Un nuage entre les dents : le blu-ray propose un documentaire de 28 minutes où interviennent Pierre Richard, François Lartigue (assistant opérateur), et un jovial Marco Pico, ravis de partager leurs souvenirs sur un film absolument méconnu, et qui a été pour ma part une grande découverte. C'est réalisé par Jérémie Imbert, grand connaisseur du travail de l'acteur.
A cette époque, Pierre Richard et Philippe Noiret sortaient respectivement du
Grand blond avec une chaussure noire et de
Grande bouffe ; autant dire qu'on ne pouvait rien leur refuser. Ils jettent leur dévolu sur le scénario d'
Un nuage entre les dents, écrit par Marco Pico et Edgar de Bresson, et leur seule présence va suffire à faire le film, avec Pico à la réalisation, lui qui a été un assistant d'Yves Robert durant dix ans et qui a aussi aidé Pierre Richard sur ses premiers films en tant que réalisateur. D'ailleurs, Yves Robert est coproducteur, bien que ça ne lui plaise guère de voir son grand blond dans un contre-emploi total, mal rasé, ivre mort et bagarreur, au risque de briser son image de comique.
On voit d'ailleurs des extraits du scénario annoté par Marco Pico, et il en résulte un soin du détail, avec des dessins représentant le look dégueulasse des personnages, des photos, la volonté de tourner dans le Paris de la fin des Trente glorieuses où les anciens quartiers sont en cours de démolition pour créer de nouveaux bâtiments plus modernes. Et également un travail sur la photo pour les nombreuses scènes de nuit, faites à base de flashages, ce qui était inédit à l'époque, où les projecteurs étaient très puissants.
Les trois personnes parlent aussi du scénario avant-gardiste, qui reflète la course au buzz qui se fait aujourd'hui pour un oui ou un non, avec l'extraordinaire cynisme du rédacteur en chef joué par Claude Piéplu.
Mais cette vision de Philippe Noiret et, surtout, Pierre Richard, ne sera que peu vue à l'époque, car
Un nuage entre les dents a été un énorme bide à sa sortie, et enterrée très rapidement, jusqu'à sa diffusion dans les festivals. Ce qui enrage encore ce dernier, qu'il considère comme un de ses cinq films préférés, car si c'était un succès, il aurait sans doute bifurqué vers autre chose que ses comédies à succès.
Ça n'a beau faire
seulement que 28 minutes, tout est très bien dit sur le film, bien que du côté de Pierre Richard, il reste quelques regrets, dont une autre collaboration avec Noiret et Pico qui sera avortée.
Climax : c'est une des rares fois où les bonus sont plus intéressants que le film. Il y a d'une part une version alternative de la scène de danse vue de haut, puis un court-métrage de 2014 nommé
Shoot, où la caméra est placée au niveau d'un ballon qui est tapé par plusieurs personnes ; pour les personnes qui n'aiment pas les caméras qui tournent, c'est éviter
. Ensuite, les deux autres bonus, réalisés par Alexandre Poncet consistent en deux entretiens : l'un où le concepteur des génériques de Gaspar Noé, Tom Kan, est interviewé sur son travail, en particulier sur
Enter the void, très intéressant, mais difficile à parler du fait que c'est visuel.
Et le gros morceau est une discussion de 37 minutes entre Gaspar Noé et Jan Kounen passionnante, car ça ressemble en gros à ce qu'on fait sur le forum à savoir parler des films, de leurs transferts, du passage aux différents formats vidéo (ou Jan Kounen reste un nostalgique du Laserdisc), une discussion de café qui est un véritable plaisir à suivre. On note que si Jan Kounen est un grand bavard toujours souriant, Gaspar Noé semble tout le temps stressé ou sous pression, parlant très vite sous sa moustache.
Bizarrement,
Climax est peu évoqué, mais les deux parlent de leurs méthodes de tournage très différents (préparés pour Kounen et 15 jours de tournage pour Noé avec quelques pages de scénario), mais une volonté commune de faire un cinéma visuel.
A la fin, Gaspar Noé souhaite faire un documentaire, là aussi qui partirait dans tous les sens, et, Kounen, séduit par l'idée, lui lance un
au boulot !, et il y a cette dernière seconde géniale où on voit Gaspar Noé se décomposer après avoir parlé de ça
!
L'empereur de Paris : le blu-ray propose un documentaire de 40 minutes, pas vraiment sur le tournage, ni un making-of, mais sur ce qu'on appelle, sans connotation péjorative, les petites mains. C'est-à-dire la décoration, les costumes, les maquilleurs, les coiffeurs, et c'est agréable de découvrir les coulisses d'un si gros film par ce biais. On note tout d'abord une volonté presque politique d'avoir réalisé le film en France, à Brétigny-sur-Orge, où tout le décor a été entièrement construit. On voit vraiment comment tout a commencé, sur un gigantesque terrain de plus de 5000 m², qui a d'ailleurs été déminé, car il pouvait y avoir des vestiges de la guerre. Tout le travail des artisans est très bien montré, de la costumière qui ponce les habits pour leur donner un aspect vieilli, à la construction de charpentes là aussi avec quelques petits défauts visuels, à la mise en place de pavés d'époque... Sans oublier le travail de la figuration, avec un long aparté les concernant, et ceux déguisés en militaires qui doivent apprendre à manier les armes et à marher au pas. On sent la fierté de tout le monde de participer à quelque chose de 100¨% français, particulièrement le décorateur, et c'était avant tout la volonté de Jean-François Richet, le réalisateur.
L'édition Fnac propose en plus un bonus de 30 minutes, qui verse plus dans le promotionnel, avec les acteurs qui parlent de leurs personnages, et où j'ai appris que Fabrice Luchini n'a tourné que deux jours. Il y a quelques extraits du tournage, mais c'est moins intéressant que le premier documentaire.