Menu
Critique de film
Le film

Les Couleurs du désert

(The Painted Desert)

L'histoire

Dans une région désertique de l’Arizona, deux amis, Cash Holbrook (William Farnum) et Jeff Cameron (J. Farrell MacDonald), découvrent un bébé dans une carriole abandonnée. Leur amitié est mise à rude épreuve lorsqu'il s'agit de choisir qui élèvera l'enfant qu’ils ont prénommé Bill. C'est finalement Cash qui l'emmène avec lui tandis que Jeff décide de rester sur place s'occuper de la ferme. Vingt ans plus tard, les deux partenaires ne se sont toujours pas réconciliés même si leurs terrains se jouxtent. L’enfant est devenu un beau jeune homme (William Boyd) et il a dans l’idée de mettre fin à ce conflit qui à son avis n’a pas lieu d’être ; il le souhaite d’autant plus que Jeff est père d’une charmante jeune fille (Helen Twelvetrees) de qui il tombe amoureux. Il espère réunifier les deux familles lorsqu’il découvre du tungstène sur les terres de Jeff, qui jusque-là est toujours resté pauvre...

Analyse et critique

Réalisateur d’une vingtaine de films durant les années 20 et 30, scénariste d’autant de titres à la même période, Howard Higgin est un nom qui semble rester inconnu de la très grande majorité des cinéphiles. Et pour cause, sa filmographie ne comporte strictement aucune œuvre passée à la postérité et son unique titre de gloire - qui n’est autre que ce The Painted Desert - est dû au simple fait qu’il s’agissait du premier rôle parlant de la future star numéro un de la Metro Goldwin Mayer, à savoir Clark Gable, ici encore sans sa célèbre moustache. Il interprète le bad guy de cette histoire mélodramatique de rivalités familiales ; son temps de présence est certes moins important que celui des trois acteurs principaux mais son rôle se révèle cependant loin d’être négligeable. Et c’est surtout de lui dont on se souviendra, Gable étant le seul des comédiens de ce casting pourtant assez prestigieux pour l’époque qui parvient à rendre charismatique son personnage assez renfrogné. Ses partenaires sont encore bien trop engoncés dans un jeu qui datait du muet et qui ne fonctionnait alors plus forcément bien, donnant cette désagréable impression que personne ne semble vraiment très concerné par ce qu’il joue.


Les séquences dialoguées s’avèrent d’ailleurs bien trop étirées en longueur sans que le réalisateur ne parvienne à les dynamiser ou à  les rendre intéressantes. Le film paraît ainsi aujourd’hui très vieillot, peu enthousiasmant faute avant tout à un scénario emphatique un peu simpliste et au traitement un peu trop caricatural, narrant les tentatives d’un fils adoptif pour essayer de réconcilier les deux hommes désormais âgés qui l'avaient trouvé abandonné dans un chariot alors qu’il était tout bébé... Et ce, malgré un soin certain apporté à la reconstitution (le décor du saloon et de la mine, entre autres) rendant l’ensemble assez réaliste, une importante figuration et surtout une superbe utilisation de magnifiques et grandioses paysages naturels de l’Arizona dont Monument Valley ainsi bien évidemment que, comme le titre du film l’indique, les rochers si particuliers du Parc National de Painted Desert. C’est grâce à ce tournage quasi-intégralement en extérieurs que ce western peut conserver un certain attrait de nos jours. En effet, le chef opérateur Edward Snyder semble s’être fait plaisir en nous proposant quelques plans d'ensemble assez mémorables.


Pour le reste, nous noterons que le garçon que les deux vieux ennemis jurés se disputent n’est autre que le futur Hopalong Cassidy qui chevauchera tout au long d’une bonne cinquantaine de films et tout autant d’épisodes de séries télés, grande vedette à venir de la petite lucarne dans les années 50, que William Farnum et surtout J. Farrell MacDonald sont deux habitués du genre - le second ayant beaucoup tourné avec John Ford au temps du muet - et que la jolie Helen Twelvetrees donne un peu de couleur à l’ensemble notamment au cours de la première partie où, vêtue à la garçonne, chemise échancrée, elle impose un beau tempérament accolé à un joli minois ; dommage qu’ensuite elle soit obligée de rentrer dans le rang et de s’affadir. Quant à Charles Sellon, il apporte une touche d’humour pas nécessairement fine mais pas déplaisante non plus. Signalons aussi l’absence presque totale d’une quelconque musique, ce qui n’est pas une mauvaise nouvelle au vu de celle à l’orchestration totalement vieillotte utilisée lors du générique de début.


Un western au budget a priori conséquent, soigné et superbement photographié et qui permet surtout aux admirateurs du grand Clark Gable de le découvrir dans son premier rôle d’importance au sein d’un film parlant ; il imposait dès lors une belle présence. "Une certaine efficacité dans la réalisation et une belle utilisation des paysages" : telle était la brève description de Patrick Brion dans son encyclopédie du western ; il n’y a peut-être pas à en dire grand-chose de plus ! Il s'agit donc d'une curiosité bien plus que d’une réussite ; nous remercions néanmoins l’éditeur Lobster de nous avoir enfin permis de pouvoir la visionner dans de bonnes conditions.

En savoir plus

La fiche IMDb du film

Par Erick Maurel - le 20 avril 2019