissifs de la saison 1, avec un duel westernien rondement mené jusqu'à la fin
Et comme je le soulignais, John Dehner revient dès la saison 2 avec un personnage un peu moins marquant peut-être, mais avec une belle interprétation dans un rôle radicalement différent.

Je complète ma revue de saison avec l'épisode 4 que je n'avais pas pu voir;

"A Killer in Town" (2x04): de tous les personnages du Virginien, Trampas est probablement celui qui est le plus martyrisé par les scénaristes qui n'ont de cesse de le placer dans des situations dramatiques et compliquées... Quel vie! Dans cet épisode, il est impliqué dans la mort accidentelle d'un homme connaissant l'identité d'un meurtrier avec une prime de 5000 dollars à la clé.. Un "Body Hunter", joué par Broderick Crawford, débarque en ville et suspecte Trampas d'être l'assassin recherché.
Je pensais retrouver l'atmosphère de malaise du réussi "No Name on the Bullet" de Jack Arnold, mais il aurait pour cela fallu mieux brosser le personnage de Broderick Crawford, qui ne parvient que peu à véhiculer cette aura de mystère qu'avait si bien traduit Audie Murphy à l'écran.
L'ensemble se suit passablement, l'épisode est relativement peu rythmé et la tension, trop rarement existante. Les scénaristes ont beau se servir du passé douteux de Trampas pour instiller le doute dans le cerveau des spectateurs, cela ne prends pas vraiment...
Malgré cela, on peut noter un scénario dont la résolution s'imbrique habilement avec une sous-intrigue de l'épisode (l'épidémie de fièvre typhoïde), ce qui relève pas mal l'épisode.
La résolution est cependant très convenue ;
Spoiler (cliquez pour afficher)
La mansuétude dont fait preuve Broderick Crawford envers l'assassin apparaît plus comme un passage obligé pour le happy end que comme un acte fort du bodyhunter, faute de profondeur du personnage.
Pas spécialement désagréable dans son ensemble mais un épisode décevant par rapport au potentiel du scénario: 5/10
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Jeremy Fox
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Bradford Dillman

1.26- Echo of Antoher day

Réalisation : William Graham
Scénario : Frank Fenton
Guest Star : Bradford Dillman & John Dehner
Première diffusion 27/03/1963 aux USA - 02/09/1983 en France
DVD : VF & VOSTF
Note : 7.5/10


Le Pitch : Sam (Bradford Dillman) revient à Medicine Bow après avoir purgé une peine de 5 ans de prison pour le vol de 50000 dollars dont il a toujours refusé de dévoiler la cachette. Il revoit son vieil ami Trampas qui à l'époque avait failli faire parti du coup. Lui devant la vie, Trampas le fait embaucher par le Virginien. Si Sam reste sur les lieux, c'est parce qu'il sait pertinemment que son complice (John Dehner) finira par le retrouver pour récupérer le butin ; Sam l'attend donc pour mettre un terme définitif à cette histoire et pouvoir enfin recommencer une nouvelle et honnête vie. Ce ne sera cependant pas sans dangers...

Mon avis : Ce magnifique épisode que constitue Echo of Another Day a été signé par un prolifique réalisateur de télévision qui pour le cinéma aura réalisé en 1967 une comédie westernienne produite par Blake Edwards, injustement mésestimée à mon humble avis, le très amusant L'Or des pistoleros (Waterhole #3) avec en tête d'affiche un inénarrable James Coburn. Ce 26ème épisode a été écrit par l'excellent Frank Fenton, déjà auteur du mémorable If You are Tears issu de cette même première saison, mais surtout célèbre comme nous l'écrivions précédemment pour avoir laissé son nom aux génériques de westerns prestigieux aux castings de rêve tels Vaquero de John Farrow (Robert Taylor/Ava Gardner/Anthony Quinn), Rivière sans retour d’Otto Preminger (Robert Mitchum/Marilyn Monroe/Rory Calhoun), Le Jardin du diable de Henry Hathaway (Gary Cooper/Susns Hayward/Richard Widmark) ou encore le sublime Fort Bravo de John Sturges (William Holden/Eleanor Parker/John Forsythe). Après plusieurs incursions dans les histoires policières, la série revient ici au western pur et dur au travers cet épisode rigoureux, tendu et presque dénué de fantaisie -hormis les habituelles séquences de 'drague' de Trampas- qui a pour principale qualité une direction d'acteurs irréprochable, Doug McClure comme James Drury s'avérant être à leurs sommets, pourtant supplantés par le duo de Guest Stars, Bradford Dillman et John Dehner.

Bradford Dillman -prix d'interprétation mérité à Cannes pour son rôle d'étudiant meurtrier dans le très bon Le Génie du mal (Compulsion) de Richard Fleischer ; excellent également dans la peau d'un lieutenant va-t-en guerre et orgueilleux dans The Plainsman (Les Fusils du Far West) de David Lowell Rich- interprète ici un homme qui autrefois travaillait dans le même ranch que Trampas mais qui, ayant accepté d'entrer dans un gang de voleurs de train, écopa de 5 ans de prison suite à un braquage. A sa sortie, il décide d'entamer une vie honnête ; mais pour se faire, il lui faut se racheter, ce qui ne va pas s’avérer si simple puisqu'il sait pertinemment que Bleeck, le complice qui a échappé à l'arrestation, va chercher à le retrouver puisque lui seul connait l'emplacement du butin. Plutôt que d'éternellement le fuir, il décide donc de l'attendre sur place et de le conduire jusqu'à la cachette où il est certain que Bleeck le provoquera en duel afin de ne pas partager. Alors seulement il sera obligé de le tuer pour pouvoir restituer les dollars au gouvernement et repartir pour une nouvelle vie en allant retrouver une épouse qui l'attend au Texas. En attendant, il doit trouver du travail sur place ; Trampas qui lui doit la vie va le présenter à son régisseur qui accepte de l'embaucher. A ce propos l'on constate une fois encore le progressisme des auteurs qui abordent le sujet de la réinsertion des voyous dans la société, le Virginien acceptant de faire confiance à l'homme qu'il est devenu, ne voulant pas se soucier de son passé.

Une splendide séquence réunira les deux hommes alors qu'ils nettoient un poulain nouveau-né en pleine nuit ; là le Virginien lui explique qu'il lui faut faire attention de ne pas replonger et que si jamais il est tenté de le faire, qu'il fasse bien en sorte de ne pas entrainer Trampas avec lui sur la mauvaise pente auquel cas il serait obligé d'agir sévèrement, son amitié pour son principal cow-boy passant par dessus tout. En magnifiques dialogues, ça donne ça : "We all think we've changed, we think we've become something better and different. We think we've grown up. Then something happens like a prairie catches fire or a herd bolts and stampedes or a star falls. And we find out we're back again to something we thought we'd forgotten..." Puis, alors que malgré ses conseils Trampas ait quand même décidé de venir en aide à l'ex-voleur qui allait se retrouver dans une situation trop délicate sans lui -belle leçon de camaraderie ici aussi-, Le Virginien prononce une phrase au shérif qui confirme cette indéfectible et puissante affection pour son homme de main : "Whether he's right or wrong I'm going to be here for him." Mais, pour ne pas que Trampas coure un risque, le Virginien serait capable de tout y compris de sacrifier la vie d'autres personnes ; ce qui renforce son caractère très déterminé voire même très dur ; culotté de la part des scénaristes de rendre leur héros aussi acariâtre, endurci et renfrogné, capable même de remettre en cause l'autorité du shérif en se montrant encore plus directif que lui. C'est à vrai dire assez fascinant pour les fans de la série qui se révèle à nouveau bien plus adulte que familiale comme on a un peu trop hâtivement eu tendance à la qualifier.

Quant à John Dehner, il nous gratifie ici dans le rôle de Bleeck de la performance de Bad Guy jusqu'à présent la plus inoubliable de la série même s'il y en eut précédemment d'autres de mémorables et notamment Clu Gulager dans The Judgement. Son personnage est d'autant plus puissant et inquiétant que son extrême méchanceté, son incroyable sarcasme et son implacable rouerie découlent d'une enfance malheureuse qu'il raconte sans complexes. La cerise sur le gâteau pour cet épisode à la mise en scène rigoureuse et efficace lorsqu'il s'agit d'emballer des séquences d'action, à l'interprétation de haut niveau et au scénario linéaire, resserré et tendu au cours duquel même le flash-back du début est remarquablement bien intégré. Il manque peut-être d'un peu d'humour, de fantaisie ainsi que d'une présence féminine mais il n'en est pas moins assez admirable et d'une humanité qui fait plaisir à voir, autant au travers la description de plusieurs touchantes amitiés que des thématiques de la possible réinsertion des délinquants ainsi que de la confiance en la seconde chance. A signaler dans la peau du détective une autre Guest Star en la personne d'Edward Asner. Quant à la conclusion, elle ne déçoit pas, d'une belle dignité de la part du personnage interprété par Bradford Dillman. Du tout bon !

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Jeremy Fox
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Re: Le Virginien

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Skip Homeier

1.27- Strangers at Sundown

Réalisation : David Friedkin
Scénario : Morton S. Fine, Roy Huggins & David Friedkin
Guest Star : Jocelyn Brando, Harry Morgan, Arthur Hunnicutt, Skip Homeier
Première diffusion 03/04/1963 aux USA - Jamais diffusé en France
DVD : VOSTF
Note : 7/10

Le Pitch : De retour d'un voyage dans le Montana, le Juge Garth et sa fille Betsy rentrent à Medicine Bow en diligence. Celle-ci est attaquée par Pauk et sa bande, le conducteur tué. Les huit voyageurs ont le temps de se terrer à l'intérieur du relais de Sundown dirigé par le vieux Tom (Arthur Hunnicutt). Les bandits lancent un ultimatum aux réfugiés : leur livrer un certain George qui semble les avoir trahi et dont ils veulent la peau, auquel cas contraire ils n’hésiteront pas à faire un massacre pour le récupérer. Qui parmi les voyageurs se cache sous une fausse identité ? Doit-on livrer un homme à la mort pour sauver sa propre vie ?

Mon avis : A propos de The Man who wouldn't Die avec Vera Miles en Guest Star, j'écrivais que le réalisateur et scénariste du premier opus de la série revenait pour signer ce 19ème épisode, mélange de mystère policier et de romance et qu'avant cela, David Friedkin s’occupa également d’écrire le scénario de deux autres épisodes, le principal point commun à ces quatre titres étant l’intégration d’une histoire d’amour d’importance au sein de chacune de leurs intrigues. Ici l'on ne peut pas vraiment dire que la romance entre Skip Homeier et Evans Evans -Mme John Frankenheimer à la ville- soit absolument primordiale au sein de l'histoire, mais elle a néanmoins son rôle à jouer, n'est pas dénuée d'intérêt et s'avère à nouveau assez touchante puisque le couple est constitué par une ancienne prostituée et un jeune homme qui connait son passé mais ne veut pas s'en soucier. Autre élément 'fleur bleue' de cet épisode, un début qui voit la jeune Betsy s'émerveiller de la vie, s'extasier sur tout ce qui l'entoure plus elle se rapproche du ranch Shiloh... Cependant, contrairement à ce que nous aurions pu penser au vu de cette description, aucune mièvrerie mais une jolie sensibilité, d'autant que l'actrice Roberta Shore tout comme son personnage ont entre temps acquis une belle maturité. La première séquence qui vient casser ce tendre lyrisme est la tuerie d'une jeune biche par un des passagers de la diligence qui les ramène au Wyoming. Le spectateur est aussi choqué que la jeune fille et voit d'un assez mauvais œil ce vieil homme.

C'est l'une des qualités premières de cet épisode que de faire évoluer le regard que nous portons sur chacun des protagonistes, tous bien plus complexes et riches que ce qu'ils nous paraissaient être de prime abord. Cet homme marqué physiquement par la fatigue, on commence donc par le mépriser pour avoir abattu gratuitement un si doux animal ; mais nous nous mettrons à le comprendre une fois qu'il aura expliqué son geste plus loin dans le courant de l'intrigue : avec son épouse -excellente Jocelyn Brando-, il a travaillé durement pendant 25 ans pour essayer de faire pousser des cultures systématiquement détruites par ces biches et chevreuils. L'on repense alors au magnifique The Yearling (Jody et le faon) de Clarence Brown, le personnage joué par Malcolm Atterbury pouvant être celui de Gregory Peck avec quelques années de plus. S'ils sont du voyage c'est qu'ils ont pu bénéficier d'un héritage qui va leur permettre de pouvoir enfin vivre dignement dans une région plus clémente. Rappelons qu'ils font partie d'un groupe de huit 'touristes'qui se retrouvent d'un instant à l'autre 'prisonniers' dans un relais, cernés par une bande de brigands tenant à récupérer l'un des leurs qui se trouve être incognito parmi les voyageurs. Le blocus et le siège d'un relais de diligence est un des petits classiques récurrents du western ; parmi les plus connus citons surtout L'Attaque de la malle poste (Rawhide) de Henry Hathaway ; mais la situation de cet épisode ressemble bien plus à celle du superbe Hangman's Knot (Le Relais de l'or maudit), seul long métrage réalisé par Roy Huggins ; Roy Huggins qui rappelons-le est en cette année 1963 le producteur exécutif de la série et l'un des scénaristes de Strangers at Sundown.

Il s'agit en sorte d'une variation sur ce grand film de série B avec cependant un changement d'importance ; ce que cherchent à récupérer les bandits n'est donc pas un quelconque trésor mais l'un des leurs qui les a récemment trahis en livrant la bande à la police avec trois morts à la clé ; et cet homme se trouve 'caché' parmi les passagers réfugiés au sein d'un relais de diligence qui servait autrefois de prison ; situation assez cocasse puisque le dirigeant du poste n'est autre que le dernier homme qui était prisonnier en ces lieux, autrement dit le personnage interprété par Arthur Hunnicutt, un homme pragmatique et surtout un lâche qui s'assume. Avant d'arriver en cet endroit confiné, se déroule une poursuite entre la diligence -dont le conducteur est rapidement tué- et la dizaine de bandits ; une scène bien rythmée mais un peu gâchée par de nombreux plans en studio et bien trop d'invraisemblances, les passagers tirant devant alors que les poursuivants se trouvent en arrière, la diligence rejoignant le relais cinq minutes avant l'arrivée des bandits alors que ceux-ci les talonnaient. Mais peu importe, le huis-clos peut alors débuter et l'épisode trouver tout son intérêt, sa richesse et son ampleur à travers la description de ce petit groupe et le dilemme moral qui se pose à lui, à savoir s'ils doivent livrer ou non aux malfrats l'homme que ces derniers souhaitent récupérer pour le tuer, s'ils ont le droit de l'envoyer à une mort certaine sans se poser de problèmes de conscience. Le premier mystère aura consisté à deviner qui du groupe de voyageurs était cet homme recherché, ce qui n'est pas forcément évident ; mais le dénouement de cet intrigant suspense aura lieu avant même la fin du premier tiers. La suite sera principalement basée sur le choix de ces deux alternatives, la moitié voulant sauver leur vie en se débarrassant de la brebis galeuse, les autres estimant que ce serait un meurtre ; et parmi ces derniers bien évidemment le juge Garth qui va essayer de convaincre les autres et notamment sa fille. Je ne vous dirais rien de ce qui sera finalement décidé et ce dont il s'ensuivra, mais les discussions et les questions morales qu'elles amènent se révèlent assez passionnantes, les idées progressistes finissant une fois encore par l'emporter.

Parmi les passagers, outre Garth et sa fille ainsi que le couple de vieux pionniers, un homme qui n'a plus que 6 mois à vivre (Richard Anderson, futur 'patron' de L'Homme qui valait trois milliards et de Super Jaimie), un vendeur ambulant de machines à coudre (Harry Morgan qui demeurera assez ambigu jusqu'au bout, entre noblesse d'âme et pervers débauché), et enfin le couple composé de la prostituée et du jeune homme interprété par l'un des plus grands de la série B westernienne, Skip Homeier. Mais celui qui marque le plus les esprits est très certainement Paul Richards dans le rôle du chef des bandits ; il fallait le faire pour savoir se rendre attachant alors même que son personnage est prêt à massacrer tout le monde pour en arriver à ses fins ; le comédien avait déjà été remarqué dans le genre dans La Furieuse chevauchée (Tall Man Riding) de Lesley Selander avec Randolph Scott où il incarnait un tueur à gage inquiétant et efféminé. D'excellents comédiens, un scénario fort bien écrit avec la mise en avant de thématiques comme le courage, la lâcheté, la loyauté, la justice, la rédemption... des cascadeurs chevronnés dans de bonnes scènes d'action -dont la longue fusillade finale-, une bonne utilisation des décors naturels dont ces concrétions rocheuses faisant face et surplombant le relais de diligence en pierre, quelques captivants dilemmes moraux chers aux auteurs David Friedkin et Morton S. Fine... Très plaisant à défaut de faire partie des meilleurs épisodes.


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Alexandre Angel
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Re: Le Virginien

Message par Alexandre Angel »

Jeremy Fox a écrit :et enfin le couple composé de la prostituée et du jeune homme interprété par l'un des plus grands de la série B westernienne, Skip Homeier
...qui vient de nous quitter.
Je me suis rendu compte, en ne cherchant que la semaine dernière le générique du Virginien sur YouTube, que ce générique m'était familier car la série était diffusée sporadiquement à Samedi est à vous.
J'ai vraiment le nez là-dedans en ce moment :mrgreen: .
Comme "le Temps de l'innonce" et "A tombeau ouvert", "Killers of the Flower Moon" , très identifiable martinien, est un film divisiblement indélébile et insoluble, une roulade avant au niveau du sol, une romance dramatique éternuante et hilarante.

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Jeremy Fox
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Re: Le Virginien

Message par Jeremy Fox »

Alexandre Angel a écrit :
Jeremy Fox a écrit :et enfin le couple composé de la prostituée et du jeune homme interprété par l'un des plus grands de la série B westernienne, Skip Homeier
...qui vient de nous quitter.

Ah oui tiens, j'avais oublié. Hommage involontaire donc.
A samedi est à vous Bonanza devait malheureusement souvent être préféré dans le choix western.
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Lockwood
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Re: Le Virginien

Message par Lockwood »

Alexandre Angel a écrit :
Jeremy Fox a écrit :et enfin le couple composé de la prostituée et du jeune homme interprété par l'un des plus grands de la série B westernienne, Skip Homeier
... que j'avais trouvé totalement transparent dans cet épisode.. L'acteur ré-apparaît à nouveau dans la saison 2 dans le rôle d'un flic dur et provocateur, il y est un peu plus convaincant.
Je te suis sur l’interprétation fataliste de Paul Richards, elle m'avait également marqué..

Les stocks-shots sont en effet peu discrets et je me souviens avoir un peu tiqué sur un montage pas toujours rigoureux dans la fusillade finale, mais rien de fondamentalement déplaisant au final.. on est sur un format serie tv, avec des moyens limités, donc inconsciemment, je dois avoir un œil plutôt conciliant sur les décors de studio et les environnements un peu chiches qui sont parfois retranscrits à l'écran (ce qui est aussi ton cas visiblement)

Tu arrives maintenant à " The Mountain of the sun", qui pour moi est un excellent cru de cette saison !
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