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Critique de film
Le film
Affiche du film

Le Coup de l'escalier

(Odds Against Tomorrow)

L'histoire

Dave Burke, ancien policier révoqué pour corruption, prépare le hold-up d'une banque dont le plan semble facilement réalisable. En quête de complices, il convainc deux hommes qui se trouvent dans une impasse financière de participer au casse de la banque de Melton, une petite localité de l'Etat de New York : Earl Slater, un vétéran de la Seconde Guerre mondiale récemment sorti de prison, et Johnny Ingram, un chanteur criblé de dettes. Tout semble marcher comme sur des roulettes, mis à part un détail : Earl Slater est raciste et Johnny Ingram est noir...

Analyse et critique

Au sein de la filmographie pléthorique de Robert Wise, qui aura abordé tous les genres et rencontré presque tous les degrés de réussite, il est une place particulière pour le "film noir", genre qu’il aura accompagné quasiment de son aube (Né pour tuer date de 1946) à son crépuscule : daté de 1959, Le Coup de l’escalier est en effet parfois envisagé comme le terminus du registre. Le prétexte de l’intrigue est un braquage, mais comme souvent, celui-ci est réduit à la portion congrue des derniers instants du film ; l’essentiel se trouve bien dans la caractérisation des protagonistes et dans l’exploration des tréfonds de leur tourments. Ils sont donc trois, que tout ou presque sépare : au centre, Dave Burke, ex-policier déchu, qui convainc Johnny Ingram et Earl Slater de devenir ses complices. Le premier, beau chanteur noir, endetté jusqu’au cou à cause de son addiction au jeu, qui voudrait reconquérir sa femme et sa fillette. Le second, vétéran de la Seconde Guerre mondiale, dévoré par l’aigreur et l’amertume.

Dès l’habile ouverture du film, qui voit Slater et Ingram se succéder dans l’appartement miteux de Burke, la mise en scène suggère l’antagonisme profond des deux personnages : alors que l’un, souriant et aimable, rigole avec le garçon d’ascenseur, l’autre maugrée et déverse sa morgue raciste. Les historiens du cinéma ont parfois voulu amplifier la dimension de plaidoyer anti-raciste du Coup de l’escalier, en en faisant le cœur du film ; s’il est probable qu’il s’agissait alors d’une préoccupation de Robert Wise (Le Coup de l’escalier ne précède-t-il pas West Side Story ?) et si la fin, particulièrement sombre, est empreinte d’un symbolisme assez didactique (dans la mort, il n’y a plus de différences), on peut également envisager cet antagonisme comme un facteur aggravant supplémentaire de l’espèce de "course à l’échec" globale dans laquelle sont lancés ces trois protagonistes. Il pèse en effet durant tout le film comme un parfum de fatalité, un sentiment d’inéluctabilité, et cela dès l’atmosphère tumultueuse des premiers instants new-yorkais du film : le vent souffle en tempête, et les immeubles à l’horizon de Central Park ont quelque chose d’inquiétant, comme les flammes du brasier dans lequel se consume le trio.

Dans les extérieurs de la seconde partie du film, à Hudson, le réalisme global de la mise en scène se fait plus expressif, amplifiant les contours géométriques et les contrastes violents entre la lumière et cette obscurité qui finira par tous les avaler. Même si une fin plus positive avait un temps été envisagée (finalement abandonnée à cause de la proximité de la sortie de La Chaîne de Stanley Kramer), on reconnaît bien dans Le Coup de l’escalier la patte désabusée d’Abraham Polonsky, auteur du scénario bien que non crédité au générique à cause de sa mise au ban par le Comité des Activités Anti-américaines au début des années 50 : le titre original (Odds Against Tomorrow) traduit d’ailleurs bien mieux l’absence de perspective offerte aux personnages que ce titre français assez incongru...

En savoir plus

La fiche IMDb du film

Film réédité en salle par Swashbuckler Films

Date de sortie : 25 janvier 2012

La Page du distributeur

Par Antoine Royer - le 4 janvier 2012