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Critique de film
Le film
Affiche du film

Le Rouleau compresseur et le violon

(Katok i skripka)

Analyse et critique

Film de fin d’études d'Andréi Tarkovski (avec pour la première fois Vadim Ioussov à la photographie), Le Rouleau compresseur et le violon s’adresse tout d’abord à des enfants. Un petit musicien, tête de turc des autres enfants de son âge, après une audition ratée durant laquelle il se fait de plus manger son quatre heures par une petite camarade, gagne le droit de monter sur le rouleau compresseur d’un ouvrier qui se prend d’amitié pour lui, devant d’autres gamins jaloux. Ils passent la journée ensemble, se promenant dans les rues, assistant à la démolition d’un quartier sous une pluie torrentielle. L’enfant ayant laissé son instrument sur la goudronneuse, les autres gosses s’en prennent à son étui. Mais l’ouvrier le répare à son atelier. Ils discutent, de la mauvaise manie de fumer du travailleur, du fait qu’il a été soldat quand il était à peine plus âgé que ce garçon (la nocivité du tabac et le scandale des enfants envoyés au combat étant un trait récurrent des conversations de l’œuvre à venir). L'homme et l'enfant se donnent rendez-vous pour un spectacle le soir, mais la mère, bien entendu, interdit à son fils de sortir. Il tente de transmettre ses excuses à l’ouvrier, qui ne les reçoit pas. Par chance celui-ci rencontre une jeune  femme prête à aller voir Tchapaïev au théâtre avec lui. L’enfant face à un miroir est ramené à sa propre solitude. Il s’enfuit de chez lui… pour partir au volant du rouleau compresseur.

Cette chronique a priori un peu vaine regorge de petits effets de style qui annoncent des traits de la mise en scène "tarkovskienne" : travellings ambitieux, plans de reflets (de l’eau ou de vitres permettant des jeux d’optique), une insistance sur le chignon d’une petite fille... Ces effets ne dépassent pas ici la joliesse, mais leur application est suffisamment sûre pour y sentir un vrai tempérament de mise en scène. Dans ses meilleurs moments, Le style du Rouleau compresseur et le violon évoque une rencontre entre Zazie dans le métro et Le Voleur de bicyclette. En tournant avec des enfants, Andréi Tarkovski se préparait peut-être à la direction d’acteurs de L’Enfance d’Ivan. La faiblesse de son jeune protagoniste le place en tout cas dans une longue lignée à venir. Nettement plus intéressant que ses précédents travaux, ce court métrage reste cependant très en deçà de ce à quoi aboutira Tarkovski dans son premier long métrage. Reste à se demander si la raison en est un système soviétique de production ne favorisant guère la prise de risques pour les novices ou un caractère d’auteur ne pouvant s’épanouir que dans un long format. Probablement un peu des deux…

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La fiche IMDb du film

Par Jean Gavril Sluka - le 17 avril 2012