Menu
Critique de film
Le film
Affiche du film

Les Noces vénitiennes

(La Prima notte)

L'histoire

Isabelle de Santos est invitée à Venise par un ami milliardaire. Elle promène avec elle une mallette contenant des diamants. Ces bijoux attirent l'attention d'une bande d'escrocs menée par un barman de grande classe. Celui-ci décide d'utiliser un jeune peintre en le faisant passer pour un prince oriental, afin de séduire Isabelle, l'épouser et ainsi entrer en possession des diamants.

Analyse et critique


Plutôt connu comme documentariste (ses travaux sur le Brésil), et assistant de Marcel L’Herbier, Alberto Cavalcanti n’a pas vraiment marqué l’époque. Tout juste pouvons-nous noter quelques perles comme Champagne Charlie (1944) ou Je suis un fugitif (1947). Et encore... C’est un de ses derniers films que la Gaumont réédite : Les Noces vénitiennes. Une comédie franco-italienne, adaptée d’un roman d’Abel Hermant, collaborateur notoire. Le générique du film, à l’image de la réalisation, est barbant : un feu de cheminée, sur fond d’orchestre tonitruant. Tout un programme. « - C’est vrai, tout ça ? Oui, tout est vrai. » D’emblée, la ficelle semble assez grosse : un cadre vénitien, plein de faux-semblants, et qui met en abîme la fausseté, les masques, les identités. De bons dialogues, des plans de carte postale... Seulement, l’introduction des enjeux est tellement poussive et superficielle, à l’image des accents italiens, qu’on entre difficilement dans l’histoire. Les transitions sont si expédiées qu’on peine à prendre les intrigues pour ce qu’elles sont : des prétextes. Prétextes à Venise, prétextes à la critique sociale... Bref : de la comédie à l’italienne. Toutes les saynètes tombent à l’eau : une grande bourgeoisie (culturelle) trop bavarde, du sentimentalisme surjoué, des Italiens voleurs et idiots. Claudia Cardinale, au milieu de tout ça, n’a pas l’once d’une pointe érotique à faire valoir. C’est une faire-valoir, justement, et nous demeurons frustrés devant tant de gâchis scénique.


Rajoutons à cela un Vittorio De Sica absolument terne, une Martine Carol terriblement terne et un Philippe Nicaud énervant : la hotte est pleine. L’argument principal, consistant à faire passer un faussaire pour un prince saoudien, qui aurait pu donner quelque chose d’intéressant, est mal écrit : le tour de passe-passe n’est pas dramatisé, les enjeux sont absents, les conséquences sont risibles. Le décorum permettant l’arnaque, lui-même, n’est absolument pas crédible, ce qui empêche finalement tout suspense (personne ne pourrait croire au décorum déployé pour impressionner la presse). On l’aura compris : tout cela n’est qu’un vague prétexte pour surfer sur la vague vénitienne, mettre en valeur les bâtiments, la ville et son cadre. Au juste, la scène de l’amphithéâtre apportera un minimum de composition et d’originalité, la réalisation se permettant une gamme de plans et de techniques étonnants.


Mais voilà : l’intégralité du plan monté la barman / mafieux est ridicule, ce qui annihile complètement le propos. Seule la bêtise de la bourgeoisie, extrêmement surfaite, et donc inconsistante, permet de faire croire un minimum à la possibilité d’un tel stratagème. Quelques subterfuges connexes tentent de faire monter la sauce, mais rien n’y fait : on s’ennuie, à défaut d’y croire un seul instant. Le mariage, avec tout ce que cela induit comme fausseté, devrait servir de climax, mais c’est une farce mal expédiée qui nous est infligée : une supercherie mal maîtrisée et nullement comique. La grande bourgeoisie tente de se rassurer, les scènes sont censées être mordantes, la fausseté des opinions « communes » entrant en collision avec la véracité des sentiments, mais rien n’y fait : on pique du nez.


Non, vraiment : Les Noces vénitiennes sont risibles, poussives, pénibles... De beaux décors naturels mais une direction d’acteurs mauvaise, une photographie convenue ainsi qu’un scénario pas assez mis en valeur font que le résultat est catastrophique. Ni Claudia Cardinale, ni Vittorio De Sica ne sauvent l’ensemble. Oublions ce film...

En savoir plus

La fiche IMDb du film

Par Florian Bezaud - le 21 mai 2019