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Critique de film
Le film

La Loi du colt

(Al Jennings of Oklahoma)

L'histoire

1863 dans le Tennessee, la naissance en plein milieu du violent conflit qui oppose Unionistes et Confédérés d'Al Jennings (Dan Duryea), fils d’un officier sudiste. Vingt ans plus tard, il est devenu avocat à l’instar de son père et de ses frères puis s’est exilé en Oklahoma pour exercer à leurs côtés. Seulement, fort de tempérament, il lui arrive de provoquer en plein tribunal une bagarre générale. Ce qui n’est pas du goût de ses adversaires, notamment Tom Mardsen (John Dehner), un avocat de la partie adverse qui se venge de cet affront en tuant l'un des frères d'Al à bout portant. Mardsen étant acquitté de ce meurtre, Al se charge de faire sa propre justice, assassine ce dernier et fuit ensuite pour se cacher au sein d’un ranch qui est en fait une couverture pour une bande de hors-la-loi. Par son caractère et sa vivacité d’action, il va vite devenir le chef de ce gang de pilleurs de train...

Analyse et critique

Au "bestiaire" des grands hors-la-loi du Far West, après Jesse James, Billy le Kid, les frères Dalton, les frères Younger ou encore John Wesley Hardin - personnifié par Rock Hudson dans le magnifique The Lawless Breed (Victime du destin) de Raoul Walsh -, manquait encore celui dont on avait l’habitude de dire qu’il avait été le plus maladroit des pilleurs de train, soit Al Jennings. Homme de loi à l’origine, il s'est transformé en chef de gang en raison d'un tempérament un peu trop impulsif qui le faisait se battre en plein tribunal et qui le poussa une fois à aller un peu trop loin. Après des années de rapines qui le conduisirent à cinq ans d'emprisonnement, il vivra encore une soixantaine d’années jusqu’en 1961 ; il travaillera d'abord à nouveau en tant que juriste avant de faire du cinéma, adaptant même à deux reprises sa propre histoire à l’époque du muet. Le scénario du film de Ray Nazarro est également basé sur sa propre autobiographie, mais Jennings n’appréciera pas vraiment le résultat ni l'interprétation que fit de lui Dan Duryea ; il faut dire que sa vie aura surement été plus captivante que ce mollasson western de série C qu’elle a inspiré.

On a déjà put s'en rendre compte : avec Ray Nazarro, c’est du quitte ou double et a priori, d’après tout ce que j’ai pu voir, tout dépend principalement des scénaristes. Dans le western, ce fut l’un des cinéastes les plus prolifiques durant les années 40 et 50, capable de réaliser jusqu’à treize films dans la même année ! Il débuta sa carrière au cinéma à l’époque du muet et à partir de 1945, il travailla exclusivement pour la Columbia à qui il fournit de la matière pour ses premières parties de séance, presque exclusivement des westerns de séries B ou Z tournés principalement - mais pas nécessairement - vers l’action non-stop, comme c’est effectivement le cas ici. Il lui arrivera de réaliser d’excellents westerns tels Top Gun avec Sterling Hayden, l’un de ses derniers films daté de 1955, de plaisants divertissements comme La Folie de l’or (Cripple Creek) mais aussi beaucoup d’autres assez médiocres - même si pas forcément déshonorants - comme par exemple Les Derniers jours de la nation Apache (Indian Uprising). La Loi du colt se révèle encore inférieur, tout aussi inintéressant que laborieux et ennuyeux.

Excepté le charme incontestable du Technicolor de l’époque, des paysages californiens ainsi que de quelques images assez belles comme celle de la maison fleurie de John Dehner, il n'y a pas grand-chose à sauver de ce western qui semble avoir été tourné à toute vitesse et écrit par-dessus la jambe. C’est bien simple, en visionnant ce film et malgré le parcours rocambolesque de son protagoniste principal, on ne s’intéresse à rien, pas plus à l’intrigue qu’aux séquences d’action, pas plus aux retournements de situations qu’aux personnages, tous dépeints par le médiocre George Bricker sans aucune nuances, sans aucune richesse, sans rien qui nous les fasse trouver un minimum captivants ou attachants. Concernant la direction d’acteurs, c’est le calme plat ; à tel point que Dan Duryea - un comédien souvent inoubliable de charisme et de présence notamment lorsqu’il interprète les bad guys - nous semble ici totalement fadasse. Dommage car avec un personnage aussi impulsif et haut en couleurs, il ne semblait pas difficile de nous y intéresser et d’en faire un protagoniste bigger than life. C’était sans "compter" sur le manque total d’implication de toute l’équipe technique et artistique. A partir de là, il est aisé de comprendre que tout ce qui va lui arriver ou se passer durant ces pourtant toutes petites 79 minutes nous feront grandement bailler. Il en va de même concernant tous les autres personnages, même si au sein du casting la présence des habituellement très bons John Dehner ou James Millican nous faisait saliver. Quant à Gale Storm, elle confirme avoir vraiment été une très mauvaise actrice.

Pas besoin de s’appesantir plus longtemps sur ce film réalisé pour être projeté en première partie de double programme avec une bande musicale entièrement reprise d’autres westerns du studio. Son manque d’enthousiasme et de dynamisme, sa solennité plombante, sa réalisation peu inspirée, ses personnages sans relief et son manque total de fantaisie ne mettent pas longtemps à nous alourdir les paupières. Sauf pour un "complétiste" en matière de western ou de filmographie "Dan Duryeenne, j'éviterais de conseiller ce western routinier et débordant de clichés. Il va s'en dire, bien évidemment que certains autres pourront au contraire grandement l'apprécier !

En savoir plus

La fiche IMDb du film

Par Erick Maurel - le 10 juin 2017