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Critique de film
Le film

L'Étalon sauvage

(Thunderhoof)

L'histoire

Dans le désert mexicain, Scotty (Preston Foster) est à la recherche d’un étalon sauvage nommé Thunderhoof qu’il rêve d’attraper et d’en faire le premier cheval de son futur cheptel. Il est accompagné de sa jeune épouse Margarita (Mary Stuart) ainsi que de The Kid (William Bishop), son homme de main à qui il autrefois sauvé la vie et qui est entre-temps tombé amoureux de Margarita. The Kid ne voulant pas continuer la poursuite du cheval, Scotty veut l’empêcher de s’en aller et ils finissent à se battent à poings nus en haut d’une falaise. Au moment où la bagarre devient dangereuse, ils aperçoivent l’étalon tant recherché. Ils parviennent à le capturer non sans dégâts puisque Scotty se casse la jambe. Il faut néanmoins qu’ils retournent au Texas ; ce qui ne se fera pas facilement d’autant que les tensions entre les trois personnages vont en grandissant et que des tempêtes de sable et la fièvre typhoïde se profilent...

Analyse et critique

Si Phil Karlson fut surtout associé au film noir, genre au sein duquel il œuvra majoritairement et qui le fit aduler des amateurs de séries B, il réalisa également cinq ou six westerns dès 1947, quasiment tous inconnus au bataillon - y compris Thunderhoof qui passait même un moment pour invisible, perdu et donc inaccessible -, avant Le Salaire de la violence (Gunman’s Walk) qui sortit à la sauvette en France, fut accueilli très tièdement par la critique et resta aux abonnés absents de quasiment toutes les bonnes anthologies du genre. C’est assez récemment que sa cote de popularité commença à remonter, et ce regain d’intérêt n’était qu’amplement mérité au vu des très grandes qualités que cette œuvre recélait à quelque niveau que ce soit. Quasiment dix ans après avoir donc signé l’un des plus beaux westerns psychologiques des années 50, Phil Karlson réalisait cette fois l’un des plus mauvais westerns de la décennie suivante avec La Poursuite des Tuniques Bleues (A Time for Killing), entérinant sa réputation de cinéaste très inégal.

Comme précédemment avec par exemple les superbes Quand les tambours s’arrêteront (Apache Drums) ou Joe Dakota, les westerners les plus chevronnés ont probablement eu la salive aux lèvres en apprenant la sortie prochaine sur galette numérique d’un autre western devenu culte pour à la fois sa rareté et réputation prestigieuse, le Thunderhoof qui nous concerne ici, rebaptisé - inutilement - L’Étalon sauvage par Sidonis pour sa sortie DVD. Pourtant quelle tristesse lorsque le temps est enfin venu de sa découverte d’avoir l’impression de ne pas avoir vu le même film que celui tari d'éloges ici et là ! Pensant être passé côté de ce Thunderhoof et avoir été déçu par le fait d’en avoir peut-être trop attendu, motivé par la présentation dithyrambique de Bertrand Tavernier en bonus du DVD, le deuxième visionnage consécutif allait-il me remettre sur les bons rails ? Peine perdue, au deuxième essai ce western de Phil Karlson m’a tout aussi peu captivé et tout autant ennuyé ; j’ai eu beau lire et relire ensuite tous les textes superlatifs à son propos, je ne suis absolument pas arrivé à me retrouver dans les descriptions et les analyses qui y étaient faites. De là à dire que je détiens la vérité, il y a un gouffre que je ne franchirai pas. Certains ont comparé ce film, pour son ton et son minimalisme à The Ride Back (La Chevauchée du retour) d’Allen H. Miner et aux films de Budd Boetticher avec Randolph Scott ; il pourrait y avoir un peu de cela sauf que ces derniers m’ont à la fois grandement passionné et touché... le premier pas du tout.

Pour ne pas peiner les nombreux admirateurs, et parce que je n'ai pas grand-chose à en dire, je ne vais donc pas m’appesantir longuement sur un film que j’ai trouvé non seulement ennuyeux et peu captivant mais également sans grand intérêt ni tension. Je n'ai pas plus été convaincu par une mise en scène, certes honorable mais sans grandes fulgurances, que par un scénario finalement plus original par son minimalisme (trois personnages et deux chevaux) que pour son intrigue qui aurait peut-être pu donner lieu à un grand film si l’écriture avait été moins répétitive et avait donné plus de relief à des personnages pour lesquels j’ai eu du mal à éprouver la moindre empathie. Faute aussi à une direction d’acteurs pas totalement aboutie : les trois comédiens ne sont pas spécialement mauvais mais ils ne parviennent néanmoins pas à relever l’ensemble, pas plus l’excellent Preston Foster - ici parfois assez pénible avec son sempiternel "rire de chacal" - que les intéressants William Bishop et la charmante Mary Stuart, dont on soupçonne les talents mais qui ne m’ont guère non plus séduit plus que cela. Si l’on ajoute une musique assourdissante lors des séquences mouvementées et qui gâche en partie ces dernières, comme le pourtant teigneux fist fight en haut de la falaise, la déception est presque totale, la torpeur qui m’a pris ne m’ayant pourtant pas empêché d’apprécier le superbe travail de Henry Freulich à la photo et quelques superbes plans en extérieurs, notamment ceux en plongée sur les chevaux.

Mais ne me faites surtout pas confiance - d’autant que les films noirs de Karlson ne m'ont jamais franchement convaincu non plus - et faites-vous plutôt votre propre avis en vous souvenant que la grande majorité des amateurs de westerns ne tarissent pas d’éloges à l'égard de Thunderhoof, s’extasiant sur son histoire allégorique aux forts enjeux et aux différents niveaux de lecture, son ton âpre et tendu, son "intensité oppressante, l’ambiguïté des personnages et de leurs relations, son climat unique qui en fait une sorte de "fable existentielle claustrophobe", sa "force minérale", son "lyrisme dépouillé" ou encore sur son inventivité et sa puissance. Avec tous ces exemples d'apologie, j’imagine que les aficionados voudront juger sur pièces sans tenir compte de ce qui a été écrit dans les trois paragraphes précédents. Et si jamais l’un d’entre eux reste sur le bord de la route sans montrer beaucoup d'enthousiasme, il se sentira moins seul.

En savoir plus

La fiche IMDb du film

Par Erick Maurel - le 30 septembre 2017