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Critique de film
Le film

Les Indomptés

(Renegades)

L'histoire

Sam Martin (Willard Parker) est le médecin de la petite ville de Prairie Dog ; en raison de sa sagesse, de son caractère et de son aisance dans le maniement des armes, il est également souvent appelé à la rescousse pour gérer les conflits qui risquent de tourner au drame. Alors qu’il revient de Denver avec son futur beau-père - puisqu’il doit bientôt épouser la charmante Hannah (Evelyn Keyes) -, leur diligence est attaquée par la fameuse bande de Kirk Dembrow (Edgar Buchanan) et de ses fils. Un mystérieux cavalier (Larry Parks) vient à la rescousse des passagers. Lorsque le gang attaque la ville en représailles de ce loupé, on apprend la véritable identité du sauveteur qui n’est autre que Ben Dembrow, qui avait décidé de mener une vie honnête et quitté le domicile familial avec sa mère. Se trouvant sur les lieux, il est alors inculpé malgré le fait d’être totalement innocent. Alors qu’il passe en jugement, ses frères viennent le délivrer malgré lui. C’est le début d’une chasse à l’homme impitoyable d’autant que Hannah, tombée sous le charme de Ben, est partie avec les bandits...

Analyse et critique

Lorsque George Sherman réalise Renegades, le prolifique cinéaste a déjà une soixantaine de films à son actif, quasiment tous inconnus par les cinéphiles français ! Autant dire qu’il reste encore un bon terrain à défricher au sein de cette œuvre quantitativement conséquente, même s’il semblerait qu’une majorité de ses "premiers" films n’ait en fait guère trop d’intérêt. Car il ne faudrait surtout pas aller dans l’excès inverse, qui prendrait le contrepied de la médiocre réputation qu’avait Sherman dans notre pays voici seulement vingt ans en arrière en s’agenouillant désormais devant chacun de ses opus. En effet, au regard de ce que nous avons pu découvrir ces dernières années de sa filmographie, il s’avère que, malgré le fait de contenir quelques très belles pépites surtout entre 1948 et 1953, ce corpus demeure néanmoins sacrément inégal, notamment en qui concerne les westerns.


En cette année 1946, Les Indomptés précède la période qualitativement faste du cinéaste qui débutera deux ans plus tard lorsqu’il signera un contrat pour le studio Universal. En attendant cette suite de westerns ou de films d’aventures colorés pour la plupart hautement divertissants - voire plus concernant des petits bijoux comme Tomahawk -, le western Columbia qui nous concerne ici se révèle au contraire malheureusement très mauvais. C’est d’autant plus dommage que sur le papier l’intrigue laissait positivement augurer malgré la plupart de ses situations assez invraisemblables : un médecin doux et altruiste, également tireur d’élite, qui perd sa fiancée par le fait de porter plus d’attentions à ses malades qu’à leur projet de mariage ; cette même charmante rousse qui tombe dans les bras d’un jeune homme condamné par un jury de ses concitoyens alors qu’il est innocent, fuyant avec lui lorsqu’il n’a plus d’autre choix que de suivre un chemin tortueux pour sauver sa tête ; cet hors-la-loi par la force des choses qui n’est autre que le membre d’une famille de véritable outlaws qu’il a quittés avec sa mère pour mener une vie pauvre mais honnête ; cette gentille maman qui est tombée malade depuis qu’elle a pris la décision de se détacher de ses deux autres fils et de son époux dont elle refuse de valider les méfaits ; ce chef de bande qui avant chaque mauvais coup se réfère à la Bible pour se justifier et mettre au repos sa conscience...


Mais voilà, le scénario manque tellement d’aspérités - étonnant de lire ici et là plusieurs avis se réjouissant d’un "film adulte aux personnages fouillés annonçant les grands westerns des années 50"... sic ! -, la direction d’acteurs est tellement médiocre que la plupart des comédiens se révèlent soit fades (Willard Parker ou Evelyn Keyes, une actrice surtout connue pour avoir été successivement l’épouse de Charles Vidor et de John Huston) soit totalement amorphes (Larry Parks). Du coup, comment s’intéresser à leurs histoires, aussi dramatiques ou mélodramatiques soient-elles, alors qu’il est très difficile d'éprouver de l’empathie pour quelconque d’entre eux ? Pas plus pour l’angélique docteur "super-héros" aimé de tous que pour sa charmante fiancée qui le quittera le temps d’une fuite éperdue ; pas plus pour le chef de bande finalement pas très effrayant que pour son fils prodige tout mollasson. On s’agacera même du ton souvent larmoyant mis en avant par les auteurs - le personnage de la mère rendu malade suite à un traumatisme et sur les épaules duquel tous les malheurs du monde semblent être tombés - au sein d’un film pourtant plus gentillet et enfantin que réellement sombre. On regrettera cette direction d’acteurs dilettante car l’on sait à quel point Edgard Buchanan put souvent être convaincant, tout comme Willard Parker, habitué des rôles de shérif, qui le fût déjà dans Relentless (Du sang dans la Sierra) du même Sherman et surtout dans le western culte de Hugo Fregonese, Apache Drums (Quand les tambours s’arrêteront).


Pas d'indulgence à avoir à l’encontre de ce film même s'il est signé par un cinéaste qui nous aura certes ravis à de nombreuses reprises (Calamity Jane and Sam Bass, Black Bart, The Battle of Apache Pass, Tomahawk, Reprisal !, The Hard Man) mais qui ne peut quand même pas rivaliser sur la longueur avec les grands maîtres du genre. Le western qui nous concerne est non seulement difficilement crédible mais également guère captivant et au contraire sacrément ennuyeux, pas non plus aidé par un score absolument abominable du fécond Paul Sawtell. Reste un Technicolor réjouissant pour les yeux, des cascadeurs chevronnés, quelques efficaces séquences mouvementées - notamment la poursuite de la diligence par des dizaines de cavaliers - et enfin une courte scène d'obsèques plastiquement superbe qui nous fait regretter que le film n'ait pas été de ce niveau tout du long. Ceci étant dit, sachant que François Guérif a bien apprécié, il ne vous est pas non plus interdit de lui faire confiance !

En savoir plus

La fiche IMDb du film

Par Erick Maurel - le 22 juillet 2017